Tour-opérateur - vrais salariés détachés

Cour d’appel de Chambéry 7 mai 2003 n° 03/462

Sommaire :

En application des normes communautaires, la personne qui exerce une activité salariée sur le territoire d’un Etat membre au service d’une entreprise d’un autre Etat membre reste soumise à la législation du premier Etat dès lors qu’il subsiste un lien organique entre l’ entreprise étrangère et le salarié pendant la période de détachement, que l’entreprise exerce habituellement des activités significatives sur le territoire du premier Etat membre, et que le salarié effectue un travail saisonnier dont la durée ne peut dépasser huit mois s’il réside à l’étranger. En conséquence, l’infraction de travail dissimulé par défaut de déclaration n’est pas caractérisée à l’encontre de l’exploitant anglais d’un bar-restaurant en France qui emploie des travailleurs anglais sans avoir effectué de déclaration auprès de l’administration française, dès lors que ce gérant est également associé dans une société de tour-operator, que les deux activités sont liées par une convention globale de prestation de services, qu’il existe un lien organique entre les salariés du bar-restaurant et la société de tour-operator

Texte intégral :

Cour d’appel de Chambéry 7 mai 2003 N° 03/462
République française

Au nom du peuple français
GC/DV DOSSIER N 02/00780 ARRET N° 03/462 DU 07 MAI 2003
COUR D’APPEL DE CHAMBERY
Prononcé publiquement le MERCREDI 07 MAI 2003, par la Chambre des Appels Correctionnels, Sur appel d’un jugement du T.G.I. D’ALBERTVILLE du 23 avril 2001, COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats : Président

Monsieur X... Monsieur B assistée de Madame Y..., Greffier, en présence de Monsieur B, Substitut de Monsieur le Procureur Général, PARTIES EN CAUSE DEVANT LA COUR : HODKIN Z... épouse A..., née le 23 août 1946 à DONCASTER (GRANDE BRETAGNE), de nationalité britannique, mariée, secrétaire, demeurant Barnsley Road Doncaster Pine - Lodge-South Youkshire DN5 8RB - GRANDE BRETAGNE Prévenue, appelante, libre, comparante Assistée de Maître LE BRETON Pierre, avocat au barreau de LYON A... B..., né le 10 mai 1943 à WATHE UPON DEARBE (ROYAUME-UNI), de nationalité britannique, marié, tour operator, demeurant Barnsley Road Doncaster Pine - Lodge South Yorkshire DN5 8RB - GRANDE BRETAGNE Prévenu, appelant, libre, comparant Assisté de Maître LE BRETON Pierre, avocat au barreau de LYON LE MINISTÈRE PUBLIC appelant, ASSOCIATION FORCE OUVRIERE DES CONSOMMATEURS DE LASAVOIE "A.F.O.C.", sise Maison des Syndicats - 3-5 rue Ronde 73000 CHAMBERY Partie civile, intimée, représentée par Maître CALLOUD Jean-Paul, avocat au barreau de CHAMBERY UNION FEDERALE DES CONSOMMATEURS D’ALBERTVILLE, sise 2 rue du Président Coty 73200 ALBERTVILLE Partie civile, appelante, représentée par Maître SAUTHIER Laure, avocat au barreau d’ALBERTVILLE UNION FEDERALE DES CONSOMMATEURS DE LA SAVOIE "U.F.C.", sise 2 boulevard de la Roche du Roi 73100 AIX LES BAINS Partie civile, intimée, représentée par Maître SAUTHIER Laure, avocat au barreau d’ALBERTVILLE ASSEDIC DE L’AIN ET DES DEUX SAVOIE, sise 31 avenue de Loverchy 74000 ANNECY Partie civile, appelante, représentée par Maître BLANCHIN Christelle substituant Maître DENARIE Denis, avocats au barreau de CHAMBERY URSSAF DE LA SAVOIE, sise 10 rue des Champagnes 73014 CHAMBERY CEDEX Partie civile, intimée, représentée par Monsieur C... et Maître BLANCHIN Christelle substituant Maître DENARIE Denis, avocats au barreau de CHAMBERY RAPPEL DE LA PROCÉDURE : LE JUGEMENT : Le Tribunal, par jugement contradictoire du 23 avril 2001, a poursuivi : HODKIN Z... épouse A... des chefs de EXECUTION D’UN TRAVAIL DISSIMULE, entre le 15.12.1998 et le 29.04.1999, à COURCHEVEL, infraction prévue par les articles L.362-3, L.324-9, L.324-10, L.324-11, L.320, L.143-3 du Code du travail et réprimée par les articles L.362-3, L.362-4, L.362-5 du Code du travail, EXECUTION D’UN TRAVAIL DISSIMULE, entre le 15.12.1999 et le 29.04.2000, à COURCHEVEL, infraction prévue par les articles L.362-3, L.324-9, L.324-10, L.324-11, L.320, L.143-3 du Code du travail et réprimée par les articles L.362-3, L.362-4, L.362-5 du Code du travail, OUVERTURE D’UN DEBIT DE BOISSONS, D’UN CAFE OU D’UN CABARET SANS DECLARATION PREALABLE, entre le 15.12.1998 et le 29/04/1999, à COURCHEVEL, infraction prévue par les articles L.3352-3 1 , L.3332-3 AL.1, AL.2 du Code de la santé publique et réprimée par les articles L.3352-3,

L.3355-4, L.3355-6 AL.1 du Code de la santé publique, OUVERTURE D’UN DEBIT DE BOISSONS, D’UN CAFE OU D’UN CABARET SANS DECLARATION PREALABLE, entre le 15.12.1999 et le 29.04.2000, à COURCHEVEL, infraction prévue par les articles L.3352-3 1 , L.3332-3 AL.1, AL.2 du Code de la santé publique et réprimée par les articles L.3352-3, L.3355-4, L.3355-6 AL.1 du Code de la santé publique, EXPOSITION OU VENTE DE DENREE ALIMENTAIRE, BOISSON OU PRODUIT AGRICOLE FALSIFIE, CORROMPU OU TOXIQUE, le 18.03.1999, à COURCHEVEL, infraction prévue par l’article L.213-3 AL.1 2 du Code de la consommation et réprimée par les articles L.213-3, L.213-1, L.216-2, L.216-3 du Code de la consommation, EMPLOI D’UNE PERSONNE NON QUALIFIEE EXERCANT LES FONCTIONS DE PROFESSEUR, MONITEUR, EDUCATEUR, ENTRAINEUR OU ANIMATEUR D’UNE ACTIVITE PHYSIQUE OU SPORTIVE, le 14.02.2000, à Méribel, infraction prévue par les articles 49, 43 I, II de la Loi 84-610 du 16/07/1984, l’article 8 du Décret 93-1035 du 31/08/1993, les articles 1 ANX.UNIQUE, 2 de l’Arrêté ministériel du 04/05/1995, l’article 2 du Décret 89-685 du 21/09/1989, l’article 1, 8, 10, 12, 12-1 du Décret 91-260 du 07/03/1991 et réprimée par l’article 49 de la Loi 84-610 du 16/07/1984, A... B... des chefs de EXECUTION D’UN TRAVAIL DISSIMULE, entre le 15.12.1998 et le 29.04.1999, à COURCHEVEL, infraction prévue par les articles L.362-3, L.324-9, L.324-10, L.324-11, L.320, L.143-3 du Code du travail et réprimée par les articles L.362-3, L.362-4, L.362-5 du Code du travail, EXECUTION D’UN TRAVAIL DISSIMULE, entre le 15.12.1999 et le 29.04.2000, à COURCHEVEL, infraction prévue par les articles L.362-3, L.324-9, L.324-10, L.324-11, L.320, L.143-3 du Code du travail et réprimée par les articles L.362-3, L.362-4, L.362-5 du Code du travail, OUVERTURE D’UN DEBIT DE BOISSONS, D’UN CAFE OU D’UN CABARET SANS DECLARATION PREALABLE, entre le 15.12.1998 et le 29.04.1999, à COURCHEVEL, infraction prévue par les articles L.3352-3 1 , L.3332-3 AL.1, AL.2

du Code de la santé publique et réprimée par les articles L.3352-3, L.3355-4, L.3355-6 AL.1 du Code de la santé publique, OUVERTURE D’UN DEBIT DE BOISSONS, D’UN CAFE OU D’UN CABARET SANS DECLARATION PREALABLE, entre le 15.12.1999 et le 29.04.2000, à COURCHEVEL, infraction prévue par les articles L.3352-3 1 , L.3332-3 AL.1, AL.2 du Code de la santé publique et réprimée par les articles L.3352-3, L.3355-4, L.3355-6 AL.1 du Code de la santé publique, EXPOSITION OU VENTE DE DENREE ALIMENTAIRE, BOISSON OU PRODUIT AGRICOLE FALSIFIE, CORROMPU OU TOXIQUE, le 18/03/1999, à COURCHEVEL, infraction prévue par l’article L.213-3 AL.1 2 du Code de la consommation et réprimée par les articles L.213-3, L.213-1, L.216-2, L.216-3 du Code de la consommation, EMPLOI D’UNE PERSONNE NON QUALIFIEE EXERCANT LES FONCTIONS DE PROFESSEUR, MONITEUR, EDUCATEUR, ENTRAINEUR OU ANIMATEUR D’UNE ACTIVITE PHYSIQUE OU SPORTIVE, le 14/02/2000, à Méribel, infraction prévue par les articles 49, 43 I, II de la Loi 84-610 du 16/07/1984, l’article 8 du Décret 93-1035 du 31/08/1993, les articles 1 ANX.UNIQUE, 2 de l’Arrêté ministériel du 04/05/1995, l’article 2 du Décret 89-685 du 21/09/1989, l’article 1, 8, 10, 12, 12-1 du Décret 91-260 du 07/03/1991 et réprimée par l’article 49 de la Loi 84-610 du 16/07/1984, et, par application de ces articles, les a relaxés du chef d’ouverture d’un débit de boissons sans déclaration préalable, les a déclarés coupables des autres faits et les a condamnés à 30 000 francs d’amende, Sur l’action civile : a condamné solidairement A... B... et HODKIN Z... épouse A... à payer à l’URSSAF de la Savoie 7 000 francs à titre de dommages et intérêts et 2 000 francs au titre de l’article 475-1 du Code de Procédure Pénale, à l’ASSEDIC de l’Ain et des Deux Savoie 7 000 francs à titre de dommages et intérêts et 3 000 francs au titre de l’article 475-1 du Code de Procédure Pénale, à l’Association Force Ouvrière des Consommateurs de la Savoie 800 francs à titre de dommages et intérêts

et 800 francs au titre de l’article 475-1 du Code de Procédure Pénale, à l’Union Fédérale des Consommateurs de Savoie 800 francs à titre de dommages et intérêts et 800 francs au titre de l’article 475-1 du Code de Procédure Pénale. LES APPELS : Appel a été interjeté par : Madame HODKIN Z..., le 02 mai 2001 Monsieur A... B..., le 02 mai 2001 Monsieur le Procureur de la République, le 03 mai 2001 Union Fédérale des Consommateurs d’Albertville, le 04 mai 2001 ASSEDIC de l’Ain et des Deux Savoie, le 07 mai 2001 DÉROULEMENT DES DÉBATS : A l’audience publique du 03 avril 2003, le Président a constaté l’identité des prévenus qui étaient assistés de Mme D..., interprète en langue anglaise, inscrite sur la liste des experts près la Cour d’Appel de Chambéry. Ont été entendus : Le Président en son rapport, HODKIN Z... épouse A... et A... B... en leurs interrogatoires et moyens de défense, M. C..., représentant l’URSSAF, en ses observations, Maître BLANCHIN substituant Maître DENARIE, avocat de l’ASSEDIC et de l’URSSAF, en sa plaidoirie, Maître CALLOUD, avocat de l’Association Force Ouvrière des Consommateurs de la Savoie, en sa plaidoirie, Maître SAUTHIER, avocat de l’Union Fédérale des Consommateurs de la Savoie et d’Albertville, en sa plaidoirie, Le Ministère Public en ses réquisitions, Maître LE BRETON, avocat des prévenus, en sa plaidoirie. Le Président a ensuite déclaré que l’arrêt serait prononcé le 07 MAI 2003. DÉCISION :
Il résulte de la procédure et des débats les faits suivants :
Les 5 et 20 février 1999, les services de l’URSSAF de la Savoie procédaient à des vérifications à Courchevel au "Rocky’s Bar".
De leur enquête, il ressortait que la SARL Le Rocky’s Bar était régulièrement inscrite au Registre du Commerce d’Albertville pour une activité de bar, restaurant, piano-bar, night club, que cet établissement était situé au rez-de chaussée de l’Hôtel "Les Avals" et que M. et Mme A... étaient les associés propriétaires du Rocky’s Bar.
Par ailleurs, M. et Mme A... exerçaient au Royaume-Uni sous le nom "Ski Olympic" une activité de voyagiste (tour opérator) offrant à sa clientèle britannique des séjours "tout compris" en Savoie (transport hôtel-restauration).
L’inspecteur de l’URSSAF constatait la présence de 5 personnes en situation de travail au bar, de nationalité britannique, lors de ces contrôles. Un procès-verbal de travail dissimulé était dressé et M. et Mme A... faisait l’objet de poursuites de ce chef.
Trois autres séries d’infractions étaient relevées à leur encontre pour mise en vente d’une boisson interdite, pour emploi d’un animateur-ski non diplômé et ouverture illicite d’un débit de boissons.
Le Tribunal Correctionnel d’Albertville statuait sur la prévention par jugement du 23 avril 2001.
M. et Mme A..., le Ministère Public, l’Union Fédérale des Consommateurs d’Albertville et l’ASSEDIC des Alpes interjetaient appel de ce jugement les 2, 3, 4 et 7 mai 2001. * * *
L’URSSAF de la Savoie, ainsi que l’ASSEDIC de la Savoie demandent à la Cour de confirmer le jugement entrepris et de condamner M. et Mme A... à lui payer les sommes de 3 048,98 ä et celles de 457,35 ä, ainsi qu’une somme supplémentaire de 2 286,75 ä à titre de dommages et intérêts, outre des indemnités procédurales de 1 000 ä et 610 ä.
L’Union Fédérale des Consommateurs d’Albertville et de la Savoie, l’Association Force Ouvrière des Consommateurs de la Savoie sollicitent également la confirmation du jugement déféré, mais de porter pour la première à la somme de 1 525 ä le montant des dommages et intérêts, outre l’allocation d’une indemnité procédurale en cause d’appel de 500 ä et de 230 ä.
Le Ministère Public requiert pour l’essentiel la confirmation du jugement entrepris.
M. et Mme A... demandent à la Cour de réformer le jugement entrepris s’agissant de l’infraction de travail dissimulé et de les relaxer de ce chef de prévention, constatant la conformité des détachements avec le règlement CEE n° 1408/71. SUR QUOI, LA COUR,
Attendu que la Cour constate que M. et Mme A... ne remettent pas en cause le jugement déféré s’agissant des infractions autre que le travail dissimulé qui leur sont reprochées,
Qu’il y a lieu de statuer dans un premier temps sur ces infractions ; 1) Sur l’infraction de mise en vente d’une boisson interdite à la vente en France
Attendu qu’il est constant que les fonctionnaires des services de la
Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes ont constaté que le 18 mars 1999 était mise en vente dans l’établissement le Rocky’s Bar une boisson dénommée Red Bull Stimulation,
Que l’analyse de cette boisson établissait qu’elle contenait de la caféine selon une teneur largement supérieure à la norme utilisée (300 mg/l au lieu de 150 mg/l), que du glucoronolactone, substance non autorisée en alimentation humaine, y était incorporé, que des ajouts de vitamines avaient été effectués dans le but d’enrichir le produit alors que ce procédé n’est pas admis en alimentation courante, que se trouvaient présents également dans cette boisson deux additifs non admis en alimentation courante : la taurine et l’inositol ;
Attendu que cette boisson dont la composition vient d’être définie ne peut être mise en vente en France,
Que M. et Mme A... avaient pour rôle, en leur qualité d’associés et gérants de cet établissement, de vérifier les boissons qui y sont vendues ;
Attendu que l’analyse du premier Juge sera confirmé en ce qu’il a déclaré cette infraction établie ; 2) Sur l’infraction d’emploi d’un animateur de ski non diplômé
Attendu qu’il est constant que les militaires de la Gendarmerie ont constaté que, le 14 février 2000, une personne vêtue d’une combinaison portant l’inscription Ski Olympic encadrait un groupe de skieurs britanniques sur la piste du Doron dans la station de
Méribel,
Que M. Andrew E... déclarait avoir été embauché par la Société Ski Olympic pour la saison d’hiver en tant qu’animateur et qu’il lui arrivait d’accompagner des clients sur les pistes de ski sans donner de cours, étant dépourvu de diplôme ;
Attendu que l’analyse juridique de la situation faite par le premier Juge est pertinente et sera confirmée,
Qu’en application des articles 43 et 49 de la Loi du 16 juillet 1984 modifiée par la Loi du 6 mars 1998 et de la jurisprudence constante de cette Cour, il y a lieu de déclarer M. et Mme A... coupable de cette infraction ; 3) Sur l’infraction d’ouverture illicite d’un débit de boisson
Attendu que le Ministère Public ne produit devant la Cour aucune pièce complémentaire, en sorte que les éléments du dossier de première instance ne sont pas suffisants pour caractériser une infraction,
Que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a renvoyé les prévenus des fins de la poursuite sans peine ni dépens ;
Attendu qu’il convient dans un dernier temps de statuer sur la prévention de travail dissimulée ; 4) Sur l’infraction de travail dissimulé
Attendu qu’il y a lieu de rappeler les dispositions essentielles applicables en l’espèce ;
Attendu que l’article 14 OE 1 (a) du règlement communautaire 1408/71 en date du 14 juin 1971 énonce : "La personne qui exerce une activité salariée sur le territoire d’un état membre au service d’une entreprise dont elle relève normalement et qui est détaché par cette entreprise sur le territoire d’un autre état membre afin d’y effectuer un travail pour le compte de celle-ci, demeure soumise à la législation du premier état membre à condition que la durée prévisible de ce travail n’excède pas 12 mois et qu’elle ne soit pas envoyée en remplacement d’une autre personne parvenue au terme de la période de son détachement" ;
Attendu que la portée de cet article 14 a été affinée par la décision n° 181 du 13 décembre 2000 de la commission administrative des travailleurs migrants, laquelle précise : "dans le cadre des dispositions prévues au paragraphe 1 de la présente décision les articles 14 OE 1 continuent à s’appliquer, notamment dans les conditions suivantes : détachement du personnel embauché en vue d’être détaché, lorsque le travailleur soumis à la législation d’un état membre est embauché dans cet état membre où l’entreprise a son siège ou son établissement en vue d’être détaché pour le compte de son entreprise, soit sur le territoire d’un autre état membre... à la condition : . qu’il subsiste un lien organique entre cette entreprise et le travailleur pendant la période de son détachement, . que cette entreprise exerce normalement son activité sur le territoire du premier état membre, c’est-à-dire que l’entreprise exerce habituellement des activités significatives sur le territoire du premier état membre" ;
Attendu que le même règlement 1408/71 (article 1.C) a donné la
définition du travailleur susnommé en ce qu’il "désigne tout travailleur salarié qui se rend sur le territoire d’un état membre autre que celui où il réside, afin d’y effectuer pour le compte d’une entreprise ou d’un employeur de cet état, un travail à caractère saisonnier dont la durée ne peut dépasser en aucun cas 8 mois s’il séjourne sur le territoire dudit état pendant la durée de son travail ; par travail à caractère saisonnier, il convient d’entendre un travail qui dépend du rythme des saisons et se répète automatiquement chaque année" ;
Attendu qu’il est constant que M. et Mme A... exploitent une activité de tour operator sous le nom commercial Ski Olympic et assurent, à partir du Royaume-Uni, la vente de prestations de services d’hébergement et de séjour sur des sites hôteliers situés à Courchevel (notamment Hôtel Les Avals et Bar Rocky’s Bar) au bénéfice d’une clientèle britannique,
Qu’ils sont parallèlement associés égalitaires d’une société de droit français, la SARL Rocky, exploitant le bar-restaurant-night club le Rocky’s Bar,
Que les entités sont liées par une convention globale de prestations de services ;
Attendu qu’il est établi que les salariés travaillant au Rocky’s Bar ont été recrutés au Royaume-Uni pour exercer en France durant la saison d’hiver (5 mois) et sont embauchés par Ski Olympic,
Que le bar assure une prestation pour les clients britanniques de l’hôtel, l’ouverture à un public extérieur à cette clientèle étant
une obligation légale française,
Qu’il est rappelé que le bar est situé au rez de chaussée de l’Hôtel "Les Avals" où est hébergée la clientèle britannique du tour operator ;
Attendu que les salariés, objet du contrôle de l’URSSAF en février 2000, sont placés sous l’autorité de la Société Ski Olympic et donc de M. et Mme A...,
Qu’il conservent durant le temps de leur détachement un lien organique avec cette société, qu’ils ont le même statut que les employés des structures hôtelières ;
Attendu qu’il est établi que les salariés visés par le contrôle étaient en possession de certificats E101 délivrés par l’institution anglaise compétente, ce qui établit que les formalités requises lors de l’embauche par le droit anglais ont été respectées et que la qualité de travailleur détaché a été reconnue par l’institution compétente anglaise en application de l’article 14.1 du règlement CEE 1408/71 énoncé supra ;
Attendu que la délivrance du certificat de détachement E101 crée une présomption de régularité de l’affiliation du travailleur détaché au régime de Sécurité Sociale de son pays d’origine qui s’impose à l’état d’accueil,
Qu’en l’espèce, cette présomption n’a pas été remise en cause par l’URSSAF ou l’Etat français selon les procédures déterminées,
Qu’il n’appartient pas à la Cour de céans d’apprécier la régularité de ces certificats E101 qui s’imposent à la juridiction pénale avec tous leurs effets ;
Attendu que de l’ensemble de ces éléments il s’évince que la Société Ski Olympic exerce une activité transnationale de prestation de services et détache sur le territoire français en Savoie des salariés pendant une période de 5 mois (travailleurs saisonniers),
Que ces salariés bénéficient tous du certificat E101,
Que la Société Ski Olympic exerce cette activité de prestation de services de manière effective et significative au Royaume-Uni ;
Attendu que le délit de travail dissimulé, par défaut de déclaration à l’embauche, n’est pas établi,
Qu’il y a lieu, par infirmation du jugement entrepris, de renvoyer M. et Mme A... des fins de la poursuite sans peine ni dépens ; 5) Sur la peine
Attendu que les circonstances de la cause et la situation sociale de M. et Mme A... commandent qu’une peine d’amende de 2 000 ä soit prononcé pour les deux infractions retenues à leur égard (2 000 ä pour chacun d’eux) ; 6) Sur l’action civile
Attendu que l’Association Force Ouvrière des Consommateurs de la Savoie, l’Union Fédérale des Consommateurs d’Albertville et de la Savoie subissent un préjudice découlant des 2 infractions pour lesquelles M. et Mme A... ont été déclarés coupables,
Qu’elles sont recevables à exercer l’action civile à leur égard ;
Attendu que la Cour dispose des éléments d’appréciation suffisants pour confirmer le montant des dommages et intérêts alloués à l’Association Force Ouvrière des Consommateurs de la Savoie et à l’Union Fédérale des Consommateurs de la Savoie, pour le porter à la somme de 1 000 ä s’agissant de l’action exercée par l’Union Fédérale des Consommateurs d’Albertville (appelante sur les intérêts civils) et d’allouer aux parties civiles la somme de 500 ä et 230 ä à titre d’indemnité procédurale en cause d’appel ;
Attendu que les constitutions de parties civiles de l’URSSAF de la Savoie et de l’ASSEDIC des Alpes, compte tenu de la relaxe prononcée du chef de travail dissimulé, seront déclarées irrecevables ; PAR CES MOTIFS, LA COUR,
Statuant publiquement, après en avoir délibéré conformément à la loi, contradictoirement, En la forme,
Déclare les appels recevables ; Au fond,
Confirme le jugement rendu le 23 avril 2001 par le Tribunal Correctionnel d’Albertville sur la déclaration de culpabilité du chef de mise en vente d’une boisson interdite à la vente en France et du chef d’emploi d’un animateur de ski non diplômé, sur la relaxe du chef d’ouverture illicite d’un débit de boisson, sur l’action civile exercée par l’Union Fédérale des Consommateurs de la Savoie et d’Albertville et l’Association Force Ouvrière des Consommateurs de la Savoie, et sur les dommages et intérêts accordés à l’Association
Force Ouvrière des Consommateurs de la Savoie et à l’Union Fédérale des Consommateurs de la Savoie ;
Le réforme pour le surplus ; et, statuant à nouveau,
Renvoie des fins de la poursuite sans peine ni dépens M. et Mme A... du chef de travail dissimulé ;
Condamne A... B... et HODKIN Z... épouse A... à une amende de 2 000 ä (DEUX MILLE EUROS) chacun ;
Dit que la présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d’un montant de 120 euros dont est redevable chaque condamné ;
Fixe la contrainte par corps, s’il y a lieu, conformément aux dispositions de l’Article 750 du Code de Procédure Pénale ;
Le tout en vertu des textes sus-visés ;
Déclare irrecevables les constitutions de parties civiles de l’URSSAF et de l’ASSEDIC des Alpes ;
Condamne solidairement M. et Mme A... à payer à l’Union Fédérale des Consommateurs d’Albertville la somme de 1 000 ä à titre de dommages et intérêts ;
Condamne solidairement M. et Mme A... à payer à l’Union Fédérale des Consommateurs de la Savoie et d’Albertville la somme de 500 ä en application de l’article 475-1 du Code de Procédure Pénale en cause
d’appel et à l’Association Force Ouvrière des Consommateurs de la Savoie la somme de 230 ä sur le même fondement.
Ainsi prononcé et lu en audience publique du 07 mai 2003 par M F..., en application des dispositions de l’article 485 dernier alinéa du Code de Procédure Pénale dans sa rédaction issue de la Loi 85-1407 du 30 décembre 1985, assisté de Madame Y..., Greffier, en présence du Ministère Public.
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le Président et le Greffier. LE GREFFIER,
LE PRESIDENT,

Demandeur : M. et Mme OSBORNE
Défendeur : Ministère Public

Dalloz jurisprudence © Editions Dalloz 2010