Détermination du respect du smic

Cour de cassation

chambre sociale

Audience publique du 5 juin 2013

N° de pourvoi : 12-14149

ECLI:FR:CCASS:2013:SO01041

Non publié au bulletin

Cassation partielle

M. Gosselin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président), président

Me Haas, Me Le Prado, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que Mme X...et dix-neuf autres salariés ont été engagés par la société Adrexo en qualité de distributeurs de journaux et de documents publicitaires dans le cadre d’un contrat de travail à temps partiel ; qu’ils ont saisi la juridiction prud’homale de demandes en requalification de leur contrat de travail à temps partiel respectif en contrat de travail à temps plein et en paiement de diverses sommes ;

Sur le second moyen du pourvoi principal de l’employeur et les premiers et troisième moyens du pourvoi incident des salariés :

Attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer sur ces moyens qui ne sont pas de nature à permettre l’admission des pourvois ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal de l’employeur :

Attendu que l’employeur fait grief à l’arrêt de requalifier les contrats de travail à temps partiel de chacun des salariés en contrat de travail à temps plein et de le condamner au paiement de diverses sommes en conséquence, alors selon le moyen :

1°/ qu’une convention ou un accord collectif de travail étendu ou un accord d’entreprise ou d’établissement peut prévoir que la durée hebdomadaire ou mensuelle peut varier dans certaines limites sur tout ou partie de l’année ; que cette convention ou accord collectif doit notamment prévoir la durée minimale de travail pendant les jours travaillés ; qu’en l’espèce, la société Adrexo faisait valoir que la convention collective de la distribution directe conclue le 9 février 2004 et étendue le 16 juillet 2004 dispose dans l’article 1. 2 de son chapitre IV que les entreprises de distribution peuvent avoir recours au travail à temps partiel modulé pour les salariés de la filière logistique – dont font partie les distributeurs –, un tel contrat de travail ne pouvant cependant pas avoir une durée de travail inférieure à 2 heures quotidiennes, 6 heures hebdomadaires et 26 heures mensuelles ; que la cour d’appel, par motifs propres et adoptés, a jugé que pour la période postérieure au 1er juillet 2005 la société Adrexo ne pouvait prétendre au bénéfice des dispositions relatives au travail à temps partiel modulé sur l’année dans la mesure où la convention collective de la distribution directe ne contenait pas de dispositions relatives à la durée minimale de travail pendant les jours travaillés ; qu’en statuant ainsi, quand la convention collective de la distribution directe prévoit au contraire que la durée minimale de travail des distributeurs employés à temps partiel modulé ne peut être inférieure à deux heures pendant les jours travaillés, la cour d’appel a violé les dispositions de l’article 1. 2 du chapitre IV de cette convention collective ;

2°/ qu’à défaut d’une convention ou d’un accord collectif de travail étendu, un accord d’entreprise ou d’établissement peut prévoir que la durée hebdomadaire ou mensuelle peut varier dans certaines limites sur tout ou partie de l’année, à condition que cet accord contienne certaines mentions dont la durée minimale de travail pendant les jours travaillés ; qu’en l’espèce, la société Adrexo faisait valoir que l’accord d’entreprise du 11 mai 2005 disposait dans son article 2. 1 intitulé « durée du travail d’un distributeur à temps partiel modulé » que « le distributeur bénéficie d’une garantie de travail minimale par jour, semaine et mois travaillés conformes à celles prévues par la convention collective de branche soit au moins 2 heures par jour, 6 heures hebdomadaires et 26 heures par mois » ; que la cour d’appel, par motifs propres et adoptés, a jugé que pour la période postérieure au 1er juillet 2005 la société Adrexo ne pouvait prétendre au bénéfice des dispositions relatives au travail à temps partiel modulé sur l’année dans la mesure où la convention collective de la distribution directe ne contenait pas de dispositions relatives à la durée minimale de travail pendant les jours travaillés ; qu’en statuant ainsi, quand l’accord collectif d’entreprise du 11 mai 2005 prévoyait en tout état de cause le recours pour les distributeurs au temps partiel modulé avec une durée minimale de deux heures de travail par jour travaillé, la cour d’appel a violé l’article L. 3123-25 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, applicable au litige ;

Mais attendu qu’abstraction faite des motifs erronés mais surabondants critiqués par le moyen, la cour d’appel, qui a constaté, par motifs propres, l’absence de mention dans le contrat de travail de la durée de travail et, par motifs adoptés, que l’employeur n’établissait pas la durée de travail convenue, a ainsi légalement justifié sa décision ;

Mais, sur le deuxième moyen du pourvoi incident des salariés, à l’exception de Mme Y... :

Vu l’article 1134 du code civil ;

Attendu, que les frais qu’un salarié justifie avoir exposés pour les besoins de son activité professionnelle et dans l’intérêt de l’employeur, doivent être remboursés sans qu’ils puissent être imputés sur la rémunération qui lui est due, à moins qu’il n’ait été contractuellement prévu qu’il en conserverait la charge moyennant le versement d’une somme fixée à l’avance de manière forfaitaire et à la condition que la rémunération proprement dite du travail reste chaque mois au moins égale au SMIC ;

Attendu que pour débouter les salariés de leur demande de rappel d’indemnités kilométriques, l’arrêt retient que la convention collective de la distribution directe de février 2004 en son annexe 3 définissant un forfait secteur puis l’avenant numéro 8 du 1er juin 2006 prévoyant les méthodes de calcul et de révision des kilomètres parcourus énoncent que le salarié sera indemnisé sur la base d’une somme forfaitaire de sorte qu’il ne peut être retenue une indemnisation évaluée sur des bases différentes alors que les distances kilométriques mentionnées sur les feuilles de route signées par le salarié l’ont été conformément à ces dispositions collectives, la preuve d’une erreur dans l’établissement du décompte des frais n’étant pas établie ;

Qu’en se déterminant ainsi, sans vérifier si la rémunération proprement dite du travail de chacun des salariés restait chaque mois au moins égale au SMIC, la cour d’appel a privé sa décision de base légale ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il déboute les salariés de leurs demandes en remboursement de frais professionnels, l’arrêt rendu le 16 décembre 2011, entre les parties, par la cour d’appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel d’Angers ;

Condamne la société Adrexo aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne la société Adrexo à payer à Mme X...et aux 18 autres salariés la somme globale de 2 500 euros et à Mme Y...la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juin deux mille treize. MOYENS ANNEXES au présent arrêt.

Moyens produits AU POURVOI PRINCIPAL par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour la société Adrexo.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR requalifié les contrats de travail à temps partiel conclus par la société Adrexo avec les salariés défendeurs en contrats de travail à temps plein et d’AVOIR, en conséquence, condamné la société Adrexo à verser à chacun d’eux diverses sommes à ce titre,

AUX MOTIFS QUE c’est à bon droit que le jugement du conseil de prud’hommes a considéré que pour la période à compter du 1er juillet 2005, l’employeur ne pouvait prétendre au bénéfice des dispositions relatives au travail à temps partiel modulé sur l’année résultant de dispositions de l’article L. 3123-25 du code du travail puisqu’un tel contrat ne pouvait être conclu qu’en application d’un accord collectif comportant des dispositions obligatoires ce qui n’est pas le cas de la convention collective de la distribution directe de février 2004 qui prévoit la possibilité du travail à temps partiel modulé pour les distributeurs mais ne contient pas de dispositions relatives à la durée minimale de travail pendant les jours travaillés, dispositions exigées par l’article susvisé ; qu’il convient donc alors que l’absence de mention dans le contrat de travail de la durée du travail a pour conséquence d’obliger le salarié à demeurer à la disposition de son employeur, quelles que soient par ailleurs ses disponibilités, de requalifier son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein avec obligation pour l’employeur de payer les salaires sur la base d’un temps plein pour la période non prescrite ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE pour la période débutant au 1er juillet 2005, la société Adrexo ne peut prétendre au bénéfice des dispositions relatives au travail à temps partiel modulé sur l’année résultant des dispositions de l’article L. 3123-25 du code du travail (précédemment L. 212-4-6 et désormais abrogé par la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 mais en vigueur lors de la signature des avenants ou contrats de 2005) ; qu’en effet, de tels contrats ne pouvaient être conclus qu’en application d’accords collectifs qui, suivant les dispositions de l’article L. 3123-25, devaient prévoir des dispositions obligatoires ; que la convention collective de la distribution directe de février 2004 qui prévoit la possibilité du travail à temps partiel modulé pour les distributeurs, ne contient notamment pas de dispositions relatives à la durée minimale de travail pendant les jours travaillés, dispositions qui étaient exigées par l’article susvisé ; qu’en conséquence, les contrats de travail à temps partiel de chacun des salariés demandeurs doivent être requalifiés en contrats de travail à temps plein ;

1°) ALORS QU’une convention ou un accord collectif de travail étendu ou un accord d’entreprise ou d’établissement peut prévoir que la durée hebdomadaire ou mensuelle peut varier dans certaines limites sur tout ou partie de l’année ; que cette convention ou accord collectif doit notamment prévoir la durée minimale de travail pendant les jours travaillés ; qu’en l’espèce, la société Adrexo faisait valoir que la convention collective de la distribution directe conclue le 9 février 2004 et étendue le 16 juillet 2004 dispose dans l’article 1. 2 de son chapitre IV que les entreprises de distribution peuvent avoir recours au travail à temps partiel modulé pour les salariés de la filière logistique – dont font partie les distributeurs –, un tel contrat de travail ne pouvant cependant pas avoir une durée de travail inférieure à 2 heures quotidiennes, 6 heures hebdomadaires et 26 heures mensuelles ; que la cour d’appel, par motifs propres et adoptés, a jugé que pour la période postérieure au 1er juillet 2005 la société Adrexo ne pouvait prétendre au bénéfice des dispositions relatives au travail à temps partiel modulé sur l’année dans la mesure où la convention collective de la distribution directe ne contenait pas de dispositions relatives à la durée minimale de travail pendant les jours travaillés ; qu’en statuant ainsi, quand la convention collective de la distribution directe prévoit au contraire que la durée minimale de travail des distributeurs employés à temps partiel modulé ne peut être inférieure à deux heures pendant les jours travaillés, la cour d’appel a violé les dispositions de l’article 1. 2 du chapitre IV de cette convention collective ;

2°) ALORS en tout état de cause QU’à défaut d’une convention ou d’un accord collectif de travail étendu, un accord d’entreprise ou d’établissement peut prévoir que la durée hebdomadaire ou mensuelle peut varier dans certaines limites sur tout ou partie de l’année, à condition que cet accord contienne certaines mentions dont la durée minimale de travail pendant les jours travaillés ; qu’en l’espèce, la société Adrexo faisait valoir que l’accord d’entreprise du 11 mai 2005 disposait dans son article 2. 1 intitulé « durée du travail d’un distributeur à temps partiel modulé » que « le distributeur bénéficie d’une garantie de travail minimale par jour, semaine et mois travaillés conformes à celles prévues par la convention collective de branche soit au moins 2 heures par jour, 6 heures hebdomadaires et 26 heures par mois » ; que la cour d’appel, par motifs propres et adoptés, a jugé que pour la période postérieure au 1er juillet 2005 la société Adrexo ne pouvait prétendre au bénéfice des dispositions relatives au travail à temps partiel modulé sur l’année dans la mesure où la convention collective de la distribution directe ne contenait pas de dispositions relatives à la durée minimale de travail pendant les jours travaillés ; qu’en statuant ainsi, quand l’accord collectif d’entreprise du 11 mai 2005 prévoyait en tout état de cause le recours pour les distributeurs au temps partiel modulé avec une durée minimale de deux heures de travail par jour travaillé, la cour d’appel a violé l’article L. 3123-25 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, applicable au litige.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR requalifié les démissions de Mesdames X..., Z..., J..., K..., L..., M..., N..., O..., P... et de Messieurs A..., B..., C..., D..., E..., F..., G...en des licenciements sans cause réelle et sérieuse et d’AVOIR, en conséquence, condamné la société Adrexo à verser à chacun d’eux des dommages-intérêts ;

AUX MOTIFS QUE c’est la première fois en cause d’appel que les salariés présentent cette demande tendant à la disqualification de leur démission en un licenciement sans cause réelle et sérieuse qui est recevable devant la cour ; qu’il ne peut être retenu contrairement à l’argumentation développée par l’appelante que chacun des salariés a de manière claire et non équivoque donné par écrit sa démission entre septembre 2006 et 2008 sans invoquer de griefs à l’encontre de son employeur alors qu’il résulte des circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu’à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci est équivoque étant intervenue postérieurement à la naissance du litige opposant les parties et à l’introduction de l’instance devant le conseil de prud’hommes ; que cette démission s’analyse en une prise d’acte de la rupture qui produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse dès lors que les faits invoqués la justifiaient à savoir que l’employeur n’a pas respecté la loi et les dispositions conventionnelles entraînant la requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein et ouvrant droit à un rappel de salaire, d’indemnité de congés payés y afférents et de primes d’ancienneté ;

1°) ALORS QUE lorsque le salarié a saisi le conseil de prud’hommes de demandes relatives à sa durée du travail, puis qu’il a, plusieurs mois plus tard, démissionné sans émettre de grief à l’encontre de l’employeur et sans présenter de demande devant le conseil de prud’hommes tendant à voir juger sa démission imputable à l’employeur, ne formant une telle demande que bien ultérieurement devant la cour d’appel, le fait que la saisine du conseil de prud’hommes ait été antérieure à la démission ne saurait suffire à rendre cette dernière équivoque ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a constaté que c’est pour la première fois en cause d’appel que les salariés avaient présenté une demande tendant à la disqualification de leurs démissions en licenciements sans cause réelle et sérieuse ; que pour juger cependant que leurs démissions étaient équivoques, elle a relevé qu’elles étaient intervenues postérieurement à l’introduction des instances devant le conseil de prud’hommes ; qu’en statuant ainsi, quand les salariés n’avaient formé aucune demande relative à leur démission dans le cadre de l’instance prud’homale mais seulement plusieurs années plus tard devant la cour d’appel, ce dont il s’évinçait que le différend qui avait justifié leur saisine du conseil de prud’hommes n’était pas la cause de leur démission, la cour d’appel a statué par des motifs inopérants, et a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 1237-1 du code du travail, ensemble l’article 1134 du code civil ;

2°) ALORS QUE l’existence d’un différend, même antérieur à la démission, ne peut rendre cette dernière équivoque que s’il est la cause de cette démission ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a jugé que la démission des salariés qui ne contenait aucune réserve, était néanmoins équivoque dès lors qu’elle était intervenue postérieurement à la naissance du litige opposant les parties ; qu’en statuant ainsi, sans aucunement faire ressortir le lien supposé entre le litige relatif au temps de travail ayant justifié la saisine du conseil de prud’hommes, et les démissions des salariés que ces derniers n’avaient remises en cause que plusieurs années après la naissance du litige relatif à la durée du travail, la cour d’appel a derechef privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 1237-1 du code du travail, ensemble l’article 1134 du code civil ;

3°) ALORS en tout état de cause QUE s’il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu’à la date à laquelle à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, elle doit s’analyser en une prise d’acte de la rupture qui produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d’une démission ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a jugé que les démissions s’analysaient en prises d’acte de la rupture qui produisaient les effets de licenciements sans cause réelle et sérieuse, dès lors que les faits invoqués les justifiaient, à savoir que l’employeur n’avait pas respecté la loi et les dispositions conventionnelles entraînant la requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein ; que la cassation de l’arrêt en ce que les contrats à temps partiel modulés ont été requalifiés en contrats à temps plein pour la période postérieure au 1er juillet 2005 entraînera donc par voie de conséquence, en application de l’article 624 du code de procédure civile, la cassation de l’arrêt en ce qu’il a requalifié les démissions en licenciements sans cause réelle et sérieuse, dès lors que la décision de la cour d’appel sur la requalification de la démission est dans un lien de dépendance nécessaire avec sa décision sur la requalification du contrat de travail à temps partiel modulé en contrat à temps complet.

Moyens produits AU POURVOI INCIDENT par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour Mmes X..., Z..., H..., J..., K..., L..., M..., N..., O..., Robin, P... et MM. C..., A..., B..., D..., E..., I..., F...et G....

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l’arrêt attaqué :

D’AVOIR considéré que le licenciement pour faute grave de Madame H...et de Monsieur I...était justifié, et débouté ces derniers de leurs demandes afférentes à un licenciement abusif ;

AUX MOTIFS QUE « Madame H...et Monsieur Jean-Claude I...sollicitent pour la première fois en appel la requalification de leur licenciement pour faute grave en licenciement sans cause réelle et sérieuse et la condamnation de l’employeur à leur verser respectivement des indemnités de 9. 465, 96 € et de 8. 026, 38 €. Pour se conformer au jugement du Conseil de prud’hommes de Nantes du 7 juillet 2009 requalifiant le contrat de travail en contrat de travail à temps plein, l’employeur les a mis en demeure par courrier du 28 août 2009 de se tenir durant 35 heures hebdomadaires à sa disposition selon des horaires communiquées. Par courrier en date du 24 septembre 2009, M. I...n’a pas respecté ses nouveaux horaires et a été mis en demeure de justifier de ses absences. Par courrier en date du 23 octobre 2009, la société Adrexo a reproché aux salariés de ne se rendre au dépôt que lorsqu’ils le souhaitent et de n’effectuer qu’une durée de travail hebdomadaire à temps partiel. Il résulte des éléments portés à la connaissance de la cour que les salariés ont le 20 novembre 2009 été convoqués à un entretien préalable prévu le 4 décembre 2009 et qu’ils ont déclaré au cours de cet entretien ne pas pouvoir respecter les horaires mis en place par la société en ce qu’ils avaient déjà pris pour certains d’autres engagements. Leur licenciement pour faute grave intervenu le 11 décembre 2009 est donc justifié pour absence injustifiée et prolongée malgré la mise en demeure de l’employeur. Il convient donc de les débouter de leurs demandes sur ce point » ;

ALORS QUE la faute grave, privative des indemnités de licenciement et de préavis, résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise même pendant la durée limitée du préavis ; que pour retenir une faute grave à l’encontre des salariés, la Cour d’appel a énoncé que pour se conformer au jugement du Conseil de prud’hommes de Nantes du 7 juillet 2009 requalifiant leurs contrats de travail en contrat de travail à temps plein, l’employeur les avait mis en demeure par courrier du 28 août 2009 de se tenir durant 35 heures hebdomadaires à sa disposition selon des horaires communiquées, et que les intéressés n’avaient pas respecté les nouveaux horaires de travail ; qu’en statuant par ces motifs inopérants à caractériser une faute grave, bien qu’elle ait relevé que l’employeur avait fait appel du jugement litigieux en ce qu’il a ordonné la requalification de la relation de travail en contrat de travail à temps plein avant de licencier les salariés, en sorte que ce jugement non encore définitif et dont les effets étaient pour partie suspendus jusqu’à l’arrêt à intervenir, ne pouvait pas fonder un licenciement pour absence injustifiée, la Cour d’appel a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du Code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l’arrêt attaqué :

D’AVOIR débouté les salariés de leurs demandes de rappel d’indemnités kilométriques ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « si le principe du remboursement des frais exposés par le salarié pour les besoins de son activité professionnelles n’est pas contestable, en revanche, la convention collective de la distribution directe de février 2004 en son annexe 3 définissant un forfait secteur, puis l’avenant n° 8 du 1er juin 2006 prévoyant les méthodes de calcul et de révision des kilomètres parcourus énoncent que le salarié sera indemnisé sur la base d’une somme forfaitaire de sorte qu’il ne peut être retenue une indemnisation évaluée sur des bases différentes alors que les indemnités kilométriques mentionnées sur les feuilles de route signées par le salarié, l’ont été conformément à ces dispositions collectives, la preuve d’une erreur dans l’établissement du décompte des frais n’étant pas établie en l’espèce » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES « les frais qu’un salarié justifie avoir exposés pour les besoins de son activité professionnelle et dans l’intérêt de l’employeur doivent lui être remboursés. Toutefois, les accords collectifs ou les contrats de travail peuvent prévoir que le salarié sera indemnisé sur la base d’une somme forfaitaire. Tel a été le cas de la convention collective de la distribution directe de février 2004 en son annexe III qui définissait un forfait secteur, puis de l’avenant n° 8 du 1er juin 2006 qui prévoyait des méthodes de calcul et de révision des kilomètres parcourus arrêtées après négociation au sein de chaque entreprise avec des distances définies propres à chaque secteur. Il était également prévu des modalités de contestation du décompte des kilomètres parcourus, avec possibilité de vérification par le responsable cal et, en cas de désaccord persistant, recours possible devant la commission de conciliation de branche. Il apparaît que les kilomètres parcourus décomptés sur les feuilles de route l’ont été conformément à ces dispositions collectives. Les salariés demandeurs n’établissent pas qu’il aurait été fait une application erronée de celles-ci » ;

ALORS QUE les frais professionnels engagés par le salarié doivent être supportés par l’employeur ; qu’en déboutant les salariés de leurs demandes de complément d’indemnités kilométriques, après avoir relevé que l’indemnité qui leur avait été allouée avait été calculée conformément aux dispositions conventionnelles, sans rechercher si le montant de l’indemnité octroyée par l’employeur, correspondait bien au coût réel des frais exposés par les salariés et si ces derniers, qui supportaient une partie des frais professionnels engagés, percevaient une rémunération au moins égale au SMIC, la Cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard de l’article 1134 du Code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l’arrêt attaqué :

D’AVOIR débouté les salariés de leurs demandes d’indemnités pour travail dissimulé ;

AUX MOTIFS PROPRES QU’« en application des articles L. 8221-3 et L. 8221-5 du Code du travail, le fait pour l’employeur de soustraire intentionnellement aux déclarations qui doivent être effectuées aux organismes de sécurité sociale ou à l’administration fiscale, est réputé travail dissimulé, ainsi que le fait de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement des formalités de délivrance des bulletins de paie ou de déclaration préalable à l’embauche. De même, est réputé travail dissimulé le fait de mentionner sur le bulletin de paie un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement effectué. Il n’apparaît pas au regard des éléments du dossier que la société Adrexo qui n’a fait l’objet d’aucune poursuite pénale, ait intentionnellement voulu dissimuler le nombre d’heures réellement effectuées par les salariés quand bien même cette dissimulation porterait sur un grand nombre de salariés alors qu’un tel système a été mis en place dans le cadre d’un accord d’entreprise conclu en 1993, puis ensuite dans le cadre d’une convention collective signée en 2004 et étendue en 2005. La demande des salariés dont le contrat a été rompu ne pourra donc être que rejeté et le jugement confirmé sur ce point » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QU’« en application des articles L. 8221-3 et L. 8221-5 du Code du travail, le fait pour l’employeur de soustraire intentionnellement aux déclarations qui doivent être effectuées aux organismes de sécurité sociale ou à l’administration fiscale, est réputé travail dissimulé, ainsi que le fait de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement des formalités de délivrance des bulletins de paie ou de déclaration préalable à l’embauche. De même, est réputé travail dissimulé le fait de mentionner sur le bulletin de paie un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement effectué. S’il peut être considéré, ainsi qu’il a été dit précédemment, que l’organisation du travail mise en place par la société Adrexo avait pour effet de dissimuler le nombre d’heures réellement effectuées par les salariés, il apparaît toutefois que l’élément intentionnel de dissimulation est insuffisamment établi dans la mesure où un tel système a été mis en place dans le cadre d’un accord d’entreprise conclu en 1993, puis ensuite dans le cadre d’une convention collective signée en 2004 et étendue en 2005. Les demandes au titre du travail dissimulé seront en conséquence rejetées » ;

ALORS QUE la dissimulation d’emploi est caractérisée dès lors que l’employeur a connaissance des heures de travail réellement effectuées par le salarié, et qu’il s’abstient intentionnellement de faire figurer les heures de travail effectivement accomplies sur les bulletins de salaire ; que la Cour d’appel par motifs propres et adoptés a relevé que l’organisation du travail mise en place par la société Adrexo avait pour effet de dissimuler le nombre d’heures de travail réellement effectuées par un grand nombre de salariés ; que la Cour d’appel aurait du déduire de ses propres énonciations que les salariés pouvaient prétendre à l’indemnité pour travail dissimulé revendiquée ; qu’en décidant le contraire aux motifs qu’un tel système était mis en place par des accords d’entreprise, lesquels ainsi que le savait pertinemment l’employeur, étaient directement contraires aux règles d’ordre public édictées par le Code du travail en matière de durée du travail, la Cour d’appel a violé les articles L. 8223-1 et L. 8221-5 du Code du travail.

Décision attaquée : Cour d’appel de Rennes , du 16 décembre 2011