Mise à disposition - transfert du lien de subordination oui

Cour de cassation

chambre sociale

Audience publique du 15 décembre 2016

N° de pourvoi : 15-23761

ECLI:FR:CCASS:2016:SO02319

Non publié au bulletin

Cassation partielle

Mme Vallée (conseiller le plus ancien faisant fonction de président), président

SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que Mme X..., fonctionnaire de l’Education nationale, a été détachée auprès de la Mutuelle générale de l’éducation nationale (MGEN) à compter de septembre 2009, en dernier lieu en qualité de directrice adjointe de la section de la Nièvre, son détachement ayant été maintenu par son administration jusqu’au 31 août 2014 ; qu’après un entretien du 27 janvier 2012, la MGEN a notifié à Mme X..., par lettre du 8 mars 2012, qu’elle sollicitait du ministère de l’Education nationale la fin de ce détachement à effet au plus tard au 31 août 2012, avec dispense d’activité rémunérée ; que par arrêté du 20 mars 2012, Mme X... a été réintégrée dans son corps d’origine et affectée à un poste de titulaire remplaçant d’école maternelle ;
Sur le pourvoi principal de la MGEN :
Sur le premier moyen :
Attendu que la MGEN fait grief à l’arrêt de la condamner à payer des dommages-intérêts au titre de la rupture ainsi que de la perte de chance de recevoir une retraite supplémentaire, alors, selon le moyen :
1°/ que le fonctionnaire détaché est soumis aux règles régissant la fonction qu’il exerce par l’effet de son détachement, à l’exception des dispositions des articles L. 1234-9, L. 1243-1-1, L. 1243-4 et L. 1243-6 du code du travail ou de toute disposition législative, réglementaire ou conventionnelle prévoyant le versement d’indemnités de licenciement ou de fin de carrière et qu’il peut être mis fin à la convention de détachement avant le terme de l’arrêté le prononçant à la demande de l’une ou de l’autre des parties ; qu’en allouant des dommages-intérêts de rupture anticipée de fin de convention pour dépassement du délai d’un mois prévu à l’article L. 1332-1 du code du travail aux motifs inopérants que l’organisme de détachement exerçait sur l’agent un lien de subordination, la cour d’appel a violé l’article 45, alinéa 5, de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, l’article 24 du décret n° 85-986 du 16 septembre 1985, ensemble l’article 6 de la convention de partenariat relative à la participation de fonctionnaires et agents relevant du ministère chargé de l’Education nationale au fonctionnement du groupe MGEN ;
2°/ qu’il ne doit résulter de la réparation du préjudice ni perte ni profit ; qu’ayant constaté que la fonctionnaire dont le détachement avait cessé avant son terme avait été rémunérée par son corps d’origine sans solution de continuité et que le différentiel de rémunération correspondait à des sujétions propres aux fonctions exercées dans le cadre du détachement, ce dont il résultait que l’agent n’avait éprouvé aucun préjudice, la cour d’appel a violé le principe susvisé ;
Mais attendu qu’ayant, d’une part, retenu à juste titre que la lettre en date du 8 mars 2012, par laquelle la MGEN a informé Mme X... de sa décision de faire application des dispositions réglementaires et contractuelles prévoyant un terme anticipé au détachement, devait être analysée comme une lettre de licenciement dans la mesure où cette décision de l’employeur mettait fin unilatéralement à une relation de travail salariée entre l’intéressée et la MGEN et que celle-ci ne pouvait renoncer par avance à ses droits de contester le bien-fondé ou la régularité d’une telle décision de l’employeur, d’autre part, estimé qu’il s’agissait d’un licenciement pour motif disciplinaire, la cour d’appel, qui a souverainement apprécié le préjudice subi, a légalement justifié sa décision ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que le rejet du premier moyen prive ce moyen de portée ;
Sur le troisième moyen :
Attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé, qui n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi incident de Mme X... :
Vu l’article L. 1234-5 du code du travail, ensemble l’article 45 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant statut général des fonctionnaires ;
Attendu que pour débouter Mme X... de sa demande en paiement d’indemnités compensatrice de préavis et de congés payés, l’arrêt retient qu’il est établi par les pièces produites aux débats qu’elle a été rémunérée jusqu’au 31 mars 2012 par la MGEN puis par son administration d’origine, qu’il n’est pas allégué, dans le cadre de la demande d’indemnité de préavis, de perte de rémunération ni sollicité de demande au titre d’un différentiel de rémunération ;
Qu’en statuant ainsi, alors qu’en application de l’article 45 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant statut général des fonctionnaires, le fonctionnaire détaché auprès d’une personne morale de droit privé pour exercer des fonctions dans un rapport de subordination est lié à cette personne morale par un contrat de travail de droit privé et que lorsque la personne morale de droit privé demande à l’autorité administrative compétente de mettre fin au détachement, cette rupture s’analyse en un licenciement régi, à l’exception des articles L. 1243-6, L. 1243-1 et L. 1234-9, par les dispositions du code du travail, notamment les articles L. 1234-5, L. 1232-2 et suivants de ce code, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il déboute Mme X... de sa demande en paiement d’indemnités compensatrice de préavis et de congés payés, l’arrêt rendu le 19 juin 2015, entre les parties, par la cour d’appel de Bourges ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel d’Orléans ;
Condamne la MGEN aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne la MGEN à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze décembre deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour la Mutuelle générale de l’éducation nationale (MGEN)
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir condamné la MGEN au paiement à Mme X... de la somme de 43 291, 78 € de dommages et intérêts en réparation du préjudice et de la somme de 3 500 € au titre d’une perte de chance de recevoir une retraite complémentaire ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE, Sur la nature du contrat de travail, Mme X... a été détachée à compter de septembre 1989 auprès de la MGEN en qualité de déléguée stagiaire ; que son détachement a été renouvelé en septembre 2010 en qualité de déléguée de section et en septembre 2011 pour une durée de trois ans jusqu’au 31 août 2014 ; que par courrier en date du 8 mars 2012, il a été mis fin à son détachement avec effet au 31 août 2012 avec dispense d’activité à compter de la réception du courrier ; Que l’article 45 de la loi du 11 janvier 1984 portant statut de la fonction publique dispose que « le fonctionnaire détaché est soumis aux règles régissant la fonction qu’il exerce par l’effet de son détachement à l’exception des dispositions des articles L. 1234-9, L. 1243-1 à L. 1243-4 et 1243-6 du code du travail ou de toute disposition législative ou réglementaire ou conventionnelle prévoyant le versement d’indemnités de licenciement ou de fin de carrière ; Qu’il est constant que la MGEN est un organisme de droit privé, à but non lucratif, régi par les dispositions des livres II et III du code de la mutualité ; Que contrairement à ce que soutient la MGEN, et ainsi que l’on retenu les premiers juges par des motifs pertinents que la cour adopte expressément, Mme X... a effectué au profit de la MGEN une prestation de travail et a perçu de cette dernière, en contrepartie, une rémunération ; qu’il ressort des mails, comptes rendus, évaluations, produits aux débats que sa prestation de travail s’est exercée sous la direction de la MGEN dans le cadre d’un lien de subordination exclusif d’un mandat salarié ou d’un mandat politique délégué ou encore d’un contrat d’engagement militant ; Que par application des dispositions précitées, Mme X... s’est donc trouvée soumise aux règles de droit commun dans le cadre de ses relations contractuelles avec la MGEN, organisme de droit privé, peu important à cet égard que la salariée continuerait à bénéficier de ses droits à avancement et à retraite dans son corps d’origine et également d’une réintégration à l’issue du détachement ; Que dès lors, la décision entreprise en ce qu’elle a retenu que Mme X... était liée à la MGEN par un contrat de travail de droit commun, doit être confirmée ; Que, Sur la rupture, au regard de ce qui précède, il ne peut être mis fin au contrat de travail de Mme X... qu’à l’issue de la période de détachement initialement fixé pour 3 ans ou en application des règles de droit commun ; Que si l’article 24 du décret du 16 septembre 1985, prévoit la possibilité d’une « fin anticipée » d’un détachement, à l’initiative de l’organisme d’accueil ou de l’administration d’origine, le courrier en date du 8 mars 2012 par lequel la MGEN a informé Mme X... de sa décision de faire application de ces dispositions réglementaires et contractuelles, prévoyant un tel terme anticipé, doit être analysé comme une lettre de licenciement dans la mesure où cette décision de l’employeur met fin unilatéralement à une relation de travail salariée entre l’intéressée et la MGEN, au motif d’une attitude irrespectueuse envers le directeur de la section notamment le 5 janvier 2012, d’un refus de s’engager sur les propositions de la commission de suivi et d’accompagnement des centres de service de septembre 2011 et de propos humiliants et agressions verbales répétés à l’encontre d’une salariée de la section ; Qu’en effet, la circonstance que la convention, signée par l’intéressée, puisse prévoir une telle possibilité de terme anticipé du détachement, à la libre disposition des parties, ne saurait être analysée comme établissant l’accord donné par la salariée à une future rupture alors que celle-ci ne pouvait renoncer par avance à ses droits de contester le bien-fondé ou la régularité d’une telle décision de l’employeur ; Que dès lors, s’agissant d’une procédure de licenciement, celle-ci doit respecter les dispositions légales ; Que l’article L. 332-2 du code du travail dispose que lorsque l’employeur envisage de prendre une sanction, il convoque le salarié... la sanction ne peut intervenir moins d’un jour franc ni plus d’un mois après le jour fixé pour l’entretien ; Qu’en l’espèce la MGEN, après un entretien préalable fixé au 27 janvier 2012 a, par courrier en date du 8 mars 2012, mis fin au détachement de Mme X... dans le cadre d’une mesure disciplinaire pour cause réelle et sérieuse au regard des motifs invoqués ; Que le non-respect du délai édicté par l’article L. 1332-2 du code du travail rend le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse ; que le jugement déféré sera également confirmé de ce chef ; Que, Sur l’indemnisation, il n’est pas contesté que Mme X... a été, à l’issue du courrier mettant fin à son détachement, dispensée d’activité au sein de la MGEN avec indemnisation ; Que le courrier du 8 mars 2012 précisait que la mesure prendra effet au plus tard au 31 août 2012 ; qu’il est également constant que Mme X... a été réintégrée dans son corps d’origine par arrêté du 20 mars 2012 à effet du 1er avril 2012 ; Qu’il est établi par les pièces produites aux débats qu’elle a été rémunérée jusqu’au 31 mars 2012 par la MGEN puis par son administration d’origine ; Qu’il n’est pas allégué, dans le cadre de la demande d’indemnité de préavis, de perte de rémunération ni sollicité de demande au titre d’un différentiel de rémunération ; Que dès lors Mme X... sera déboutée de sa demande ; que la décision déférée sera réformée en ce sens ; Que du fait de son licenciement abusif Mme X... a subi une perte de rémunération certes liée à des sujétions particulières, mais à laquelle elle pouvait prétendre jusqu’à la fin de son détachement ; que l’indemnité allouée par les premiers juges indemnise équitablement Mme X... de ce chef ; Que le jugement entrepris sera confirmé ; Que, Sur la perte de chance de complément retraite, du fait de la rupture du contrat de travail avant le terme du détachement a nécessairement fait perdre à la salariée des chances de complément retraite ; Que ce préjudice a été équitablement indemnisé par les premiers juges ; que le jugement entrepris sera confirmé de ce chef ; ET AUX MOTIFS RÉPUTÉS ADOPTÉS QUE, Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique ; Vus les articles L. 1411-2, L. 1152-1, L. 1152-4, L. 1154-1, L. 1226-4, L. 1235-1 et L. 1332-2 et suivants du code du travail, I. Sur l’application du code du travail et sur le contrat de travail, le conseil constate qu’en application de la loi susvisée, le fonctionnaire détaché est soumis aux règles régissant la fonction qu’il exerce par l’effet de son détachement, et qu’au surplus, l’article L. 1411-2 du code du travail donne compétence au conseil de prud’hommes pour régler les différends et litiges des personnels des services publics lorsqu’ils sont employés dans les conditions du droit privé ; Que le groupe Mutuelle générale de l’éducation nationale (MGEN), soumise aux dispositions des livres II et III du code de la mutualité, est un organisme de droit privé ; Que Mme X..., fonctionnaire de l’Éducation nationale, a été détachée auprès de la MGEN pour effectuer différentes missions opérationnelles au service de la qualité et de l’efficacité de la mutuelle dans des conditions similaires à celles d’un salarié titulaire d’un contrat de travail relevant du droit commun privé, bénéficiaire du statut de cadre et titulaire d’une délégation de son employeur ; Qu’il est établi en l’espèce l’existence : – d’une prestation de travail au profit d’un employeur et sous sa direction, – du versement en contrepartie de ce travail d’un salaire direct et d’avantages indirects, dont un complément de retraite, constituant des éléments constitutifs ou différés de ce salaire, – du fait que le salarié devait rendre compte de l’exécution de ses missions devant des organes décisionnels de l’employeur (Comité de Section et Commission permanente), établissant ainsi également l’existence d’un lien de subordination ; Que le conseil estime ainsi, aux vues de l’ensemble des débats et des pièces produites, que Mme X... bénéficiait du statut de salarié et qu’elle était liée de fait par un contrat de travail avec la MGEN, et ce, en dépit des diverses analyses et dénominations originales sans consistance juridique proposées pour tenter de s’y opposer, dont celle retenue notamment dans le « Contrat d’Engagement Militant » signé entre les parties, et des restrictions contraires à ce statut de salarié, avancées de façon inopérante notamment par le document intitulé « Statut du Délégué de Section » ; Que, II. Sur le licenciement, le conseil estime, au vu de l’ensemble des débats et des pièces produites que l’activité salariée de Mme X... au profit de la MGEN dans le cadre de son « détachement » était régie par l’ensemble des dispositions du code du travail, à l’exclusion des seules exceptions expressément énumérées par l’article 45 de la loi susvisée ; Que le conseil estime que la MGEN est à l’origine de la rupture de ce contrat de travail de par la notification qu’elle a faite de la demande de réintégration de Mme X... auprès de son administration d’origine, et que cette rupture doit s’analyser en un licenciement soumis aux dispositions communes du code du travail, sauf exception précitées ; Que le conseil constate que cette notification de licenciement excède largement le délai prescrit d’un mois maximum après l’entretien préalable et qu’en conséquence ce licenciement est dépourvu de motif réel et sérieux ; Qu’au-delà, le conseil estime, au vu de l’ensemble des débats et des pièces produites, que la réalité et le sérieux des griefs reprochés à Mme X... dans le courrier de licenciement ne sont pas établis et qu’ils ne constituent pas, même globalement, un motif suffisant au licenciement ; Que le conseil conviendra à cet égard de donner droit aux demandes de Mme X..., et de condamner la MGEN à lui payer les sommes suivantes, que le conseil estime devoir fixer en sommes brutes, soumises à l’ensemble des éventuelles dispositions sociales et fiscales applicables, à savoir :
"-" 12 979, 65 € au titre d’indemnité de préavis,

"-" 1 297, 96 € au titre des congés payés afférents,

"-" 5 703, 16 € à titre d’indemnité compensatrice de congés payés,

"-" 43 291, 78 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice ;
Que, III. Sur la perte de chance de complément de retraite, le conseil estime, au vu de l’ensemble des débats, des pièces produites et de l’âge de Mme X..., que la perte de chance d’un complément de retraite est rapportée et qu’elle doit être estimée, sur la base de 150 € annuels, à 3 500 € de dommages et intérêts, somme au versement de laquelle sera condamnée la MGEN au profit de Mme X... ;
1) alors que le fonctionnaire détaché est soumis aux règles régissant la fonction qu’il exerce par l’effet de son détachement, à l’exception des dispositions des articles L. 1234-9, L. 1243-1-1, L. 1243-4 et L. 1243-6 du code du travail ou de toute disposition législative, réglementaire ou conventionnelle prévoyant le versement d’indemnités de licenciement ou de fin de carrière et qu’il peut être mis fin à la convention de détachement avant le terme de l’arrêté le prononçant à la demande de l’une ou de l’autre des parties ; qu’en allouant des dommages et intérêts de rupture anticipée de fin de convention pour dépassement du délai d’un mois prévu à l’article L. 1332-1 du code du travail aux motifs inopérants que l’organisme de détachement exerçait sur l’agent un lien de subordination, la cour d’appel a violé l’article 45, alinéa 5, de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, l’article 24 du décret n° 85-986 du 16 septembre 1985, ensemble l’article 6 de la Convention de partenariat relative à la participation de fonctionnaires et agents relevant du ministère chargé de l’Éducation nationale au fonctionnement du groupe Mutuelle générale de l’Éducation nationale ;
2) alors au demeurant qu’il ne doit résulter de la réparation du préjudice ni perte ni profit ; qu’ayant constaté que la fonctionnaire dont le détachement avait cessé avant son terme avait été rémunérée par son corps d’origine sans solution de continuité, et que le différentiel de rémunération correspondait à des sujétions propres aux fonctions exercées dans le cadre du détachement, ce dont il résultait que l’agent n’avait éprouvé aucun préjudice, la cour d’appel a violé le principe susvisé.
DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir condamné la MGEN au paiement à Mme X... de la somme 5 703, 13 € à titre d’indemnité compensatrice de congés payés ;
AUX MOTIFS QUE Mme X... sollicite une indemnité compensatrice de congés payés ; qu’il est constant qu’elle était fondée à prétendre à 3, 5 jours par mois de congés payés au titre de l’année 2011 soit 42 jours par an dont il n’est pas contesté qu’elle avait utilisé à la date de sa réintégration 13 jours soit un solde de 29 jours ; que si selon le statut de délégué de section « la gestion anticipée doit permettre à chacun de prendre l’intégralité des congés dont il bénéficie : aucune indemnité de congés payés compensant la non-prise des congés n’est versée », cette disposition n’a pas vocation à recevoir application dès lors qu’est intervenue une rupture du contrat de travail dans le cadre d’un licenciement dénué de cause réelle et sérieuse ;
alors que la cassation du chef du dispositif jugeant que le licenciement était dénué de cause réelle et sérieuse entraînera par voie de conséquence l’annulation du chef de dispositif allouant une indemnité pour congés payés non pris, en application de l’article 624 du code de procédure civile.
TROISIÈME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir condamné la MGEN au paiement à Mme X... de la somme 2 000 € à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral ;
AUX MOTIFS PROPRES QU’en application de l’article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que selon l’article L. 1154-1 du code du travail instituant la procédure légale à suivre en la matière, en cas de litige relatif à l’application de l’article L. 1152-1, dès lors que le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement, il incombe à la partie défenderesse, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que pour étayer sa demande, Mme X... produit notamment un mail d’information sur le secret professionnel, duquel il ressort qu’elle n’en a pas été destinataire et diverses attestations desquelles il ressort que M. Y... a fait preuve de violence verbale à son égard et qu’elle était tenue à l’écart des informations courantes de la section (Mme Z...) ; qu’elle subissait des conflits au quotidien et qu’elle avait informé ses responsables de la situation dont elle était victime (Mme A...) ; qu’« ils n’avaient qu’une idée : virer Mme X... » à l’encontre de laquelle étaient tenus des « propos désobligeants » (attestation B...) ; que la MGEN ne produit aucune pièce justifiant son comportement ; que dès lors, c’est à bon droit que les premiers juges ont estimé établi le harcèlement moral invoqué, qu’ils ont fait une exacte application du préjudice de la salariée ; que la décision sera également confirmée sur ce point ; ET AUX MOTIFS RÉPUTÉS ADOPTÉS QUE le conseil estime au vu de l’ensemble des débats et des pièces produites qu’il est établi la matérialité des différents faits concordants de harcèlement moral à l’encontre de Mme X..., faits auxquels la MGEN n’apporte pas suffisamment d’éléments s’opposant à la présomption de harcèlement et que dès lors ces faits sont établis ; que bien que ces faits aient été portés à la connaissance de la MGEN, celle-ci n’a pas prévenu ou fait cesser ces agissements autrement que par le licenciement de la harcelée, et qu’ils ont eu un retentissement durable sur la santé de Mme X... ;
alors que le harcèlement moral suppose la répétition d’agissements ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu’en retenant pour juger que Mme X... avait subi des faits de harcèlement, des attestations faisant état d’impressions subjectives, de propos désobligeant et de mise à l’écart, sans constater aucun fait ni propos ni précis ni datés, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail.

Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour Mme X...
Le moyen fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’AVOIR débouté Madame X... de sa demande de condamnation de la MGEN à lui payer la somme de 12. 979, 65 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis et la somme de 1. 297, 96 euros au titre des congés payés afférents ;
AUX MOTIFS QU’il n’est pas contesté que Mme X... a été, à l’issue du courrier mettant fin à son détachement, dispensée d’activité au sein de la MGEN avec indemnisation ; que le courrier du 8 mars 2012 précisait que la mesure prendra effet au plus tard au 31 août 2012 ; qu’il est également constant que Mme X... a été réintégrée dans son corps d’origine par arrêté du 20 mars 2012 à effet du 1er avril 2012 ; qu’il est établi par les pièces produites aux débats qu’elle a été rémunérée jusqu’au 31 mars 2012 par la MGEN puis par son administration d’origine ; qu’il n’est pas allégué, dans le cadre de la demande d’indemnité de préavis, de perte de rémunération ni sollicité de demande au titre d’un différentiel de rémunération ; que dès lors Mme X... sera déboutée de sa demande ; que la décision déférée sera réformée en ce sens ;
ALORS QUE le fonctionnaire détaché est soumis aux règles régissant la fonction qu’il exerce par l’effet de son détachement, à l’exception des dispositions des articles L. 1234-9, L. 1243-1 à L. 1243-4 et L. 1243-6 du code du travail ou de toute disposition législative, réglementaire ou conventionnelle prévoyant le versement d’indemnités de licenciement ou de fin de carrière ; qu’il en résulte que le fonctionnaire détaché auprès d’une personne morale de droit privé pour exercer des fonctions dans un rapport de subordination est lié à cette personne morale par un contrat de travail de droit privé ; que lorsque la personne morale de droit privé demande à l’autorité administrative compétente de mettre fin au détachement avant le terme, cette rupture s’analyse en un licenciement régi, sauf les exceptions précitées, par les dispositions du code du travail, notamment l’article L. 1234-5 du code du travail ; que lorsque le salarié n’exécute pas le préavis, il a droit, sauf s’il a commis une faute grave, à une indemnité compensatrice ; que l’inexécution du préavis n’entraîne aucune diminution des salaires et avantages que le salarié aurait perçus s’il avait accompli son travail jusqu’à l’expiration du préavis, indemnité de congés payés comprise ; qu’en décidant que Mme X... ne pouvait pas prétendre à l’indemnité compensatrice de préavis après avoir pourtant constaté qu’elle avait été licenciée dans le cadre d’une mesure disciplinaire pour cause réelle et sérieuse, aux motifs inopérants qu’elle a été rémunérée jusqu’au 31 mars 2012 par la MGEN puis par son administration d’origine et qu’elle n’a pas allégué de perte de rémunération ni sollicité de demande au titre d’un différentiel de rémunération, la cour d’appel a violé l’article 45 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’Etat, l’article L. 1234-5 du code du travail, ensemble l’article 10 de la convention relative à la participation de fonctionnaires et agents de l’Education Nationale au fonctionnement du groupe Mutuelle Générale de l’Education Nationale.

Décision attaquée : Cour d’appel de Bourges , du 19 juin 2015