à titre onéreux oui

Cour de cassation

chambre criminelle

Audience publique du 27 mai 1999

N° de pourvoi : 98-82934

Non publié au bulletin

Rejet

Président : M. GOMEZ, président

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de justice à PARIS, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

 Y... Georges,

contre l’arrêt de la cour d’appel de COLMAR, chambre correctionnelle, en date du 28 janvier 1998, qui, pour prêt illicite de main-d’oeuvre, l’a condamné à 50 000 francs d’amende ;

La COUR, statuant après débats en l’audience publique du 30 mars 1999 où étaient présents dans la formation prévue à l’article L.131-6, alinéa 4, du Code de l’organisation judiciaire : M. Gomez président, Mme Anzani conseiller rapporteur, M. Milleville conseiller de la chambre ;

Avocat général : M. de Gouttes ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

Sur le rapport de Mme le conseiller ANZANI, les observations de la société civile professionnelle LYON-CAEN, FABIANI et THIRIEZ, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général de X... ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 125-3 du Code du travail, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

”en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Georges Y... coupable de prêt de main-d’oeuvre à but lucratif, hors du cadre légal du travail temporaire, et l’a condamné à une amende de 50 000 francs ;

”aux motifs qu’il n’est pas justifié, en l’espèce, d’un contrat d’entreprise ; que les salariés étaient placés sous l’autorité de l’entreprise utilisatrice qui définissait les tâches à exécuter ; que la facturation était calculée en fonction du prix de la main-d’oeuvre ;

”alors, d’une part, que le prêt de main-d’oeuvre n’est pas prohibé par l’article L. 125-3 du Code du travail lorsqu’il n’est que la conséquence nécessaire de la transmission d’un savoir-faire ou de la mise en oeuvre d’une technique spécifique à l’entreprise prêteuse ; qu’en ne recherchant pas, comme l’y invitait Georges Y..., si les travaux confiés aux salariés de la société GBI ne correspondaient pas, indépendamment de la qualification requise, à une activité spécifique à la société GBI, distincte de celle de la société Général Motors, de sorte que la société GBI en assumait seule la responsabilité, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 125-3 du Code du travail ;

”alors, d’autre part, qu’en se bornant à relever que la mise à disposition par la société GBI de certains de ses salariés à la société Général Motors donnait lieu à facturation et donc à une rémunération, la cour d’appel n’a pas, pour autant, caractérisé le but lucratif exigé par l’article L. 125-3 du Code du travail et a, de plus fort, privé de base légale son arrêt au regard de cette disposition ;

”alors, enfin, que ce but lucratif doit être apprécié en considération non seulement du but poursuivi par l’employeur mais également de celui, indissociable, recherché par l’entreprise utilisatrice de main-d’oeuvre ; que la cour d’appel, qui ne s’explique pas sur celui-ci, prive sa décision de base légale au regard de l’article L. 125-3 précité” ;

Attendu que, pour déclarer Georges Y..., dirigeant de l’entreprise “Générale Bâtiment Industries”, GBI, coupable de prêt illicite de main-d’oeuvre, la cour d’appel retient que cette entreprise a mis à la disposition de la société “Général Motors”, à titre onéreux, quatre salariés, hors le cadre des dispositions relatives au travail temporaire ;

que les juges relèvent, par des motifs propres et adoptés, que les ouvriers concernés travaillaient sous les ordres exclusifs de l’entreprise utilisatrice qui définissait les tâches à exécuter ; que les travaux réalisés ne présentaient aucune technicité propre à l’entreprise GBI ; que le montant des prestations était calculé en fonction du prix de la main-d’oeuvre, l’heure de travail étant facturée le double de ce que percevait le salarié mis à disposition ; qu’enfin, le responsable de l’entretien des bâtiments à la Général Motors déclarait que, depuis 6 ans, il avait recours à GBI quand il avait besoin de personnel complémentaire, ne tenant pas à faire appel aux agents de travail intérimaire ;

Attendu qu’en se déterminant ainsi, par des motifs exempts d’insuffisance ou de contradiction et répondant aux chefs péremptoires des conclusions qui lui étaient soumises, la cour d’appel a caractérisé en tous ses éléments constitutifs, tant matériels qu’intentionnel, le délit prévu par l’article L. 125-3 du Code du travail ; que, notamment, le but lucratif est caractérisé par le seul fait que le prêt de main-d’oeuvre a été effectué à titre onéreux ;

D’où il suit que le moyen, qui revient à remettre en discussion l’appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause et des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne peut être admis ;

Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-sept mai mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;

Décision attaquée : cour d’appel de COLMAR chambre correctionnelle , du 28 janvier 1998

Titrages et résumés : TRAVAIL - Travail clandestin - Contrat - Prêt de main d’oeuvre à titre onéreux - Prêt illicite - Eléments constitutifs.

Textes appliqués :
• Code du travail L125-3