Signalement URSSAF - flagrance oui

Cour de cassation

chambre civile 1

Audience publique du 28 janvier 2009

N° de pourvoi : 08-11251

Non publié au bulletin

Cassation sans renvoi

M. Bargue (président), président

SCP Peignot et Garreau, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles 53, 54, 67 du code de procédure pénale et L. 552-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, ensemble l’article L. 324-12 du code du travail ;

Attendu, selon l’ordonnance attaquée, rendue par le premier président d’une cour d’appel, et les pièces de la procédure, qu’à la suite du contrôle d’un supermarché alimentaire par un inspecteur de l’URSSAF, les services de police ont vérifié l’identité des salariés présents, dont celle de M. X..., de nationalité chinoise, qui a été placé en garde à vue dans le cadre d’une procédure incidente d’infraction à la législation sur les étrangers ; que le Préfet de police de Paris a pris à l’encontre de celui-ci un arrêté de reconduite à la frontière et de maintien en rétention dans un local ne relevant pas de l’administration pénitentiaire ;

Attendu que, pour constater la nullité de la procédure, l’ordonnance retient que “ pour qu’existent des indices apparents de ce que se commettait le délit de travail dissimulé, infraction prévue et réprimée par les articles L. 324-9, L. 324-10 et L. 362-3 du code du travail et que soit ainsi caractérisé l’état de flagrance, il fallait impérativement que les personnes mentionnées dans sa déclaration soient en train de travailler, ce qui est une constatation particulièrement aisée à décrire ; que force est de constater que la relation des faits qu’expose l’inspecteur URSSAF aux officiers de police judiciaire ne mentionne cette activité de travail que sous forme hypothétique ;

que, dès lors que cette activité de travail n’avait pas été vérifiée de façon certaine par l’inspecteur, les conditions de la flagrance telles que rappelées ci-dessus n’était pas réunies, étant observé que l’audition postérieure de l’inspecteur URSSAF ne peut régulariser les conditions d’interpellation “ ;

Qu’en statuant ainsi, alors que valablement informé du délit de travail dissimulé qui se commettait, l’officier de police judiciaire a pénétré dans les lieux, a procédé aux constatations utiles et a régulièrement invité à justifier de son identité l’intéressé à l’encontre duquel existait un indice faisant présumer qu’il avait commis une infraction ou qu’il était susceptible de fournir des renseignements utiles à l’enquête, avant de décider son placement en garde à vue dans le cadre d’une procédure incidente d’infraction à la législation sur les étrangers, de sorte que la procédure était régulière, le premier président a violé les textes susvisés ;

Vu l’article 627 du code de procédure civile ;

Et attendu que les délais légaux de rétention étant expirés, il ne reste plus rien à juger ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’ordonnance rendue le 1er décembre 2007, entre les parties, par le premier président de la cour d’appel de Paris ;

DIT n’y avoir lieu à renvoi ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’ordonnance cassée ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit janvier deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt.

Moyen produit par la SCP Peignot et Garreau, avocat aux Conseils pour le Préfet de police de Paris.

Le moyen reproche à l’ordonnance infirmative attaquée d’avoir confirmé l’ordonnance du Juge des libertés et de la rétention en ce qu’elle avait constaté la nullité de la procédure,

AUX MOTIFS PROPRES QUE

” M. le Procureur et M. le Préfet font grief à l’ordonnance déférée d’avoir déclaré la procédure irrégulière alors que le contrôle de l’établissement dans lequel M. X... Jiang Jun a été interpellé a été motivé par des recherches préalables sur la société, laissant présumer au regard des déclarations faites par le gérant, des irrégularités visant le personnel salarié, et que ce gérant n’a jamais pu attester de l’identité de certaines personnes travaillant sur place à l’aide de documents probants ;

L’identité de M. X... Jiang Jun a été contrôlé le 28 novembre 2007, à 11h30, après que les officiers de police judiciaire ont pénétré dans les locaux de la société “ JER “, supérette d’alimentation asiatique ouverte au public ;

Il résulte effectivement de l’article 53 du code de procédure pénale que, pour que les officiers de police judiciaire puissent agir en flagrant délit, il suffit qu’ils aient connaissance d’un indice apparent d’un comportement délictueux ;

Cependant, en l’espèce, il résulte procès-verbal d’interpellation que, ressortant des locaux susvisé, l’inspecteur URSSAF informe les officiers de police judiciaire “ que quatre personnes susceptibles d’être employées se trouver dans le commerce et que deux d’entre elles, des hommes asiatiques n’ont pas pu lui présenter une pièce d’identité permettant d’établir s’ils étaient ou non déclarés auprès de son organisme “ ;

Pour qu’existent des indices apparents de ce que se commettait le délit de travail dissimulé, infraction prévue et réprimée par les articles L. 324-9, L. 324-10 et L 362-3 du Code du travail et que soit ainsi caractérisé l’état de flagrance, il fallait impérativement que les personnes mentionnées dans sa déclaration soient en train de travailler, ce qui est une constatation particulièrement aisée à décrire ;

Or, force est de constater que la relation des faits qu’expose l’inspecteur URSSAF aux officiers de police judiciaire ne mentionne cette activité de travail que sous forme hypothétique ;

Dès lors que cette activité de travail n’avait pas été vérifiée de façon certaine par l’inspecteur, les conditions de la flagrance telles que rappelées ci-dessus n’était pas réunies, étant observé que l’audition postérieure de l’inspecteur URSSAF ne peut régulariser les conditions d’interpellation ;

On ajoutera, de façon surabondante, que le procès-verbal d’interpellation révèle qu’en réalité, les constatations et le contrôle qui aurait dû précéder l’intervention des officiers de police judiciaire ont en réalité eu lieu postérieurement à leur entrée dans les lieux ; il est expressément mentionné que l’inspecteur URSSAF a pénétré dans les lieux à 11 heures 25 et que les officiers de police judiciaire y ont pénétré à 11 h 30, ce qui supposerait qu’en moins de cinq minutes, l’inspecteur ait pu effectuer son contrôle, se faire désigner le gérant, lui faire rechercher des documents sociaux, noter les irrégularités, puis ressortir et informer les enquêteurs de ces diligences ; ainsi l’insuffisance du procès-verbal d’interpellation n’est que la conséquence de la brièveté de l’intervention de l’inspecteur ;

En tout état de cause, c’est à juste titre que le premier juge a déclaré la procédure irrégulière et l’ordonnance de référé doit être confirmée “,

AUX MOTIFS ADOPTES QUE

” le conseil de l’intéressé soulève la nullité de la procédure pour plusieurs moyens ;

Le conseil soulève en premier lieu que les conditions de l’intervention des services de police en flagrance n’étaient pas réunies ;

Il apparaît que les services de police sont intervenus dans le magasin JRS quelques minutes après que M. A...inspecteur de l’URSSAF soit rentré puis ressorti pour indiquer que, selon lui, quatre personnes étaient susceptibles de travailler dans ce magasin sans être déclarées ;

Si les services de police peuvent pénétrer sur le travail à la demande d’un inspecteur de l’URSSAF c’est à la condition que celui-ci ait pu effectivement constater l’existence d’une infraction flagrante ;

En l’espèce, il apparaît que l’inspecteur de l’URSSAF s’est contenté de constater qu’il était en présence de personnes ne parlant pas le français et ne lui présentant pas spontanément des documents d’identité pour induire qu’ils travaillaient clandestinement alors même qu’il ressort du procès-verbal des services de police dressé lorsqu’ils ont pénétré dans le magasin que le gérant était en mesure, avec un peu de patience, de présenter les documents d’identité ;

Le fait que ces documents se soient révélés faux ultérieurement et sans incidence sur la régularité de l’intervention initiale des services de police ;

Il y a donc le d’annuler la présente procédure sans examiner les autres moyens “,

ALORS QU’en refusant de faire droit à la prolongation de la mesure de rétention administrative prise à l’encontre de Monsieur X..., en ce que l’état de flagrance n’aurait pas été caractérisé par la relation des faits exposée par l’inspecteur de l’URSSAF aux officiers de police judiciaire qui ne mentionnait une activité de travail que sous forme hypothétique, quand bien même les officiers de police judiciaire peuvent inviter à justifier, par tout moyen, de son identité toute personne à l’égard de laquelle existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction ou qu’elle est susceptible de fournir des renseignements utiles à l’enquête en cas de crime ou de délit, ce qui était bien le cas puisqu’une infraction portant sur du travail dissimulé était suspectée, le délégué du premier Président de la Cour d’appel a violé les articles 53, 54, 78-2 du Code de procédure pénale et L 551-1 et suivants et L 661-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, ensemble l’article L 324-12 du Code du travail.

Décision attaquée : Cour d’appel de Paris , du 1 décembre 2007