Rétroactivité non

Cour de cassation

chambre civile 2

Audience publique du 9 mars 2006

N° de pourvoi : 04-30220

Publié au bulletin

Rejet.

Président : M. Dintilhac., président

Rapporteur : M. Laurans., conseiller apporteur

Avocat général : Mme Barrairon., avocat général

Avocats : Me Luc-Thaler, SCP Piwnica et Molinié., avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le moyen unique

Attendu que, selon l’arrêt attaqué (Besançon, 3 février 2004) la société Exapaq Franche Comté (la société), commissionnaire de transport faisant appel à des transporteurs sous traitants, affiliés au régime d’assurance maladie et d’assurance vieillesse des travailleurs indépendants, a fait l’objet le 31 mars 1998 d’un contrôle de la Direction du travail et des transports qui a mis en évidence que certains sous traitants travaillaient dans un lien de subordination ; qu’ à la suite de ce contrôle, l’URSSAF a notifié à la société, le 5 novembre 1998, une mise en demeure de payer les cotisations afférentes à la période comprise entre le 1er octobre 1995 et le 30 juin 1998 ; que la cour d’appel a débouté l’URSSAF de ses demandes ;

Attendu que l’URSSAF fait grief à l’arrêt d’avoir dit qu’elle ne pouvait recouvrer les cotisations pour la période antérieure à la requalification des contrats de sous-traitance en emplois salariés mentionnés dans la mise en demeure du 5 novembre 1998, alors selon le moyen :

1 ) qu’une disposition législative ou réglementaire qui consacre un principe nouveau ne peut s’appliquer aux situations et rapports juridiques formés avant sa promulgation que pour autant qu’il n’en résulte pas de lésion des droits acquis ; que s’agissant des rédactions successives de l’article L. 120-3 du Code du travail, telles qu’issues des lois n° 97-210 du 11 mars 1997 et n° 2003-721 du 1er août 2003, en ce qui concerne le paiement des cotisations afférentes aux travailleurs faisant l’objet de délit de travail dissimulé, le droit à perception de ces cotisations par l’U.R.S.S.A.F était acquis au plus tard lors de la reconnaissance par la cour d’appel du délit de travail dissimulé, qu’en déniant l’existence d’un droit acquis et en retenant comme loi applicable l’article L. 120-3 du Code du travail dans sa rédaction en vigueur au moment où elle se prononçait, la cour d’appel a violé l’article 2 du Code civil et l’article L. 120-3 du Code du travail issue de la loi du 11 mars 1997 ;

2 ) que le principe d’application immédiate de la loi pénale plus douce ne peut concerner que les dispositions pénales ; qu’en l’étendant au delà de ce champ, au prétexte que les cotisations réclamées s’analyseraient comme une sanction administrative, la cour d’appel a violé tant l’article 112-1 du Code pénal que l’article L. 120-3 du Code du travail dans sa rédaction issue de la loi du 12 mars 1997 ;

Mais attendu que la cour d’appel après avoir rappelé la teneur de la loi nouvelle du 1er août 2003 et des dispositions abrogées de l’article L. 120-3 du Code du travail, dans sa rédaction issue de la loi du 11 mars 1997, a relevé que le paiement du rappel de cotisations, avec application de majorations et de pénalités, constituait une sanction ayant pour objet de pénaliser le travail dissimulé dès lors qu’il ne s’agissait pas de régulariser la situation du salarié ayant pour la période expirée, déjà cotisé dans un régime indépendant ;

Qu’elle en a, dès lors, exactement déduit que la loi nouvelle du 1er août 2003, plus douce, étant immédiatement applicable, le recouvrement des cotisations dues par l’employeur, n’était possible que pour la période postérieure à la requalification des emplois ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne l’URSSAF de Besançon aux dépens ;

Vu l’article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société Exapaq Franche Comté ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf mars deux mille six.

Publication : Bulletin 2006 II N° 73 p. 72

Décision attaquée : Cour d’appel de Besançon , du 3 février 2004