Cotisations sociales - périmètre et calcul appropriés oui

Cour de cassation

chambre civile 2

Audience publique du 17 janvier 2008

N° de pourvoi : 06-20594

Non publié au bulletin

Rejet

M. Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président), président

SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Parmentier et Didier, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Nancy, 19 septembre 2006), qu’à la suite d’une vérification de la comptabilité de M. X..., entrepreneur électricien, l’inspecteur des impôts a, le 11 février 2002, dressé un procès-verbal où il est constaté que, sans être inscrit au répertoire des métiers et sans avoir procédé aux déclarations fiscales et sociales, il avait exécuté des travaux pour le compte de la société Maisons Vesta (la société) qui ne lui avait pas demandé les documents énumérés à l’article R. 324-4 du code du travail ; qu’après transmission de ce procès-verbal à l’URSSAF, l’inspecteur du recouvrement a adressé à la société, le 23 septembre 2002, une lettre d’observations l’avisant qu’était mise en oeuvre à son encontre la solidarité financière instituée par l’article L. 324-14 du code du travail et lui précisant le montant du redressement correspondant ; qu’une mise en demeure a été délivrée le 13 novembre 2002 ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société fait grief à l’arrêt de déclarer valide la procédure de redressement initiée par l’URSSAF, alors, selon le moyen :

1°/ que le caractère contradictoire de la procédure de contrôle est assuré par l’envoi à l’assujetti d’un document daté et signé par lequel l’inspecteur du recouvrement lui communique “l’objet du contrôle, les documents consultés, la période vérifiée et la date de fin de contrôle” ; qu’en l’espèce, la lettre d’observations du 23 septembre 2002 visait le “procès-verbal travail dissimulé impôts” en tant qu’unique document consulté par l’inspecteur ayant procédé au contrôle ; qu’en retenant cependant, à l’appui de sa décision validant le redressement, que l’URSSAF ne se serait pas fondée uniquement sur les constatations de l’administration fiscale mais aurait “procédé à son propre contrôle pour aboutir à la mise en cause de la société et à l’établissement du montant des cotisations dues”, la cour d’appel, qui a méconnu les mentions de la lettre d’observations du 23 septembre 2002, a violé les articles L. 243-7 et R. 243-59 du code de la sécurité sociale, 1134 du code civil ;

2°/ que la décision de la commission de recours amiable du 18 mars 2003 précisait expressément que le pourcentage des ordres de la société dans le chiffre d’affaires de M. X..., base du redressement opéré, résultait exclusivement des calculs du vérificateur des impôts, à l’exclusion de toute évaluation propre par l’URSSAF ; qu’en retenant cependant, à l’appui de sa décision validant le redressement, que l’URSSAF ne se serait pas fondée uniquement sur les constatations de l’administration fiscale mais aurait “ procédé à son propre contrôle pour aboutir (…) à l’établissement du montant des cotisations dues”, la cour d’appel, qui a méconnu les mentions de la décision de la commission de recours amiable, a violé derechef les textes susvisés ;

3°/ qu’en validant un redressement non contradictoire, car opéré sur la base de “pièces” non précisées ni transmises à l’assujettie lors du contrôle -lequel mentionnait uniquement le “procès-verbal travail dissimulé impôts”- privant ainsi la société de la possibilité d’assurer utilement sa défense devant le contrôleur, la cour d’appel a violé les articles R. 243-9 du code de la sécurité sociale et 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu que la prise en considération des renseignements communiqués par l’administration fiscale constituant un contrôle au sens des articles L. 243-7 et R. 243-59 du code de la sécurité sociale, il appartenait seulement à l’URSSAF, avant de procéder au redressement, de respecter les formalités qui sont destinées à assurer le caractère contradictoire des opérations de contrôle, prévues par le second de ces textes ;

Et attendu qu’il résulte des constatations de la cour d’appel et de la lettre d’observations du 23 septembre 2002, qui n’a pas été dénaturée, que l’inspecteur du recouvrement, après avoir visé le procès-verbal de travail dissimulé correspondant au contrôle fiscal initial de M. X... et non le procès-verbal de carence ultérieur dont l’insuffisance a justifié l’annulation du redressement fiscal notifié à la société, a informé celle-ci que le redressement envisagé était relatif aux cotisations personnelles d’allocations familiales non réglées par M. X... qui lui étaient réclamées sur le fondement de la solidarité financière instituée par l’article L. 324-14 du code du travail, que ces cotisations, pour les années non prescrites avaient été calculées sur le pourcentage du chiffre d’affaires de M. X... réalisé avec la société, les calculs étant au demeurant détaillés année par année ;

Que, de ces constatations et énonciations, la cour d’appel a exactement déduit que les exigences de l’article R. 243-59 du code de la sécurité sociale avaient été respectées ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

Et sur le second moyen :

Attendu que la société fait encore grief à l’arrêt de valider la procédure de redressement, alors, selon le moyen, que la solidarité du donneur d’ordre au titre des obligations mises à la charge de son cocontractant par l’article L. 324-10 du code du travail ne concerne que les contrats dont l’objet porte sur une obligation d’un montant au moins égal à 20 000 francs ou 3 000 euros ; qu’en validant le redressement opéré par l’URSSAF à l’encontre de la société pour l’ensemble des prestations traitées avec M. X... sur la constatation de ce qu’elle aurait conclu avec lui “de très nombreux contrats portant sur des montants globaux supérieurs à 20 000 francs”, la cour d’appel a violé l’article L. 324-14 du code du travail

Mais attendu qu’après avoir relevé que le pourcentage du chiffre d’affaires réalisé par M. X... avec la société était de 90,91 % en 1999, de 90,91 % en 2000 et de 72,13 % en 2001, que M. X... avait conclu de très nombreux contrats portant sur des montants globaux supérieurs à 20 000 francs, ce dont il résultait que la relation entre celui-ci et la société était continue, répétée et successive, et que la prestation globale était supérieure à cette somme, la cour d’appel a pu en déduire que les conditions de mise en oeuvre de la solidarité financière instituée par l’article L. 324-14 du code du travail étaient réunies ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Vesta espace aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de l’URSSAF de Meurthe-et-Moselle ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept janvier deux mille huit.

Décision attaquée : Cour d’appel de Nancy du 19 septembre 2006