Aide-opératoire clinique - salarié non

Cour de cassation

chambre sociale

Audience publique du 31 mars 2016

N° de pourvoi : 14-20774

ECLI:FR:CCASS:2016:SO00672

Non publié au bulletin

Rejet

M. Ludet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président), président

SCP Boullez, SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 15 mai 2014), que Mme X... a saisi la juridiction prud’homale pour faire juger qu’elle avait été, de juillet 2005 au 19 juin 2008, employée en qualité d’aide opératoire au sein de la société Institut de chirurgie ostéo-articulaire (ICOA) dirigée par M. Y..., alors son époux ;
Attendu que Mme X... fait grief à l’arrêt de la débouter de sa demande, alors, selon le moyen :
1°/ que l’existence d’un contrat de travail dépend des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité du travailleur, peu important que ce dernier n’ait pas la qualification requise ; qu’en excluant l’existence de tout contrat de travail entre l’ICOA et Mme X... au motif que celle-ci n’était pas qualifiée pour occuper ce poste et n’était pas assurée en responsabilité professionnelle, la cour d’appel a statué par un motif inopérant et a violé les articles L. 1211-1 et L. 1221-1 du code du travail ;
2°/ que l’existence d’un lien de subordination n’est pas une condition nécessaire à la reconnaissance d’un contrat de travail au bénéfice d’une épouse qui a travaillé de manière constante au service de son conjoint, gérant et associé de l’entreprise ; qu’ayant constaté que Mme X... avait travaillé en qualité d’instrumentaliste, aide opératoire aux côtés de M. Y..., son mari entre novembre 2004 et juillet 2007, la cour ne pouvait, sans contredire ses propres constatations, écarter l’existence d’un contrat de travail entre Mme X... et l’ICOA géré par son époux au motif inopérant qu’elle ne rapportait pas la preuve d’un lien de subordination du fait de son comportement, que la cour a violé les articles L. 1211-1 et L. 1221-1 du code du travail ;
3°/ que l’existence d’un contrat de travail n’est pas incompatible avec un mandat social dans une entreprise différente ; qu’en excluant l’existence d’un contrat de travail entre Mme X... et l’ICOA dirigé par son mari, au motif que Mme X... était par ailleurs gérante d’une société civile immobilière Bocage-Antoine depuis le 4 février 2005 pour en déduire qu’elle ne se tenait pas à la disposition de l’ICOA pour l’exercice d’une activité professionnelle sans constater qu’elle dédiait entièrement son activité à cette SCI, la cour d’appel a violé les articles L. 1211-1 et L. 1221-1 du code du travail ;
Mais attendu qu’ayant relevé que Mme X... fournissait une aide bénévole et qu’elle ne se considérait pas dans une relation salariée impliquant des contraintes professionnelles auxquelles elle devait se soumettre indépendamment de son lien matrimonial, de sorte qu’elle ne se tenait pas à la disposition de la société ICOA, la cour d’appel a, par ces seuls motifs, justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un mars deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour Mme X...
Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR débouté Mme X... de ses demandes aux fins de faire reconnaître sa qualité de salariée de la société Institut de Chirurgie Ostéo-Articulaire pour la période de juillet 2005 au 19 juin 2008 et obtenir la condamnation de celle-ci à lui verser des sommes à titre de rappels de salaires, de congés payés afférents, d’indemnité pour travail dissimulé, d’indemnité de préavis et de dommages et intérêts pour licenciement abusif ;
AUX MOTIFS QU’il appartient à Mme Laurence X... d’établir la relation de travail ; qu’à défaut de contrat de travail et de salaires versés, la relation contractuelle de travail résulte d’un faisceau d’indices établissant une activité professionnelle et un lien de subordination ; que Mme Laurence X... revendique une activité salariée en qualité d’aide opératoire sans justifier des qualifications requises pour l’exercice de ce métier relevant du statut d’infirmier bloc opératoire ; que l’indication dans un CV produit par l’appelante qu’elle passait un diplôme d’état validant ses compétences d’aide opératoire en chirurgie orthopédique en 2005 n’est pas corroboré par la production aux débats dudit diplôme ; que le défaut de production des fiches opératoires n’est pas imputable à société ICOA dans la mesure où d’une part il n’est pas établi qu’elle les détient et où d’autre part le conseil de l’ordre a interdit à la clinique où avaient lieu les interventions de produire ces documents couverts par le secret professionnel ; que les attestations établies par les membres de la famille, le personnel de maison ou un commerçant ne font pas état de faits personnellement constatés puisque ces derniers ne se trouvaient pas sur le lieu des interventions de M. Jacques-Stéphane Y... ; que Mme Elise Z... évoque des faits de 2000 soit pour une période différente de celle visée au présent litige, que le docteur A... et Mme Sandra B... ne font également que rapporter les propos de Mme Laurence X... ; que le fait que celle-ci ait accompagné à la clinique la fille de Mme B... qui effectuait un stage en décembre 2007 ne signifie pas que sa mère a constaté une activité salariée de l’appelante ; que par ailleurs, le 16 juillet 2007, M. Paul X..., père de Mme Laurence X... subissant une intervention chirurgicale relate la présence de sa fille (tenue de circonstance et assistance de l’acte) sans toutefois décrire une action d’aide opératoire ; que dans son attestation en date du 23 mai 2008, Mme Laurence X... décrit sa seule activité en tant que secrétaire médicale en 2000 ; qu’en revanche, Mme Antoinette C..., panseuse-vacataire, a pu constater entre novembre 2004 et juillet 2007 à la clinique de la Défense, la présence de Mme Laurence X... en qualité d’instrumentaliste, aide opératoire, aux côtés de M. Jacques-Stéphane Y... ; que tant le directeur général de la clinique de la Défense (M. D...) que celui de Chatou (M. E...), dans des courriers respectifs des 26 juin 2008 et 30 juin 2008, constatent les perturbations résultant du conflit matrimonial avec son épouse qui est également son aide opératoire ; mais que le docteur Jean-Michel F...confirme par attestation qu’un chirurgien réalise ses interventions majeures et/ ou techniques avec le concours d’un ou d’une aide opératoire dûment qualifiée et assurée en responsabilité professionnelle, ce dont ne justifie pas Mme Laurence X... ; qu’il en résulte pour la cour la certitude que Mme Laurence X... n’a pu assister son mari au cours de ses interventions chirurgicales ; que d’ailleurs elle précise qu’elle fournissait une aide bénévole et qu’aucun document produit ne permet de vérifier la réalité du lien de subordination ; qu’en effet il résulte expressément des courriers des directeurs de clinique que Mme Laurence X... perturbait fortement le bon déroulement des interventions, certaines ayant dû être annulées ou reportées, et qu’elle était sujette à des absences répétées ; que Mme Myriam G..., chirurgien à la clinique de la Défense atteste de l’absence impromptue de Mme Laurence X..., de sorte qu’il est certain que celle-ci ne se considérait pas dans une relation salariée impliquant des contraintes professionnelles auxquelles elle devait se soumettre indépendamment de son lien matrimonial ; qu’à cet égard, Mme Emmanuelle H... I..., amie de l’appelante, explique que Mme Laurence X... a arrêté d’exercer son métier de responsable commerciale dans lequel elle était brillante, pour se consacrer entièrement à l’aide de son mari ; qu’il est constant que Mme Laurence X... occupait des fonctions salariées d’assistante jusqu’en 2002 ; que par ailleurs celle-ci était gérante de la société civile immobilière Bocage-Antoine depuis le 4 février 2005, de sorte qu’elle ne se tenait pas à la disposition de société ICOA pour l’exercice d’une activité professionnelle ;
Et aux motifs éventuellement adoptés des premiers juges que :

1- Laurence X... épouse Y... qui ne dispose d’aucun contrat de travail a la charge de la preuve de la relation salariée entre 2005 et juin 2008 ;

2- la demanderesse ne dispose d’aucun élément de preuve, tels qu’agendas personnels, plannings d’occupation de salles d’opération, attestations d’amis de parents ou de malades établissant qu’en effet elle servait d’aide opératoire à son époux à titre professionnel et habituel ;

3- il est en outre constant que Laurence X... épouse Y... était associée de la Selarl ICOA en compagnie de son époux lequel est le gérant de la Selarl ;

4- l’absence de production par la Selarl défenderesse des fiches opératoires même anonymisées et qui feraient preuve de ce que Laurence X... épouse Y... a effectivement travaillé dans sa propre société à titre professionnel et habituel, n’est pas de nature à permettre au Conseil de considérer qu’il faut en déduire que la relation salariée existait ; qu’en effet, il doit être relevé que rien au dossier ne vient contredire le fait que les fiches opératoires réclamées ne sont pas en possession de la Selarl ICOA ; que le directeur de la clinique de la Défense refuse à la défenderesse par le truchement de son gérant le Docteur Y..., sommée par le Conseil de les produire, de lui remettre ces documents couverts par le secret médical ; qu’il s’en déduit que les archives ne sont plus détenues par la société défenderesse et le Conseil ne peut imputer à faute à ICOA le refus d’un tiers ; qu’en tout état de cause, il est constant que ces documents sont effectivement, même partiellement anonymisés, couverts par le secret médical ;

5- l’injonction de production de pièces délivrée à nouveau à l’ICOA voire à un tiers dans les conditions des articles 138 et suivants du code de procédure civile n’est pas davantage de nature à permettre à la demanderesse de disposer de la preuve qu’elle recherche, dès lors que d’une part la demanderesse n’établit pas comme indiqué plus haut que l’ICOA dispose toujours de ces documents et d’autre part que le refus opposé par la clinique qui est tiers au litige repose sur un motif légitime tenant au respect du secret médical ;
1°- ALORS QUE l’existence d’un contrat de travail dépend des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité du travailleur, peu important que ce dernier n’ait pas la qualification requise ; qu’en excluant l’existence de tout contrat de travail entre l’ICOA et Mme X... au motif que celle-ci n’était pas qualifiée pour occuper ce poste et n’était pas assurée en responsabilité professionnelle, la cour d’appel a statué par un motif inopérant et a violé les articles L. 1211-1 et L. 1221-1 du code du travail ;
2°- ALORS QUE l’existence d’un lien de subordination n’est pas une condition nécessaire à la reconnaissance d’un contrat de travail au bénéfice d’une épouse qui a travaillé de manière constante au service de son conjoint, gérant et associé de l’entreprise ; qu’ayant constaté que Mme X... avait travaillé en qualité d’instrumentaliste, aide opératoire aux côtés de M. Y..., son mari entre novembre 2004 et juillet 2007, la cour ne pouvait sans contredire ses propres constatations, écarter l’existence d’un contrat de travail entre Mme X... et l’ICOA géré par son époux au motif inopérant qu’elle ne rapportait pas la preuve d’un lien de subordination du fait de son comportement, que la cour a violé les articles L. 1211-1 et L. 1221-1 du code du travail ;
3°- ALORS QUE l’existence d’un contrat de travail n’est pas incompatible avec un mandat social dans une entreprise différente ; qu’en excluant l’existence d’un contrat de travail entre Mme X... et l’ICOA dirigé par son mari, au motif que Mme X... était par ailleurs gérante d’une société civile immobilière Bocage-Antoine depuis le 4 février 2005 pour en déduire qu’elle ne se tenait pas à la disposition de l’ICOA pour l’exercice d’une activité professionnelle sans constater qu’elle dédiait entièrement son activité à cette SCI, la cour d’appel a violé les articles L. 1211-1 et L. 1221-1 du code du travail.

Décision attaquée : Cour d’appel de Versailles , du 15 mai 2014