Discothèque

Le : 15/07/2013

Cour de cassation

chambre criminelle

Audience publique du 11 décembre 2012

N° de pourvoi : 11-88643

Non publié au bulletin

Rejet

M. Louvel (président), président

Me Foussard, SCP Boutet, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

"-" M. Mohamed X...,

contre l’arrêt de la cour d’appel d’ORLÉANS, chambre correctionnelle, en date du 31 octobre 2011, qui, pour travail dissimulé, infraction à la législation sur les débits de boissons et contraventions au code du travail, l’a condamné à six mois d’emprisonnement avec sursis, 1 500 euros d’amende ainsi qu’à cinq amendes d’un montant de 100 euros chacune et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. X..., qui est de nationalité marocaine, a été poursuivi devant la juridiction correctionnelle à la suite d’un contrôle effectué notamment par des fonctionnaires des services fiscaux et de l’inspection du travail le 28 novembre 2008, pour avoir, à cette date, en qualité de gérant de fait de la société Z64, ouvert un débit de boissons à consommer sur place sans justifier de la nationalité française ou de celle d’un Etat membre de la Communauté européenne ou d’un autre Etat partie à l’accord sur l’Espace économique européen, ainsi que pour travail dissimulé par dissimulation de salariés et contraventions au code du travail ; que le tribunal ayant dit la prévention établie, M. X...et le ministère public ont relevé appel de la décision ;

En cet état :

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 8224-1, L. 8224-3, L. 8224-4, L. 8221-1, L. 8221-3, L. 8221-4, L. 8221-5 du code du travail, des articles R. 4745-3, R. 4624-10, R. 4125-9, R. 7745-3, R. 4124-16, R. 4125-1 du code de la santé publique, ainsi que des articles 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs ;

” en ce que l’arrêt attaqué a déclaré M. X...coupable d’embauche de salariés sans déclaration préalable, d’embauche de salariés sans visite médicale préalable, d’embauche de salariés sans visite médicale annuelle et l’ouverture de débit de boissons par une personne étrangère à l’Union européenne et l’a condamné en répression à diverses sanctions ;

” aux motifs que Mme Y..., présente dans la discothèque lors du contrôle, a spontanément indiqué ne pas détenir sur place les documents qui lui étaient demandés et a téléphoné à M. X...qui, selon elle, les détenait. M. X...est arrivé dans la discothèque un peu plus tard et a expliqué s’être fait voler récemment les documents en question ; entendue le 8 puis le 29 décembre 2008, Mme Y...a précisé que les documents qui lui avaient été demandés étaient en possession du comptable, auprès de qui ils avaient été déposés par M. X..., qui s’occupait de tout, elle-même exploitant un autre établissement (restaurant « l’Auberge ... », selon les précisions fournies à l’audience par la prévenue) ; elle a indiqué que M. X...avait procuration sur le compte de la société et émettait les chèques ; que s’il est mentionné dans l’attestation du directeur de l’agence Blois Château de la Banque Populaire Val-de-France datée du 9 mars 2011, produite aux débats devant la cour, que M. X...n’a pas de procuration sur le compte de la SARL Z 64, il n’en ressort pas pour autant que l’intéressé n’en disposait pas en décembre 2008 et antérieurement ; qu’entendu le 16 décembre 2008 par les fonctionnaires de police du commissariat de Blois, M. X..., figurant sur le registre du personnel depuis le 1er avril 2003 en qualité de directeur, en réponse à la question « quelle est la différence entre directeur et gérant ? » a répondu « le gérant s’occupe normalement de tout ce qui est administratif, mais moi je fais les deux » ; entendu le 12 janvier 2009 par ces mêmes fonctionnaires, M. X..., en réponse à la question « puisque vous êtes défait le véritable responsable de l’établissement, pourquoi n’avoir pas mis l’établissement à votre nom ? », a répondu « c’est parce que je n’ai pas la nationalité française » ; qu’alors que les services de l’URSSAF du Loir-et-Cher avaient adressé le 1er décembre 2008 une convocation au représentant légal de la société Z 64, c’est M. X...qui s’est présenté le 5 décembre suivant pour répondre à leurs questions et leur présenter les documents visés dans cette convocation ; qu’alors que les services de l’inspection du travail avaient adressé le 1er décembre 2008 une convocation au représentant légal de la société Z 64, c’est M. X...qui s’est présenté le 8 décembre suivant pour répondre à leurs questions et leur présenter les documents visés dans cette convocation ; qu’il convient, dans ces conditions, de retenir M. X..., gérant de fait de la société Z 64 (Z comme X...et 64 comme 1964 année de naissance du prévenu), dans les liens de la prévention et de confirmer le jugement déféré sur la déclaration de culpabilité ; que la décision entreprise doit être également confirmée sur la peine d’emprisonnement sanctionnant le délit d’exécution d’un travail dissimulé par dissimulation de salariés et sur les peines d’amende s’agissant des contraventions, qui constituent une juste application de la loi pénale ; que s’agissant du délit d’exercice de la profession de débitant de boissons à consommer sur place par un étranger à l’union européenne, qui était reproché au prévenu et dont il a été déclaré coupable par la juridiction du premier degré, une amende d’un montant de 1 500 euros sera prononcée à son encontre, l’infraction pouvant être reprochée à l’exploitant de fait ;

” 1) alors que, ne peut être reconnu comme dirigeant de fait que celui dont il est établi qu’il a le pouvoir d’engager et de représenter la société et d’exercer les attributions dévolues au dirigeant de droit ; que faute de constater que tel était le cas en l’espèce de M. X..., les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des textes susvisés ;

” 2) alors que, une personne ne peut se voir imputer des infractions, en tant que dirigeant de fait d’une société, que si les juges du fond précisent à quelles dates les infractions ont été commises, se prononcent sur la période au cours de laquelle la personne en cause a assumé la direction de fait et s’assurent que les infractions, eu égard à leurs dates, relèvent de cette période ; que faute de s’être expliqués sur ces différents points, les juges du fond ont entaché leur décision d’une insuffisance de motifs ;

” 3) alors que s’agissant d’infraction d’ouverture de débit de boissons à consommer sur place par une personne étrangère à l’Union européenne, la prévention visait l’ouverture du débit de boissons ; qu’en s’abstenant de rechercher si M. X...pouvait être regardé comme dirigeant de fait à la date de l’ouverture du débit de boissons, les juges du fond ont de nouveau entaché leur décision d’une insuffisance de motifs “ ;

Sur le moyen pris en ses deux premières branches :

Attendu que, pour confirmer le jugement entrepris en ses dispositions relatives au délit de travail dissimulé par dissimulation de salariés et aux contraventions au code du travail, l’arrêt retient que M. X...a répondu aux convocations adressées au représentant légal de la société par plusieurs administrations, qu’il a procédé au recrutement du personnel oeuvrant au sein de celle-ci et dont il a organisé le travail et qu’enfin, au cours de l’enquête, il a lui-même admis être le véritable responsable de l’établissement ;

Attendu qu’en l’état de ces motifs exempts d’insuffisance comme de contradiction et déduits de son appréciation souveraine des faits et circonstances de la cause et des éléments de preuve contradictoirement débattus, la cour d’appel a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués par le demandeur ;

Sur le moyen pris en sa troisième branche :

Attendu que, pour confirmer le jugement entrepris en ses dispositions relatives au délit d’ouverture irrégulière d’un débit de boissons prévu et réprimé par l’article L. 3352-2 du code de la santé publique et par l’article L. 3332-3 du même code, dans sa rédaction applicable lors des faits poursuivis, l’arrêt retient que M. X...a personnellement assuré l’exploitation de l’établissement en cause, alors qu’il n’avait pas le pouvoir de le faire en raison de sa nationalité ;

Attendu qu’en l’état de ces motifs, la cour d’appel a justifié sa décision ; que, contrairement à ce que soutient le demandeur, qui reproche vainement aux juges du second degré de ne pas avoir recherché s’il avait la qualité de gérant de fait de la société Z 64 à la date de l’ouverture du débit de boissons en cause, le délit prévu par l’article L. 3352-2 du code de la santé publique est constitué non seulement au début d’une telle activité, mais également au jour où l’exercice de ladite activité est constaté ;

D’où il suit que le moyen ne saurait être admis ;

Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l’article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Barbier conseiller rapporteur, Mme Guirimand conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : M. Bétron ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;

Décision attaquée : Cour d’appel d’Orléans , du 31 octobre 2011