Bulletin de paie incomplet oui

Cour de cassation

chambre sociale

Audience publique du 2 avril 2014

N° de pourvoi : 10-23744

ECLI:FR:CCASS:2014:SO00701

Non publié au bulletin

Rejet

Mme Goasguen (conseiller le plus ancien faisant fonction de président), président

SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 29 juin 2010), que M. X... a été engagé à compter du 1er septembre 2003 en qualité d’agent de surveillance par la société Action coordination sécurité privée sur la base d’une rémunération mensuelle brute de 1 192,63 euros portée à 3 015, 25 euros entre juillet et novembre 2004, puis successivement ramenée à 2 925,35 euros en décembre 2004, et à 1 839,39 euros à compter de janvier 2005 ; que se plaignant de la baisse unilatérale de son salaire et de temps de travail non rémunérés, l’ intéressé a saisi courant octobre 2007 la juridiction prud’homale de diverses demandes aux fins de résiliation judiciaire et de paiement de diverses sommes ; qu’il a été licencié le 17 janvier 2008 pour absences injustifiées ;

Attendu que l’employeur fait grief à l’arrêt de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail à ses torts et de le condamner au paiement de rappels de salaire et diverses indemnités, alors, selon le moyen :

1°/ que la novation ne se présume pas et la volonté de l’opérer doit résulter clairement de l’acte si bien qu’en énonçant qu’il résultait de ce que l’employeur a procédé à une augmentation de salaire au mois de juillet 2004, qu’il a délivré des bulletins de salaire conformes et qu’il a décaissé les sommes correspondantes, dûment acceptées par le salarié, une intention de nover de la part des deux parties sur la valeur du salaire rémunérant le travail de M. X..., sans pour autant caractériser une telle volonté, la cour d’appel a violé l’article 1273 du code civil ;

2°/ que la novation ne se présume pas mais doit résulter de la commune intention des parties si bien qu’en se fondant uniquement sur le comportement de l’employeur, sans caractériser la volonté claire et non équivoque du salarié, la cour d’appel a encore violé l’article 1273 du code civil ensemble l’article 1134 du même code ;

3°/ qu’en retenant que l’employeur avait commis de graves manquements en ne payant pas les heures supplémentaires qu’aurait effectuées le salarié et en allouant à ce dernier certaines sommes de ce chef, sans répondre aux conclusions de l’employeur qui faisait valoir que le salarié produisait des mains courantes d’une société Goron qui n’était pas client de la société ACSP, mais aussi que les feuilles versées aux débats par le salarié étaient des originaux dont l’employeur n’avait pu avoir connaissance pour vérifier la véracité des heures effectuées et les régler, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;

4°/ qu’en se déterminant, pour allouer au salarié une indemnité forfaitaire sur le fondement de l’article 8223-1 du code du travail, par l’affirmation selon laquelle la société ACSP a intentionnellement mentionné sur les bulletins de salaire de M. X... un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli au titre de la majoration des heures de travail le dimanche, fait avéré qu’elle ne pouvait ignorer et qu’elle a dès lors commis sciemment, sans s’expliquer plus avant sur le caractère volontaire de cette omission, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu, d’abord, que la cour d’appel, qui a constaté que l’augmentation de salaire à laquelle avait procédé l’ employeur avait été acceptée par le salarié, a caractérisé la novation ;

Attendu, ensuite, que la cour d’appel, qui a apprécié souverainement la valeur probante des éléments qui lui étaient produits sur les heures supplémentaires par l’une et l’autre des parties, a répondu aux conclusions prétendument délaissées ;

Attendu, enfin, qu’ayant relevé que l’employeur ne pouvait ignorer avoir mentionné sur les bulletins de paye un nombre d’heures supplémentaires inférieur à celui réellement accompli et que ce fait avait été commis sciemment, la cour d’appel a caractérisé l’élément intentionnel du travail dissimulé ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société ACSP aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du deux avril deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour la société Action coordination sécurité privée.

Le moyen reproche à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de la société ACSP à la date du 17 janvier 2008 et en conséquence condamné cette dernière à payer à son ancien salarié diverses sommes à titre de rappel de salaires, d’heures supplémentaires, d’indemnité compensatrice de repos compensateur obligatoire, d’heures travaillées de nuit, d’heures travaillées le dimanche, d’indemnité compensatrice de préavis, de congés payés afférents à ces sommes, d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et d’indemnité forfaitaire fondée sur les dispositions de l’article L 8223-1 du Code du travail,

AUX MOTIFS QUE

”Sur la résiliation judiciaire du contrat de travail

lorsqu’un salarié demande la résiliation de son contrat de travail en raison de faits qu’il reproche à son employeur, tout en continuant à travailler à son service, et que ce dernier le licencie postérieurement pour des faits survenus au cours de la poursuite du contrat, le juge doit rechercher si la demande de résiliation du contrat était justifiée et que c’est seulement dans le cas contraire qu’il doit se prononcer sur le licenciement prononcé par l’employeur ; lorsque la résiliation judiciaire du contrat de travail est prononcée à l’initiative du salarié et aux torts de l’employeur, elle produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

en l’espèce, le conseil de prud’hommes de Montmorency était saisi dès le 31 octobre 2007 d’une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, sur laquelle la juridiction a omis de statuer, alors que le licenciement pour absences injustifiées a été notifié par l’employeur le 17 janvier 2008, pour faire suite à un avertissement pour absence injustifiée du 5 décembre 2007 ; dans ces conditions, il y aura lieu d’examiner en premier lieu la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail sollicitée par M. X... ;

A. Sur la diminution de salaire de décembre 2004 au 30 novembre 2007

la société ACSP ne conteste pas avoir engagé M. X... sur la base d’un salaire mensuel brut de 1 192,63 euros en qualité d’agent de surveillance, puis avoir porté le salaire de base brut à la somme de 1 450,00 euros, ni ne conteste avoir promu M. X... aux fonctions de chef de poste, statut agent de maîtrise, moyennant un salaire mensuel brut de 1 829,39 euros ; la société ACSP ne conteste pas de même avoir à compter de juillet 2004 délivrer à M. X... des bulletins de paie sur lesquels figurait un salaire brut de 3 015,25 euros, puis d’avoir ensuite délivré un bulletin de salaire mentionnant un salaire brut de 2 925,35 euros en décembre 2004 avant de ramener le salaire brut de M. X... à la somme de 1 839,39 euros à compter du mois de janvier 2005 que M. X... justifie avoir protesté contre cette baisse de rémunération par lettre recommandée avec accusé de réception du 12 octobre 2006 et qu’il produit aux débats les pièces bancaires qui permettent de vérifier le montant des salaires versés de juillet 2004 à novembre 2004 ;

il résulte du fait que l’employeur a procédé à une augmentation de salaire au mois de juillet 2004, qu’il a délivré des bulletins de salaire conformes et qu’il a décaissé les sommes correspondantes, dûment acceptées par le salarié, une intention de nover de la part des deux parties sur la valeur du salaire rémunérant le travail de M. X..., novation sur laquelle la société ACSP ne pouvait revenir en diminuant le salaire jusqu’à sa valeur primitive sans l’accord du salarié ; la société ACSP allègue vainement qu’il s’agissait d’un accord avec M. X... consistant à faire apparaître un salaire plus important que celui effectivement versé dès lors, d’une part, que la société ACSP procède par voie d’allégation et que les salaires ont été effectivement payés et que, d’autre part, une telle manoeuvre s’analyserait nécessairement en une tentative de frauder un établissement de crédit, fait susceptible de recevoir une qualification pénale dont l’employeur ne saurait exciper à son avantage ;

en définitive, il y aura lieu de constater sur ce point un manquement grave de l’employeur dans l’exécution du contrat de travail, justifiant une résiliation de celui-ci à ses torts, et de tenir la société ACSP au paiement des sommes réclamées - soit 47 780,86 euros à titre de rappel de salaires, outre 4 778,08 euros au titre des congés payés afférents - lesquelles ne sont pas contestées dans leur montant par la société ACSP et sont en tout état de cause justifiées au vu des pièces versées aux débats ;

B. Sur l’applicabilité de l’accord d’entreprise du 15 octobre 2000 et le paiement des heures supplémentaires, des heures de nuit et des heures de travail le dimanche ;

en vertu des dispositions de l’article 3 de la loi n° 98-461 du 13 juin 1998 d’orientation et d’incitation relative à la réduction du temps de travail, dans sa rédaction à la date du 15 octobre 2000, les entreprises ou établissements qui réduisent la durée du travail avant le 1er janvier 2000 ou pour les entreprises de vingt salariés ou moins avant le 1er janvier 2002 en application d’un accord collectif et qui procèdent en contrepartie à des embauches ou préservent des emplois peuvent bénéficier d’une aide dès lors que la réduction du temps de travail est organisée par un accord d’entreprise ou d’établissement ; en vertu du III de l’article 3 précité, dans les entreprises ou établissements dépourvus de délégué syndical ou de délégué du personnel désigné connue délégué syndical, un accord collectif peut être conclu par un ou plusieurs salariés expressément mandatés par une ou plusieurs organisations syndicales reconnues représentatives sur le plan national ou départemental pour ce qui concerne les départements d’outre-mer ;

en l’espèce il apparaît que la société ACSP et M. Z..., salarié mandaté par le syndicat CFDT le 10 octobre 2000, ont conclu un accord d’entreprise portant sur la réduction, l’aménagement et l’organisation du temps de travail le 15 octobre 2000, déposé à la direction départementale du travail et de la formation professionnelle le 14 novembre 2000, cet accord n’étant pas soumis à la procédure de consultation des salariés dès lors qu’il a été conclu avec un salarié mandaté au visa de l’article 3 de la loi précitée ;

pour affirmer que l’accord du 15 octobre 2000 ne lui est pas opposable, M. X... soutient que le mandat désignant M. Z... n’est pas signé par le secrétaire général de la CFDT mais par une tierce personne, de sorte que l’accord devait être soumis à la consultation des salariés ; il fait également valoir que la société ACSP ne rapporte pas la preuve de ce que ses effectifs étaient inférieurs à 20 salariés lors de la signature de l’accord ; M. X... fait par ailleurs valoir que l’accord du 15 octobre 2000 a été conclu sous la condition, notamment, de constitution d’un comité d’entreprise par la société ACSP alors qu’un tel comité n’existe toujours pas ; par ailleurs, l’inopposabilité de l’accord aux salariés de la société ACSP découlerait de la circonstance que son existence n’a jamais été portée à leur connaissance ; il souligne enfin qu’ayant été embauché en septembre 2003, aucune mention de son contrat de travail ne fait apparaître l’existence de l’accord d’entreprise ;

Mais le mandat confié par le secrétaire général de la CFDT à M. Z... le 10 octobre 2000 se tient dans un document à l’entête de la CFDT, est libellé au nom du secrétaire général de la CFDT, l’attache de signature y étant conforme, et que c’est par voie d’allégation que M. X... affirme qu’il s’agit d’une tierce personne ; il appartient à M. X..., qui affirme l’inopposabilité de l’accord en prétendant de manière dubitative que l’entreprise comprenait plus de 20 personnes, de rapporter la preuve de cette circonstance, alors que l’effectif a nécessairement été vérifié par les partenaires sociaux au moment de la négociation et n’a jamais été contesté ; la mise en place d’un comité d’entreprise ne constituait pas une condition de validité de l’accord d’entreprise ; cet accord est entré en application le jour suivant le dépôt auprès de l’autorité administrative conformément aux dispositions de l’article L. 132-10 du code du travail alors en vigueur, formalité constituant la mesure de publicité rendant l’accord opposable aux salariés ; M. X... soutient vainement qu’il n’a jamais eu connaissance de l’accord d’entreprise, puisque son contrat de travail en constitue une application directe, notamment en prévoyant une durée de travail de 35 heures et les modalités de prise en compte du nombre d’heures travaillées ; en définitive, il conviendra de rejeter le moyen de M. X... tiré de l’inopposabilité de l’accord d’entreprise du 15 octobre 2000, de rejeter par voie de conséquence ses prétentions à titre principal au paiement d’heures supplémentaires, et d’examiner sa demande de paiement des heures supplémentaires au regard du plafond annuel horaire de 1 600 heures prévu par l’accord d’entreprise, le cas échéant en examinant l’existence d’un manquement grave de l’employeur de ce chef, susceptible de justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail ;

1°) Sur les heures supplémentaires

s’il résulte de l’article L. 3171-4 du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n’incombe spécialement à aucune des parties, il appartient toutefois au salarié de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande, l’employeur devant ensuite fournir les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; en l’espèce, M. X... produit les cahiers mis à la disposition des chefs de poste, récapitulant le travail des agents et les incidents survenus dans la période de surveillance, documents intitulés mains courantes, les feuilles de pointage et quelques relevés globaux établis par le chef de site, desquels il déduit l’existence de 592,05 heures supplémentaires pour l’année 2004, 37,52 heures pour l’année 2005, 851,50 heures pour l’année 2006 et 158 heures pour l’année 2007 ; l’employeur se borne à suspecter par voie d’allégation la sincérité des documents produits sans fournir aucun élément de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par M. X... et prétend s’appuyer sur les témoignages de Messieurs A... et B... qui témoigneraient n’avoir pas travaillé le nombre d’heures qui figure à leur nom sur les pièces de M. X... ; cependant, outre le caractère très limité de cette contestation au regard du nombre très important de pièces justificatives produites par le salarié, il importe de constater que les attestations de MM. A... et B... ne sont pas versées aux débats ni mentionnées dans la liste des pièces communiquées, non plus qu’aucune pièce constituant la preuve qu’un salarié Abidi aurait été embauché après la période pour laquelle son nom figure sur les pièces de M. X... ; dans ces conditions, il conviendra d’accueillir la demande subsidiaire de M. X... relative aux heures supplémentaires majorées de 25 %, soit la somme de 40 730,87 euros (14 712,44 euros heures supplémentaires 2004 + 932,36 euros heures supplémentaires 2005 + 21159,77 euros heures supplémentaires 2006 + 3 926,30 euros heures supplémentaires 2007), outre une somme de 4 073,08 euros au titre des congés payés afférents, sommes sur l’exactitude desquelles la société ACSP ne formule aucune observation ; M. X... justifie avoir réclamé le paiement de ces heures par lettre recommandée avec accusé de réception du 12 octobre 2006, de sorte que de ce chef à nouveau, il y aura lieu de constater sur ce point un manquement grave de l’employeur dans l’exécution du contrat de travail, justifiant une résiliation de celui-ci à ses torts ;

2°) Sur le repos compensateur obligatoire

en vertu de l’article L. 3121-27 du code du travail, applicable au présent contrat de travail qui a été exécuté avant l’abrogation de cette disposition par la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, dans les entreprises de vingt salariés et moins, les heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent annuel d’heures supplémentaires conventionnel ou réglementaire ouvrent droit à un repos compensateur obligatoire dont la durée est égale à 50 % de chaque heure supplémentaire accomplie au-delà du contingent ;

M. X..., dont la demande en paiement d’heures supplémentaires a été accueillie, doit être considéré comme n’ayant pas été en mesure de formuler, du fait de son employeur, une demande de repos compensateur auquel ces heures lui donnaient droit et doit ainsi voir son préjudice réparé à ce titre, dont le montant correspond à ses droits acquis, ainsi qu’il résulte de l’ancien article L 3121-31 du code du travail applicable au présent contrat de travail qui a été exécuté avant l’abrogation de cette disposition par la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 ;

ainsi, alors que dans le paragraphe qui précède, un total de 1 763,88 heures supplémentaires a été retenu, il y aura lieu de faire droit à la demande de M. X... tendant au paiement d’une somme de 17 532,97 euros, somme sur l’exactitude de laquelle la société ACSP ne formule aucune observation et correspondant à 50 % du taux horaire de 19,88 euros, correspondant au salaire mensuel brut retenu dans les développements qui précèdent, sur l’ensemble des heures supplémentaires, outre 1 753,29 euros au titre des congés payés afférents ; la demande de dommages intérêts de 2 000,00 euros sera rejetée dès lors que le préjudice tiré du défaut d’information au repos compensateur est déjà réparé ;

3°) Sur les heures de travail de nuit

a) Sur les heures de nuit non payées

en vertu de l’article 1.1. de l’avenant du 25 septembre 2001 relatif au travail de nuit de la Convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité du 15 février 1985, les heures de travail comprises entre 21 heures et 6 heures font l’objet d’une majoration de 10 % du taux horaire minimum conventionnel du salarié concerné ;

s’il résulte de l’article L 3171-4 du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n’incombe spécialement à aucune des parties, il appartient toutefois au salarié de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande, l’employeur devant ensuite fournir les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ;

en l’espèce, M. X... produit les cahiers mis à la disposition des chefs de poste, récapitulant le travail des agents et les incidents survenus dans la période de surveillance, documents intitulés mains courantes, les feuilles de pointage et quelques relevés globaux établis par le chef de site ; il étaye ainsi suffisamment sa demande aux termes de laquelle sur la somme de 42 592,50 euros qui lui étaient due par la société ACSP pour les heures de nuit de novembre 2005 à mai 2007, seule la somme globale de 15 958,99 euros lui a été effectivement payée et figure sur ses bulletins de paie ; l’employeur se borne à affirmer que toutes les heures de nuit ont été payées en renvoyant aux mentions des bulletins de paie, sans fournir aucun élément de nature à justifier les horaires de nuit effectivement réalisés par M. X... ;

dans ces conditions, il conviendra d’accueillir la demande de M. X... en paiement d’une somme de 26 633,51 euros au titre des heures de nuit, outre une somme de 2 663,35 euros au titre des congés payés afférents, sommes sur l’exactitude desquelles la société ACSP ne formule aucune observation ; M. X... justifie avoir réclamé le paiement de ces heures par lettre recommandée avec accusé de réception du 12 octobre 2006, de sorte que de ce chef à nouveau, il y aura lieu de constater sur ce point un manquement grave de l’employeur dans l’exécution du contrat de travail, justifiant une résiliation de celui-ci à ses torts ;

b) Sur le droit au repos compensateur pour les heures travaillées de nuit

en vertu de l’article 1.2. de l’avenant du 25 septembre 2001 relatif au travail de nuit de la Convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité du 15 février 1985, le repos compensateur est attribué dès la première heure de nuit et est d’une durée égale à 1% par heure de travail comprise entre 21 heures et 6 heures ; en vertu de la même disposition, l’information des droits acquis fait l’objet d’une mention sur la fiche de paie ou en annexe à la fiche de paie, sous la rubrique “Repos compensateur sur travail de nuit” qui doit être distincte du suivi et de la rubrique “Repos compensateur sur heures supplémentaires” ;

en l’espèce, la société ACSP se borne à alléguer qu’à la demande expresse de M. X..., le repos compensateur a fait l’objet du versement d’indemnités de congés payés sur ses bulletins de paie ; outre le fait que l’article 1,2. précité prohibe la compensation indemnitaire du repos compensateur, l’affirmation de la société ACSP suffit à démontrer que M. X... n’a jamais bénéficié de ce droit, ainsi qu’il le souligne, alors qu’en outre la société ACSP ne rapporte pas la preuve ni des modalités de calcul de cette compensation non plus que son intégration en sus des congés payés authentiques qui étaient dus ;

il sera dès lors fait droit à la demande de M. X... tendant à l’allocation d’une somme de 5 000,00 euros à titre de dommages intérêts pour privation du droit conventionnel au bénéfice du repos compensateur et défaut d’information des droits acquis de ce chef ;

4°) Sur les heures de travail le dimanche

l’article 1er de l’accord du 29 octobre 2003 relatif aux modalités de rémunération du travail du dimanche annexé à la Convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité du 15 février 1985 dispose qu’à compter du 1er juillet 2004, toutes les heures de travail effectuées le dimanche (soit entre 0 heure et 24 heures) font l’objet d’une majoration de 10 % du taux horaire minimum conventionnel du salarié concerné ;

s’il résulte de l’article L. 3171-4 du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n’incombe spécialement à aucune des parties, il appartient toutefois au salarié de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande, l’employeur devant ensuite fournir les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ;

en l’espèce, M. X... produit les cahiers mis à la disposition des chefs de poste, récapitulant le travail des agents et les incidents survenus dans la période de surveillance, documents intitulés mains courantes, concernant 53 dimanches du dimanche 24 août 2004 au dimanche 25 mars 2007 ; il apparaît qu’aucun des bulletins de salaires versés aux débats ne mentionne la majorité due à ce titre et que l’employeur se borne à affirmer que le lieu de surveillance de M. X... était fermé le dimanche, en excipant d’une attestation de M. C... qui n’est pas produite ni énumérée dans la liste des pièces versées aux débats, sans fournir aucun élément de nature à justifier le travail du dimanche effectivement réalisé par M. X... ;

dans ces conditions, il conviendra d’accueillir la demande de M. X... en paiement d’une somme de 8 308,68 euros au titre du travail le dimanche, outre une somme de 830,66 euros au titre des congés payés afférents, sommes sur l’exactitude desquelles la société ACSP ne formule aucune observation ; M. X... justifie avoir réclamé le paiement de ces heures par lettre recommandée avec accusé de réception du 12 octobre 2006, de sorte que de ce chef à nouveau, il y aura lieu de constater sur ce point un manquement grave de l’employeur dans l’exécution du contrat de travail, justifiant une résiliation de celui-ci à ses torts ;

en définitive qu’il résulte des développements qui précèdent, que la société ACSP a commis des manquements graves à ses obligations justifiant la résiliation du contrat de travail à ses torts exclusifs, produisant les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, sans qu’il y ait lieu d’examiner le bien-fondé du licenciement prononcé par l’employeur le 17 janvier 2008, la résiliation du contrat de travail sera prononcée à cette dernière date, qui a marqué la fin des relations contractuelles entre les parties ;

III. Sur l’indemnisation de la résiliation du contrat de travail produisant les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse et le rappel de salaire avant licenciement

au moment de la rupture de son contrat de travail, M. X... avait au moins deux années d’ancienneté et que la société ACSP employait habituellement au moins onze salariés ;

en vertu de l’article L. 1235-3 du code du travail, M. X... peut prétendre à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qui ne peut être inférieure au montant des salaires bruts qui étaient dus pendant les six derniers mois précédant la rupture, soit en l’espèce 18091,50 euros (3 015,25 euros x 6) ;

M. X... ne justifie par ailleurs d’aucun préjudice supplémentaire et qu’il convient de lui allouer la somme précitée à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

par ailleurs, il résulte des pièces versées aux débats, et non contestées par la société ACSP, que celle-ci n’a pas réglé les salaires de M. X... à compter du 1er décembre 2007 ; la société ACSP fait valoir que dans l’hypothèse d’une résiliation judiciaire, “la rupture sans préavis doit être la demande de résolution judiciaire”, laquelle date, selon elle, du 26 octobre 2007 ; que ce moyen, tel qu’il est articulé, signifie que la société ACSP considère, de manière inopérante, que dès la date de demande de résiliation judiciaire du contrat, l’employeur n’est plus tenu d’exécuter son obligation au paiement du salaire ; il y aura lieu de considérer que la société ACSP ne fait valoir aucun motif légitime de cessation du salaire de M. X... avant la date de licenciement effectif de celui-ci et de faire droit à la demande de rappel de salaire sur la période réclamée, soit 4765,93 euros outre 476, 59 euros au titre des congés payés afférents ;

IV. Sur l’indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents

en application de l’article L. 1234-5 du code du travail, l’indemnité compensatrice de préavis correspond aux salaires et avantages qu’aurait perçus le salarié s’il avait travaillé pendant cette période ; il y aura lieu de tenir la société ACSP d’une somme de 6 030,50 euros, soit deux mois de salaire en application de la convention collective applicable, outre une somme de 603,50 euros au titre des congés payés afférents, alors que l’intimée n’articule aucun moyen au soutien de sa demande de rejet ;

V. Sur le travail dissimulé

contrairement aux prescriptions de l’article L. 8221-5 du code du travail, la société ACSP a intentionnellement mentionné sur les bulletins de salaire de M. X... un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli au titre de la majoration des heures de travail le dimanche, fait avéré qu’elle ne pouvait ignorer et qu’elle a dès lors commis sciemment ;

aux termes de l’article L. 8223-1 du code du travail, le salarié auquel un employeur a eu recours en violation des dispositions de l’article L. 8221-5 a droit, en cas de rupture de la relation de travail, à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire, à moins que l’application de règles légales ou de stipulations conventionnelles ne conduise à une solution plus favorable ;

il convient en conséquence d’allouer à M. X... la somme de 18 091,50 euros qu’il sollicite sur le fondement de l’article L. 8223-1 précité ;

VII. Sur les demandes de documents et la capitalisation des intérêts

il y aura lieu d’ordonner à la société ACSP de remettre à M. X... des bulletins de salaire, une attestation destinée à Pôle Emploi et un certificat de travail conformes aux dispositions du présent arrêt, sous astreinte de 50,00 euros par jour de retard passé le délai d’un mois suivant la signification de présent arrêt, sans qu’il soit nécessaire que la cour se réserve le droit de liquider cette astreinte ;

par ailleurs la demande de M. X... tendant à la production sous astreinte de mains courantes et de feuilles de pointage sera rejetée, dès lors que ces documents ne sont plus nécessaires à la résolution du litige

il y a lieu d’ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1154 du code civil ;

IX. Sur le remboursement des indemnités de chômage aux organismes concernés

en application de l’article L. 1235-4 du code du travail, il y a lieu d’ordonner le remboursement par la société ACSP aux organismes concernés, parties au litige par l’effet de la loi, des indemnités de chômage qu’ils ont versées à M. X... à compter du jour de son licenciement, et ce à concurrence de 6 mois”,

ALORS, D’UNE PART, QUE la novation ne se présume pas et la volonté de l’opérer doit résulter clairement de l’acte si bien qu’en énonçant qu’il résultait de ce que l’employeur a procédé à une augmentation de salaire au mois de juillet 2004, qu’il a délivré des bulletins de salaire conformes et qu’il a décaissé les sommes correspondantes, dûment acceptées par le salarié, une intention de nover de la part des deux parties sur la valeur du salaire rémunérant le travail de Monsieur X..., sans pour autant caractériser une telle volonté, la Cour d’appel a violé l’article 1273 du Code civil,

ALORS, D’AUTRE PART, QUE la novation ne se présume pas mais doit résulter de la commune intention des parties si bien qu’en se fondant uniquement sur le comportement de l’employeur, sans caractériser la volonté claire et non équivoque du salarié, la Cour d’appel a encore violé l’article 1273 du Code civil ensemble l’article 1134 du même Code,

ALORS, DE TROISIEME PART, QU’en retenant que l’employeur avait commis de graves manquements en ne payant pas les heures supplémentaires qu’aurait effectuées le salarié et en allouant à ce dernier certaines sommes de ce chef, sans répondre aux conclusions de l’employeur qui faisait valoir que le salarié produisait des mains courantes d’une société GORON qui n’était pas client de la société ACSP, mais aussi que les feuilles versées aux débats par le salarié étaient des originaux dont l’employeur n’avait pu avoir connaissance pour vérifier la véracité des heures effectuées et les régler, la Cour d’appel a violé l’article 455 du Code de procédure civile,

ALORS ENFIN QU’en se déterminant, pour allouer au salarié une indemnité forfaitaire sur le fondement de l’article 8223-1 du Code du travail, par l’affirmation selon laquelle la société ACSP a intentionnellement mentionné sur les bulletins de salaire de Monsieur X... un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli au titre de la majoration des heures de travail le dimanche, fait avéré qu’elle ne pouvait ignorer et qu’elle a dès lors commis sciemment, sans s’expliquer plus avant sur le caractère volontaire de cette omission, la Cour d’appel a violé l’article 455 du nouveau Code de procédure civile.

Décision attaquée : Cour d’appel de Versailles , du 29 juin 2010