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Cour de cassation

chambre criminelle

Audience publique du 23 janvier 2018

N° de pourvoi : 16-87712

ECLI:FR:CCASS:2018:CR03448

Non publié au bulletin

Cassation partielle

M. Soulard (président), président

SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Ortscheidt, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

 

 

M. Joël X...,

M. Claude X...,

contre l’arrêt de la cour d’appel de BORDEAUX, chambre correctionnelle, en date du 22 novembre 2016, qui, pour travail dissimulé par dissimulation de l’activité d’entreprise de travail temporaire et publicité tendant à favoriser le travail dissimulé, a condamné, le premier, à un an d’emprisonnement avec sursis, 20 000 euros d’amende, et une mesure de confiscation, le second, à six mois d’emprisonnement avec sursis et 10 000 euros d’amende, a prononcé à leur encontre cinq ans d’interdiction de diriger, d’administrer, de gérer ou contrôler une entreprise de travail temporaire, et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l’audience publique du 12 décembre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l’article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Durin-Karsenty, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Zita ;

Sur le rapport de Mme le conseiller DURIN-KARSENTY, les observations de la société civile professionnelle ORTSCHEIDT, de la société civile professionnelle BARADUC, DUHAMEL et RAMEIX, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général DESPORTES ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu les mémoires communs aux demandeurs et le mémoire en défense produits ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué, du jugement qu’il confirme partiellement et des pièces de procédure qu’un contrôle opéré par l’inspection du travail, en juillet et en novembre 2011 au siège de l’entreprise SNC Distillerie X... à [...] , dont l’objet social était la distillation d’alcool, le négoce de jus de raisin et d’alcool, ainsi que des prestations de service agricoles et la location immobilière, a révélé que cette société avait fait appel successivement à plusieurs entreprises roumaines de travail temporaire, pour introduire en France des travailleurs étrangers qu’elle mettait à la disposition d’exploitations viticoles ou industrielles, dans le cadre de contrats de prestation de services ou de contrats de mandataire commercial ; que le procès-verbal de l’inspection du travail a été adressé au procureur de la République qui a fait diligenter une enquête, à l’issue de laquelle MM. Joël et Claude X..., cogérants de la société précitée, ont été cités devant le tribunal correctionnel notamment des chefs susvisés ; que les juges du premier degré ont retenu leur culpabilité ; que les prévenus ont relevé appel de cette décision, ainsi que le procureur de la République et la Mutualité sociale agricole des Charentes sur le dispositif civil ;

En cet état ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 1251-2, L. 8221-1,1°, L. 8221-3, L. 8221-4, L. 8221-5, L. 8224-3, du code du travail, 121-3 du code pénal, 593 du code de procédure pénale, défaut de motif et manque de base légale ;

”en ce que l’arrêt confirmatif attaqué a déclaré MM. Joël X... et Claude X... coupables de travail dissimulé par dissimulation de l’activité d’entreprise de travail temporaire et de publicité tendant à favoriser le travail dissimulé et a statué sur les actions publique et civile ;

”aux motifs qu’il résulte de la procédure que M. Joël X... est cogérant avec son fils Claude de la SNC Distillerie X... qui a pour objet social la distillation d’alcool, le négoce de jus de raisin et d’alcool, des prestations de services agricoles et la location immobilière ; que dans le cadre de ces activités l’enquête a établi que M. Joël X... a fait appel depuis 2009 et jusqu’en juin 2014 à des entreprises de travail temporaire roumaines pour introduire en France des travailleurs roumains qui ont été mis à disposition d’exploitations agricoles ou industrielles soit dans le cadre de contrats qualifiés de prestations de services, afin que ces travailleurs effectuent des travaux de taille du tirage de bois, d’attachage et de relevage de vigne, soit dans le cadre de contrats qualifiés par l’intéressé de mandataire commercial, afin que ces mêmes travailleurs effectuent des travaux de manutention ou de récolte de pommes de terre ; que le rapport du service agricole de l’inspection du travail à l’origine de la procédure et l’enquête diligentée ont permis d’établir que dans les deux cadres précités la SNC Distillerie X... hébergeait les travailleurs roumains dans des maisons mobiles installées dans l’enceinte de l’entreprise ou dans des gîtes loués à proximité des entreprises utilisatrices ; qu’en outre dans le cadre des activités qualifiées de prestation de services, la SNC Distillerie X... mettait les travailleurs à disposition des exploitations agricoles et facturait ensuite à ces dernières lesdites prestations de services qui étaient établies non sur la base d’un forfait mais au prorata du nombre d’heures effectuées par chacun des travailleurs, ce qui en tout état de cause ne correspond pas à une véritable prestation de service ; qu’il convient par ailleurs de relever que la SNC Distillerie X... , qui n’est pas déclarée comme étant une entreprise de travail temporaire, dans ce même cadre d’activité dite de prestation de service avait conclu des contrats avec des exploitants agricoles et vinicoles qui portaient sur la mise à disposition de personnes n’ayant aucun savoir-faire spécifique où aucune technicité particulière par rapport aux salariés des exploitations ; que l’enquête ayant en effet permis de mettre en évidence que les travailleurs roumains étaient employés comme de simples ouvriers viticoles et que leur travail ne nécessitait pas compétences spéciales ; qu’enfin il ressortait des constatations et des auditions que lesdits travailleurs se trouvaient sous la subordination des exploitants agricoles ou vinicoles et que les responsables des exploitations reconnaissaient avoir eu recours à la SNC Distillerie X... dans le seul but d’obtenir de la main-d’oeuvre sans qualification spécifique ; que pour ce qui concerne l’activité présentée par les prévenus comme étant celle de mandataire commercial, il convient de relever qu’en application de l’article L.134-1 du code du commerce, elle ne peut concerner que la vente, l’achat, la location de produits ou de prestations de service ne peut en aucun cas concerner la mise à disposition de travailleurs temporaires ; qu’en outre, il convient de souligner que cette activité nécessite une inscription au registre du commerce, ce qui n’était pas le cas pour la SNC Distillerie X... , cette dernière ni aucun de ses gérants n’ayant fait une déclaration en ce sens à un quelconque organisme ; qu’ainsi il résulte de l’ensemble de ces éléments que l’activité de la SNC Distillerie X... consistant à mettre à disposition dans les circonstances ci-dessus décrites des travailleurs s’analyse en réalité comme étant une activité dissimulée entreprise de travail temporaire et ce, alors que MM. Joël et Claude X..., cogérants de la SNC Distillerie X... n’étaient nullement habilités à exercer cette activité au demeurant totalement étrangère à l’objet social de la SNC Distillerie X... et que par ailleurs cette activité n’a fait l’objet d’aucune inscription au registre du commerce et des sociétés ni à aucun organisme de protection sociale ; que deux poursuivis pour les délits d’exercice d’une activité d’entrepreneur de travail temporaire sans déclaration préalable et d’exécution d’un travail dissimulé par dissimulation de l’activité d’entreprise de travail temporaire, il convient de relever que ces deux préventions visent à sanctionner la violation d’une seule valeur sociale pénalement protégée et que par conséquent, en présence d’un concours idéal d’infraction, il ne peut être retenu que la qualification qui fait encourir la peine la plus élevée, en l’espèce celle prévue pour le délit d’exécution d’un travail dissimulé par dissimulation de l’activité d’entreprise de travail temporaire ; que c’est pourquoi MM. Joël et Claude X... seront finalement déclarés coupables du seul délit d’exécution d’un travail dissimulé par dissimulation d’activité, en l’espèce l’activité d’entreprise de travail temporaire ;

”et aux motifs non contraires qu’il résulte de la procédure que M. Joël X... est co-gérant avec son fils Claude de la SNC Distillerie X... , laquelle a pour activité la distillation d’alcool, le négoce de jus de raison et alcool, des prestations de services agricoles et la location ; que dans le cadre de cette activité, M. Joël X... a fait appel depuis 2009 à des entreprises de travail temporaire roumaines pour introduire en France- des travailleurs roumains qu’il a mis à disposition d’exploitations agricoles ou industrielles soit dans le cadre de contrats qualifiés de prestations de services afin que ces travailleurs effectuent des travaux de taille, de tirage de bois, d’attachage et de relevage de vignes soit dans le cadre de contrats de mandataire commercial afin notamment d’effectuer des travaux de manutention ou de procéder à la récolte de pommes de terre ; que le rapport de l’Inspection du travail et l’enquête réalisée par les militaires de la gendarmerie ont permis d’établir que dans tous les cas, la SNC Distillerie X... hébergeait les travailleurs dans des mobil homes installés dans l’enceinte de l’entreprise ou dans des gîtes loués à proximité des entreprises utilisatrices ; que dans le cadre des prestations de services, la SNC Distillerie X... mettait les travailleurs à disposition des exploitations agricoles et facturait ensuite à ces dernières les “prestations de services” qui étaient établies non sur la base d’un forfait mais en fonction du nombre d’heures effectuées, ce qui ne correspond pas à une véritable prestation de service ; que, de plus, les contrats conclus entre les exploitations agricoles et la SNC X..., qui n’est pas une entreprise de travail temporaire, portaient sur la mise à disposition de personnes n’ayant aucun savoir-faire spécifique par rapport aux salariés des exploitations agricoles ou vinicoles ; qu’en effet, il apparaît que les travailleurs roumains étaient employés comme ouvriers viticoles, tailleurs de vigne ou tireurs de bois et que les prestations réalisées par ces travailleurs ne demandaient pas de savoir-faire ou de technicité particulière, ces derniers se trouvant en outre sous la subordination des exploitations agricoles ou vinicoles ; qu’il résulte d’ailleurs de l’audition des gérants des exploitations agricoles que ceux-ci ont fait appel à la SNC Distillerie X... afin d’obtenir de la main d’oeuvre, sans que les salariés disposent d’un savoir-faire particulier ; que s’agissant des contrats de mandataire commercial, il convient de relever que l’activité d’agent commercial définie par l’article L. 134-1 du code de commerce doit concerner la vente, l’achat, la location de produits ou prestations de service et que cette activité ne peut concerner la mise à disposition de travailleurs temporaires ; que de plus, cette activité d’agent commercial doit être obligatoirement immatriculée au registre du commerce, ce qui n’était pas le cas de la SNC Distillerie X... et n’a fait l’objet d’aucune déclaration auprès des organismes sociaux ; que cette activité de la Z... B... X... consistant à mettre à disposition de la main d’oeuvre étrangère s’analyse en réalité en activité d’agence d’intérim alors que M. Joël X... et son fils M. Claude X... n’étaient pas habilités à exercer une telle activité qui est totalement étrangère à l’objet social de la société ;

”1°) alors que selon l’article L. 1251-2 du code de travail « est un entrepreneur de travail temporaire, toute personne physique ou morale dont l’activité exclusive est de mettre à la disposition temporaire d’entreprises utilisatrices des salariés qu’en fonction d’une qualification convenue elle recrute et rémunère à cet effet » ; qu’en déclarant les prévenus coupables de dissimulation d’activité par dissimulation de l’activité d’entreprise de travail temporaire, quand il résulte de ses propres constatations que les salariés concernés ne disposaient d’aucune qualification convenue, de sorte que l’une des conditions requises pour l’activité litigieuse en activité d’entreprise de travail temporaire faisait défaut, la cour d’appel, qui n’a pas déduit de ses constatations les conséquences légales qui s’en évinçaient, a violé les textes visés au moyen ;

”2°) alors qu’il n’y a point de délit sans intention de le commettre ; que selon l’article L. 8221-3 du code du travail est réputé travail dissimulé par dissimulation d’activité, l’exercice à but lucratif d’une activité de production, de transformation, de réparation ou de prestation de services ou l’accomplissement d’actes de commerce par toute personne qui se soustrait intentionnellement à ses obligations visées par ce texte ; qu’en déclarant les prévenus coupables du chef de dissimulation d’emploi par la dissimulation d’une activité d’entreprise de travail temporaire, sans caractériser l’intention des prévenus de se soustraire intentionnellement aux obligations visées par l’article L.8221-3 du code du travail, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des textes visés au moyen” ;

Attendu que, pour confirmer le jugement en ce qu’il a déclaré les prévenus coupables du délit de travail dissimulé par dissimulation de l’activité d’entreprise de travail temporaire, l’arrêt énonce que MM. X... ont mis à la disposition d’exploitants agricoles ou vinicoles, entre 2009 et 2014, des travailleurs roumains afin qu’ils effectuent des travaux agricoles sur les vignes, de manutention ou de récolte ; que les juges retiennent que ces ouvriers agricoles étaient hébergés par la société Distillerie X... dans des maisons mobiles installées dans l’enceinte de l’entreprise ou dans des gîtes loués à proximité des entreprises utilisatrices ; qu’ils observent que les travailleurs n’avaient pas de savoir faire spécifique et que les prévenus facturaient ces mises à disposition sur la base non d’un forfait mais au prorata du nombre d’heures effectuées par chacun des travailleurs ; qu’ils ajoutent que les exploitations utilisatrices ont reconnu avoir recours à la société Distillerie X... dans le seul but d’obtenir de la main-d’oeuvre sans qualification spécifique ; qu’ils en déduisent que l’activité de ladite société consistant à mettre à la disposition, dans les circonstances précitées, les travailleurs, s’analyse en réalité en une activité dissimulée de travail temporaire exercée par les deux cogérants ;

Attendu qu’en l’état de ces énonciations, déduites de son appréciation souveraine des faits et circonstances de la cause contradictoirement débattus, la cour d’appel, qui a caractérisé, en tous ses éléments, tant matériel qu’intentionnel, le délit prévu à l’article L. 1251-3 du code du travail, a justifié sa décision ;

D’où il suit que le moyen doit être écarté ;

Mais sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 111-3 du code pénal, L. 8224-3-3° du code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi n°201-990 du 6 août 2015, 593 du code pénal, manque de base légale ;

”en ce que l’arrêt attaqué a ordonné à l’encontre de M. Joël X... la confiscation de la somme de 1 900 euros saisie ;

”aux motifs que le jugement sera également confirmé pour ce qui concerne la confiscation à M. Joël X... de la somme de 1 900 euros qui a été saisie et qui était le produit de l’infraction de travail dissimulé ;

”alors que l’article L. 8224-3-3° du code du travail relatif à la peine de confiscation dans sa rédaction applicable à la date des faits, soit entre le 9 novembre 2009 et le 21 juin 2014, prévoyait que « la confiscation des objets ayant servi directement ou indirectement à commettre l’infraction ou qui ont été utilisés à cette occasion, ainsi que de ceux qui en sont le produit et qui appartiennent au condamné » ; qu’en ordonnant la confiscation de la somme de 1 900 euros saisie à l’encontre de M. Joël X... en répression de l’infraction de travail dissimulé par dissimulation de l’activité de travail temporaire en ce qu’elle était le produit de l’infraction intervenue au plus tard au mois de juin 2014, quand la somme en cause appartenait à la Snc Distribution X... au nom de laquelle s’exerçait l’activité litigieuse, la cour d’appel a violé les textes visés au moyen” ;

Vu l’article 593 du code de procédure pénale ;

Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que l’insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;

Attendu que, pour ordonner, à titre de peine complémentaire, la confiscation de la somme de 1 900 euros, l’arrêt énonce que cette somme saisie est le produit de l’infraction de travail dissimulé ;

Mais attendu qu’en l’état de ces seuls motifs, insuffisants à établir que la somme saisie a servi, directement ou indirectement, à commettre les infractions, ou a été utilisée à cette occasion, ou qu’elle en est le produit direct et appartient à M. Joël X..., la cour d’appel n’a pas justifié sa décision au regard de l’article L. 8224-3, 3° du code du travail, visé dans la citation, dans sa version alors applicable ;

D’où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;

Et sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 132-20, alinéa 2, et 132-1 du code pénal, 485, 512 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

”en ce que l’arrêt confirmatif attaqué a déclaré MM. Joël X... et Claude X... coupables de travail dissimulé par dissimulation d’activité et les a condamnés à payer respectivement une amende délictuelle de 20 000 euros et de 10 000 euros ;

”aux motifs qu’afin de sanctionner des faits qui ont été commis de manière continue et qui ont perduré pendant plusieurs années et qui constituent une grave atteinte à l’ordre public économique car contribuant à l’existence et au développement d’une économie souterraine faussant ainsi les règles de l’économie et notamment celles de la concurrence et étant à l’origine d’importantes évasions fiscales et sociales compromettant davantage l’équilibre des comptes nationaux et sociaux en période de difficultés économiques et budgétaires ; qu’il convient de prononcer des sanctions dissuasives à même de prévenir tout risque de récidive ; que c’est pourquoi au regard de l’implication de chacun des prévenus dans les faits qui leur sont reprochés, M. Joël X... ayant manifestement eu un rôle prépondérant et eu égard aux relaxes partielles prononcées, il y a lieu de réformer le jugement déféré sur la peine et de condamner M. Joël X... à la peine de un an d’emprisonnement avec sursis et à la peine de 20 000 euros d’amende ; que pour sa part M. Claude X... sera condamné à la peine de six mois d’emprisonnement avec sursis et à la peine de 10 000 euros d’amende ;

”alors qu’en matière correctionnelle, le juge qui prononce une amende doit motiver sa décision au regard des circonstances de l’infraction, de la personnalité et de la situation personnelle de son auteur en tenant compte de ses ressources et de ses charges ; qu’en condamnant MM. Joël et Claude X... à payer une amende respective de 20 000 euros et de 10 000 euros, sans s’expliquer ni sur les ressources ni sur les charges des prévenus qu’elle devait prendre en considération pour fonder sa décision, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard des textes visés au moyen” ;

Vu l’article 132-20, alinéa 2, du code pénal, ensemble l’article 132-1 du même code et les articles 485, 512 et 593 du code de procédure pénale ;

Attendu qu’en matière correctionnelle, toute peine doit être motivée en tenant compte de la gravité des faits, de la personnalité de leur auteur et de sa situation personnelle ; que le juge qui prononce une amende doit motiver sa décision en tenant compte des ressources et des charges du prévenu ;

Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l’insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;

Attendu que, pour condamner MM. Joël et Claude X..., respectivement à 20 000 euros et 10 000 euros d’amende, l’arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

Mais attendu qu’en se déterminant, sans s’expliquer sur le montant des ressources et des charges des intéressés, la cour d’appel n’a pas justifié sa décision ;

D’où il suit que la cassation est également encourue de ce chef ;

Par ces motifs :

CASSE et ANNULE l’arrêt susvisé de la cour d’appel de Bordeaux, en date du 22 novembre 2016, mais en ses seules dispositions relatives aux peines prononcées, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu’il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d’appel de Bordeaux, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

FIXE à 2 500 euros la somme que MM. X... devront payer à la Caisse de mutualité sociale agricole des Charentes, au titre de l’article 618-1 du code de procédure pénale ;

ORDONNE l’impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d’appel de Bordeaux et sa mention en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-trois janvier deux mille dix-huit ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.

Décision attaquée : Cour d’appel de Bordeaux , du 22 novembre 2016