Test professionnel oui

Cour de cassation

chambre sociale

Audience publique du 16 septembre 2009

N° de pourvoi : 07-45485

Non publié au bulletin

Rejet

M. Chollet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président), président

SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon le jugement attaqué (Boulogne Billancourt, 24 avril 2007), que Mme X... a postulé à une offre d’emploi de M. Y..., qui exerce la profession d’avocat, pour un poste de secrétaire dactylographe ; qu’invoquant avoir exécuté une prestation de travail pour ce dernier du 13 au 17 mars 2000, Mme X... a saisi la juridiction prud’homale pour obtenir la condamnation de M. Y... au paiement de diverses sommes ;

Attendu que Mme X... fait grief au jugement de l’avoir déboutée de ses demandes de rappel de salaires, de congés payés afférents, de prime de treizième mois au prorata, de frais de transports, de dommages et intérêts pour travail dissimulé, de dommages et intérêts pour résistance abusive et de délivrance de divers documents, alors, selon le moyen :

1°/ que toute exécution d’une prestation de travail utile commande, en contrepartie, le versement d’une rémunération ; qu’en l’espèce, le conseil de prud’hommes a constaté que Mme X... avait travaillé plusieurs heures pour M. Y... ; qu’en la déboutant néanmoins de toutes ses demandes, sans rechercher dans quelle mesure le travail fourni avait été exploitable pour le cabinet de M. Y... , le conseil de prud’hommes a violé les articles L. 121 1 du code du travail, alors applicable, et 1134 du code civil ;

2°/ que ne constitue pas un test professionnel, mais une prestation de travail relevant du salariat et ouvrant droit à rémunération, la prestation exécutée par le candidat dans des conditions normales d’emploi ; qu’à cet égard, la courte durée de la prestation ne saurait suffire à la qualifier de test non rémunéré ; qu’en l’espèce, en se bornant à relever que l’essai litigieux n’avait duré que quelques heures, sans rechercher si Mme X... n’avait pas été placée dans des conditions normales d’emploi pour effectuer sa prestation, le conseil de prud’hommes a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 121 1 du code du travail, alors applicable ;

3°/ que les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes des parties sans examiner l’ensemble des pièces fournies par celles ci à l’appui de leurs prétentions ; qu’en l’espèce, outre les deux brouillons de lettre visés dans le jugement du conseil de prud’hommes, étaient produites aux débats une lettre tapée par Mme X... dès le samedi 11 mars 2000, à titre de test, afin que M. Y... puisse juger s’il entendait qu’elle vienne travailler à son cabinet la semaine suivante, ainsi que des copies de cotes de plaidoiries également tapées par Mme X..., révélant qu’elle avait ainsi fourni un travail effectif et utile au cabinet de M. Y... ; qu’en se bornant à se référer aux seuls deux brouillons de lettre, sans examiner ni encore moins analyser, même sommairement, les autres éléments de preuve susvisés, le conseil de prud’hommes a violé l’article 455 du code de procédure civile ;

4°/ que la motivation hypothétique ou dubitative équivaut à un défaut de motivation ; qu’en l’espèce, le conseil de prud’hommes, en relevant que Mme X... avait « visiblement » fait un essai, que les deux brouillons de lettre correspondaient « sans doute » à l’essai fait le 13 mars 2000 et que le fondement de ses demandes était « douteux », a fondé sa décision sur des motifs explicitement dubitatifs ; qu’il a partant violé l’article 455 du code de procédure civile ;

5°/ que l’action en paiement de salaire se prescrivant par cinq ans, le salarié est toujours en droit de réclamer, dans la limite de la prescription quinquennale, le paiement des salaires qui ne lui ont pas été réglés ; qu’en l’espèce, en retenant pour débouter l’exposante, qu’elle avait attendu la fin de l’année 2004 pour revendiquer le paiement d’un travail effectué en mars 2000, ce qui rendait « douteux » le bien fondé de ses demandes, le conseil de prud’hommes a statué par un motif radicalement inopérant, et a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 143 14 du code du travail, alors applicable, et 2277 du code civil ;

Mais attendu qu’appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve, le conseil de prud’hommes, qui a fait ressortir que la prestation pendant quelques heures de Mme X..., constituait, non pas une relation de travail impliquant que celle ci soit placée dans des conditions normales d’emploi, mais un test professionnel, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize septembre deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour Mme X...

Il est fait grief au jugement attaqué d’AVOIR débouté Mme X... de ses demandes de rappel de salaires, de congés payés afférents, de prime de 13ème mois au prorata, de frais de transports, de dommages et intérêts pour travail dissimulé, de dommages et intérêts pour résistance abusive et de délivrance de divers documents,

AUX MOTIFS QUE Mme X... a visiblement fait un essai pour le cabinet de M. Y... qui n’a duré que quelques heures, en tout cas à peine un après-midi ; que les documents produits par Mme X... ne sont que deux brouillons de lettres correspondant sans doute à l’essai fait le 13 mars 2000 ; que ces deux documents ne prouvent absolument pas une relation de travail suivie sur plusieurs jours ; que le fait que Mme X... ne se soit rappelée au souvenir de M. Y... que fin 2004 afin de réclamer son salaire démontre bien que le fondement de ses demandes est « douteux » ;

1°) ALORS QUE toute exécution d’une prestation de travail utile commande, en contrepartie, le versement d’une rémunération ; qu’en l’espèce, le conseil de prud’hommes a constaté que Mme X... avait travaillé plusieurs heures pour M. Y... ; qu’en la déboutant néanmoins de toutes ses demandes, sans rechercher dans quelle mesure le travail fourni avait été exploitable pour le cabinet de M. Y... , le conseil de prud’hommes a violé les articles L. 121-1 du code du travail, alors applicable, et 1134 du code civil ;

2°) ALORS QUE ne constitue pas un test professionnel, mais un prestation de travail relevant du salariat et ouvrant droit à rémunération, la prestation exécutée par le candidat dans des conditions normales d’emploi ; qu’à cet égard, la courte durée de la prestation ne saurait suffire à la qualifier de test non rémunéré ; qu’en l’espèce, en se bornant à relever que l’essai litigieux n’avait duré que quelques heures, sans rechercher si Mme X... n’avait pas été placée dans des conditions normales d’emploi pour effectuer sa prestation, le conseil de prud’hommes a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 121-1 du code du travail, alors applicable ;

3°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes des parties sans examiner l’ensemble des pièces fournies par celles-ci à l’appui de leurs prétentions ; qu’en l’espèce, outre les deux brouillons de lettre visés dans le jugement du conseil de prud’hommes, étaient produites aux débats une lettre tapée par Mme X... dès le samedi 11 mars 2000, à titre de test, afin que M. Y... puisse juger s’il entendait qu’elle vienne travailler à son cabinet la semaine suivante, ainsi que des copies de cotes de plaidoiries également tapées par l’exposante, révélant qu’elle avait ainsi fourni un travail effectif et utile au cabinet de M. Y... ; qu’en se bornant à se référer aux seuls deux brouillons de lettre, sans examiner ni encore moins analyser, même sommairement, les autres éléments de preuve susvisés, le conseil de prud’hommes a violé l’article 455 du code de procédure civile ;

4°) ALORS QUE la motivation hypothétique ou dubitative équivaut à un défaut de motivation ; qu’en l’espèce, le conseil de prud’hommes, en relevant que Mme X... avait « visiblement » fait un essai, que les deux brouillons de lettre correspondaient « sans doute » à l’essai fait le 13 mars 2000 et que le fondement de ses demandes était « douteux », a fondé sa décision sur des motifs explicitement dubitatifs ; qu’il a partant violé l’article 455 du code de procédure civile ;

5°) ALORS QUE l’action en paiement de salaire se prescrivant par cinq ans, le salarié est toujours en droit de réclamer, dans la limite de la prescription quinquennale, le paiement des salaires qui ne lui ont pas été réglés ; qu’en l’espèce, en retenant pour débouter l’exposante, qu’elle avait attendu la fin de l’année 2004 pour revendiquer le paiement d’un travail effectué en mars 2000, ce qui rendait « douteux » le bien-fondé de ses demandes, le conseil de prud’hommes a statué par un motif radicalement inopérant, et a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 143-14 du code du travail, alors applicable, et 2277 du code civil.
Décision attaquée : Conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt du 24 avril 2007