Article L.8271-1 du code du travail exclusif article L.241-7 du css

Cour de cassation

chambre civile 2

Audience publique du 9 octobre 2014

N° de pourvoi : 12-28958

ECLI:FR:CCASS:2014:C201564

Non publié au bulletin

Rejet

Mme Flise (président), président

SCP Boutet-Hourdeaux, SCP Jean-Philippe Caston, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Grenoble, 2 octobre 2012), qu’à la suite d’un contrôle effectué dans le bar-restaurant exploité par M. X..., l’URSSAF des Hautes-Alpes lui a notifié un redressement portant sur la période s’étendant du 15 décembre 2008 au 15 avril 2009 et lui a adressé une mise en demeure datée du 8 janvier 2010 ; que, contestant ce redressement, l’intéressé a saisi d’un recours une juridiction de sécurité sociale ;
Attendu que M. X...fait grief à l’arrêt de valider le redressement, alors, selon le moyen, que les agents de contrôle de l’URSSAF ne sont autorisés à entendre les salariés que dans l’entreprise ou sur les lieux de travail ; qu’en validant le redressement et la mise en demeure litigieux en ce que les déclarations des salariés, résultant des auditions faites par l’agent de contrôle, n’étaient pas essentielles à la solution du litige comme ne faisant que confirmer ce qu’il avait relevé au vu des documents que l’employeur lui avait communiqués, sans vérifier, avant d’apprécier ces déclarations, si en amont l’agent de contrôle avait effectivement entendu les salariés dans l’entreprise ou sur les lieux de travail, la cour d’appel a violé l’article R. 243-59 du code de la sécurité sociale ;
Mais attendu qu’ayant constaté que le contrôle avait été engagé sur le fondement des articles L. 8271-1 et suivants du code du travail relatifs à la lutte contre le travail illégal, la cour d’appel n’avait pas à répondre au moyen tiré d’une violation de l’article R. 243-59 du code de la sécurité sociale, cette disposition n’étant applicable qu’aux contrôles effectués en application de l’article L. 243-7 ;
D’où il suit que le moyen est inopérant ;
Et attendu que les autres branches du moyen ne sont pas de nature à permettre l’admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X...aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X..., le condamne à payer à l’URSSAF des Hautes-Alpes la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf octobre deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Caston, avocat aux Conseils, pour M. X....
Il est fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’AVOIR validé le redressement notifié à Monsieur X...le 16 septembre 2009 et la mise en demeure du 8 janvier 2010 ;
AUX MOTIFS QUE c’est à bon droit que les premiers juges ont écarté le moyen tiré de la nullité de la procédure de contrôle dès lors que lorsqu’un contrôle est opéré dans le cadre de la lutte contre le travail dissimulé, la rédaction d’un procès-verbal signé par l’agent chargé du contrôle et par la personne auditionnée, n’est qu’une faculté ; que lors du contrôle effectué le mardi 17 février 2009 à 21 h 00, l’inspecteur du recouvrement s’est fait remettre divers documents dont il donne la liste en page 2 de la lettre d’observations (bulletins de salaire et livre de paie jusqu’au mois d’avril 2009, contrats de travail, registre du personnel, plannings du 7 au 13 février et de la semaine en cours ¿) ; qu’il a croisé ces documents entre eux, ce dont il est ressorti : 1 ¿ que les horaires figurant sur les plannings sont systématiquement supérieurs aux horaires mentionnés sur les contrats de travail rémunérés sur les bulletins de salaire ; qu’ainsi cinq salariés, dont la durée hebdomadaire de travail est de 15 heures, doivent selon le planning de la semaine en cours travailler 46 heures et un autre 42 heures ; que deux salariés dont la durée hebdomadaire de travail est de 35 heures doivent également travailler 46 heures selon le planning de la semaine en cours ; 2- que deux salariés figurant sur le planning de la semaine en cours pour 46 heures (D...) et 9 heures (B...) n’ont ni contrat de travail, ni bulletins de salaire ; que cette constatation n’a jamais donné lieu à aucune explication de la part de Monsieur X... ; 3- que les heures complémentaires accomplies au cours de cette semaine n’ont pas été prises en compte ; qu’ainsi les salariés dont l’horaire hebdomadaire est de 15 heures et qui au cours de la semaine du contrôle ont travaillé 46 heures ont accompli 31 heures complémentaires ; qu’en dépit de cela, un salarié (Y...) a été rémunéré de 25 heures complémentaires pour tout le mois de février 2009, et un autre salarié (Z...) d’une heure complémentaire pour ce même mois, quand il avait accompli 31 heures au cours de la seule semaine du contrôle ; qu’en l’état de ces constatations objectives faites à partir des propres documents établis par l’employeur, les déclarations des salariés ne sont pas essentielles à la solution du litige puisqu’elles ne font que confirmer ce que l’inspecteur a relevé au vu des documents qu’il s’est fait communiquer ; que la Cour ne se trouve donc pas en situation d’avoir à « avaliser les assertions du vérificateur », renonçant ainsi à son pouvoir de contrôle ; que l’absence d’un traducteur assermenté n’est pas de nature à invalider les éléments recueillis par l’inspecteur, émanant de salariés en contact avec une clientèle parlant le français qui étaient en mesure de comprendre ce qui leur était demandé ; que c’est inutilement que Monsieur X...soutient que la semaine du contrôle est « probablement la semaine la plus chargée de l’année », alors qu’ainsi que le relève l’URSSAF, les vacances de février se déroulent sur quatre semaines ; que c’est en vain que Monsieur X...argumente sur la requalification des contrats de travail à temps partiel en contrats de travail à temps plein alors qu’il ressort de la lettre d’observations du 16 septembre 2009 et de la réponse de l’inspecteur adressée à Monsieur X...le 24 octobre 2009, que la taxation forfaitaire n’a pas été faite sur la base de contrats de travail à temps plein ; que si tel avait été le cas, un volume de 10. 800 heures de travail aurait été chiffré pour la saison au lieu des 7. 453 heures calculées (outre 142 heures de musiciens) ; que compte tenu des horaires d’ouverture de l’établissement tels que rappelés dans le courrier du 24 octobre 2009 (de 8 h 00 à 2 h 00 du matin, 7 jours sur 7), d’un service de restauration assuré en continu, de l’existence d’une terrasse et en l’état des approximations de l’employeur, c’est sans méconnaître les dispositions de l’article R. 242-5 du Code de la sécurité sociale que l’URSSAF a établi le redressement sur la base forfaitaire de 430 heures de travail hebdomadaire ; que le jugement du 16 septembre 2011 sera infirmé en toutes ses dispositions et le redressement validé (arrêt, p. 3 et 4) ;
1°) ALORS QUE les agents de contrôle de l’URSSAF ne sont autorisés à entendre les salariés que dans l’entreprise ou sur les lieux de travail ; qu’en validant le redressement et la mise en demeure litigieux en ce que les déclarations des salariés, résultant des auditions faites par l’agent de contrôle, n’étaient pas essentielles à la solution du litige comme ne faisant que confirmer ce qu’il avait relevé au vu des documents que l’employeur lui avait communiqués, sans vérifier, avant d’apprécier ces déclarations, si en amont l’agent de contrôle avait effectivement entendu les salariés dans l’entreprise ou sur les lieux de travail, la Cour d’appel a violé l’article R. 243-59 du Code de la sécurité sociale ;
2°) ALORS QUE si l’agent de contrôle de l’URSSAF détient la faculté de procéder à l’audition de salariés de l’entreprise sans nécessité de formaliser cette diligence par un procès-verbal, il doit néanmoins, pour se conformer au respect du principe fondamental des droits de la défense, spécialement au respect de l’égalité des armes, composante essentielle du droit à un procès équitable, communiquer au cotisant la teneur exacte des indications fournies par les salariés au cours de ces auditions, ayant eu une incidence sur la décision de l’URSSAF de redresser l’entreprise ; qu’au demeurant, en retenant ainsi que les déclarations des salariés n’étaient pas essentielles à la solution du litige comme ne faisant que confirmer ce que l’agent de contrôle avait relevé au vu des documents communiqués par l’employeur, sans rechercher si les indications fournies par les salariés de Monsieur X...lors des auditions litigieuses n’avaient pas eu une incidence déterminante sur la décision de l’URSSAF de redresser l’entreprise et, partant, si l’absence de communication à Monsieur X...de la teneur exacte de ces déclarations n’avait pas méconnu le principe de l’égalité des armes, composante essentielle du droit à un procès équitable, la Cour d’appel a violé l’article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles R. 243-59 du Code de la sécurité sociale et L. 8271-11 du Code du travail ;
3°) ALORS QUE les juges sont tenus de répondre aux conclusions des parties ; qu’en ajoutant, pour valider le redressement et la mise en demeure litigieux, que l’absence d’un traducteur assermenté n’était pas de nature à invalider les éléments recueillis par l’agent de contrôle, ces éléments émanant de salariés qui, en contact avec une clientèle parlant le français, étaient en mesure de comprendre ce qui leur était demandé, sans répondre précisément au moyen des conclusions d’appel de Monsieur X...faisant valoir que ses salariés étant tous de nationalité anglaise et qu’aucun d’entre eux ne parlait couramment la langue française, de sorte que l’agent de contrôle aurait dû être accompagné d’un traducteur assermenté et, qu’en son absence, un doute sérieux subsistait quant à la compréhension des questions posées aux salariés en question, affectant la teneur des propos ainsi recueillis et, partant, rendant nulle la mise en demeure litigieuse et déchargeant Monsieur X...du montant de la dette de redressement, la Cour d’appel a violé l’article 455 du Code de procédure civile ;
4°) ALORS QUE les juges sont tenus de répondre aux conclusions des parties ; qu’en se contentant aussi, pour valider le redressement et la mise en demeure litigieux, de rejeter le moyen de Monsieur X...faisant valoir que la semaine du contrôle était probablement la plus chargée de l’année, sans mieux répondre aux conclusions par lesquelles il était soutenu que le calcul par l’URSSAF d’un volume horaire constant pendant quatre mois pour tous les salariés à partir de la semaine contrôlée était erroné dans la mesure où le planning de la semaine contrôlée du 14 février 2009 faisant apparaître un horaire hebdomadaire de 46 heures constituait un maximum et non une base identique à toutes les semaines de la période considérée et où, en l’absence de salariés, alors en repos ou en congés, il fallait retrancher au minimum 205 heures de travail de l’horaire habituel des salariés présents lors du contrôle, outre que, d’après les documents fournis par l’employeur, spécialement les contrats de travail, les bulletins de paie et le registre d’entrées et sorties du personnel, nombre de salariés étaient entrés après le 15 décembre 2008 et partis avant le 15 avril 2009, enfin que selon les propres constatations de l’inspecteur, certains salariés ¿ A..., B...et C...-n’avaient pas effectué 46 heures au cours de la semaine contrôlée, mais respectivement 42 heures, 9 heures et aucune, la Cour d’appel a violé l’article 455 du Code de procédure civile ;
5°) ALORS QUE la dissimulation d’emploi salarié n’est caractérisée que s’il est établi que l’employeur a, de manière intentionnelle, minoré le nombre d’heures de travail par rapport à celui réellement effectué ; qu’en se contentant encore, pour valider le redressement litigieux, établi sur la base forfaitaire de 430 heures de travail hebdomadaire, de retenir les horaires d’ouverture de l’établissement tels que rappelés dans un courrier du 24 octobre 2009, l’existence d’un service de restauration assuré en continu, celle d’une terrasse, et des « approximations de l’employeur », sans rechercher s’il était établi par l’URSSAF que Monsieur X...avait, de manière intentionnelle, minoré le nombre d’heures de ses salariés par rapport à celui réellement effectué, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 8221-5 du Code du travail ;
6°) ALORS QUE c’est seulement lorsque la comptabilité de l’employeur ne permet pas d’établir le chiffre exact des rémunérations servant de base au calcul des cotisations que l’organisme de recouvrement est fondé à recourir à la taxation forfaitaire, le recours à tort à l’évaluation forfaitaire des bases de cotisation entraînant la nullité du redressement ; qu’au demeurant, en recourant à la taxation forfaitaire, compte tenu des horaires d’ouverture de l’établissement tels que rappelés dans un courrier du 24 octobre 2009, d’un service de restauration assuré en continu, de l’existence d’une terrasse et des « approximations de l’employeur », sans s’expliquer sur les circonstances que Monsieur X...avait communiqué à l’URSSAF l’ensemble des éléments justificatifs nécessaires au contrôle et produit l’intégralité des plannings, contrats de travail, bulletins de paie et registre du personnel, de sorte que la taxation forfaitaire ne pouvait s’appliquer et, partant, le redressement être annulé, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article R. 242-5 du Code de la sécurité sociale.

Décision attaquée : Cour d’appel de Grenoble , du 2 octobre 2012