CJUE Media - activité entièrement ou principalement tournée

Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 5 octobre 1994. - TV10 SA contre Commissariaat voor de Media. - Demande de décision préjudicielle : Raad van State - Pays-Bas. - Libre prestation des services - Législation nationale visant à préserver un réseau de radiodiffusion pluraliste et non commercial. - Affaire C-23/93.

1. Libre prestation des services ° Dispositions du traité ° Champ d’ application ° Diffusion par câble de programmes télévisés provenant d’ une entreprise établie dans un autre État membre ° Inclusion, indépendamment de l’ objectif poursuivi à travers une diffusion à partir de l’ étranger

(Traité CEE, art. 59 et 60)

2. Libre prestation des services ° Restrictions dirigées contre les prestataires ne cherchant qu’ à se soustraire au respect des règles professionnelles ° Admissibilité

(Traité CEE, art. 59 et 60)

Sommaire

1. La notion de "prestation de services" visée par les articles 59 et 60 du traité couvre la diffusion, par l’ intermédiaire d’ exploitants de réseaux de câbles établis dans un État membre, de programmes télévisés offerts par un organisme de radiodiffusion établi dans un autre État membre, même si cet organisme s’ y est établi dans le but de se soustraire à la législation applicable dans l’ État de réception aux organismes nationaux de radiodiffusion.

2. On ne saurait dénier à un État membre le droit de prendre des mesures destinées à empêcher que les libertés garanties par le traité soient utilisées par un prestataire dont l’ activité serait entièrement ou principalement tournée vers son territoire en vue de se soustraire aux règles qui lui seraient applicables au cas où il serait établi sur le territoire de cet État.

On ne saurait donc interpréter les dispositions du traité relatives à la libre prestation des services comme s’ opposant à ce qu’ un État membre assimile à un organisme de radiodiffusion national un organisme de radiodiffusion constitué selon la législation d’ un autre État membre et établi dans cet État, mais dont les activités sont entièrement ou principalement tournées vers le territoire du premier État membre, lorsque cet établissement a eu lieu en vue de permettre à cet organisme de se soustraire aux règles édictées par le premier État membre dans le cadre d’ une politique culturelle visant à mettre en place un système de radiodiffusion et de télévision à caractère pluraliste et non commercial.

Parties

Dans l’ affaire C-23/93,

ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l’ article 177 du traité CEE, par la section juridictionnelle du Raad van State (Pays-Bas) et tendant à obtenir, dans le litige pendant devant cette juridiction entre

TV10 SA

et

Commissariaat voor de Media,

une décision à titre préjudiciel sur l’ interprétation des dispositions du traité CEE relatives aux prestations de services,

LA COUR (cinquième chambre),

composée de MM. J. C. Moitinho de Almeida, président de chambre, R. Joliet (rapporteur), G. C. Rodríguez Iglesias, F. Grévisse et M. Zuleeg, juges,

avocat général : M. C. O. Lenz,

greffier : Mme L. Hewlett, administrateur,

considérant les observations écrites présentées :

° pour TV10 SA, par Mes M. van Empel et A. J. H. W. M. Versteeg, avocats à Amsterdam,

° pour le Commissariaat voor de Media, par Me G. H. L. Weesing, avocat à Amsterdam,

° pour le gouvernement allemand, par M. E. Roeder, Ministerialrat au ministère fédéral de l’ Économie, en qualité d’ agent,

° pour le gouvernement français, par MM. P. Pouzoulet, sous-directeur à la direction des affaires juridiques du ministère des Affaires étrangères, et J.-L. Falconi, secrétaire des affaires étrangères à la direction des affaires juridiques du même ministère, en qualité d’ agents,

° pour le gouvernement néerlandais, par M. A. Bos, conseiller juridique au ministère des Affaires étrangères, en qualité d’ agent,

° pour la Commission des Communautés européennes, par MM. H. Etienne, conseiller juridique principal, et P. van Nuffel, membre du service juridique, en qualité d’ agents,

vu le rapport d’ audience,

ayant entendu les observations orales de TV10 SA, du Commissariaat voor de Media, du gouvernement français, du gouvernement néerlandais, représenté par M. J. W. De Zwaan, conseiller juridique adjoint au ministère des Affaires étrangères, en qualité d’ agent, et de la Commission à l’ audience du 14 avril 1994,

ayant entendu l’ avocat général en ses conclusions à l’ audience du 16 juin 1994,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l’arrêt

1 Par ordonnance du 11 mai 1992, parvenue à la Cour le 26 janvier 1993, la section juridictionnelle du Raad van State (Pays-Bas) a, en application de l’ article 177 du traité CEE, posé deux questions préjudicielles relatives à l’ interprétation des dispositions du même traité concernant la libre prestation des services, en vue d’ apprécier la compatibilité avec le droit communautaire d’ une réglementation d’ un État membre imposant des restrictions aux activités d’ organismes de radiodiffusion établis dans d’ autres États membres.

2 Ces questions ont été soulevées dans le cadre d’ un litige opposant la société anonyme de droit luxembourgeois TV10 (ci-après "TV10"), organisme commercial de radiodiffusion établi au Luxembourg, à l’ institution chargée de la surveillance de l’ exploitation de la radiodiffusion aux Pays-Bas, le Commissariaat voor de Media, à propos de l’ application de dispositions de la loi néerlandaise du 21 avril 1987, qui règlent la fourniture de programmes de radiodiffusion et de télévision, les redevances de radiodiffusion et les mesures d’ aides aux organes de presse (Staatsblad n 249 du 4.6.1987, ci-après la "Mediawet").

3 A titre liminaire, il convient de relever que la Mediawet établit deux régimes distincts pour la radiodiffusion d’ origine néerlandaise et pour la diffusion de programmes émis à partir de l’ étranger.

4 En ce qui concerne la radiodiffusion néerlandaise, l’ article 31 de la Mediawet prévoit que le temps d’ antenne des émissions de radio et de télévision sur le réseau national est attribué par le Commissariaat voor de Media à des organismes de radiodiffusion. Selon l’ article 14 de cette loi, ces organismes sont des associations d’ auditeurs ou de téléspectateurs, dotées de la personnalité juridique et constituées dans le but de représenter un courant social, culturel, religieux ou spirituel, qui est précisé dans leurs statuts. Ils doivent assurer un programme varié. La Mediawet, dans ses articles 99 à 102, prévoit, en outre, un mode de financement tendant à assurer le pluralisme et le caractère non commercial des organismes nationaux de radiodiffusion.

5 En ce qui concerne la diffusion de programmes audiovisuels étrangers distribués au moyen du câble, l’ article 66 de la Mediawet prévoyait, dans sa rédaction en vigueur à l’ époque des faits :

"1. Le gérant d’ un réseau de télédistribution peut :

a) transmettre les programmes qui sont émis par un organisme de radiodiffusion étranger au moyen d’ un émetteur de radiodiffusion et qui, la plupart du temps, peuvent être captés directement dans la zone desservie par le réseau câblé au moyen d’ une antenne individuelle normale dans des conditions de qualité satisfaisantes ;

b) transmettre des programmes autres que ceux visés sous a) et qui sont émis par un organisme de radiodiffusion étranger ou par un ensemble de tels organismes en tant que programmes de radiodiffusion, conformément à la législation applicable dans le pays d’ émission...".

6 Il résulte du dossier que TV10 s’ est établie effectivement au Luxembourg et a entrepris d’ émettre conformément à la législation luxembourgeoise. Ainsi a-t-elle obtenu des autorités de ce pays l’ autorisation de diffuser ses programmes par l’ intermédiaire du satellite Astra, qui les envoie vers le territoire néerlandais. Le Commissariaat voor de Media souligne toutefois que la gestion journalière de TV10 est assurée, dans une large mesure, par des ressortissants néerlandais et que ses programmes sont destinés à être diffusés par les réseaux de télédistribution principalement au Luxembourg et aux Pays-Bas. Il retient, par ailleurs, que TV10 n’ a conclu de contrat qu’ avec des exploitants de réseaux de télédistribution au Luxembourg et aux Pays-Bas et non dans d’ autres États de la Communauté européenne. Le Commissariaat voor de Media relève également que, si l’ émission de programmes, l’ achat, le sous-titrage des programmes étrangers, la direction et la régie finale sont assurés au Luxembourg, le public visé est le public néerlandais, la majeure partie des collaborateurs recrutés pour les différents programmes de TV10 proviennent des Pays-Bas et les messages publicitaires sont réalisés aux Pays-Bas.

7 Le Commissariaat voor de Media en a déduit, dans une décision du 28 septembre 1989, que TV10 s’ est installée au Luxembourg dans le but d’ échapper à la législation néerlandaise applicable aux organismes nationaux. Il en a conclu qu’ elle ne peut pas être considérée comme un organisme de radiodiffusion étranger au sens de l’ article 66, paragraphe 1, de la Mediawet, et que, dès lors, ses programmes ne peuvent pas être transmis par la voie du câble aux Pays-Bas.

8 Suite à cette décision, TV10 a décidé de n’ émettre aucun programme. Elle a cependant formé, au titre de la Wet administratieve rechtspraak overheidsbeschikkingen (loi sur les recours contre les décisions administratives), un recours en annulation contre cette décision devant la section juridictionnelle du Raad van State.

9 Dans son arrêt du 11 mai 1992, le Raad van State confirme, tout d’ abord, l’ analyse du Commissariaat voor de Media et considère, comme celui-ci, que TV10 s’ est établie au Luxembourg dans l’ intention manifeste de se soustraire à la Mediawet et qu’ elle ne peut pas être regardée comme un organisme de radiodiffusion étranger au sens de l’ article 66 de cette législation. Il estime, en outre, que la décision du Commissariaat ne porte atteinte ni au principe d’ égalité, ni à l’ article 10 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’ homme et des libertés fondamentales, qui consacre le droit à la liberté d’ expression, ni à l’ article 14 de la même convention, qui interdit les discriminations relatives aux droits et libertés qui y sont garantis.

10 Le Raad van State se réfère ensuite aux arrêts du 3 décembre 1974, Van Binsbergen (33/74, Rec. p. 1299) et du 18 mars 1980, Debauve (52/79, Rec. p. 833), pour souligner, notamment, qu’ un État membre a le droit d’ adopter des mesures s’ opposant à ce qu’ un prestataire de services dont l’ activité est entièrement ou principalement tournée vers son territoire utilise les dispositions du traité relatives à la libre prestation de services pour se soustraire à des règles professionnelles qui lui seraient applicables s’ il était établi sur le territoire de cet État membre. Toutefois, ayant à l’ esprit l’ arrêt du 10 juillet 1986, Segers (79/85, Rec. p. 2375), le Raad van State s’ interroge "sur la manière dont il convient de juger les activités exercées au départ d’ un État membre par un organisme de radiodiffusion constitué conformément au droit d’ un autre État membre et officiellement établi dans cet État".

11 Il a dès lors estimé nécessaire de poser deux questions préjudicielles. Ces questions sont ainsi libellées :

"1) Doit-on parler de services ayant un caractère transfrontalier pertinent au regard du droit communautaire lorsqu’ un organisme de radiodiffusion qui n’ entre pas en ligne de compte pour l’ accès au réseau câblé dans l’ État membre A émet des programmes à partir de l’ État membre B avec l’ intention manifeste, inférée de circonstances objectives, de se soustraire de cette façon à la législation de l’ État membre auquel les programmes sont principalement, mais pas exclusivement, destinés ?

2) Le droit communautaire, eu égard également aux dispositions combinées des articles 10 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’ homme et des libertés fondamentales, autorise-t-il l’ État membre destinataire à soumettre la prestation des services visés à la première question à des restrictions en vertu desquelles l’ organisme de radiodiffusion, bien qu’ il ait choisi de s’ établir dans un autre État membre, est considéré comme un organisme de radiodiffusion non étranger et se voit pour cette raison refuser l’ accès de ses programmes au réseau câblé national aussi longtemps qu’ il ne satisfait pas aux conditions d’ accès applicables aux organismes de radiodiffusion nationaux, au motif qu’ en s’ établissant dans cet autre État membre, cet organisme de radiodiffusion tente de contourner les dispositions prises par l’ État membre destinataire en vue de maintenir le caractère pluraliste et non commercial du système de radiodiffusion national ?"

Sur l’ applicabilité des règles relatives aux prestations de services

12 Par sa première question, la juridiction nationale vise à savoir, en substance, si la notion de "prestations de services" visée par les articles 59 et 60 du traité couvre la diffusion, par l’ intermédiaire d’ exploitants de réseaux de câble établis dans un État membre, de programmes télévisés offerts par un organisme de radiodiffusion établi dans un autre État membre, même si cet organisme s’ y est établi dans le but de se soustraire à la législation applicable dans l’ État de réception aux organismes nationaux de radiodiffusion.

13 Avant d’ examiner cette question, la Cour rappelle qu’ elle a déjà dit pour droit, dans l’ arrêt du 30 avril 1974, Sacchi (155/73, Rec. p. 409, point 6), que l’ émission de messages télévisés relève, en tant que telle, des règles du traité relatives aux prestations de services. Dans l’ arrêt Debauve, précité, point 8, la Cour a précisé qu’ il n’ y avait aucune raison de réserver un traitement différent à la transmission de tels messages par la voie de la télédistribution.

14 Dans le même arrêt Debauve, la Cour a cependant fait observer que les dispositions du traité relatives à la libre prestation de services ne peuvent s’ appliquer aux activités dont tous les éléments pertinents se cantonnent à l’ intérieur d’ un seul État membre. La question de savoir s’ il en va ainsi dans un cas particulier dépend de constatations de fait qu’ il appartient à la juridiction nationale d’ établir. Or, en l’ espèce, le Raad van State a établi que TV10 a été constituée en conformité de la législation luxembourgeoise, qu’ elle a son siège social au grand-duché de Luxembourg et qu’ elle avait l’ intention d’ émettre à destination des Pays-Bas.

15 La circonstance que, selon la juridiction de renvoi, TV10 se soit établie au grand-duché de Luxembourg dans le but d’ échapper à la législation néerlandaise n’ exclut pas que ses émissions puissent être considérées comme des services au sens du traité. En effet, cette question est distincte de celle de savoir quelles sont les mesures qu’ un État membre est autorisé à prendre pour empêcher le prestataire de services établi dans un autre État membre de contourner sa législation interne. Cet autre problème fait, en effet, l’ objet de la seconde question de la juridiction de renvoi.

16 Il y a lieu dès lors de répondre à la première question que la notion de "prestation de services" visée par les articles 59 et 60 du traité couvre la diffusion, par l’ intermédiaire d’ exploitants de réseaux de câbles établis dans un État membre, de programmes télévisés offerts par un organisme de radiodiffusion établi dans un autre État membre, même si cet organisme s’ y est établi dans le but de se soustraire à la législation applicable dans l’ État de réception aux organismes nationaux de radiodiffusion.

Sur la question de la légitimité de certaines restrictions à la libre prestation des services

17 Par sa seconde question, la juridiction de renvoi demande en substance si les dispositions du traité relatives à la libre prestation des services doivent être interprétées en ce sens qu’ elles s’ opposent à ce qu’ un État membre assimile à un organisme de radiodiffusion national un organisme de radiodiffusion constitué selon la législation d’ un autre État membre et établi dans cet État, mais dont les activités sont entièrement ou principalement tournées vers le territoire du premier État membre, lorsque cet établissement a eu lieu en vue de permettre à cet organisme de se soustraire aux règles qui lui seraient applicables au cas où il serait établi sur le territoire du premier État.

18 A cet égard, il y a lieu d’ abord de rappeler que, comme la Cour l’ a relevé dans ses arrêts du 25 juillet 1991, Collectieve Antennevoorziening Gouda (C-288/89, Rec. p. I-4007, points 22 et 23) et Commission/Pays-Bas (C-353/89, Rec. p. I-4069, points 3, 29 et 30), ainsi que dans l’ arrêt du 3 février 1993, Veronica Omroep Organisatie (C-148/91, Rec. p. I-487, point 9), la Mediawet vise à mettre en place un système de radiodiffusion et de télévision à caractère pluraliste et non commercial et s’ insère ainsi dans une politique culturelle qui a pour but de sauvegarder, dans le secteur audiovisuel, la liberté d’ expression des différentes composantes, notamment sociales, culturelles, religieuses ou philosophiques existant aux Pays-Bas.

19 Il résulte, en outre, de ces trois arrêts que de tels objectifs de politique culturelle constituent des objectifs d’ intérêt général qu’ un État membre peut légitimement poursuivre en élaborant le statut de ses propres organismes de radiodiffusion de manière appropriée.

20 La Cour a, par ailleurs, déjà relevé, à propos de l’ article 59 du traité, relatif à la libre prestation des services, que l’ on ne saurait dénier à un État membre le droit de prendre des mesures destinées à empêcher que les libertés garanties par le traité soient utilisées par un prestataire dont l’ activité serait entièrement ou principalement tournée vers son territoire en vue de se soustraire aux règles qui lui seraient applicables au cas où il serait établi sur le territoire de cet État (voir arrêt Van Binsbergen, précité).

21 Il en découle qu’ un État membre peut considérer comme un organisme national de radiodiffusion un organisme de radio et de télévision qui s’ installe dans un autre État membre dans le but d’ y prester des services destinés à son territoire, car cette mesure a pour objet d’ empêcher que, à la faveur de l’ exercice des libertés garanties par le traité, les organismes qui s’ établissent dans un autre État membre puissent se soustraire abusivement aux obligations découlant de la législation nationale, en l’ espèce celles visant à garantir le contenu pluraliste et non commercial des programmes.

22 Dans ces conditions, on ne saurait considérer comme incompatible avec les dispositions des articles 59 et 60 du traité l’ assimilation de tels organismes à des organismes nationaux.

23 La juridiction nationale s’ est cependant interrogée sur le point de savoir si cette assimilation ne mettait pas en péril le droit à la liberté d’ expression que garantissent les articles 10 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’ homme et des libertés fondamentales.

24 A cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, les droits fondamentaux, parmi lesquels figurent ceux garantis par la convention précitée, font partie intégrante des principes généraux du droit dont la Cour assure le respect (voir notamment, arrêt du 18 juin 1991, ERT, C-260/89, Rec. p. I-2925, point 41, et arrêt Commission/Pays-Bas, précité).

25 Or, dans l’ arrêt Commission/Pays-Bas, précité (point 30), la Cour a estimé que le maintien du pluralisme qu’ entend garantir la politique audiovisuelle néerlandaise vise à préserver la diversité des opinions, et donc la liberté d’ expression qu’ entend précisément protéger ladite convention.

26 Dans ces conditions, il y a lieu de répondre à la seconde question que les dispositions du traité relatives à la libre prestation des services doivent être interprétées en ce sens qu’ elles ne s’ opposent pas à ce qu’ un État membre assimile à un organisme de radiodiffusion national un organisme de radiodiffusion constitué selon la législation d’ un autre État membre et établi dans cet État, mais dont les activités sont entièrement ou principalement tournées vers le territoire du premier État membre, lorsque cet établissement a eu lieu en vue de permettre à cet organisme de se soustraire aux règles qui lui seraient applicables au cas où il serait établi sur le territoire du premier État.

Décisions sur les dépenses

Sur les dépens

27 Les frais exposés par les gouvernements allemand, français et néerlandais et par la Commission des Communautés européennes, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l’ objet d’ un remboursement. La procédure revêtant, à l’ égard des parties au principal, le caractère d’ un incident soulevé devant la juridiction nationale, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Dispositif

Par ces motifs,

LA COUR (cinquième chambre),

statuant sur les questions à elle soumises par la section juridictionnelle du Raad van State (Pays-Bas), par ordonnance du 11 mai 1992, dit pour droit :

1) La notion de "prestation de services" visée par les articles 59 et 60 du traité CEE couvre la diffusion, par l’ intermédiaire d’ exploitants de réseaux de câbles établis dans un État membre, de programmes télévisés offerts par un organisme de radiodiffusion établi dans un autre État membre, même si cet organisme s’ y est établi dans le but de se soustraire à la législation applicable dans l’ État de réception aux organismes nationaux de radiodiffusion.

2) Les dispositions du traité CEE relatives à la libre prestation des services doivent être interprétées en ce sens qu’ elles ne s’ opposent pas à ce qu’ un État membre assimile à un organisme de radiodiffusion national, un organisme de radiodiffusion constitué selon la législation d’ un autre État membre et établi dans cet État, mais dont les activités sont entièrement ou principalement tournées vers le territoire du premier État membre, lorsque cet établissement a eu lieu en vue de permettre à cet organisme de se soustraire aux règles qui lui seraient applicables au cas où il serait établi sur le territoire du premier État.