Requalification et assujettissement : mise en cause obligatoire du prétendu travailleur indépendant

Cour de cassation

chambre sociale

Audience publique du 27 mars 1997

N° de pourvoi : 95-18420

Non publié au bulletin

Rejet

Président : M. GELINEAU-LARRIVET, président

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par l’ Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF) d’Ille-et-Vilaine, dont le siège est ..., en cassation d’un arrêt rendu le 21 juin 1995 par la cour d’appel de Rennes (8e chambre, section B), au profit de la société les Meubles Morel, société à responsabilité limitée, dont le siège est Bellevue, 35133 Fleurigne, défenderesse à la cassation ;

en présence de :

La Direction régionale des affaires sanitaires et sociales de Bretagne, dont le siège est ...,

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

LA COUR, en l’audience publique du 13 février 1997, où étaient présents : M. Gélineau-Larrivet, président, M. Favard, conseiller rapporteur, MM. Gougé, Ollier, Mme Ramoff, conseillers, Mme Kermina, MM.

Petit, Liffran, conseillers référendaires, M. Lyon-Caen, avocat général, M. Richard, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Favard, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, avocat de l’ Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF) d’Ille-et-Vilaine, les conclusions de M. Lyon-Caen, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :

Attendu qu’à la suite d’un contrôle, l’URSSAF a réintégré dans l’assiette des cotisations dues par la société meubles Morel, pour la période du 1er janvier 1988 au 31 décembre 1989, le montant des commissions versées à M. X... au titre des ventes qu’il avait réalisées à l’occasion de deux foires et de l’ouverture d’un nouveau magasin de cette société ;

que la cour d’appel (Rennes, 21 juin 1995) a annulé ce redressement ;

Attendu que l’URSSAF fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir ainsi statué alors, selon le moyen, d’une part que les juges saisis d’un litige afférent à l’affiliation au régime général de la sécurité sociale d’un collaborateur d’une entreprise ne peuvent valablement statuer qu’en présence de toutes les parties intéressées à la solution du litige ; qu’il leur faut donc appeler en la cause la personne dont la situation est l’objet du litige ainsi que les organismes de travailleurs indépendants dont elle est susceptible de relever ; qu’en tranchant un tel litige sans avoir appelé ces parties en la cause, la cour d’appel a violé l’article L. 311-2 du Code de la sécurité sociale ; alors, d’autre part, que doit être affilié au régime général de la sécurité sociale le vendeur qui exerce, même de façon occasionnelle, son activité dans le cadre et au profit d’un service organisé par une société, quelle que soit la qualification donnée par les parties à leur relation ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a constaté que, moyennant rémunération, M. X... avait exercé une activité de vendeur dans le cadre et au profit d’un service organisé par la société meubles Morel ; qu’en décidant qu’il ne devait pas, du chef de cette activité, être affilié au régime général de la sécurité sociale, aux motifs inopérants qu’il n’était pas établi qu’il avait été astreint à des horaires, à des journées précises de travail ou encore à rendre des comptes, qu’il était par ailleurs inscrit au registre du commerce et avait établi des factures d’honoraires, la cour d’appel a violé le texte précité ; alors enfin que, lorsqu’un travailleur n’est affilié à aucun régime de travailleurs indépendants, sa seule inscription au registre du commerce ne peut suffire à lui donner cette qualité ; qu’en décidant le contraire, la cour d’appel a encore violé le même texte ;

Mais attendu que la cour d’appel n’avait pas à prescrire la mise en cause de M. X... ni celle d’un quelconque organisme social alors que le litige ne portait pas sur le statut social de l’intéressé, mais sur l’assiette des cotisations sociales dues par la société meubles Morel ;

Et attendu que le travail au sein d’un service organisé ne constitue qu’un indice du lien de subordination ; qu’ayant relevé qu’il ne résultait d’aucun élément du débat que l’intéressé ait été astreint à des horaires et à des journées précises de travail, ni qu’il ait rendu des comptes à la société sur l’exécution de sa mission, la cour d’appel a pu exclure l’existence d’un lien de subordination et a exactement décidé que la rémunération litigieuse n’était pas soumise à cotisations sociales ; qu’elle a ainsi, abstraction faite du motif surabondant critiqué par la troisième branche du moyen, légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne l’ Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF) d’Ille-et-Vilaine aux dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale , et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept mars mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept.

Décision attaquée : cour d’appel de Rennes (8e chambre section B) , du 21 juin 1995

Titrages et résumés : SECURITE SOCIALE - Assujettissement - Personnes assujetties - Lien de subordination - Constatations insuffisantes.

Textes appliqués :
• Code de la sécurité sociale L311-2