Père fils - emploi domestique et familial - salarié oui

Cour de cassation

chambre sociale

Audience publique du 7 décembre 1995

N° de pourvoi : 94-10408

Non publié au bulletin

Rejet

Président : M. GELINEAU-LARRIVET, président

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par M. Denis Y..., agissant en sa qualité d’administrateur légal de M.

Raphaël Y..., demeurant 8, rue du ..., en cassation d’un arrêt rendu le 16 novembre 1993 par la cour d’appel de Versailles (5e chambre sociale, section A), au profit :

1 / de M. Jean-Louis Y..., demeurant ...,

2 / de la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) des Hauts-de-Seine, dont le siège est ...,

3 / de l’ Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF) de Paris, dont le siège est ...,

4 / de la Direction régionale des affaires sanitaires et sociales d’Ile-de-France (DRASSIF) , dont le siège est ..., défendeurs à la cassation ;

Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

LA COUR, en l’audience publique du 26 octobre 1995, où étaient présents :

M. Gélineau-Larrivet, président, M. Ollier, conseiller rapporteur, MM. Favard, Gougé, Thavaud, Mme Ramoff, conseillers, MM. Choppin X... de Janvry, Petit, conseillers référendaires, M. Martin, avocat général, M. Richard, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. le conseiller Ollier, les observations de la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, avocat de M. Denis Y..., ès qualités, de Me Roger, avocat de M. Jean-Louis Y..., les conclusions de M. Martin, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :

Attendu que M. Jean-Louis Y... a démissionné le 17 juin 1985 de l’emploi qu’il occupait et qu’’il est alors venu s’établir chez son père, M. Raphaël Y..., âgé de 85 ans et atteint de troubles mentaux ;

qu’en 1987, il a demandé au titre de tierce personne son affiliation au régime général de la sécurité sociale à compter du 1er juillet 1985 ;

que la Caisse primaire d’assurance maladie ayant accueilli favorablement sa demande, cette décision a été contestée par son frère, M. Denis Y..., désigné par jugement du 12 décembre 1988 comme tuteur de son père ;

que la cour d’appel (Versailles, 16 novembre 1993) a rejeté son recours et confirmé la décision d’affiliation ;

Attendu que M. Denis Y... fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir ainsi statué, alors, selon le moyen, d’une part, que l’incapacité naturelle s’analysant en une absence totale de discernement, la personne qui décide unilatéralement de s’installer, pour lui prêter assistance, chez un parent insane d’esprit ne peut, du fait de cette altération de sa volonté, conclure avec lui aucune convention susceptible de la placer en état de subordination ;

qu’en déclarant au contraire qu’il importait peu que le dément n’eût pas eu la conscience suffisante pour s’engager en qualité d’employeur vis-à -vis de son fils, la cour d’appel a violé l’article L. 311-2 du Code de la sécurité sociale ; alors, d’autre part, qu’en se bornant à affirmer que le fils de l’incapable, qui lui apportait une aide ainsi que des soins, aurait exercé une activité profitable à son père et dépassant son devoir d’assistance, sans nullement caractériser l’existence d’un lien de subordination entre le père et le fils dans l’exercice de cette activité, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard du texte précité ;

alors, enfin, qu’en retenant péremptoirement que les avantages (hébergement, nourriture et indemnité mensuelle) reçus par le fils de la part de son père incapable auraient excédé les droits résultant de l’obligation alimentaire entre ascendants et descendants, sans préciser, ni le montant de la somme versée, ni son affectation (dépenses personnelles ou communes) et sans rechercher si une autre personne, dégagée de toute préoccupation d’entraide familiale, aurait accepté de se lier aux mêmes conditions, la cour d’appel n’a pas davantage justifié sa décision au regard du texte précité ;

Mais attendu que la cour d’appel a relevé que M. Jean-Louis Y... avait quitté volontairement son emploi pour venir s’installer chez son père, alors hors d’état d’effectuer seul les actes de la vie courante, et qu’il avait reçu de celui-ci, outre l’hébergement et la nourriture, une indemnité pécuniaire ;

qu’elle a retenu que M. Jean-Louis Y... était allé au-delà de son devoir d’assistance pour exercer une activité profitable à son père dans la dépendance duquel il s’était placé, et que les avantages consentis par son père à M. Y..., allant au-delà de l’obligation d’un père envers son fils, s’analysaient comme la contrepartie des services rendus par celui-ci ;

qu’elle a exactement décidé que s’étaient créées entre le père et le fils des relations d’employeur à salarié, quel que fût l’état mental de M. Raphaël Y... à l’époque de la conclusion du contrat -dont la nullité n’était pas demandée- et que, dès lors, les conditions d’une affiliation de M. Jean-Louis Y... au régime général de la sécurité sociale étaient remplies ;

que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;

Sur la demande formée au titre de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile :

Attendu que M. Denis Y... demande l’allocation à ce titre d’une somme de 12 000 francs ;

Mais attendu qu’il n’y a pas lieu d’accueillir cette demande ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Rejette la demande de M. Denis Y... présentée au titre de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Condamne M. Denis Y..., envers le trésorier-payeur général, pour M. Jean-Louis Y..., et les trois autres défenderesses, aux dépens et aux frais d’exécution du présent arrêt ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par M. le président en son audience publique du sept décembre mil neuf cent quatre-vingt-quinze.

4991

Décision attaquée : cour d’appel de Versailles (5e chambre sociale, section A) du 16 novembre 1993

Titrages et résumés : SECURITE SOCIALE - Assujettissement - Personnes assujetties - Aide d’une tierce personne - Constatations suffisantes.

Textes appliqués :
* Code de la sécurité sociale L311-2