Mise à disposition - transfert du lien de subordination non

Cour de cassation

chambre sociale

Audience publique du 14 avril 2016

N° de pourvoi : 15-12195

ECLI:FR:CCASS:2016:SO00836

Non publié au bulletin

Rejet

M. Ludet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président), président

SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Douai, 28 novembre 2014), rendu sur renvoi après cassation (Soc. 3 mai 2012, n° 10-27. 461) que M. X..., engagé le 12 mai 2003 en qualité de directeur commercial par la société Adhecoup, filiale de la société CFL, a également travaillé pour le compte d’une autre filiale de cette dernière, la société Longavenne distribution dont le fonds de commerce a été cédé à la société ASM ; que la société Adhecoup a proposé à M. X..., le 18 octobre 2006, une modification de son contrat de travail qu’il a refusée ; que, licencié le 30 décembre 2006 pour motif économique, il a saisi la juridiction prud’homale de diverses demandes dirigées contre la société Adhecoup et la société Longavenne distribution ; que M. Z... a été désigné en qualité de mandataire ad hoc de celle-ci ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l’arrêt de décider que la société Longavenne distribution n’était pas son coemployeur et de le débouter de ses demandes à ce titre, alors, selon le moyen :
1°/ que deux sociétés d’un même groupe sont coemployeurs du salarié qui a été engagé par l’une d’elles s’il existe entre ces sociétés une confusion d’intérêts, d’activités et de direction se manifestant par une immixtion de l’une dans la gestion économique et sociale de l’autre ; qu’en écartant le coemploi quand il résultait de ses constatations que les sociétés Adhecoup et Longavenne avaient le même dirigeant, M. Pierre Y..., lequel avait, suivant une pratique courante de gestion du personnel des deux entreprises, engagé M. X... au nom de la société Adhecoup pour qu’il exerce des fonctions de directeur commercial au sein des deux sociétés à la fois, la cour d’appel qui n’a pas tiré les conséquence légales de ses constatations desquelles il résultait que les sociétés avaient une gestion économique et sociale commune, a violé l’article L. 1221-1 du code du travail ;
2°/ que l’appartenance des sociétés à un même groupe suffit à caractériser une communauté d’intérêts et d’activités ; qu’en jugeant que M. X... ne justifiait pas d’une communauté d’intérêts et d’activités des sociétés Adhecoup et Longavenne distribution au motif qu’elles n’avaient pas le même objet social ni exactement la même activité, quand il résultait de ses constatations qu’elles appartenaient au même groupe, la cour d’appel a violé l’article L. 1221-1 du code du travail ;
3°/ qu’à supposer que l’existence d’une convention de prêt de main d’oeuvre à but non lucratif suffise à écarter la qualité de coemployeur de l’entreprise utilisatrice, la cour d’appel qui a exclu en l’espèce la qualité de coemployeur de la société Longavenne Distribution au motif que M. X... avait travaillé pour elle dans le cadre d’une convention de prêt de main d’oeuvre à but non lucratif qui avait été conclu avec la société Adhecoup, quand elle avait constaté que ladite convention qui avait pour effet de modifier le contrat de travail de M. X... sans son accord préalable lui était dès lors inopposable, a violé l’article L. 1221-1 du code du travail ;
Mais attendu qu’une société faisant partie d’un groupe ne peut être considérée comme un co-employeur à l’égard du personnel employé par une autre, hors l’existence d’un lien de subordination, que s’il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l’état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d’intérêts, d’activités et de direction se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale de cette dernière ;
Et attendu qu’ayant retenu que M. X..., salarié de la société Adhecoup, avait été mis à disposition de la société Longavenne distribution par une convention de prêt de main d’oeuvre à but non lucratif, peu important que cette convention ait été déclarée inopposable à l’intéressé, ayant constaté que les deux sociétés avaient des domaines d’activité distincts et estimé que la preuve n’était pas rapportée d’une confusion d’intérêts et d’une quelconque immixtion de la société Longavenne distribution dans la gestion économique et sociale de la société Adhecoup, la cour d’appel n’encourt pas les griefs du moyen ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l’arrêt de décider que la société Longavenne distribution n’était pas son employeur conjoint et de le débouter de ses demandes à ce titre, alors, selon le moyen :
1°/ que le lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; que le salarié qui exécute ses fonctions pour le compte de deux sociétés distinctes, sous les directives, le contrôle et le pouvoir disciplinaire de leur dirigeant commun, est sous la subordination juridique des deux sociétés qui sont ses employeurs conjoints ; qu’en jugeant l’inverse, la cour d’appel a violé l’article L. 1221-1 du code du travail ;
2°/ que le versement d’une rémunération est un critère accessoire du contrat de travail salarié dont le critère déterminant est l’existence d’un lien de subordination juridique ; qu’en jugeant que M. X... ne pouvait être le salarié de la société Longavenne distribution au motif qu’il percevait sa rémunération de la société Adhecoup, quand ce constat ne permettait pas d’exclure l’existence d’un lien de subordination juridique, la cour d’appel a violé l’article L. 1221-1 du code du travail ;
3°/ que la société utilisatrice pour le compte de laquelle un salarié d’une entreprise prêteuse travaille dans le cadre d’une convention de prêt de main d’oeuvre à but non lucratif, est son coemployeur dès lors que l’application de la convention de prêt de main d’oeuvre emporte modification du contrat de travail d’origine conclu entre le salarié et la société prêteuse ; qu’en jugeant en l’espèce que la société Longavenne distribution ne pouvait être le coemployeur de M. X... au motif qu’il y avait exercé ses fonctions de directeur commercial fournitures industrielles dans le cadre d’une convention de prêt de main d’oeuvre à but non lucratif, quand elle avait constaté que cette convention modifiait son contrat de travail d’origine de sorte qu’elle lui était inopposable, la cour d’appel qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations a violé l’article L. 1221-1 du code du travail ;
Mais attendu qu’ayant estimé qu’aucun élément ne permettait d’établir la prescription d’ordres et de directives par la société Longavenne distribution ni un contrôle de l’exécution du travail par cette société, la cour d’appel en a exactement déduit que M. A... n’était pas titulaire d’un contrat de travail avec la société Longavenne distribution ; que le moyen, critiquant une motivation surabondante en ses deuxième et troisième branches, n’est pas fondé ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l’arrêt de le débouter de sa demande en paiement d’heures supplémentaires, alors, selon le moyen, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié d’étayer sa demande par la production d’éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l’employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; que constituent des éléments de preuve suffisamment précis pour étayer la demande du salarié, les attestations de ses collègues de travail sur sa durée quotidienne de travail et le décompte qu’il a réalisé des heures supplémentaires dont il demande le paiement ; qu’en déboutant M. X... de ses demandes malgré l’absence de fourniture par l’employeur des éléments de nature à justifier des horaires qu’il avait effectivement réalisés, au motif qu’il n’avait pas fait la démonstration d’une prestation continue de travail effectif sur la base d’une amplitude journalière de 10h30 de travail, quand elle avait relevé qu’il avait produit aux débats les attestations de salariés sur son amplitude quotidienne de travail de 8 heures à 18 heures 30 et un décompte précis des heures qu’il prétendait avoir réalisées et auquel l’employeur pouvait répondre, la cour d’appel a violé l’article L. 3171-4 du code du travail ;
Mais attendu qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié d’étayer sa demande par la production de tous éléments suffisamment précis pour permettre à l’employeur de répondre en apportant, le cas échéant, la preuve contraire ;
Et attendu qu’appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve produits devant elle, la cour d’appel, qui a relevé que les attestations ne contenaient aucune indication sur les jours de travail concernés et que M. X..., qui se bornait à effectuer un calcul sur la base d’une amplitude de travail quotidienne théorique de 10h30, ne produisait aucun relevé des heures effectuées par semaine civile et/ ou aucun agenda retraçant les jours et heures travaillés, de nature à permettre d’établir un décompte conforme aux dispositions de l’article L. 3121-20 du code du travail, a estimé que ces éléments n’étaient pas suffisamment précis pour étayer la demande ; que le moyen n’est pas fondé ;
Et attendu que le rejet du troisième moyen prive le quatrième moyen de portée ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. A... aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze avril deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt attaqué, d’AVOIR confirmé le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Beauvais le 12 novembre 2009 en ce qu’il avait dit que la société Longavenne Distribution n’avait pas la qualité de co-employeur et d’AVOIR débouté M. X... de l’ensemble de ses demandes à ce titre,
AUX MOTIFS QU’un salarié est en droit de démontrer que l’employeur désigné par son contrat ou tout autre document n’est pas son unique employeur, en apportant la preuve de l’existence d’employeurs-conjoints ou d’un co-emploi ; qu’en l’espèce et nonobstant l’absence de contrat de travail écrit, il est constant que Monsieur X... a été embauché à compter du 12 mai 2003 par la Société ADHECOUP en qualité de Directeur commercial ; qu’il est également constant que cette société fait partie d’un Groupe, chapeauté par la Société holding CFL, qui contrôle également la Société LONGAVENNE DISTRIBUTION, ces entreprises ayant pour objet, en ce qui concerne la société ADHECOUP, la commercialisation notamment d’abrasifs, outils coupants et machines outils, alors que la Société LONGAVENNE DISTRIBUTION a pour objet la fourniture de pièces et équipements pour l’automobile ; que l’organigramme versé aux débats et les explications des parties permettent en outre de relever que les Sociétés ADHECOUP et LONGAVENNE ont le même dirigeant, Monsieur Pierre Y..., la Société holding CFL étant quant à elle dirigée par Monsieur Jean-Pierre Y..., président du directoire ; qu’il est établi que nonobstant son embauche initiale par la Société ADHECOUP, Monsieur X... a travaillé pour le compte de la Société LONGAVENNE DISTRIBUTION, au moins à compter du 1’juin 2003, étant observé que le cadre juridique de cette activité apparaît correspondre à une convention de prêt de main d’oeuvre à but non lucratif, ce qui résulte : des termes du courrier adressé par la Société ADHECOUP à Monsieur X... le 18 octobre 2006, qui indique très clairement : “ Bien que salarié de la société ADHECOUP, vous occupiez les fonctions de Directeur commercial fournitures industrielles au sein des sociétés ADHECOUP et LONGAVENNE DISTRIBUTION (...) “, des termes des Conventions de prestations de service en date du 1er juin 2003 versées aux débats tant par la Société ADHECOUP que par l’AGS-CGEA d’AMIENS, qui, au-delà des termes employés et de l’absence de signature du représentant légal de la Société LONGAVENNE DISTRIBUTION, mettent en évidence la fourniture au profit de cette dernière de “ prestations d’assistance marketing, stratégique et commerciale notamment en faisant appel aux compétences techniques de Monsieur Bruno X... ” ; que l’attestation de Monsieur Michel B..., selon lequel “ il n’y a jamais eu de convention de mise à disposition d’un collaborateur au sein du groupe “ est contredite par la teneur des conventions précitées alors que ce témoin omet de préciser, ainsi que le relève l’AGS-CGEA d’AMIENS sans être utilement contesté sur ce point, qu’il n’était plus associé depuis plus de trois ans lorsque l’embauche de Monsieur X... a eu lieu le 12 mai 2003 ; que si l’existence d’une situation de coemploi est indépendante de celle d’un lien de subordination juridique, encore faut-il qu’il soit établi par celui qui se prévaut d’une telle situation qu’il existe entre les sociétés concernées et au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l’état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d’intérêts, d’activités et de direction se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale de l’entreprise, ces trois critères étant cumulatifs ; qu’en l’espèce, Monsieur X... affirme que les sociétés Adhecoup et Longavenne Distribution ont des dirigeants communs, des activités communes et que les salariés sont “ interchangeables “ ; qu’il ajoute qu’il disposait d’une carte de visite qui le présentait comme Directeur commercial de la Société Longavenne ; que ces éléments, outre le fait qu’ils ne s’avèrent que partiellement exacts notamment en ce qui concerne l’identité d’objet social des sociétés ADHECOUP et LONGAVENNE DISTRIBUTION qui ne résulte d’aucune des pièces produites par le salarié, alors que les extraits K bis, courriers et documents commerciaux (cf cartes de visite-pièce appelant n° 23) versés aux débats mettent au contraire en évidence des domaines d’activité distincts (d’une part la commercialisation d’abrasifs, outils coupants et machines outils, d’autre part la fourniture de pièces et équipements pour l’automobile), ce qui ne permet pas de retenir comme établi le critère de la confusion des activités, sont en tout état de cause impropres à établir une confusion d’intérêts et une quelconque immixtion de la société Longavenne Distribution dans la gestion économique et sociale de la société Adhecoup ; que l’existence d’une situation de co-emploi n’est donc pas établie ; que Monsieur X... se prévaut à titre subsidiaire de l’existence d’une situation de “ coemployeurs “ en vertu de laquelle il aurait été lié par un lien de subordination juridique avec la société LONGAVENNE DISTRIBUTION, conjointement à la relation contractuelle de travail qui l’unissait à la société ADHECOUP ; qu’il y a contrat de travail lorsqu’une personne s’engage à travailler pour le compte et sous la subordination d’une autre, moyennant rémunération ; qu’en l’espèce, s’il apparaît qu’indépendamment de la question de l’opposabilité d’une telle situation au salarié qui sera examinée ci-après, Monsieur X... a été mis à la disposition de la société LONGAVENNE DISTRIBUTION, aucun élément ne permet d’établir la prescription d’ordres et de directives par cette dernière ainsi qu’un contrôle de l’exécution du travail par ladite société ; qu’à cet égard, les témoignages dont se prévaut le salarié sont relatifs aux seuls horaires de travail de l’intéressé et ne comportent aucune indication de nature à caractériser la réalisation du travail effectué par Monsieur X... pour le compte de la société LONGAVENNE dans le cadre d’une relation hiérarchique caractérisée par un contrôle du travail et l’exercice d’un pouvoir disciplinaire ; qu’il apparaît que Monsieur X... a toujours été rémunéré par la seule société ADHECOUP pour ses fonctions de directeur commercial, qu’il a exercées, ce qui n’est pas contesté et ce qui résulte des indications précises données par l’employeur dans son courrier précité du 18 octobre 2006, à raison de 30 % de son temps pour le compte de cette dernière et 70 % pour le compte de la Société LONGAVENNE DISTRIBUTION ; que la situation de “ co-employeurs “ n’est donc pas plus établie que celle d’un co-emploi, faute pour le salarié de rapporter la preuve de l’existence d’un lien de subordination juridique ayant existé avec la société LONGAVENNE DISTRIBUTION ; qu’il n’en reste pas moins que Monsieur X... a été mis à la disposition de cette dernière société par son employeur, la Société ADHECOUP ; que toutefois et ainsi que l’observe à juste titre Monsieur X..., la convention de mise à disposition dont se prévaut l’employeur et qui emportait une modification substantielle de son contrat de travail, n’est pas opposable au salarié, faute d’avoir été soumise à son accord écrit, étant observé que l’intéressé n’est pas partie aux deux conventions susvisées du 1er juin 2003 et qu’aucun avenant contractuel n’apparaît avoir été signé ; que l’absence d’opposition et/ ou de réclamation formalisée par le salarié avant l’engagement de la présente instance ne saurait, en l’absence d’écrit signé des deux parties au contrat de travail, caractériser, une quelconque acceptation de la modification contractuelle ainsi intervenue ; que dans ces conditions, la Société ADHECOUP est seule tenue de répondre des engagements contractuels de travail qui ont été souscrits ;
1°) ALORS QUE deux sociétés d’un même groupe sont co-employeurs du salarié qui a été engagé par l’une d’elles s’il existe entre ces sociétés une confusion d’intérêts, d’activités et de direction se manifestant par une immixtion de l’une dans la gestion économique et sociale de l’autre ; qu’en écartant le coemploi quand il résultait de ses constatations que les sociétés Adhecoup et Longavenne avaient le même dirigeant, M. Pierre Y..., lequel avait, suivant une pratique courante de gestion du personnel des deux entreprises, engagé M. X... au nom de la société Adhecoup pour qu’il exerce des fonctions de directeur commercial au sein des deux sociétés à la fois, la cour d’appel qui n’a pas tiré les conséquence légales de ses constatations desquelles il résultait que les sociétés avaient une gestion économique et sociale commune, a violé l’article L. 1221-1 du code du travail ;
2°) ALORS QUE l’appartenance des sociétés à un même groupe suffit à caractériser une communauté d’intérêts et d’activités ; qu’en jugeant que M. X... ne justifiait pas d’une communauté d’intérêts et d’activités des sociétés Adhecoup et Longavenne Distribution au motif qu’elles n’avaient pas le même objet social ni exactement la même activité, quand il résultait de ses constatations qu’elles appartenaient au même groupe, la cour d’appel a violé l’article L. 1221-1 du code du travail ;
3°) ALORS QU’à supposer que l’existence d’une convention de prêt de main d’oeuvre à but non lucratif suffise à écarter la qualité de co-employeur de l’entreprise utilisatrice, la cour d’appel qui a exclu en l’espèce la qualité de coemployeur de la société Longavenne Distribution au motif que M. X... avait travaillé pour elle dans le cadre d’une convention de prêt de main d’oeuvre à but non lucratif qui avait été conclu avec la société Adhecoup, quand elle avait constaté que ladite convention qui avait pour effet de modifier le contrat de travail de M. X... sans son accord préalable lui était dès lors inopposable, a violé l’article L. 1221-1 du code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt attaqué, d’AVOIR confirmé le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Beauvais le 12 novembre 2009 en ce qu’il avait dit que la société Longavenne Distribution n’avait pas la qualité d’employeur conjoint de M. X... et d’AVOIR débouté M. X... de l’ensemble de ses demandes à ce titre,
AUX MOTIFS QU’un salarié est en droit de démontrer que l’employeur désigné par son contrat ou tout autre document n’est pas son unique employeur, en apportant la preuve de l’existence d’employeurs-conjoints ou d’un co-emploi ; qu’en l’espèce et nonobstant l’absence de contrat de travail écrit, il est constant que Monsieur X... a été embauché à compter du 12 mai 2003 par la Société ADHECOUP en qualité de Directeur commercial ; qu’il est également constant que cette société fait partie d’un Groupe, chapeauté par la Société holding CFL, qui contrôle également la Société LONGAVENNE DISTRIBUTION, ces entreprises ayant pour objet, en ce qui concerne la société ADHECOUP, la commercialisation notamment d’abrasifs, outils coupants et machines outils, alors que la Société LONGAVENNE DISTRIBUTION a pour objet la fourniture de pièces et équipements pour l’automobile ; que l’organigramme versé aux débats et les explications des parties permettent en outre de relever que les Sociétés ADHECOUP et LONGAVENNE ont le même dirigeant, Monsieur Pierre Y..., la Société holding CFL étant quant à elle dirigée par Monsieur Jean-Pierre Y..., président du directoire ; qu’il est établi que nonobstant son embauche initiale par la Société ADHECOUP, Monsieur X... a travaillé pour le compte de la Société LONGAVENNE DISTRIBUTION, au moins à compter du 1’juin 2003, étant observé que le cadre juridique de cette activité apparaît correspondre à une convention de prêt de main d’oeuvre à but non lucratif, ce qui résulte : des termes du courrier adressé par la Société ADHECOUP à Monsieur X... le 18 octobre 2006, qui indique très clairement : “ Bien que salarié de la société ADHECOUP, vous occupiez les fonctions de Directeur commercial fournitures industrielles au sein des sociétés ADHECOUP et LONGAVENNE DISTRIBUTION (...) “, des termes des Conventions de prestations de service en date du 1er juin 2003 versées aux débats tant par la Société ADHECOUP que par l’AGS-CGEA d’AMIENS, qui, au-delà des termes employés et de l’absence de signature du représentant légal de la Société LONGAVENNE DISTRIBUTION, mettent en évidence la fourniture au profit de cette dernière de “ prestations d’assistance marketing, stratégique et commerciale notamment en faisant appel aux compétences techniques de Monsieur Bruno X... ” ; que l’attestation de Monsieur Michel B..., selon lequel “ il n’y a jamais eu de convention de mise à disposition d’un collaborateur au sein du groupe “ est contredite par la teneur des conventions précitées alors que ce témoin omet de préciser, ainsi que le relève l’AGS-CGEA d’AMIENS sans être utilement contesté sur ce point, qu’il n’était plus associé depuis plus de trois ans lorsque l’embauche de Monsieur X... a eu lieu le 12 mai 2003 ; que si l’existence d’une situation de coemploi est indépendante de celle d’un lien de subordination juridique, encore faut-il qu’il soit établi par celui qui se prévaut d’une telle situation qu’il existe entre les sociétés concernées et au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l’état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d’intérêts, d’activités et de direction se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale de l’entreprise, ces trois critères étant cumulatifs ; qu’en l’espèce, Monsieur X... affirme que les sociétés Adhecoup et Longavenne Distribution ont des dirigeants communs, des activités communes et que les salariés sont “ interchangeables “ ; qu’il ajoute qu’il disposait d’une carte de visite qui le présentait comme Directeur commercial de la Société Longavenne ; que ces éléments, outre le fait qu’ils ne s’avèrent que partiellement exacts notamment en ce qui concerne l’identité d’objet social des sociétés ADHECOUP et LONGAVENNE DISTRIBUTION qui ne résulte d’aucune des pièces produites par le salarié, alors que les extraits K bis, courriers et documents commerciaux (cf cartes de visite-pièce appelant n° 23) versés aux débats mettent au contraire en évidence des domaines d’activité distincts (d’une part la commercialisation d’abrasifs, outils coupants et machines outils, d’autre part la fourniture de pièces et équipements pour l’automobile), ce qui ne permet pas de retenir comme établi le critère de la confusion des activités, sont en tout état de cause impropres à établir une confusion d’intérêts et une quelconque immixtion de la Société Longavenne Distribution dans la gestion économique et sociale de la société Adhecoup ; que l’existence d’une situation de co-emploi n’est donc pas établie ; que Monsieur X... se prévaut à titre subsidiaire de l’existence d’une situation de “ co-employeurs “ en vertu de laquelle il aurait été lié par un lien de subordination juridique avec la société LONGAVENNE DISTRIBUTION, conjointement à la relation contractuelle de travail qui l’unissait à la société ADHECOUP ; qu’il y a contrat de travail lorsqu’une personne s’engage à travailler pour le compte et sous la subordination d’une autre, moyennant rémunération ; qu’en l’espèce, s’il apparaît qu’indépendamment de la question de l’opposabilité d’une telle situation au salarié qui sera examinée ci-après, Monsieur X... a été mis à la disposition de la société LONGAVENNE DISTRIBUTION, aucun élément ne permet d’établir la prescription d’ordres et de directives par cette dernière ainsi qu’un contrôle de l’exécution du travail par ladite société ; qu’à cet égard, les témoignages dont se prévaut le salarié sont relatifs aux seuls horaires de travail de l’intéressé et ne comportent aucune indication de nature à caractériser la réalisation du travail effectué par Monsieur X... pour le compte de la société LONGAVENNE dans le cadre d’une relation hiérarchique caractérisée par un contrôle du travail et l’exercice d’un pouvoir disciplinaire ; qu’il apparaît que Monsieur X... a toujours été rémunéré par la seule société ADHECOUP pour ses fonctions de directeur commercial, qu’il a exercées, ce qui n’est pas contesté et ce qui résulte des indications précises données par l’employeur dans son courrier précité du 18 octobre 2006, à raison de 30 % de son temps pour le compte de cette dernière et 70 % pour le compte de la société LONGAVENNE DISTRIBUTION ; que la situation de “ co-employeurs “ n’est donc pas plus établie que celle d’un co-emploi, faute pour le salarié de rapporter la preuve de l’existence d’un lien de subordination juridique ayant existé avec la société LONGAVENNE DISTRIBUTION ; qu’il n’en reste pas moins que Monsieur X... a été mis à la disposition de cette dernière société par son employeur, la société ADHECOUP ; que toutefois et ainsi que l’observe à juste titre Monsieur X..., la convention de mise à disposition dont se prévaut l’employeur et qui emportait une modification substantielle de son contrat de travail, n’est pas opposable au salarié, faute d’avoir été soumise à son accord écrit, étant observé que l’intéressé n’est pas partie aux deux Conventions susvisées du 1er juin 2003 et qu’aucun avenant contractuel n’apparaît avoir été signé ; que l’absence d’opposition et/ ou de réclamation formalisée par le salarié avant l’engagement de la présente instance ne saurait, en l’absence d’écrit signé des deux parties au contrat de travail, caractériser, une quelconque acceptation de la modification contractuelle ainsi intervenue ; que dans ces conditions, la société ADHECOUP est seule tenue de répondre des engagements contractuels de travail qui ont été souscrits ;
1°) ALORS QUE le lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; que le salarié qui exécute ses fonctions pour le compte de deux sociétés distinctes, sous les directives, le contrôle et le pouvoir disciplinaire de leur dirigeant commun, est sous la subordination juridique des deux sociétés qui sont ses employeurs conjoints ; qu’en jugeant l’inverse, la cour d’appel a violé l’article L. 1221-1 du code du travail ;
2°) ALORS QUE le versement d’une rémunération est un critère accessoire du contrat de travail salarié dont le critère déterminant est l’existence d’un lien de subordination juridique ; qu’en jugeant que M. X... ne pouvait être le salarié de la société Longavenne Distribution au motif qu’il percevait sa rémunération de la société Adhecoup, quand ce constat ne permettait pas d’exclure l’existence d’un lien de subordination juridique, la cour d’appel a violé l’article L. 1221-1 du code du travail ;
3°) ALORS QUE la société utilisatrice pour le compte de laquelle un salarié d’une entreprise prêteuse travaille dans le cadre d’une convention de prêt de main d’oeuvre à but non lucratif, est son coemployeur dès lors que l’application de la convention de prêt de main d’oeuvre emporte modification du contrat de travail d’origine conclu entre le salarié et la société prêteuse ; qu’en jugeant en l’espèce que la société Longavenne Distribution ne pouvait être le coemployeur de M. X... au motif qu’il y avait exercé ses fonctions de directeur commercial fournitures industrielles dans le cadre d’une convention de prêt de main d’oeuvre à but non lucratif, quand elle avait constaté que cette convention modifiait son contrat de travail d’origine de sorte qu’elle lui était inopposable, la cour d’appel qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations a violé l’article L. 1221-1 du code du travail.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt attaqué, d’AVOIR débouté M. X... de sa demande en paiement d’heures supplémentaires ;
AUX MOTIFS QUE l’article L 3171-4 du Code du travail dispose : “ En cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles “ ; qu’il appartient donc au salarié de fournir au juge des éléments suffisamment précis de nature à étayer sa demande, pour permettre à l’employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; qu’en l’espèce, Monsieur X... se base sur cinq attestations (C..., D..., E..., B... et F...) dont il résulte qu’il aurait travaillé quotidiennement de 8 heures à 18 heures 30 et une attestation (G...) qui fait quant à elle état d’horaires de travail allant de 8 heures à 18 heures ; que ces témoignages ne contiennent aucune indication sur les jours de travail concernés et Monsieur X..., qui se borne à effectuer un calcul sur la base d’une amplitude de travail quotidienne théorique de 10 h 30, ne produit aucun relevé des heures effectuées par semaine civile et/ ou aucun agenda retraçant les jours et heures travaillés, de nature à permettre d’établir un décompte conforme aux dispositions de l’article L 3221-20 du Code du travail ; que dans ces conditions, en l’absence d’éléments suffisants pour étayer la demande et mettre ainsi l’employeur en mesure de répondre sur la question de l’accomplissement par le salarié d’heures supplémentaires, la réclamation ne peut prospérer ;
ALORS QU’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié d’étayer sa demande par la production d’éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l’employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; que constituent des éléments de preuve suffisamment précis pour étayer la demande du salarié, les attestations de ses collègues de travail sur sa durée quotidienne de travail et le décompte qu’il a réalisé des heures supplémentaires dont il demande le paiement ; qu’en déboutant M. X... de ses demandes malgré l’absence de fourniture par l’employeur des éléments de nature à justifier des horaires qu’il avait effectivement réalisés, au motif qu’il n’avait pas fait la démonstration d’une prestation continue de travail effectif sur la base d’une amplitude journalière de 10h30 de travail, quand elle avait relevé qu’il avait produit aux débats les attestations de salariés sur son amplitude quotidienne de travail de 8 heures à 18 heures 30 et un décompte précis des heures qu’il prétendait avoir réalisées et auquel l’employeur pouvait répondre, la cour d’appel a violé l’article L. 3171-4 du code du travail.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt attaqué, d’AVOIR débouté M. X... de sa demande en paiement d’indemnités au titre des repos compensateurs non pris et pour travail dissimulé,
AUX MOTIFS QUE « les demandes formulées au titre du repos compensateur et de l’indemnité pour travail dissimulé, sont le corollaire de celle formée au titre des heures supplémentaires » ;
ALORS QUE la cassation qui ne manquera pas d’intervenir sur le troisième moyen en ce qu’il critique le chef de dispositif de l’arrêt attaqué qui a débouté M. X... de sa demande en paiement des heures supplémentaires effectuées, emportera par voie de conséquence et en application de l’article 624 du code de procédure civile la cassation du chef de dispositif qui l’a débouté de ses demandes au titre des repos compensateurs non pris et de l’indemnité de travail dissimulé.

Décision attaquée : Cour d’appel de Douai , du 28 novembre 2014