Maison de jeux - loterie prohibée

Cour de cassation

chambre criminelle

Audience publique du 1 avril 2020

N° de pourvoi : 19-80092

ECLI:FR:CCASS:2020:CR00634

Non publié au bulletin

Cas. part. par voie de retranch. sans renvoi

M. Soulard (président), président

SCP Foussard et Froger, SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l’arrêt suivant :

N° Z 19-80.092 F-D

N° 634

CG10

1ER AVRIL 2020

CAS. PART. PAR VOIE DE RETRANCH. SANS RENVOI

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,

DU 1ER AVRIL 2020

M. U... F... a formé un pourvoi contre l’arrêt de la cour d’appel de Chambéry, chambre correctionnelle, en date du 24 octobre 2018, qui, pour participation à la tenue d’une maison de jeux, organisation de loteries prohibées et infractions à la législation sur les contributions indirectes, l’a condamné à des amendes et pénalités fiscales et au paiement des droits fraudés et a ordonné une mesure de confiscation.

Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de Mme Pichon, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. U... F..., les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de l’administration des douanes et droits indirects et les conclusions de M. Valat, avocat général, après débats en l’audience publique du 4 mars 2020 où étaient présents M. Soulard, président, Mme Pichon, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Guichard, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée, en application de l’article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Des mémoires ont été produits, en demande et en défense.

Faits et procédure

1. Il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. A l’issue d’une information judiciaire, M. F... a été renvoyé devant le tribunal correctionnel pour y être jugé des chefs d’escroquerie au préjudice d’associations et de participants à des lotos, travail dissimulé, organisation de loterie prohibée et participation à la tenue de maison de jeux de hasard. L’administration des douanes et droits indirects l’a fait citer pour des infractions fiscales, ouverture de maison de jeux de hasard sans déclaration préalable, absence de comptabilités générale et spéciale, absence de déclaration des recettes et de paiement de l’impôt.

3. Le tribunal correctionnel a joint les procédures. Sur l’action publique, il a relaxé le prévenu du chef d’escroquerie et l’a condamné pour travail dissimulé et, après avoir admis partiellement une erreur de droit, organisation de loterie prohibée et participation à la tenue de maison de jeux de hasard pour la seule période du 1er juillet au 6 octobre 2012, à six mois d’emprisonnement avec sursis et deux ans d’interdiction professionnelle. Sur l’action douanière, les premiers juges ont condamné le prévenu pour les infractions poursuivies à, pour chacune, cinq amendes de 300 euros et à une pénalité fiscale de 13 275 euros. Sur l’action civile, ils ont débouté l’association Handisport annécien, reçue en sa constitution de partie civile, de ses demandes en raison de la relaxe.

4. La partie civile a relevé appel de cette décision. M. F..., l’administration des douanes et droits indirects et le ministère public ont relevé appel des seules dispositions douanières.

Examen des moyens

Sur les troisième, quatrième, et cinquième moyens

5. Ils ne sont pas de nature à permettre l’admission du pourvoi au sens de l’article 567-1-1 du code de procédure pénale.

Sur le premier moyen

Énoncé du moyen

6. Le moyen est pris de la violation des articles 6, § 1, de la Convention des droits de l’homme, préliminaires, 513, alinéa 3, 509, 567, 591 et 593 du code de procédure pénale et 343, 2° du code des douanes, ensemble le principe du respect des droits de la défense.

7. Le moyen critique l’arrêt attaqué en ce qu’il résulte des mentions, que la cour d’appel a entendu Maître J... , substituant Maître V..., avocat de la partie civile, en sa plaidoirie, alors « que la partie civile qui s’est désistée de son appel ne peut plus être entendue en cette qualité par la cour d’appel saisie de la seule action douanière ; qu’en entendant la plaidoirie de l’avocat de l’association handisport Annecien, partie civile en première instance, après avoir constaté son désistement d’appel à l’audience et qu’elle n’était plus saisie que des dispositions douanières du jugement déféré, la cour d’appel a méconnu les dispositions susvisées. »

Réponse de la Cour

8. Le prévenu ne saurait se faire un grief de ce que la cour d’appel a entendu l’avocat de l’association Handisport annécien, seule appelante de la relaxe prononcée par les premiers juges pour l’escroquerie, dès lors que le désistement de la partie civile est intervenu au cours des débats et a été acquis après que la cour d’appel lui a donné acte et constaté qu’elle n’était plus saisie que des dispositions douanières du jugement.

Mais sur le deuxième moyen

Énoncé du moyen

9. Le moyen est pris de la violation des articles 6, § 1 et 7 de la Convention des droits de l’homme, 509, 515, alinéa 3, 591 et 593 du code de procédure pénale, des articles L. 322-1, L. 322-2, L. 324-1, alinéa. 1, L. 324-3, L. 324-6, L. 324-7, L. 324-9 du code de la sécurité intérieure, des articles 1565, alinéa 1, 1559, 1560, 1563, 124 annexe IV, 146 annexe IV, 1791, 1797, 1800 et 1804 du code général des impôts, 111-3 du code pénal, ensemble le principe du respect des droits de la défense et le principe de légalité des délits et des peines ; défaut de motifs et défaut de base légale.

10. Le moyen critique l’arrêt attaqué en ce qu’il a déclaré M. F... coupable, pour la période du 7 février 2009 au 6 octobre 2012, de participation à la tenue d’une maison de jeu où le public est librement admis, d’organisation de loteries prohibées, d’exploitation d’un cercle ou d’une maison de jeux sans déclaration conforme (établissement de 4e catégorie), d’exploitation d’un cercle ou d’une maison de jeux sans tenue conforme de la comptabilité et des registres (établissement de 4e catégorie), de liquidation non conforme d’impôt et taxe (impôt sur les cercles et maisons de jeux) et de paiement non conforme d’impôt et taxe (impôt sur les cercles et maisons de jeux), et a prononcé à son encontre, en répression, quatre condamnations au paiement de 66 amendes fiscales à 15 euros chacune, sa condamnation au paiement d’une pénalité de 108 109 euros, au paiement du montant des impôts fraudés pour un montant de 108 109 euros et la confiscation des 15 816 euros et des 163 chèques de recettes saisis le 7 octobre 2012, alors :

« 1°/ que l’affaire est dévolue à la cour d’appel dans la limite fixée par l’acte d’appel et par la qualité de l’appelant ; qu’en infirmant le jugement déféré ayant, sur l’action publique, relaxé M. F... des chefs de participation à la tenue d’une maison de jeux où le public est librement admis et d’organisation de loteries prohibées, pour la période antérieure au 1er juillet 2012, après avoir constaté l’appel limité des parties aux seules dispositions douanières du jugement, la cour d’appel a méconnu l’étendue de sa saisine en violation des dispositions susvisées ;

2°/ qu’en prononçant contre M. F... deux condamnations au paiement de 66 amendes douanières à 15 euros chacune au titre des infractions de participation à la tenue d’une maison de jeux où le public est librement admis et d’organisation de loteries prohibées, quand ces infractions pénales n’étaient passibles d’aucune sanction douanière, la cour d’appel, qui a par ailleurs prononcé d’autres amendes douanières pour les infractions douanières dont elle était régulièrement saisie, a encore méconnu l’étendue de sa saisine ensemble le principe de légalité des délits et des peines. »

Réponse de la Cour

Vu l’article 509 du code de procédure pénale :

11. Aux termes de ce texte, l’affaire est dévolue à la cour d’appel dans les limites fixées par l’acte d’appel et la qualité de l’appelant.

12. La cour d’appel a infirmé partiellement le jugement et notamment condamné le prévenu pour les infractions de droit commun de participation à la tenue d’une maison de jeux où le public est librement admis et d’organisation de loteries prohibées à des amendes fiscales.

13. En prononçant ainsi, alors que, s’agissant des infractions relatives aux maisons de jeux, les parties n’ont relevé appel que des dispositions fiscales du jugement et que les juges n’étaient pas saisis de l’action publique, la cour d’appel a méconnu le texte et le principe susvisés.

14. Par conséquent, la cassation est encourue de ce chef.

Portée et conséquences de la cassation

15. La cassation aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d’appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l’article L. 411-3 du code de l’organisation judiciaire.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE et ANNULE, par voie de retranchement, l’arrêt susvisé de la cour d’appel de Chambéry, en date du 24 octobre 2018, mais en ses seules dispositions :

 ayant déclaré M. F... coupable de participation à la tenue d’une maison de jeux où le public est librement admis et l’ayant condamné en répression à 66 amendes fiscales à 15 euros,

 et ayant déclaré M. F... coupable d’organisation de loteries prohibées et l’ayant condamné en répression à 66 amendes fiscales à 15 euros, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

DIT n’y avoir lieu à renvoi ;

ORDONNE l’impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d’appel de Chambéry et sa mention en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le premier avril deux mille vingt.

Décision attaquée : Cour d’appel de Chambéry , du 24 octobre 2018