Existence d’un lien de subordination juridique non - assujetti code du travail oui

Cour de cassation

chambre sociale

Audience publique du 6 octobre 2010

N° de pourvoi : 09-40133

Non publié au bulletin

Rejet

Mme Collomp (président), président

SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. et Mme X... et la société Casino ont conclu à compter du 9 septembre 1997 divers contrats de cogérance en vue de l’exploitation de supérettes, en dernier lieu le 28 mars 2006 ; qu’ils ont contesté, à compter du mois de juin 2006, les modalités d’exécution des contrats successifs conclus avec la société Casino en remettant en cause leur qualité de mandataires au profit de la qualité de salariés placés directement sous la subordination de la société Casino ; que celle-ci a pris l’initiative, après convocation à un entretien préalable, de rompre le 1er septembre 2006 le contrat de cogérance ; que M. et Mme X... ont saisi la juridiction prud’homale afin d’obtenir la requalification des relations contractuelles en contrats de travail, la fixation d’un salaire afin d’établir les sommes dues par la société Casino au titre de la rupture des relations professionnelles, et le paiement d’heures de travail ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal :
Attendu que M. et Mme X... font grief à l’arrêt de les débouter de leurs demandes tendant à la requalification de la relation contractuelle en contrats de travail alors, selon le moyen :
1° / que l’existence d’un lien de subordination est exclusive du statut de gérant non salarié de succursale des commerces de détail alimentaire ; qu’il résulte des énonciations de l’arrêt attaqué que les époux X... assuraient l’exploitation des succursales dans le cadre d’un service organisé mis en place par la société Casino et définissant les conditions de participation des gérants à la politique commerciale comportant l’obligation de vendre les marchandises fournies par la société Casino ou par ses fournisseurs agréées aux prix imposés, de participer aux actions promotionnelles et publicitaires proposées, de présenter les marchandises selon l’agencement fixé par la société, de se conformer à l’utilisation de divers documents transmis par la société, de se soumettre aux contraintes de l’installation locale de la succursale, de porter une tenue vestimentaire imposée, de se conformer à des heures d’ouverture et fermeture, et d’occuper un logement de fonction ; qu’en écartant le statut de salarié en l’état de ces constatations caractérisant l’existence d’un lien de subordination, la cour d’appel a violé les articles L. 121-1 et L. 781-2 du code du travail devenus L. 1221-1 et L. 7322-2 du code du travail ;
2° / que les époux X... démontraient par la production de

nombreuses pièces être soumis à des consignes très précises concernant notamment leurs rapports à la clientèle, ainsi qu’à une gestion de carrière imposée par la société Casino ; qu’en laissant sans réponse ce moyen déterminant des écritures d’appel des salariés incontestablement de nature à caractériser l’existence d’un lien de subordination, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
3° / qu’est gérant non salarié toute personne qui exploite, moyennant des remises proportionnelles au montant des ventes, les succursales des commerces de détail alimentaire ou des coopératives de consommation lorsque le contrat intervenu ne fixe pas les conditions de son travail et lui laisse toute latitude d’embaucher des salariés ou de se faire remplacer à ses frais et sous son entière responsabilité ; qu’en s’abstenant de rechercher, ainsi qu’elle y était pourtant invitée, si les époux X... ne percevaient pas une rémunération forfaitaire sans lien avec le montant des ventes, et en conséquence incompatible avec le statut de gérant non salarié de succursales de commerce de détail alimentaire, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard de l’article L. 782-1 du code du travail alors en vigueur, devenu L. 7322-2 du code du travail ;
4° / qu’est gérant non salarié toute personne qui exploite, moyennant des remises proportionnelles au montant des ventes, les succursales des commerces de détail alimentaire ou des coopératives de consommation lorsque le contrat intervenu ne fixe pas les conditions de son travail et lui laisse toute latitude d’embaucher des salariés ou de se faire remplacer à ses frais et sous son entière responsabilité ; que les époux X... soutenaient n’avoir aucune liberté d’engager du personnel ni aucune responsabilité dans la gestion du personnel qui était assurée par les services comptables et administratif de la société Casino ; qu’ils étayaient ces affirmations par la production de diverses pièces telles que jugements, plumitif d’audience, attestation, et courrier de la société Casino ; qu’en affirmant que « Yves et Nadia X... sont dans l’incapacité de produire aux débats des instructions personnelles visant à leur imposer l’embauche de personnel déterminé » sans analyser ni même viser les pièces ainsi produites, la cour d’appel n’a pas satisfait aux exigences de l’article 455 du code de procédure civile ;
5° / qu’en retenant que « le recours à des professionnels exerçant habituellement au sein de la structure Casino (comptable-avocat) doit être considéré comme entrant dans le cadre de l’aide que la société Casino leur a apporté dans la gestion des succursales et plus particulièrement dans la gestion des salaires et charges sociales dus aux salariés placés directement sous leur autorité et dans la gestion des conflits de travail les ayant opposé à leurs salariés, faute de pouvoir eux-mêmes prétendre assurer de telles tâches par leurs propres moyens ou en ayant recours à des relations professionnelles extérieures à la société », la cour d’appel qui a ainsi caractérisé l’impossibilité pour les époux X... d’embaucher du personnel sous leur responsabilité, n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l’article L. 782-1 du code du travail alors en vigueur, devenu L. 7322-2 du code du travail ;
6° / qu’’en retenant, pour justifier sa décision, que les époux X... admettaient avoir pu refuser sans sanction d’ouvrir le magasin les jours fériés quand le défaut de mise en oeuvre de son pouvoir disciplinaire par l’employeur dans une hypothèse où il aurait éventuellement pu y recourir ne peut exclure l’existence d’un lien de subordination, la cour d’appel a statué par un motif inopérant en violation de l’article 455 du code de procédure civile ;
7° / que les époux X... produisaient aux débats pas moins de douze pièces différentes établissant l’obligation qui leur était faite d’accepter des marchandises non commandées ; qu’en affirmant que « Yves et Nadia X... sont dans l’incapacité de produire aux débats des instructions personnelles visant à leur imposer … l’acceptation de marchandises non commandées », la cour d’appel a dénaturé ces pièces en violation de l’article 1134 du code civil ;
8° / qu’à tout le moins, en statuant ainsi sans analyser ni même viser les pièces ainsi produites aux débats, la cour d’appel a de nouveau méconnu les exigences de l’article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu, d’abord, que la cour d’appel a retenu que M. et Mme X... ne pouvaient tirer des conditions d’exécution de leur travail selon l’organisation définie par la société Casino la preuve de l’existence d’un contrat de travail alors qu’ils avaient pu, sans contrôle de cette société, organiser librement l’exercice personnel de leur activité professionnelle à l’intérieur des différentes succursales en ce qui concerne la répartition des heures de travail entre ouverture et fermeture, les relations avec la clientèle et les relations avec le personnel embauché ou repris ;
Attendu, ensuite, qu’appréciant la valeur et la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis sans être tenue de s’expliquer sur ceux qu’elle décidait d’écarter, la cour d’appel a estimé que M. et Mme X... étaient dans l’incapacité de produire aux débats des instructions personnelles visant à leur imposer l’embauche de personnel déterminé, la reprise de certains salariés n’ayant résulté que de l’application des dispositions relatives au maintien des contrats de travail en cas de transfert d’entreprise, ou à imposer aux cogérants leur remplacement par des personnes dénommées durant leurs congés, l’acceptation de marchandises non commandées et le recours à des professionnels, tels que comptables ou avocats, exerçant habituellement au sein de la structure Casino, ces derniers moyens devant être considérés comme entrant dans le cadre de l’aide que la société Casino leur a apportée dans la gestion des succursales ;
Que la cour d’appel, qui a fait ressortir que les contraintes pesant sur l’activité professionnelle de M. et Mme X... selon les conditions d’organisation déterminées par la société Casino, n’excédaient pas les limites du cadre inhérent aux relations entre la maison mère et les gérants non salariés de succursales de maison d’alimentation, et relevé que le seul fait, pour cette société, de verser temporairement aux deux cogérants, rémunérés par des remises proportionnelles au montant des ventes, une rémunération forfaitaire complémentaire pour l’exploitation d’une station service à Massy, ne pouvait suffire à les soustraire au statut de gérants non salariés a, répondant aux moyens développés dans les conclusions déposées devant elle, sans dénaturer les éléments de preuve qu’elle a examinés, et effectuant les recherches qui lui étaient demandées, justifié sa décision ;
D’où il suit que le moyen n’est fondé en aucune de ses branches ;
Sur le deuxième moyen du pourvoi principal :
Attendu que M. et Mme X... font grief à l’arrêt de les débouter de leurs demandes en paiement de rappels de salaires, d’heures supplémentaires et congés payés afférents alors, selon le moyen :
1° / que les gérants non salariés de succursales de maisons d’alimentation de détails bénéficient de tous les avantages accordés aux salariés par la législation sociale ; que la preuve des heures de travail effectuées n’incombe spécialement à aucune des parties ; qu’en retenant que les époux X... ne démontraient pas s’être vu imposer l’exécution d’heures supplémentaires quand elle devait exiger de la société Casino qu’elle lui fournisse les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par les époux, et former sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par les époux, la cour d’appel a violé l’article L. 212-1-1 du code du travail alors en vigueur, actuellement article L. 3171-4 du code du travail ;
2° / qu’en se bornant à reprocher aux époux X... de ne pas démontrer qu’ils s’étaient vu imposer l’exécution d’heures supplémentaires sans rechercher si les horaires d’ouverture et de fermeture de la succursale, auxquels les époux étaient soumis, et la réalisation des nombreuses tâches qui leur étaient confiées n’exigeaient pas de leur part la réalisation d’heures supplémentaires de travail, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 212-1-1 du code du travail alors en vigueur, actuellement article L. 3171-4 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d’appel, qui a retenu que M. et Mme X... ne démontraient pas que la société Casino leur avait imposé à titre individuel l’exécution d’horaires de travail déterminés, hors les horaires d’ouverture et de fermeture des succursales, a légalement justifié sa décision ;
Et sur le troisième moyen du pourvoi principal :
Attendu que M. et Mme X... font grief à l’arrêt de les débouter de leurs demandes d’indemnités compensatrices de préavis, congés payés afférents et d’indemnités de licenciement, alors, selon le moyen, que les gérants non salariés de succursales de maisons d’alimentation de détails bénéficient de tous les avantages accordés aux salariés par la législation sociale ; qu’en déboutant chacun des époux de ses demandes tendant au paiement d’une indemnité compensatrice de préavis, des congés payés y afférents et d’une indemnité de licenciement, la cour d’appel a violé l’article L. 782-7 du code du travail alors en vigueur, devenu L. 7322-1 du code du travail ;
Mais attendu que sous le couvert d’un grief de violation de la loi, le moyen critique une omission de statuer sur des chefs de demande ; que l’omission de statuer pouvant être réparée par la procédure prévue à l’article 463 du code de procédure civile, le moyen n’est pas recevable ;
Sur le pourvoi incident de la société Casino :
Attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer sur les moyens de ce pourvoi, qui ne seraient pas de nature à permettre son admission ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois tant principal qu’incident ;
Laisse à chaque partie la charge des dépens afférents à son pourvoi ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six octobre deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat de M. X... et de Mme Y....
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR débouté les époux X... de leurs demandes tendant à la requalification de la relation contractuelle en contrats de travail et à la condamnation de la société CASINO au paiement de rappels de salaires, heures supplémentaires, indemnités compensatrices de préavis, congés payés y afférents et indemnités de licenciement.
AUX MOTIFS QUE tous les contrats qualifiés de co-gérance conclus entre Yves et Nadia X... d’une part et la société CASINO d’autre part font référence aux dispositions prévues par les articles L. 782-1 et suivants du Code du travail (devenus les articles L. 7322-1 et suivants) et par l’accord collectif national des maisons d’alimentation à succursales, supermarchés, hypermarchés, gérants mandataires en date du 18 juillet 1963 modifié, ces dispositions fixant les modalités d’exécution du travail des gérants non salariés qui exploitent des succursales moyennant des remises proportionnelles sur les ventes tout en conservant toute latitude pour embaucher du personnel, se substituer des remplaçants et pour organiser leur exploitation ; qu’Yves et Nadia X..., qui avaient déjà occupé des fonctions similaires avant la conclusion entre 1997 et 2006 de contrats de co-gérance avec la société CASINO, ne peuvent invoquer avoir été trompés sur les conditions d’exploitation des succursales diverses mises à leur disposition à QUISSAC, OLLAINVILLE, MASSY et NEUILLY-SUR-SEINE ou pendant la durée des remplacements effectués pour le compte des gérants mandataires non salariés de succursales appartenant à la société CASINO pendant les congés annuels pris par ceux-ci ; qu’en fait, Yves et Nadia X... n’ont remis en cause la validité des contrats de cogérance pour réclamer leur requalification en contrats de travail de doit commun qu’à partir des difficultés qu’ils ont rencontrées dans le cadre du règlement des comptes afférents à la gestion de la station-service exploitée à MASSY durant la période d’octobre 2004 à décembre 2005 ; que l’existence d’une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu’elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de faits dans lesquelles est exercées l’activité des travailleurs ; qu’à cet égard, pour démontrer la réalité d’un travail effectué sous la subordination de la société CASINO, exclusif de le qualification du contrat de gérant non salarié, Yves et Nadia X... doivent démontrer qu’ils ont exploité les diverses succursales sous la subordination de la société CASINO dans l’exercice du travail lui-même, un tel lien de subordination étant caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a leu pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; qu’au cas présent, il n’est pas contesté qu’Yves et Nadia X... ont effectivement assuré l’exploitation des succursales dans le cadre d’un service organisé mis en place par la société CASINO et définissant, conformément aux dispositions légales et de l’accord collectif du 18 juin 1963 déjà citées, les conditions de participation des gérants à la politique commerciale (article 34) : obligation de vendre les marchandises fournies par la société CASINO ou les fournisseurs agréés par elle aux prix imposés par celle-ci – obligation d’assurer la présentation des marchandises selon l’agencement fixé par la société – obligations de se conformer à l’utilisation des divers documents transmis par la société ; que toutefois, Yves et Nadia X... ne peuvent tirer des conditions d’exécution de leur travail selon l’organisation définie par la société CASINO (obligations de se soumettre au port d’une tenue vestimentaire imposée et aux heures d’ouverture et de fermeture des magasins – obligations de respecter l’agencement particulier des produits vendus – obligations de se soumettre à une liste de fournisseurs, aux contraintes de l’installation locale de la succursale et du logement de fonction et aux prix imposés) la preuve de l’exécution d’un contrat de travail obéissant aux règles de droit commun alors qu’en dehors des contraintes ainsi rappelées ils ont pu, sans contrôle de la société CASINO, organiser librement l’exercice personnel de leur activité professionnelle à l’intérieur des succursales en ce qui concerne la répartition des heures de travail entre ouverture et fermeture de la succursale, les relations avec la clientèle et les relations avec le personnel embauché ou repris et alors qu’ils admettent eux-mêmes qu’ils ont pu refuser, sans encourir de sanction d’ouvrir le magasin situé à NEUILLY-SUR-SEINE pendant les jours fériés auxquels la société souhaitait voir assurer l’exploitation de cet établissement ; qu’enfin Yves et Nadia X... sont dans l’incapacité de produire aux débats des instructions personnelles visant à leur imposer l’embauche de personnel déterminé (les salariés repris lors de l’installation dans les succursales bénéficiant des dispositions sur les transferts des contrats de travail conformément à l’article L. 122-12 du Code du travail), leur remplacement par des personnes dénommées durant leurs congés, l’acceptation de marchandises non commandées et plus généralement le recours à des professionnels exerçant habituellement au sein de la structure CASINO (comptable – avocat), ces derniers moyens devant être considérés comme entrant dans le cadre de l’aide que la société CASINO leur a apporté dans la gestion des succursales et plus particulièrement dans la gestion des salaires et charges sociales dus aux salariés placés directement sous leur autorité et dans la gestion des conflits de travail les ayant opposé à leurs salariés, faute de pouvoir eux-mêmes prétendre assurer de telles tâches par leurs propres moyens ou en ayant recours à des relations professionnelles extérieures à la société ; qu’en conséquence il convient d’infirmer les jugements déférés et de débouter Yves et Nadia X... de leurs demandes tendant à voir requalifier leurs contrats de gérance en contrats de travail ; qu’indépendamment de toute réclamation au titre de la requalification de la relation de travail, Yves et Nadia X... ne peuvent obtenir le paiement de rappels de salaires sur la base des minima fixés par le Code du travail pour un travail salarié dès lors qu’ils ne démontrent pas que dans le cadre de l’exécution des contrat de gérance la société CASINO leur a imposés à titre individuel l’exécution d’horaires de travail déterminés, hors les horaires d’ouverture et de fermeture des succursales.
ALORS QUE l’existence d’un lien de subordination est exclusive du statut de gérant non salarié de succursale des commerces de détail alimentaire ; qu’il résulte des énonciations de l’arrêt attaqué que les époux X... assuraient l’exploitation des succursales dans le cadre d’un service organisé mis en place par la société CASINO et définissant les conditions de participation des gérants à la politique commerciale comportant l’obligation vendre les marchandises fournies par la société CASINO ou par ses fournisseurs agréées aux prix imposés, de participer aux actions promotionnelles et publicitaires proposées, de présenter les marchandises selon l’agencement fixé par la société, de se conformer à l’utilisation de divers documents transmis par la société, de se soumettre aux contraintes de l’installation locale de la succursale, de porter une tenue vestimentaire imposée, de se conformer à des heures d’ouverture et fermeture, et d’occuper un logement de fonction ; qu’en écartant le statut de salarié en l’état de ces constatations caractérisant l’existence d’un lien de subordination, la Cour d’appel a violé les articles L. 121-1 et L. 781-2 du Code du travail devenus L. 1221-1 et L. 7322-2 du Code du travail.
ET ALORS QUE les époux X... démontraient par la production de nombreuses pièces être soumis à des consignes très précises concernant notamment leurs rapports à la clientèle, ainsi qu’à une gestion de carrière imposée par la société CASINO ; qu’en laissant sans réponse ce moyen déterminant des écritures d’appel des salariés incontestablement de nature à caractériser l’existence d’un lien de subordination, la Cour d’appel a violé l’article 455 du Code de procédure civile.
ALORS encore QU’est gérant non salarié toute personne qui exploite, moyennant des remises proportionnelles au montant des ventes, les succursales des commerces de détail alimentaire ou des coopératives de consommation lorsque le contrat intervenu ne fixe pas les conditions de son travail et lui laisse toute latitude d’embaucher des salariés ou de se faire remplacer à ses frais et sous son entière responsabilité ; qu’en s’abstenant de rechercher, ainsi qu’elle y était pourtant invitée, si les époux X... ne percevaient pas une rémunération forfaitaire sans lien avec le montant des ventes, et en conséquence incompatible avec le statut de gérant non salarié de succursales de commerce de détail alimentaire, la Cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard de l’article L. 782-1 du Code du travail alors en vigueur, devenu L. 7322-2 du Code du travail.

ET ALORS QU’est gérant non salarié toute personne qui exploite, moyennant des remises proportionnelles au montant des ventes, les succursales des commerces de détail alimentaire ou des coopératives de consommation lorsque le contrat intervenu ne fixe pas les conditions de son travail et lui laisse toute latitude d’embaucher des salariés ou de se faire remplacer à ses frais et sous son entière responsabilité ; que les époux X... soutenaient n’avoir aucune liberté d’engager du personnel ni aucune responsabilité dans la gestion du personnel qui était assurée par les services comptables et administratif de la société CASINO ; qu’ils étayaient ces affirmations par la production de diverses pièces telles que jugements, plumitif d’audience, attestation, et courrier de la société CASINO ; qu’en affirmant que « Yves et Nadia X... sont dans l’incapacité de produire aux débats des instructions personnelles visant à leur imposer l’embauche de personnel déterminé » sans analyser ni même viser les pièces ainsi produites, la Cour d’appel n’a pas satisfait aux exigences de l’article 455 du Code de procédure civile.
ET QU’en retenant que « le recours à des professionnels exerçant habituellement au sein de la structure CASINO (comptable – avocat) doit être considéré comme entrant dans le cadre de l’aide que la société CASINO leur a apporté dans la gestion des succursales et plus particulièrement dans la gestion des salaires et charges sociales dus aux salariés placés directement sous leur autorité et dans la gestion des conflits de travail les ayant opposé à leurs salariés, faute de pouvoir eux-mêmes prétendre assurer de telles tâches par leurs propres moyens ou en ayant recours à des relations professionnelles extérieures à la société », la Cour d’appel qui a ainsi caractérisé l’impossibilité pour les époux X... d’embaucher du personnel sous leur responsabilité, n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l’article L. 782-1 du Code du travail alors en vigueur, devenu L. 7322-2 du Code du travail.
ALORS de plus QU’en retenant, pour justifier sa décision, que les époux X... admettaient avoir pu refuser sans sanction d’ouvrir le magasin les jours fériés quand le défaut de mise en oeuvre de son pouvoir disciplinaire par l’employeur dans une hypothèse où il aurait éventuellement pu y recourir ne peut exclure l’existence d’un lien de subordination, la Cour d’appel a statué par un motif inopérant en violation de l’article 455 du Code de procédure civile.
ALORS enfin QUE les époux X... produisaient aux débats pas moins de 12 pièces différentes établissant l’obligation qui leur était faite d’accepter des marchandises non commandées ; qu’en affirmant que « Yves et Nadia X... sont dans l’incapacité de produire aux débats des instructions personnelles visant à leur imposer … l’acceptation de marchandises non commandées », la Cour d’appel a dénaturé ces pièces en violation de l’article 1134 du Code civil.
QU’à tout le moins, en statuant ainsi sans analyser ni même viser les pièces ainsi produites aux débats, la Cour d’appel a de nouveau méconnu les exigences de l’article 455 du Code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR débouté les époux X... de leurs demandes en paiement de rappels de salaires, d’heures supplémentaires et congés payés y afférents.
AUX MOTIFS QU’indépendamment de toute réclamation au titre de la requalification de la relation de travail, Yves et Nadia X... ne peuvent obtenir le paiement de rappels de salaires sur la base des minima fixés par le Code du travail pour un travail salarié dès lors qu’ils ne démontrent pas que dans le cadre de l’exécution des contrat de gérance la société CASINO leur a imposés à titre individuel l’exécution d’horaires de travail déterminés, hors les horaires d’ouverture et de fermeture des succursales.
ALORS QUE les gérants non salariés de succursales de maisons d’alimentation de détails bénéficient de tous les avantages accordés aux salariés par la législation sociale ; que la preuve des heures de travail effectuées n’incombe spécialement à aucune des parties ; qu’en retenant que les époux X... ne démontraient pas s’être vu imposer l’exécution d’heures supplémentaires quand elle devait exiger de la société CASINO qu’elle lui fournisse les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par les époux, et former sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par les époux, la Cour d’appel a violé l’article L. 212-1-1 du Code du travail alors en vigueur, actuellement article L-3171-4 du Code du travail.
ET ALORS en tout cas QU’en se bornant à reprocher aux époux X... de ne pas démontrer qu’ils s’étaient vu imposer l’exécution d’heures supplémentaires sans rechercher si les horaires d’ouverture et de fermeture de la succursale, auxquels les époux étaient soumis, et la réalisation des nombreuses tâches qui leur étaient confiées n’exigeaient pas de leur part la réalisation d’heures supplémentaires de travail, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 212-1-1 du Code du travail alors en vigueur, actuellement article L-3171-4 du Code du travail.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR débouté les époux X... de leurs demandes en paiement d’indemnités compensatrices de préavis, congés payés y afférents et d’indemnités de licenciement.
AUX MOTIFS QU’Yves et Nadia X... peuvent prétendre au paiement de dommages-intérêts :- au titre de la rupture abusive de leur contrat, conformément aux dispositions prévues par l’article L. 782-5 du Code du travail (devenu L. 7322-5) et l’article 14 de l’accord collectif du 18 juillet 1963,- au titre du respect de la clause de non concurrence stipulée sans contrepartie financière qui a limité pendant une durée de trois années leur possibilité d’exercer une autre activité commerciale.
ALORS QUE les gérants non salariés de succursales de maisons d’alimentation de détails bénéficient de tous les avantages accordés aux salariés par la législation sociale ; qu’en déboutant chacun des époux de ses demandes tendant au paiement d’une indemnité compensatrice de préavis, des congés payés y afférents et d’une indemnité de licenciement, la Cour d’appel a violé l’article L. 782-7 du Code du travail alors en vigueur, devenu L. 7322-1 du Code du travail.

Moyens produits au pourvoi incident par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour la société Distribution Casino France.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’AVOIR condamné la société CASINO à payer à chacun des époux X... 40. 000 € à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive de son contrat de gérance,
AUX MOTIFS QUE la société CASINO a procédé le 1er septembre 2006 à la résiliation du dernier contrat de co-gérance en invoquant la contestation élevée au cours du mois de juillet 2006 par Yves et Nadia X... de leur statut de mandataire ; que toutefois elle ne démontre pas que cette contestation élevée à propos des difficultés rencontrées par les gérants dans le cadre de la rupture du précédent contrat (principalement le contrat visant l’exploitation de la station-service située à Massy) a rendu impossible la poursuite des relations professionnelles ; qu’en effet aucun élément n’établit que les gérants n’ont plus respecté à compter de cette date la politique commerciale mise en place depuis leur entrée dans la succursale de Neuilly-sur-Seine le 28 mars 2006 ; qu’ainsi la rupture n’est pas fondée sur un motif réel et sérieux ; qu’après avoir pris en considération l’ancienneté des relations entre les parties et la brutalité de la rupture de celles-ci, la cour condamne la société CASINO à payer à chacun des époux X... la somme de 40. 000 € à titre de dommages et intérêts ;
ALORS QU’un désaccord contractuel profond entre l’entreprise propriétaire d’une succursale et le gérant non salarié chargé de l’exploiter constitue un motif réel et sérieux de résiliation du contrat de gérance ; qu’il en va notamment ainsi de la contestation, élevée à tort par le gérant non salarié, de son statut de mandataire indépendant et de sa demande infondée de requalification en contrat de travail, ce comportement remettant en cause l’essence même et la nature des relations contractuelles ainsi que la politique commerciale de l’entreprise mandante dès lors que l’ensemble des succursales de cette dernière sont exploitées par des gérants non salariés ; qu’en jugeant le contraire, la cour d’appel a violé l’article 14 de l’accord collectif national des maisons d’alimentation à succursales, supermarchés, hypermarchés, « Gérants – Mandataires » du 18 juillet 1963.
SECOND MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’AVOIR condamné l’exposante à verser aux Epoux X... la somme de 5 000 euros chacun à titre de dommages et intérêts sanctionnant l’exécution d’une clause de non concurrence irrégulière.
AUX MOTIFS QU’« il n’est pas contesté qu’Yves et Nadia X... ont respecté la clause de non concurrence ; que le respect d’une telle clause nulle car dépourvue de contrepartie financière leur a occasionné un préjudice qu’il convient de réparer par l’attribution d’une indemnité que la Cour fixe pour chacun à 5 000 € » ;
1. ALORS QUE les parties à un contrat de gérance non salariée de succursale de maison d’alimentation de détail, sont libres d’y insérer une clause de non-concurrence dépourvue de contrepartie financière ; qu’en retenant que les gérants non salariés des succursales des maisons d’alimentation de détail pouvaient prétendre au bénéfice d’une indemnité dès lors que leur contrat comportait une clause de non-concurrence dépourvue de contrepartie financière, la Cour d’appel a violé l’article 1134 du Code civil, ensemble l’article L. 782-1 devenu L. 7322-2 du Code du travail ;
2. ALORS en tout état de cause QUE seuls les salariés peuvent se prévaloir de la nullité de la clause de non-concurrence ne comportant pas de contrepartie financière ; que dès lors, en considérant que les Epoux X... pouvaient, en leur qualité de gérants mandataires non salariés, se prévaloir de la nullité d’une clause de non concurrence ne comportant pas de contrepartie financière, la Cour d’appel a violé l’article 1134 du Code civil.

Décision attaquée : Cour d’appel de Versailles , du 13 novembre 2008