Journaliste pigiste non - journaliste professionnel oui - rémunération forfaitaire

Cour de cassation

chambre sociale

Audience publique du 26 janvier 2000

N° de pourvoi : 97-45583

Non publié au bulletin

Rejet

Président : M. LE ROUX-COCHERIL conseiller, président

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société EMAP France, venant aux droits de la société Télé star, société anonyme, dont le siège est ...,

en cassation d’un arrêt rendu le 18 septembre 1997 par la cour d’appel de Paris (18e chambre, section E), au profit de M. Pascal X..., demeurant ...,

défendeur à la cassation ;

LA COUR, en l’audience publique du 8 décembre 1999, où étaient présents : M. Le Roux-Cocheril, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président et rapporteur, MM. Brissier, Texier, conseillers, Mme Bourgeot, conseiller référendaire, M. Duplat, avocat général, Mme Guénée-Sourie, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Le Roux-Cocheril, conseiller, les observations de Me Luc-Thaler, avocat de M. X..., les conclusions de M. Duplat, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu que M. X... a été engagé le 1er août 1983 en qualité de journaliste pigiste par la société Télé star au sein de laquelle il était chargé de la rédaction de fiches de films diffusées à la télévision et d’articles sur le cinéma publiés dans les pages magazines de la revue Télé star ; qu’en fin d’année 1993, la société lui a proposé l’emploi permanent de chef du service cinéma que l’intéressé a refusé ; que la société a, par lettre du 7 octobre 1994, reproché au salarié d’avoir engagé à son encontre diverses procédures, fait état du refus opposé par celui-ci d’accepter la modification du contrat de travail et considéré que M. X... avait ainsi pris l’initiative de la rupture et en prenait acte ;

que le journaliste a saisi la juridiction prud’homale ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société EMAP France, venant aux droits de la société Télé star, fait grief à l’arrêt attaqué (Paris, 18 septembre 1997) de l’avoir condamnée à payer au salarié diverses sommes à titre de rappels de salaire et d’indemnités de rupture alors, selon le moyen, qu’en ne répondant pas aux conclusions de la société, laquelle faisait valoir qu’elle n’avait pas l’obligation de maintenir le nombre des prestations qu’elle demandait à l’intéressé, lequel avait la qualité de pigiste et non celle de journaliste permanent, la cour d’appel a violé l’article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d’appel a répondu aux conclusions invoquées en constatant que M. X... n’était pas rémunéré à la tâche en fonction du nombre et de la qualité des prestations fournies, mais percevait régulièrement une rémunération forfaitaire et en faisant ainsi ressortir que l’intéressé n’avait pas la qualité de pigiste mais celle de journaliste professionnel permanent ; que le moyen n’est pas fondé ;

Sur les deuxième et troisième moyens réunis :

Attendu que la société fait encore grief à l’arrêt de l’avoir condamnée à payer au salarié une somme à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse alors, selon les moyens, d’une première part, que la modification proposée n’entraînait pas une réduction automatique de la rémunération du salarié ; alors, d’une deuxième part, que la volonté d’intégrer un journaliste pigiste dans l’équipe permanente de l’entreprise est une hypothèse prévue par l’article L. 321-1 du Code du travail, à savoir un motif non inhérent à la personne du salarié dans le cadre d’une transformation d’emploi qui ne s’inscrit pas automatiquement dans le cadre de difficultés économiques ; et alors, d’une troisième part, que le fait, pour le salarié, d’avoir engagé des poursuites à l’encontre de son employeur, constituait une cause réelle et sérieuse de licenciement ;

qu’en jugeant le contraire, la cour d’appel a violé l’article L. 122-14-4 du Code du travail ; et alors, d’une quatrième part, que pour fixer le montant de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d’appel a entaché sa décision d’une contradiction de motifs en retenant, d’un côté, que le salarié a retrouvé un emploi au journal “Le Monde” et, de l’autre, qu’il collaborait avec cette entreprise depuis 1993 ;

Mais attendu, d’abord, que la cour d’appel a constaté, d’une part, que la modification du contrat de travail entraînait une réduction de la rémunération du salarié et, d’autre part, que la lettre de licenciement, laquelle fixe les limites du litige, se bornait à rappeler le refus opposé par le salarié, sans faire état de difficultés économiques ou d’une réorganisation de l’entreprise décidée pour sauvegarder sa compétitivité ;

Attendu, ensuite, que la cour d’appel, après avoir relevé que le fait, pour le salarié, d’avoir engagé des procédures à l’encontre de son employeur et d’avoir fait procéder à une saisie-contrefaçon, s’analyse comme l’exercice d’un droit qui ne peut, en l’absence d’abus, constituer une faute, a, dans l’exercice du pouvoir qu’elle tient de l’article L. 122-14-4 du Code du travail, décidé que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Et attendu, enfin, que les juges du fond ont apprécié, hors toute contradiction, le montant du préjudice subi par le salarié du fait du licenciement ;

D’où il suit que les moyens ne sont pas fondés ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société EMAP France aux dépens ;

Vu l’article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société EMAP France à M. X... la somme de 12 000 francs ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six janvier deux mille.

Décision attaquée : cour d’appel de Paris (18e chambre section E) , du 18 septembre 1997

Titrages et résumés : TRAVAIL REGLEMENTATION - Journaliste professionnel - Définition - Pigiste.

Textes appliqués :
· Code du travail L761-1, L122-14-4