Gérant chaîne hôtelière

Cour de cassation

chambre sociale

Audience publique du 15 décembre 2010

N° de pourvoi : 09-40478

Non publié au bulletin

Cassation partielle

Mme Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président), président

SCP Masse-Dessen et Thouvenin, SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. X... a constitué en juillet 1996 une société dénommée SGHMN, dont il était gérant, qui a conclu le 27 septembre1996 avec la Société d’exploitation hôtelière Paris-La Courneuve exploitant en franchise un hôtel sous l’enseigne ETAP Hôtel, un contrat de gérance-mandat lui confiant la gestion de cet hôtel ; que M. X... a démissionné le 22 avril 2000 ; qu’il a saisi la juridiction prud’homale le 3 mai 2001, pour voir constater l’existence d’un contrat de travail le liant à la Société d’exploitation hôtelière Paris-La Courneuve, réclamer des heures supplémentaires et repos compensateurs, des dommages-intérêts, voir requalifier sa démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse et obtenir les indemnités liées à la rupture ;
Sur le pourvoi incident de la Société d’exploitation hôtelière Paris-La Courneuve :
Sur le moyen unique :
Attendu que la Société d’exploitation hôtelière Paris-La Courneuve fait grief à l’arrêt de constater l’existence d’un contrat de travail la liant à M. X... et de la condamner à payer des dommages-intérêts, alors, selon le moyen :
1°/ que le pouvoir du gérant mandataire de recruter et de licencier le personnel de l’établissement qu’il gère, à ses frais et sous sa responsabilité, sans en référer au mandant, est incompatible avec l’exécution d’un rapport de subordination ; que la société SEHPLC faisait valoir, dans ses conclusions d’appel, que la mandataire gérante disposait contractuellement de la faculté de procéder seule à l’embauche, au licenciement ainsi qu’à la fixation des conditions de travail du personnel qu’elle croirait devoir recruter ce qui excluait tout lien de subordination entre M. X... et elle-même ; qu’en décidant le contraire, la cour d’appel a violé les articles L. 120-3, L. 121-1 du code du travail et les articles 1984 et suivants du code civil ;
2°/ que si l’intégration dans un service organisé constitue un indice du lien de subordination, c’est uniquement lorsque les conditions de travail sont unilatéralement déterminées par le prétendu employeur ; que la société SEHPLC faisait valoir dans ses conclusions d’appel que M. X... disposait de la faculté de fixer lui-même ses horaires de travail, ce qui excluait tout lien de subordination de ce dernier à son égard ; qu’en s’abstenant de s’expliquer sur le pouvoir de M. X... de fixer lui-même ses propres conditions de travail, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 121-1 du code du travail ;
3°/ que le contrat de travail se définit comme l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; qu’en retenant l’existence d’un contrat de travail entre M. X... et la société SEHPLC, sans caractériser un quelconque pouvoir disciplinaire de cette dernière de sanctionner d’éventuels manquements de M. X... à exécuter des ordres et directives susceptibles d’être donnés par elle, la seule faculté reconnue au mandant de résilier le contrat de mandat en cas d’inexécution de ses obligations par le mandataire étant le fait de tout contrat et n’étant pas propre au contrat de travail, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 121-1 du code du travail ;
Mais attendu qu’ayant relevé, par motifs propres et adoptés, que M. X..., après une formation imposée, n’avait pas le choix du mobilier ni du matériel d’exploitation, qu’il ne pouvait modifier les prix des chambres et petits déjeuners, que sa liberté d’engager du personnel était, de fait, limitée par cette politique de prix, que les instructions relatives à l’entretien et la maintenance de l’hôtel ne lui laissaient pas de liberté d’organisation, qu’il ne pouvait contracter pour une somme supérieure à 3 049 euros et que les conditions d’engagement étaient strictement définies, que les horaires d’ouverture et de présence étaient imposés, que la société mandante, qui avait le contrôle de la comptabilité et des données informatisées, avait un pouvoir de sanction pécuniaire et de résiliation de plein droit du contrat, la cour d’appel a pu en déduire que les relations contractuelles caractérisaient un contrat de travail ;

Sur le pourvoi principal de M. X... :
Sur le premier moyen et sur le deuxième moyen, pris en sa seconde branche :
Attendu que ces moyens ne sont pas de nature à permettre l’admission du pourvoi ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l’arrêt de rejeter sa demande de requalification de sa démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que le refus de l’employeur de reconnaître à son salarié le bénéfice d’un contrat de travail et de l’application des dispositions protectrices du code du travail constitue un manquement grave justifiant que lui soit imputée la rupture du contrat de travail à l’initiative du salarié ; qu’en déboutant M. X... de ses demandes de ce chef après avoir constaté que la société SEHPLC avait détourné les dispositions protectrices du code du travail en lui imposant la création d’une société destinée à dissimuler son statut de salarié, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l’article L. 324-10 du code du travail alors en vigueur, actuellement articles L. 8221-3 et L. 8221-5 du code du travail ;
2°/ qu’en disant que la demande de requalification de la rupture n’était liée qu’au non-paiement des heures supplémentaires quand il résulte de ses écritures que sa demande était liée à l’inexécution par la SEHPLC de ses obligations contractuelles, lesquelles comprennent la qualification de contrat de travail et les conséquences qui s’en déduisent, la cour d’appel a modifié les termes du litige et violé l’article 4 du code de procédure civile ;
3°/ que la cassation à intervenir sur le rappel d’heures supplémentaires, l’indemnité pour travail dissimulé et l’indemnité pour repos compensateur sollicités à bon droit par le salarié, emportera la cassation par voie de conséquence du chef du dispositif critiqué par le présent moyen en application des dispositions des articles 624 et 625 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu’ayant retenu qu’aucun des manquements reprochés à l’employeur n’étaient établis, la cour d’appel, devant laquelle M. X... ne s’est pas prévalu du refus de lui reconnaître le bénéfice d’un contrat de travail et des dispositions protectrices du code du travail, a légalement justifié sa décision ;
Sur le quatrième moyen :
Attendu que la cour d’appel n’a pas statué sur la demande en paiement d’une indemnité compensatrice de congés payés ;
Que l’omission de statuer pouvant être réparée par la procédure prévue par l’article 463 du code de procédure civile, le moyen n’est pas recevable ;
Mais sur le deuxième moyen, pris en sa première branche :
Vu l’article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour rejeter la demande d’indemnité pour travail dissimulé la cour d’appel énonce que la demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires n’est pas fondée ;
Qu’en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de M. X... qui invoquaient également le recours à un contrat fictif dissimulant le contrat de travail, la cour d’appel a méconnu les exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a rejeté la demande d’indemnité pour travail dissimulé, l’arrêt rendu le 2 décembre 2008, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris, autrement composée ;
Laisse à chaque partie la charge des dépens afférents à son pourvoi ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne la Société d’exploitation hôtellière Paris-La Courneuve à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze décembre deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils, pour M. X..., demandeur au pourvoi principal
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR débouté Monsieur Sensouksacones X...de ses demandes tendant au paiement d’heures supplémentaires et congés payés afférents, d’une indemnité pour non paiement des heures supplémentaires, d’une indemnité pour absence de prise de repos compensateur et d’une indemnité pour travail dissimulé.
AUX MOTIFS QUE M. X...se prévaut des dispositions de la convention collective de l’hôtellerie pour la période du 14 octobre 1996 au 8 décembre 1997 et de celle des hôtels-cafés-restaurants du 30 avril 1997 pour la période ultérieure, sa position étant celle de directeur d’établissement, cadre, niveau V, échelon 3 définie par cette dernière convention ; qu’il se prévaut du seuil conventionnel de 43 heures hebdomadaires, la majoration pour heures supplémentaires intervenant avec la 44ème heure et soutient qu’il était en permanence à l’Etap Hôtel de la Courneuve, 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, condition impérative imposée par la société SEHPLC et mentionnée à de multiples reprises dans le contrat de gérance-mandat, que sa journée commençait à cinq heures du matin avec la préparation des petits déjeuners et se terminait après 23 heures avec l’arrivée des derniers clients, que de 23 heures à 5 heures, il assurait une permanence de sécurité et s’occupait des clients ayant des problèmes avec le distributeur automatique des chambres, que son temps de travail effectif était de 168 heures par semaine, dont 8 heures devant être majorées de 25 % et 117 heures de 50 %, soit un rappel de 335. 910, 60 euros sur la base d’un taux horaire de 10, 06 euros compte tenu de la rémunération qu’il percevait à hauteur de 1. 873, 61 euros en moyenne pour 186, 33 heures par mois ; que cependant, M. X...ne donne aucun descriptif du temps passé pour chacune de ses tâches ; que la fiche technique produite sur la mise en place des petits déjeuners le matin définit sa durée dans une limite d’une demi-heure de 6 à 6 heure 30 ; que les achats étaient effectués par la société SEHPLC ; que si M. X...disposait d’un logement dans l’hôtel, il ne démontre pas avoir dû rester à la disposition de la société SEHPLC jour et nuit, même pour assurer une permanence de sécurité ; que M. X...ne précise pas les heures d’ouverture du service d’accueil de l’hôtel ; que le concept de l’enseigne Etap Hôtel est “ la contribution active du client “ dont l’accueil se limite à l’encaissement du prix de la chambre retenue le plus souvent à l’avance ou à l’aide d’un distributeur, contre remise d’une carte magnétique pour l’entrée dans celle-ci, l’entrée et la sortie de l’hôtel ; que M. X...ne justifie pas de son temps passé à la réception des livraisons quotidiennes, à la mise en place des chambres ; que la cour en l’absence d’éléments précis, concrets et pertinents n’a pas la conviction au sens de l’article L. 3171-4 du code du travail que M. X...ait eu à accomplir des heures au-delà de la durée conventionnelle du travail ; que les demandes de rappels de salaires pour heures supplémentaires et celles incidentes en paiement de dommages-intérêts, d’indemnités pour absence de repos compensateurs, travail dissimulé, ne sont pas fondées
ET AUX MOTIFS éventuellement adoptés QUE la charge de la preuve est partagée entre les parties pour établir la réalité des heures supplémentaires effectuées ; que les décomptes présentées par le requérant n’apparaissent pas plausibles en ce qu’ils sont manifestement excessifs et artificiels ; que, particulièrement, ils ne tiennent pas compte que dans son organisation celui-ci était aidé par des remplaçants, hôteliers intérimaires ou assistants de direction ; que les éléments produits par les parties ne permettent pas d’établir le bien fondé des demandes concernant le temps de travail effectivement réalisé ; que celles-ci seront donc écartées et subséquemment celle concernant te travail dissimulé.
ALORS QUE la preuve des heures de travail effectuées n’incombe spécialement à aucune des parties ; qu’en retenant, pour débouter Monsieur Sensouksacones X...de ses demandes relatives aux heures supplémentaires effectuées qu’il « ne donne aucun descriptif du temps passé pour chacune de ses tâches », qu’il « ne démontre pas avoir dû rester à la disposition de la société SEHPLC jour et nuit, même pour assurer une permanence de sécurité », « ne précise pas les heures d’ouverture du service d’accueil de l’hôtel », « ne justifie pas de son temps passé à la réception des livraisons quotidiennes, à la mise en place des chambres » et que « la Cour en l’absence d’éléments précis, concrets et pertinents n’a pas la conviction au sens de l’article L. 3171-4 du code du travail que M. X...ait eu à accomplir des heures au-delà de la durée conventionnelle du travail », la Cour d’appel a fait peser la charge de la preuve des heures de travail effectuées sur le seul salarié en violation de l’article L. 212-1-1 du Code du travail alors en vigueur, actuellement article L-3171-4 du Code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR débouté Monsieur Sensouksacones X...de sa demande en paiement d’une indemnité pour travail dissimulé.
AUX MOTIFS QUE les demandes de rappels de salaires pour heures supplémentaires et celles incidentes en paiement de dommages-intérêts, d’indemnités pour absence de repos compensateurs, travail dissimulé, ne sont pas fondées.
ET AUX MOTIFS éventuellement adoptés QUE la charge de la preuve est partagée entre les parties pour établir la réalité des heures supplémentaires effectuées ; que les décomptes présentées par le requérant n’apparaissent pas plausibles en ce qu’ils sont manifestement excessifs et artificiels ; que, particulièrement, ils ne tiennent pas compte que dans son organisation celui-ci était aidé par des remplaçants, hôteliers intérimaires ou assistants de direction ; que les éléments produits par les parties ne permettent pas d’établir le bien fondé des demandes concernant le temps de travail effectivement réalisé ; que celles-ci seront donc écartées et subséquemment celle concernant te travail dissimulé.
ALORS QU’est réputé travail dissimulé par dissimulation d’activité, l’exercice à but lucratif d’une activité de production, de transformation, de réparation ou de prestation de services ou l’accomplissement d’actes de commerce par toute personne qui, se soustrayant intentionnellement à ses obligations n’a pas procédé aux déclarations qui doivent être faites aux organismes de protection sociale ou à l’administration fiscale en vertu des dispositions légales en vigueur ; qu’en déboutant Monsieur Sensouksacones X...de sa demande en paiement d’une indemnité pour travail dissimulé après avoir constaté que la société SEHPLC avait détourné les dispositions protectrices du Code du travail en imposant à son salarié la création d’une société destinée à dissimuler son statut de salarié, la Cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l’article L. 324-10 du Code du travail alors en vigueur, actuellement articles L. 8221-3 et L. 8221-5 du Code du travail.
ET ALORS en tout cas QUE constitue le délit de travail dissimulé le fait pour l’employeur de mentionner sur le bulletin de paie un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement effectué ; que la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation, relatif aux heures supplémentaires non rémunérées emportera, par application des articles 624 et 625 du Code de procédure civile, cassation par voie de conséquence du chef de l’indemnité pour travail dissimulé.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR débouté Monsieur Sensouksacones X...de ses demandes tendant à la requalification de la rupture de son contrat de travail en licenciement sans cause réelle et sérieuse et au paiement d’une indemnité pour rupture abusive du contrat de travail, d’une indemnité de licenciement, d’une indemnité compensatrice de préavis et des congés payés y afférents.
AUX MOTIFS QUE M. X...a démissionné par lettre du 19 avril 2000 ; que dans le même temps, était envisagé de lui confier la gérance d’une nouvelle unité hôtelière à Epinay-sur-Seine ; que M. X...se prévaut du fait que sa lettre de démission fait état de conditions de travail particulièrement difficiles ; qu’il fonde sa demande d’application du droit du licenciement sur le non paiement d’heures supplémentaires ; que la réalité d’un manquement de l’employeur n’étant pas démontré et M. X...n’articulant aucun argument sur les conditions difficiles qu’il a évoquées, sa démission ne peut être imputée à la société SEHPLC ; que de même, n’est pas fondé le moyen tiré d’une mutation déguisée ; qu’à la date de la démission donnée en effet, les propositions d’une nouvelle affectation n’était, selon les correspondances versées, qu’envisagée ; que la découverte de malversations de M. X...est par ailleurs postérieure au départ de celui-ci de l’hôtel “ Etap Hôtel “ de la Courneuve puisque la plainte avec constitution de partie civile de la société SEHPLC est en date du 20 novembre 2000 et se fonde sur des rapprochements bancaires effectués après le départ de M. X...sur la période de mars à avril 2000 ; que les demandes au titre des effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ne sont pas fondées.
ET AUX MOTIFS éventuellement adoptés QUE lorsqu’un salarié démissionne en raison de faits qu’il reproche à son employeur, cette rupture constitue une prise d’acte et produit les effets sort d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit dans le cas contraire, d’une démission ; que monsieur X...a démissionné le 19 avril 2000 en ces termes : “ A l’aube du 3ème millénaire, et âpres avoir passé 4 années à l’ETAP HÔTEL de La Courneuve, dans des conditions de travail particulièrement difficiles, je ne souhaite plus continuer et vous présente donc ma démission. Dans le souci de ne pas trop perturber l’exploitation de l’hôtel, je désirerai être libéré de mes obligations pour le 31 mai 2000 … “ ; que le salarié argue à la fois de ce qu’il aurait démissionné en raison de la pénibilité du travail tout en soutenant qu’en réalité il devait conclure un nouveau contrat de mandat gérance dans un autre établissement à Epinay-sur-Seine et qu’il démissionnait pour obtenir cette mutation ; que cette argumentation apparaît contradictoire, aucune explication ne permettant de comprendre les raisons pour lesquelles le salarié aurait souhaité voir perpétuer, au sein d’un autre établissement, des conditions contractuelles qu’il trouvait, à juste titre, critiquables ; qu’en toute hypothèse, le courrier du 22 avril 2000 du président de la société SEHPLC ne peut s’analyser en un engagement de celle-ci à conclure un contrat de gérance mandat pour un établissement ETAP HÔTEL prévu à Épinay-sur-Seine ;

qu’enfin il n’est pas établi, compte tenu du contexte de la démission et de faits d’abus de confiance qui ont donné lieu é une procédure pénale, que la rupture soit imputable à la société défenderesse ; que la demande de requalification de la démission en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi que les demandes subséquentes ne seront donc pas accueillies.
ALORS QUE le refus de l’employeur de reconnaître à son salarié le bénéfice d’un contrat de travail et de l’application des dispositions protectrices du Code du travail constitue un manquement grave justifiant que lui soit imputée la rupture du contrat de travail à l’initiative du salarié ; qu’en déboutant Monsieur Sensouksacones X...de ses demandes de ce chef après avoir constaté que la société SEHPLC avait détourné les dispositions protectrices du Code du travail en lui imposant la création d’une société destinée à dissimuler son statut de salarié, la Cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l’article L. 324-10 du Code du travail alors en vigueur, actuellement articles L. 8221-3 et L. 8221-5 du Code du travail.
QU’en tout cas, en disant que la demande de requalification de la rupture n’était liée qu’au non paiement des heures supplémentaires quand il résulte de ses écritures que sa demande était liée à l’inexécution par la SEHPLC de ses obligations contractuelles, lesquelles comprennent la qualification de contrat de travail et les conséquences qui s’en déduisent, la Cour d’appel a modifié les termes du litige et violé l’article 4 du Code de procédure civile
ET ALORS QUE la cassation à intervenir sur le rappel d’heures supplémentaires, l’indemnité pour travail dissimulé et l’indemnité pour repos compensateur sollicités à bon droit par le salarié, emportera la cassation par voie de conséquence du chef du dispositif critiqué par le présent moyen en application des dispositions des articles 624 et 625 du Code de procédure civile.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR débouté Monsieur X... de ses demandes en paiement d’un solde d’indemnité compensatrice de congés payés.
SANS MOTIF
ALORS QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; qu’en déboutant Monsieur Sensouksacones X...de ce chef de demande sans donner aucun motif à sa décision, la Cour d’appel a méconnu les exigences de l’article 455 du Code de procédure civile.
Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la Société d’exploitation hôtellière Paris-La Courneuve, demanderesse au pourvoi incident
IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’avoir constaté l’existence d’un contrat de travail entre la société d’exploitation hôtellerie Paris La Courneuve (SEHPLC) et Monsieur Sensouksacones X..., d’avoir condamné la SEHPLC à payer à M. X... la somme de 25. 000 € à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral et d’avoir ordonné à la société SEHPLC de remettre à M. X... des bulletins de salaire, un certificat de travail et une attestation Assédic conformes au jugement et présent arrêt ;
AUX MOTIFS QU’Il s’évince des clauses du contrat de gérance mandat conclu entre la société SEHPLC et la société SGHMN que l’acte est conditionné par la qualité de gérant de M. X... de la seconde, la direction effective et personnelle par lui de cette société, sa qualité d’associé, que le contrat ne peut être transmis ni cédé et devait prendre fin de plein droit sans préavis si l’intéressé perdait son mandat de gérant ou sa qualité d’associé ou devait ne plus exercer les fonctions de gérant pour quelque raison que ce soit ; qu’obligation était faite à M. X... d’occuper personnellement les locaux mis à sa disposition ; que par suite la clause selon laquelle la société SGHMN accepte de gérer et d’assurer sous sa propre responsabilité la direction de l’unité hôtelière confiée est liée en réalité à l’implication personnelle et exclusive de M. X... ; … que si un « statut d’autonomie » est avancé, est précisé « le respect des normes d’exploitation garantes de l’homogénéité du produit Etap Hôtel » ; que la mission donnée est de gérer et administrer l’hôtel, développer la clientèle mais avec engagement d’assurer ou faire assurer une permanence de sécurité, accueillir le client et le guider dans l’utilisation des automatismes, assurer ou faire assurer le ménage et l’entretien technique courant, la réception des livraisons quotidiennes et la préparation du petit déjeuner, l’achat des produits « pour effectuer les prestations incombant à SEHPLC » ; qu’ensuite le mandataire ne devait disposer d’aucune possibilité de modifier le prix des chambres et petits déjeuners ; qu’interdiction lui est faite de contracter pour le compte de la mandante pour une somme supérieure à 20. 000 francs ; que lui est imposé de ne contracter que pour la gestion courante de l’hôtel ; qu’il lui est interdit tout engagement sur des annonces publicitaires ou des insertions dans des guides et revues, de prendre des engagements ou faire des règlements à son profit, sauf accord préalable de la mandante ; que si est reconnu à la mandataire la faculté de recruter, de fixer les conditions de travail, elle est rendue responsable du respect des lois sociales, des conditions de travail et de l’hygiène et de la sécurité ; que si la mandataire fixe les conditions d’exploitation de l’hôtel, il lui est interdit de modifier les locaux ; que tout le matériel et meubles lui sont fournis ; qu’il lui est imposé de respecter les normes impératives d’Etat Hôtel selon un livret intégré au contrat que la mandante se réserve de modifier ; que lui sont imposées les modalités des saisies informatiques des ventes et dépenses ; que sont affirmées l’acceptation du contrôle par le franchiseur des normes qualité, l’autorisation de consultation par celui-ci des livres de ventes, des statistiques quotidiennes ; qu’est déterminé le principe d’un commissionnement par référence au nombre de chambres vendues au cours de l’année, aux différents chiffres d’affaires ; que dans l’hypothèse où les commissions versées par la mandante ne suffiraient pas à couvrir les charges du mandat, il est stipulé que celle-ci verserait à la mandataire une commission complémentaire destinée à les équilibrer, y compris la rémunération du gérant ; qu’est reconnu à chacune des parties le droit de résilier la convention à tout moment, moyennant un préavis de trois mois ; que la société mandante se reconnaît le droit de résilier la convention à tout moment, notamment en cas de restitution de recettes, de non enregistrement des sommes lui revenant sur son compte, en cas d’abandon d’exploitation personnelle du gérant ; que les pièces produites aux débats démontrent que M. X... n’a eu aucune autonomie lors de l’exécution du contrat ; que lui ont été imposés notamment le respect de l’esprit de la chaîne, la démarche à suivre vis-à-vis de la clientèle, … le règlement des fermetures des portes, le respect des règles d’hygiène avec interdiction « d’improviser », les horaires d’accueil et de présence, le nom des fournisseurs, les modes de préparation du petit-déjeuner, la responsabilité du ménage, du blanchissage, des espaces verts, la mise en place d’un cahier d’entretien ; qu’en conséquence de l’ensemble des éléments qui précèdent sont avérés tant le caractère fictif de l’intervention de la société SGHMN dans l’exploitation de l’Etap Hôtel de la Courneuve au cours de la période litigieuse, la société SEHPLC n’ayant entendu n’en confier la gestion qu’à M. X..., que le caractère subordonné du travail de celui-ci au regard de la formation imposée, du cadre, des normes et procédures de gestion dictées, des contrôles opérés et du maintien du pouvoir de sanction, notamment en cas d’abandon de l’exploitation par l’intéressé personnellement ; que la disposition du jugement ayant qualifié la relation contractuelle entre les parties de contrat de travail ne peut être que confirmée ;
ALORS D’UNE PART QUE le pouvoir du gérant mandataire de recruter et de licencier le personnel de l’établissement qu’il gère, à ses frais et sous sa responsabilité, sans en référer au mandant, est incompatible avec l’exécution d’un rapport de subordination ; que la société SEHPLC faisait valoir, dans ses conclusions d’appel (p. 6 et 7), que la mandataire gérante disposait contractuellement de la faculté de procéder seule à l’embauche, au licenciement ainsi qu’à la fixation des conditions de travail du personnel qu’elle croirait devoir recruter ce qui excluait tout lien de subordination entre M. X... et elle-même ; qu’en décidant le contraire, la Cour d’appel a violé les articles L 120-3, L 121-1 du Code du travail et les articles 1984 et suivants du Code civil ;
ALORS D’AUTRE PART QUE si l’intégration dans un service organisé constitue un indice du lien de subordination, c’est uniquement lorsque les conditions de travail sont unilatéralement déterminées par le prétendu employeur ; que la société SEHPLC faisait valoir dans ses conclusions d’appel (p. 6 et 7) que M. X... disposait de la faculté de fixer lui-même ses horaires de travail, ce qui excluait tout lien de subordination de ce dernier à son égard ; qu’en s’abstenant de s’expliquer sur le pouvoir de M. X... de fixer lui-même ses propres conditions de travail, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L 121-1 du Code du travail ;
ALORS ENFIN QUE le contrat de travail se définit comme l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; qu’en retenant l’existence d’un contrat de travail entre M. X... et la société SEHPLC, sans caractériser un quelconque pouvoir disciplinaire de cette dernière de sanctionner d’éventuels manquements de M. X... à exécuter des ordres et directives susceptibles d’être donnés par elle, la seule faculté reconnue au mandant de résilier le contrat de mandat en cas d’inexécution de ses obligations par le mandataire étant le fait de tout contrat et n’étant pas propre au contrat de travail, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L 121-1 du Code du travail.

Décision attaquée : Cour d’appel de Paris du 2 décembre 2008