Action récursoire - remboursement possible du donneur d’ordre à l’égard de son cocontractant

Cour de cassation

chambre sociale

Audience publique du 23 novembre 2005

N° de pourvoi : 04-10677

Non publié au bulletin

Rejet

Président : Mme MAZARS conseiller, président

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur les deux moyens réunis :

Attendu que la société Urban, qui exerce une activité de gardiennage et de sécurité, a conclu le 19 juillet 1999 avec Mme X... Y... un contrat de sous-traitance, laquelle a elle-même sous-traité les travaux qui lui étaient confiés à M. Z... ; qu’à la suite d’un contrôle de l’URSSAF, la société Urban a dû s’acquitter des sommes dues par Mme X... Y... et M. Z... qui lui étaient réclamées par cet organisme sur le fondement de l’article L. 324-14 du Code du travail ;

qu’elle a saisi, en référé, le président du tribunal de commerce pour en obtenir le remboursement ;

Attendu que Mme X... Y... fait grief à l’arrêt attaqué (Versailles, 20 novembre 2003) de l’avoir condamnée à payer à la société Urban une certaine somme à titre provisionnel, alors, selon le moyen :

1 / qu’il résulte de l’article 809, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile que le juge des référés ne peut accorder une provision au créancier que dans le cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable et que tel n’est pas le cas de l’obligation au remboursement d’une somme d’argent dont l’exécution suppose préalablement résolue la question de la qualification juridique du lien professionnel qui lie une entreprise avec un tiers concourant de façon régulière à son activité de sorte qu’en se déclarant néanmoins compétent le juge des référés a tranché une difficulté sérieuse en violation du texte susvisé ;

2 / que le juge saisi d’un moyen tiré de l’existence d’un contrat de travail est tenu, en raison du caractère d’ordre public qui s’attache à ce type de convention, de rechercher l’existence d’un lien de subordination compte tenu des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité professionnelle afin de restituer, le cas échéant, son exacte qualification au contrat en cause, sans être tenu de s’attacher à la qualification que lui ont donné les parties ; qu’en ne procédant pas à cette recherche à laquelle elle était pourtant invitée, et en se bornant à se référer à l’immatriculation de Mme X... au registre du commerce ainsi qu’aux déclarations des parties pour exclure l’existence d’un contrat de travail entre la société Urban et Mme X..., la cour a privé sa décision de toute base légale au regard de l’article L. 121-1 du Code du travail ;

3 / que le juge saisi d’un moyen tiré de l’existence d’un contrat de travail est tenu, en raison du caractère d’ordre public qui s’attache à ce type de convention, de rechercher l’existence d’un lien de subordination compte tenu des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité professionnelle afin de restituer, le cas échéant, son exacte qualification au contrat en cause, sans être tenu de s’attacher à la qualification que lui ont donnée les parties ; qu’en ne procédant pas à cette recherche à laquelle elle était pourtant invitée, et en se bornant à se référer à l’immatriculation de Mme X... au registre du commerce ainsi qu’aux déclarations des parties pour exclure l’existence d’un contrat de travail entre la société Urban et Mme X..., la cour a violé l’article 12 du nouveau Code de procédure civile ;

4 / qu’il résulte de l’article L. 324-14 du Code du travail que ce n’est qu’au cas où le donneur d’ordre ne s’est pas assuré que son sous-traitant s’acquittait bien de ses obligations fiscales et sociales qu’il s’expose à la condamnation solidaire prévue par ce texte ; qu’au cas présent, la société Urban, qui ne contestait pas s’être bien assurée du respect par Mme X... de ses obligations fiscales et sociales, n’avait donc pas intérêt au sens de l’article 1251-3 du Code civil, à s’acquitter des 323 103 euros prétendument dus par Mme X... à l’URSSAF ;

qu’en considérant qu’il était indifférent que la société Urban ait procédé ou non aux vérifications auxquelles elle était tenue en ce qui concernait Mme X... et en condamnant cette dernière à rembourser cette somme à la société, la cour d’appel a violé par fausse application les textes susvisés ;

Mais attendu d’abord qu’ayant constaté que Mme X... Y..., inscrite au registre du commerce et des sociétés, se présentait elle-même comme sous-traitante de la société Urban, avait choisi son propre sous-traitant sans en référer à cette société et n’ignorait pas le caractère frauduleux de cette sous-traitance, le moyen tiré d’une prétendue existence d’un contrat de travail liant Mme X... Y... à la société Urban et d’une difficulté sérieuse quant à la qualification des relations contractuelles, n’est pas fondé ;

Attendu ensuite qu’ayant relevé que Mme X... Y... n’avait pas elle-même vérifié que M. Z... s’était acquitté de ses obligations à l’égard de l’URSSAF, la cour d’appel a, à bon droit, décidé que la société Urban, qui avait dû payer les sommes réclamées par cet organisme en application de l’article L. 324-14 du Code du travail, était fondée en sa demande ;

Que le moyen n’est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne les époux X... Y... aux dépens ;

Vu l’article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois novembre deux mille cinq.

Décision attaquée : cour d’appel de Versailles (12e chambre section 1) , du 20 novembre 2003