Faux stagiaires

Cour de cassation

chambre criminelle

Audience publique du 28 septembre 2010

N° de pourvoi : 09-87689

Non publié au bulletin

Rejet

M. Louvel (président), président

SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l’arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

La société X... frères,

contre l’arrêt de la cour d’appel d’ANGERS, chambre correctionnelle, en date du 10 septembre 2009, qui, pour travail dissimulé, l’a condamnée à 20 000 euros d’amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 8221-1, L. 8221-3, L. 8221-4, L. 8221-5 et L. 8224-1 du code du travail, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

”en ce que l’arrêt attaqué a déclaré la SCEA X... coupable de travail dissimulé, l’a condamnée de ce chef à une amende de 20 000 euros, et a prononcé sur les intérêts civils ;

”aux motifs que sur la culpabilité : les éléments constitutifs du contrat de travail sont au nombre de trois : la prestation de travail, la rémunération et la subordination juridique ; que des trois éléments n’emportent toutefois pas la même importance aux yeux de la jurisprudence ; que si la rémunération est une condition nécessaire mais non suffisante à la caractérisation d’un contrat de travail, le lien de subordination constitue l’élément déterminant ; qu’il faut d’abord que les modalités concrètes du déroulement de ce stage soient conformes à la convention et ne caractérisent pas l’exercice d’une véritable prestation de travail effectif profitable à l’entreprise ; qu’à défaut, la qualification de la convention de stage en véritable contrat de travail est ouverte ; qu’en effet, régulièrement la jurisprudence réaffirme que l’existence d’une relation de travail salarié dépend des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité des travailleurs, et ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu’elles ont donnée à leur relation ; que l’’objet du stage étant de répondre aux besoins d’une personne en situation de formation (ou aussi en recherche d’emploi) en plaçant cet individu en situation de travail afin, soit de compléter une formation théorique par une expérience pratique en entreprise, soit de favoriser son insertion professionnelle, le maître de stage ne peut se comporter comme un simple supérieur hiérarchique ; que l’absence de formation au bénéfice du stagiaire emporte alors la qualification en contrat de travail ; que la coupe du raisin est classée comme un emploi … du niveau le plus bas de qualification et de compétence … ; que dès lors, l’exécution de ce travail ne nécessite pas d’adaptation et a fortiori ne justifie pas deux journées complètes pour découvrir le processus des vendanges ; qu’il a été constaté, le jour du contrôle, que les élèves travaillaient dans les mêmes conditions et chacun occupait de cette façon un poste de travail dans l’exploitation ; que les jeunes étaient de ce fait intégrés au fonctionnement normal et ordinaire de l’entreprise ainsi que dans l’équipe de vendangeurs et réalisaient le travail de production habituel pour cette époque ; que, par ailleurs, M. X..., ès-qualités de représentant légal de la personne morale poursuivie, a indiqué avoir dû s’organiser pour accueillir les deux classes du Cèdre en même temps et avoir demandé aux saisonniers de ne pas venir travailler la semaine du 17 octobre ; que la défense soutient que les jeunes stagiaires n’ont pris aucun engagement vis-à-vis de la société X... ; qu’ils n’ont pas été recrutés, choisis, testés mais ont été imposés par le Cèdre et n’ont pris aucun engagement ; que c’est la raison pour laquelle d’ailleurs, faute d’être assujettis à des notions de rendement, la quantification du travail effectuée s’est avérée impossible au regard de la masse infinitésimale que représente cette récolte festive ; qu’on serait donc bien en présence d’un stage et de stagiaires ; qu’alors, la législation doit être respectée, pas de rémunération, pas de lien de subordination ; que l’existence d’une rémunération indirecte soulève la question de la qualification des conventions de stage en contrats de travail ; qu’il faut surtout revenir à l’objet de la convention de stage ; que certes, les conventions en l’espèce sont intitulées “convention d’enseignement et de formation de brevet de technicien, stage découverte” ; que, toutefois, aucun article des conventions ne vient définir ce qu’il faut entendre par stage découverte ; que l’objet de ces stages demeure donc ambigu ; que dès lors, on revient à la notion générale de stage impliquant une formation ; qu’à plus de quarante stagiaires par jour, la délivrance d’une formation à chacun des stagiaires se révèle impossible ; que plusieurs anciens stagiaires ont bien confirmé que le stage avait pour seul objet de faire les vendanges et non de recevoir une formation quelconque ;

RÉPARTITION DES CONVENTIONS DE STAGE

Durée du/des

stages effectués

Durée totale du/des stages

par élèves-stagiaires

% de stagiaires par rapport au total des stagiaires

2 jours

3 élèves stagiaires

3,30 %

3 jours

40 élèves-stagiaires

43,95%

5 jours

2 élèves-stagiaires

2,20 %

2 + 5 jours

44 élèves-stagiaires

48, 95 %

3 +5 jours

2 élèves-stagiaires

2, 20 %

Total

91 élèves-stagiaires

100,00 %

TOTAL :

91 stagiaires

47 conventions de 2 jours (14h)

= 658 h

42 conventions

de 3 jours (21h)

= 882 h

48 conventions

de 5 jours (35h)

= 1680 h

137 conventions Pour

3220 h
qu’il y a donc plusieurs erreurs matérielles ; que ce ne sont pas quatre-vingt-six stagiaires qui sont en cause mais quatre vingt-onze ; que les stages ne duraient pas par principe deux jours ; que seuls trois stagiaires sur quatre-vingt-onze n’ont fait que deux jours ; qu’environ la moitié des stagiaires ont enchaîné deux stages : 137 conventions de stage ont été signées pour quatre-vingt-onze stagiaires ; qu’il faut encore relever que plus de la moitié des stagiaires (2 +44 +2) ont effectué au moins cinq jours de stage pour aller jusqu’à huit jours ; que dès lors, on ne peut que constater que la situation est très éloignée du stade dit de découverte ; que normalement, les conventions de stage avaient pour objet, au moins implicitement d’apporter une formation aux stagiaires ; qu’à plus de quarante stagiaires par jour, la délivrance d’une formation à chacun des stagiaires se révèle matériellement impossible ; que plusieurs anciens stagiaires ont d’ailleurs confirmé que le stage avait pour seul objet de faire les vendanges et non de recevoir une formation quelconque ; qu’au surplus, ces stages n’avaient aucun lien avec les formations suivies à l’IREO (BTA SMR ou Service en milieu rural), que certaines stagiaires étant par ailleurs en stage dans des écoles maternelles ou encore dans des crèches (respectivement, Mélanie Y... et Emilie Z... d’une part, Stéphanie A... d’autre part) ; qu’en outre, d’autres éléments viennent conforter les conclusions de la direction du travail tendant à démontrer que les élèves n’étaient pas sur le terrain en situation de stagiaires ; que si l’on revient au texte des conventions de stages, leur article 4 prévoit l’existence d’un carnet de liaison que le maître de stage s’engage à remplir pour évaluer le travail, l’intérêt et les aptitudes du stagiaire, et à remettre aux stagiaires en fin de session ; qu’or, aucun élément porté à la connaissance du juge ne vient corroborer l’existence de tels carnets ; que ni les élèves-stagiaires interrogés lors de l’enquête, ni la défense, demandant pourtant à ce que la cour s’intéresse aux conventions de stage et alors que ces documents auraient été en leur faveur, n’ont apporté le moindre élément à ce sujet ; que la production de ces carnets de liaison aurait toutefois pu contribuer à montrer que, malgré le nombre manifestement excessif de stagiaires pour apporter une formation de qualité exigée par l’article 11 des conventions à chacun, le présumé maître de stage s’était à tout le moins efforcé d’assumer l’ensemble de ses responsabilités jusqu’au terme des stages ; que ce carnet de liaison, en tant qu’il définit les objectifs de chaque période de stage, aurait pu en outre constituer une preuve essentielle pour l’appréhension correcte de l’objet du stage ; que le silence de la défense sur ce point tend à confirmer que de tels carnets de liaison n’ont jamais été remplis ; que M. X... n’apparaît donc pas avoir joué son rôle de maître de stage ; que, par ailleurs, le travail effectué par les quatre-vingt-onze élèves-stagiaires (et non quatre-vingt-six) se révèle être une prestation effectuée pour le compte et au bénéfice de l’entreprise ; que si la défense considère que la donation s’élève à 15 000 euros donc à une somme supérieure à ce qu’aurait représenté le coût des salariés, elle se fonde sur la base de 1204 heures (86 stagiaires estimés sur deux jours : 86 x 14 = 1204 heures) ; que l’étude des conventions de stage (à la disposition de toutes les parties au procès pénal) a révélé, comme énoncé plus haut, que 137 conventions avaient été signées par les quatre-vingt-onze stagiaires, représentant un total de 3220 heures ; qu’en appliquant le coût horaire d’un saisonnier pour les vendanges en 2005 de 10,57 euros (salaire brut, congés payés et charges patronales), on arrive donc à : 3220 x 10,57 = 34 035,40 euros ; qu’on est alors très loin du montant de la libéralité versée, et ce d’autant plus qu’elle ne couvre même pas le montant des salaires bruts (hors charges patronales) qui aurait dû équivaloir à 28 561,40 euros (coût horaire brut de 8,87 euros) ; que ces éléments contribuent donc à caractériser la prestation au profit de l’entreprise ; que non seulement, la prestation de travail a été fournie et le maître de stage ne s’est pas comporté comme tel ; qu’ en outre, le versement de la libéralité correspond à environ la moitié de ce que la SCEA X... aurait dû verser comme salaires et charges patronales ; qu’au surplus, contrairement à ce qui est avancé par la défense, une telle libéralité constitue en réalité une rémunération indirecte des stagiaires ; que c’est alors un élément qui plaide en faveur de la qualification des conventions de stages en contrats de travail en caractérisant la rémunération du travail effectué ; que plusieurs élèves-stagiaires interrogés et même M. X... le jour du contrôle de l’inspection du travail, ont reconnu que les travaux de vendanges avaient pour but de financer un voyage en Turquie pour les élèves ; que si le principe de la donation n’est pas contestée, se pose alors le problème de son objet ; qu’une telle donation a eu pour contrepartie les travaux de vendanges réalisés par les élèves-stagiaires ; qu’il s’agit donc, sans aucun doute, d’une rémunération du travail effectué ; que la jurisprudence de la Cour de cassation est à ce sujet non seulement constante, mais encore ancienne ; que certes, les stagiaires n’ont « pas vu la couleur de l’argent » pour reprendre les termes de Stéphanie A... ; que pour autant, les stagiaires ont bénéficié d’une prestation (le voyage) en contrepartie de leur travail ; que si les élèves n’ont perçu directement aucune somme d’argent, ils ont directement bénéficié du voyage qui constitue dès lors une rémunération en nature ; que la reconnaissance du lien de subordination est le critère déterminant pour la qualification du contrat de travail et que deux éléments doivent être pris en compte : l’autorité et le contrôle de l’employeur et les conditions matérielles d’exercice de l’activité ; qu’en premier lieu, en ce qui concerne l’autorité et le contrôle de l’employeur, il est vrai que, comme le souligne la défense, il n’existe en soi aucune preuve formelle attestant de ce que « les élèves déféraient aux ordres et sanctions des salariés de la SCEA » et « que les enseignants et dirigeants de l’Institut présents sur le site déféraient aux ordres et sanctions des salariés de la SCEA » ; qu’en outre, selon les mêmes conclusions, il ne pouvait y avoir subordination du fait de l’absence d’intégration dans un service organisé compte tenu, notamment, du caractère éphémère de la présence des élèves, or si l’argument pouvait convaincre en présence de véritables stages découverte de deux jours, il en est tout autrement face à des stagiaires qui ont été sur le terrain, pour plus de la moitié d’entre eux, au moins cinq jours voire même huit jours ; que compte tenu du très faible degré de qualification requis pour vendanger, il ne pouvait plus s’agir de découverte ; que d’ailleurs, plusieurs autres éléments de fait s’articulent pour attester de l’assimilation des stagiaires à de véritables subordonnés par la SCEA X... ; qu’ainsi, le vocabulaire utilisé par les élèves-stagiaires est très éloquent ; qu’ils parlent de travail et à aucun moment, ils n’émettent l’idée qu’ils ne devaient pas s’astreindre aux directives de la SCEA X... ; qu’au contraire, comme l’explique notamment Mélanie Y..., il y avait « un employé de l’entreprise qui commandait le travail » ; que certes, des professeurs étaient également sur le terrain pour encadrer les stagiaires ; que cependant, les professeurs étaient présents pour travailler ; qu’ils étaient donc logiquement eux-mêmes encadrés par les employés de la SCEA X... ; qu’en effet, comme l’explique Stéphanie A... : « dans les vignes nous étions encadrés par des employés de l’entreprise X... et par nos professeurs qui eux aussi travaillaient puisqu’ils participaient au voyage » ; que dès lors, les professeurs ont constitué un relais des directives qui émanaient de la SCEA X... ; que partant, les élèves-stagiaires ont exécuté des tâches de même nature et dans des conditions de subordination semblables à celles des préposés de ces mêmes structures, sans recevoir de formation particulière, ce qui les place dans une situation de travailleurs salariés ; qu’en second lieu, les élèves-stagiaires étaient soumis aux conditions matérielles d’exercice de l’activité que ce soit en ce qui concerne le lieu de travail, les horaires, ou la fourniture du matériel ; que l’élément le plus éloquent concerne les horaires ; que cet élément est d’ailleurs soulevé par la défense qui énonce que « certains stagiaires se permettaient de venir quand ils voulaient ainsi que le reconnaît un des témoins » ; que toutefois, les différents témoignages rendent en réalité compte d’horaires précis ; que le seul fait qu’Emilie Z... explique ne pas être venue durant la totalité du stage mais seulement deux jours pour raisons familiales n’est pas de nature à contredire le fait que les stagiaires n’étaient pas maîtres de leur temps de présence ; que dès lors, en tant que maître de stage, M. X... a donné son accord à l’absence d’Emilie Z... ; qu’il ne peut alors pas, par la suite, légitimement affirmer que les stagiaires venaient à leur guise en se fondant sur la situation de cette seule stagiaire ; que certes, cette soumission à des contraintes horaires n’et pas en soi incompatible avec une situation de stage, surtout qu’elle est, en l’espèce, prévue par les conventions de stage (article 3) ; que néanmoins, M. X... a fait usage de son pouvoir de direction d’une telle manière qu’il a placé les stagiaires dans une situation de salariés intégrés à l’organisation de la SCEA X... ; qu’en effet, comme le relate Leslie B..., elle a travaillé du lundi au vendredi sauf un après-midi où il n’y avait plus de raisins à ramasser en raison de la maturé » ; qu’autrement dit, M. X... a renvoyé les stagiaires car il n’y avait plus de travail à effectuer ; que si les élèves avaient vraiment été sur place en tant que stagiaires pour recevoir une formation et découvrir le milieu professionnel, leur maître de stage aurait pu en profiter pour les former sur des thèmes indépendants de la coupe du raisin en tant que telle, comme la gestion des stocks ou les relations clients puisque, si l’on suit la logique globale de défense de la SCEA X..., les stages étaient motivés par des objectifs plus larges que l’action de vendanger ; que dès lors, même si l’on devait accepter les objectifs du stage diffusés par l’IREO pourtant non opposables juridiquement, on se rend compte ici que ces objectifs n’ont pas été mis en oeuvre sur le terrain ; qu’en d’autres termes M. X... n’a pas adopté un comportement de maître de stage ; qu’au contraire, il s’est comporté comme un employeur dirigeant ses salariés ; que toutes ces considérations emportent la conviction que les conventions de stage doivent être requalifiées en de véritables contrats de travail ; que M. X... connaît précisément les conditions et les coûts relatifs à l’embauche de salariés pour la récolte du raisin ; qu’en signant des conventions de stage en nombre, il ne peut ignorer le profit tiré de l’activité des jeunes sur son exploitation ; que l’élément intentionnel du délit de travail dissimulé se caractérise par la conjonction de plusieurs faits ; que la défense avance le montant d’une libéralité de 15 000 euros au lieu de 17 300 euros, ramène le nombre des stagiaires à 86 au lieu de 91, affirme que les stages découverte étaient de deux jours alors que seuls trois des 91 stagiaires n’ont effectué que deux jours, les autres ayant effectué jusqu’à huit jours ; qu’enfin, entérine l’erreur de la citation et affirme qu’il s’agit de 1204 heures de stage au lieu de 3220 heures, une simple opération de récolement conduit à ce résultat ; que cette déformation systématique de la vérité démontre la mauvaise foi manifeste de M. X... et partant de la personne morale dont il est le représentant légal ; que si l’objectif pédagogique d’une telle implication des élèves dans l’aboutissement d’un projet d’envergure (financement d’un voyage sur deux ans) est louable, il n’en reste pas moins que de telles ambitions doivent se réaliser dans le respect de la loi ; que si la majorité des actions menées par les élèves sont compatibles avec la loi (vente de brioche, organisation d’un loto par exemple), faire des vendanges en tant que stagiaire en contrepartie du versement d’une libéralité à l’établissement scolaire ne l’est pas ; qu’une telle prestation constitue un véritable travail rémunéré qui appelle une nouvelle qualification des conventions de stage en véritables contrats de travail ; que cette nouvelle qualification contribue alors à la caractérisation du délit de travail dissimulé ; que c’est donc par des motifs pertinents, adoptés par la cour, outre ceux rapportés ci-dessus, que les premiers juges ont retenu la culpabilité des prévenus ;

"-" que sur la peine : les peines prononcées ne sont pas adaptées à la nature des faits commis, notamment au regard des véritables chiffres, tels qu’ils résultent d’une étude attentive du dossier de la procédure ; que le jugement dont appel sera donc infirmé en ce qui concerne le montant de l’amende, lequel sera porté à 20 000 euros ;

”1°) “alors que l’accomplissement de tâches professionnelles sous l’autorité de l’entreprise d’accueil n’est pas de nature à exclure la mise en oeuvre d’une convention de stage en entreprise ; qu’au cas d’espèce, la cour d’appel ne pouvait déclarer la SCEA X... coupable de travail dissimulé après avoir uniquement constaté que les élèves de l’IREO avaient accompli des tâches professionnelles sous l’autorité des salariés de la SCEA, sans rechercher si l’exercice de cette activité pendant quelques jours, précédée d’une formation elle-même nécessairement brève compte tenu de la nature des tâches en cause, effectuée sans lien de subordination par rapport à la SCEA et dépourvue de tout objectif de rendement et de productivité ne s’inscrivait pas dans une démarche pédagogique caractéristique d’un stage et exclusive d’un contrat de travail ;

”2°) alors que l’existence d’un contrat de travail suppose le versement d’une rémunération par l’employeur directement ou indirectement au salarié ; qu’au cas d’espèce, la cour d’appel ne pouvait donc déclarer la SCEA X... coupable de travail dissimulé après avoir elle-même constaté que la SCEA n’avait pas versé de rémunération aux élèves qu’elle avait accueillis, mais s’était bornée à allouer une somme forfaitaire à l’établissement dans lequel ils étaient scolarisés, lequel conservait la libre disposition de cette somme ;

”3°) alors que les juridictions correctionnelles ne peuvent statuer que sur les faits relevés par l’ordonnance ou la citation qui les a saisies ; qu’au cas d’espèce, la SCEA X... a été citée pour avoir, à Saint-Jean-des Mauvrets, en tout cas sur le département du Maine-et-Loire, entre le 12 octobre 2005 et le 23 octobre 2005, étant employeur de 86 faux stagiaires occupant des postes de travail encadrés par des salariés de l’établissement en l’espèce vendanges à la main représentant 1204 heures travaillées, omis intentionnellement de procéder à la déclaration nominative préalable à l’embauche ; que la cour d’appel ne pouvait donc retenir, pour caractériser la matérialité du délit de travail dissimulé, que la SCEA avait en réalité accueilli 91 élèves de l’IREO, que l’étude des conventions de stage a révélé que 137 conventions avaient été signées par les 91 stagiaires représentant un total de 3220 heures , la circonstance, relevée par la cour, que les conventions de stage aient été « à la disposition de toutes les parties au procès pénal » n’autorisant pas les juges du fond à entrer en voie de condamnation pour des faits non visés par la citation ;

” 4°) alors que les juridictions correctionnelles ne peuvent statuer que sur les faits relevés par l’ordonnance ou la citation qui les a saisies ; qu’au cas d’espèce, la SCEA X... a été citée pour avoir, à Saint-Jean-des Mauvrets, en tout cas sur le département du Maine-et-Loire, entre le 12 octobre 2005 et le 23 octobre 2005, étant employeur de 86 faux stagiaires occupant des postes de travail encadrés par des salariés de l’établissement en l’espèce vendanges à la main représentant 1204 heures travaillées, omis intentionnellement de procéder à la déclaration nominative préalable à l’embauche ; que la cour d’appel ne pouvait donc retenir, pour caractériser l’élément intentionnel du délit de travail dissimulé, que la SCEA ramène le nombre de stagiaires à 86 au lieu de 91 et affirme qu’il s’agit de 1204 heures de stage au lieu de 3220 heures ;

”5°) alors enfin que les juridictions correctionnelles ne peuvent statuer que sur les faits relevés par l’ordonnance ou la citation qui les a saisies ;

qu’au cas d’espèce, la SCEA X... a été citée pour avoir, à Saint-Jean-des Mauvrets, en tout cas sur le département du Maine-et-Loire, entre le 12 octobre 2005 et le 23 octobre 2005, étant employeur de 86 faux stagiaires occupant des postes de travail encadrés par des salariés de l’établissement en l’espèce vendanges à la main représentant 1204 heures travaillées, omis intentionnellement de procéder à la déclaration nominative préalable à l’embauche ; que la cour d’appel ne pouvait donc retenir, pour estimer que la peine prononcée en première instance devait être alourdie, que cette peine n’était pas adaptée à la nature des faits commis, notamment au regard des véritables chiffres, tels qu’ils résultent d’une étude attentive du dossier de la procédure, c’est-à-dire compte tenu du fait que le nombre de stagiaires employés était de 91 et non de 86 pour un total d’heures de 3220 et non de 1204” ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, L. 8221-1, L. 8221-3, L. 8221-4, L. 8221-5 et L. 8224-1 du code du travail, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

”en ce que l’arrêt attaqué a déclaré la SCEA X... coupable de travail dissimulé, l’a condamnée de ce chef à une amende de 20 000 euros, et a prononcé sur les intérêts civils ;

”aux motifs que sur la culpabilité : les éléments constitutifs du contrat de travail sont au nombre de trois : la prestation de travail, la rémunération et la subordination juridique ; que des trois éléments n’emportent toutefois pas la même importance aux yeux de la jurisprudence ; que si la rémunération est une condition nécessaire mais non suffisante à la caractérisation d’un contrat de travail, le lien de subordination constitue l’élément déterminant ; qu’il faut d’abord que les modalités concrètes du déroulement de ce stage soient conformes à la convention et ne caractérisent pas l’exercice d’une véritable prestation de travail effectif profitable à l’entreprise ; qu’à défaut, la qualification de la convention de stage en véritable contrat de travail est ouverte ; qu’en effet, régulièrement la jurisprudence réaffirme que l’existence d’une relation de travail salarié dépend des conditions de fait dans lesquelles elle est exercée l’activité des travailleurs, et ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu’elles ont donnée à leur relation ; que l’’objet du stage étant de répondre aux besoins d’une personne en situation de formation (ou aussi en recherche d’emploi) en plaçant cet individu en situation de travail afin, soit de compléter une formation théorique par une expérience pratique en entreprise, soit de favoriser son insertion professionnelle, le maître de stage ne peut se comporter comme un simple supérieur hiérarchique ; que l’absence de formation au bénéfice du stagiaire emporte alors la qualification en contrat de travail ; que la coupe du raisin est classée comme un emploi … du niveau le plus bas de qualification et de compétence … ; que dès lors, l’exécution de ce travail ne nécessite pas d’adaptation et a fortiori ne justifie pas deux journées complètes pour découvrir le processus des vendanges ; qu’il a été constaté, le jour du contrôle, que les élèves travaillaient dans les mêmes conditions et chacun occupait de cette façon un poste de travail dans l’exploitation ; que les jeunes étaient de ce fait intégrés au fonctionnement normal et ordinaire de l’entreprise ainsi que dans l’équipe de vendangeurs et réalisaient le travail de production habituel pour cette époque ; que, par ailleurs, M. X..., ès-qualités de représentant légal de la personne morale poursuivie, a indiqué avoir dû s’organiser pour accueillir les deux classes du Cèdre en même temps et avoir demandé aux saisonniers de ne pas venir travailler la semaine du 17 octobre ; que la défense soutient que les jeunes stagiaires n’ont pris aucun engagement vis-à-vis de la société X... ; qu’ils n’ont pas été recrutés, choisis, testés mais ont été imposés par le Cèdre et n’ont pris aucun engagement ; que c’est la raison pour laquelle d’ailleurs, faute d’être assujettis à des notions de rendement, la quantification du travail effectuée s’est avérée impossible au regard de la masse infinitésimale que représente cette récolte festive ; qu’on serait donc bien en présence d’un stage et de stagiaires ; qu’alors, la législation doit être respectée, pas de rémunération, pas de lien de subordination ; qu’or l’existence d’une rémunération indirecte soulève la question de la qualification des conventions de stage en contrats de travail ; qu’il faut surtout revenir à l’objet de la convention de stage ; que certes, les conventions en l’espèce sont intitulées « convention d’enseignement et de formation de brevet de technicien, stage découverte ; que toutefois, aucun article des conventions ne vient définir ce qu’il faut entendre par stage découverte ; que l’objet de ces stages demeure donc ambigu ; que dès lors, on revient à la notion générale de stage impliquant une formation ; qu’à plus de quarante stagiaires par jour, la délivrance d’une formation à chacun des stagiaires se révèle impossible ; que plusieurs anciens stagiaires ont bien confirmé que le stage avait pour seul objet de faire les vendanges et non de recevoir une formation quelconque ;

RÉPARTITION DES CONVENTIONS DE STAGE

Durée du/des stages effectués

Durée totale du/des stages par élèves-stagiaires

% de stagiaires par rapport au total des stagiaires

2 jours

3 élèves stagiaires

3,30 %

3 jours

40 élèves-stagiaires

43, 95 %

5 jours

2 élèves-stagiaires

2,20 %

2 + 5 jours

44 élèves-stagiaires

48,95 %

3 +5 jours

2 élèves-stagiaires

2,20 %

Total

91 élèves-stagiaires

100,00 %

TOTAL :

91 stagiaires

47 conventions de 2 jours (14 h)

= 658 h

42 conventions

de 3 jours (21h)

= 882 h

48 conventions

de 5 jours (35h)

= 1680 h

137 conventions pour

3220 h

qu’il y a donc plusieurs erreurs matérielles ; que ce ne sont pas quatre-vingt -six stagiaires qui sont en cause mais quatre-vingt-onze ; que les stages ne duraient pas par principe deux jours ; que seuls trois stagiaires sur quatre vingt-onze n’ont fait que deux jours ; qu’environ la moitié des stagiaires ont enchaîné deux stages : 137 conventions de stage ont été signées pour quatre-vingt-onze stagiaires ; qu’il faut encore relever que plus de la moitié des stagiaires (2 + 44 + 2) ont effectué au moins cinq jours de stage pour aller jusqu’à huit jours ; que dès lors, on ne peut que constater que la situation est très éloignée du stade dit de découverte ; que normalement, les conventions de stage avaient pour objet, au moins implicitement d’apporter une formation aux stagiaires ; qu’à plus de quarante stagiaires par jour, la délivrance d’une formation à chacun des stagiaires se révèle matériellement impossible ; que plusieurs anciens stagiaires ont d’ailleurs confirmé que le stage avait pour seul objet de faire les vendanges et non de recevoir une formation quelconque ; qu’au surplus, ces stages n’avaient aucun lien avec les formations suivies à l’IREO (BTA SMR ou Service en milieu rural), que certaines stagiaires étant par ailleurs en stage dans des écoles maternelles ou encore dans des crèches (respectivement, Mélanie Y... et Emilie Z... d’une part, Stéphanie A... d’autre part) ; qu’en outre, d’autres éléments viennent conforter les conclusions de la direction du travail tendant à démontrer que les élèves n’étaient pas sur le terrain en situation de stagiaires ; que si l’on revient au texte des conventions de stages, leur article 4 prévoit l’existence d’un carnet de liaison que le maître de stage s’engage à remplir pour évaluer le travail, l’intérêt et les aptitudes du stagiaire, et à remettre aux stagiaires en fin de session ; qu’or, aucun élément porté à la connaissance du juge ne vient corroborer l’existence de tels carnets ; que ni les élèves-stagiaires interrogés lors de l’enquête, ni la défense, demandant pourtant à ce que la cour s’intéresse aux conventions de stage et alors que ces documents auraient été en leur faveur, n’ont apporté le moindre élément à ce sujet ; que la production de ces carnets de liaison aurait toutefois pu contribuer à montrer que, malgré le nombre manifestement excessif de stagiaires pour apporter une formation de qualité exigée par l’article 11 des conventions à chacun, le présumé maître de stage s’était à tout le moins efforcé d’assumer l’ensemble de ses responsabilités jusqu’au terme des stages ; que ce carnet de liaison, en tant qu’il définit les objectifs de chaque période de stage, aurait pu en outre constituer une preuve essentielle pour l’appréhension correcte de l’objet du stage ; que le silence de la défense sur ce point tend à confirmer que de tels carnets de liaison n’ont jamais été remplis ; que M. X... n’apparaît donc pas avoir joué son rôle de maître de stage ; que par ailleurs, le travail effectué par les quatre-vingt onze élèves-stagiaires (et non quatre-vingt six) se révèle être une prestation effectuée pour le compte et au bénéfice de l’entreprise ; que si la défense considère que la donation s’élève à 15 000 euros donc à une somme supérieure à ce qu’aurait représenté le coût des salariés, elle se fonde sur la base de 1204 heures (86 stagiaires estimés sur deux jours : 86 x 14 = 1204 heures) ; que l’étude des conventions de stage (à la disposition de toutes les parties au procès pénal) a révélé, comme énoncé plus haut, que 137 conventions avaient été signées par les quatre vingt-onze stagiaires, représentant un total de 3220 heures ; qu’en appliquant le coût horaire d’un saisonnier pour les vendanges en 2005 de 10,57 euros (salaire brut, congés payés et charges patronales), on arrive donc à : 3220 x 10,57 = 34 035,40 euros ; qu’on est alors très loin du montant de la libéralité versée, et ce d’autant plus qu’elle ne couvre même pas le montant des salaires bruts (hors charges patronales) qui aurait dû équivaloir à 28 561,40 euros (coût horaire brut de 8,87 euros) ; que ces éléments contribuent donc à caractériser la prestation au profit de l’entreprise ; que non seulement, la prestation de travail a été fournie et le maître de stage ne s’est pas comporté comme tel ; qu’en outre, le versement de la libéralité correspond à environ la moitié de la SCEA X... aurait dû verser comme salaires et charges patronales ; qu’au surplus, contrairement à ce qui est avancé par la défense, une telle libéralité constitue en réalité une rémunération indirecte des stagiaires ; que c’est alors un élément qui plaide en faveur de la qualification des conventions de stages en contrats de travail en caractérisant la rémunération du travail effectué ; que plusieurs élèves-stagiaires interrogés et même M. X... le jour du contrôle de l’inspection du travail, ont reconnu que les travaux de vendanges avaient pour but de financer un voyage en Turquie pour les élèves ; que si le principe de la donation n’est pas contestée, se pose alors le problème de son objet ; qu’une telle donation a eu pour contrepartie les travaux de vendanges réalisés par les élèves-stagiaires. Il s’agit donc, sans aucun doute, d’une rémunération du travail effectué ; que la jurisprudence de la Cour de cassation est à ce sujet non seulement constante, mais encore ancienne ; que certes, les stagiaires n’ont « pas vu la couleur de l’argent » pour reprendre les termes de Stéphanie A... ; que pour autant, les stagiaires ont bénéficié d’une prestation (le voyage) en contrepartie de leur travail ; que si les élèves n’ont perçu directement aucune somme d’argent, ils ont directement bénéficié du voyage qui constitue dès lors une rémunération en nature ; que la reconnaissance du lien de subordination est le critère déterminant pour la qualification du contrat de travail et que deux éléments doivent être pris en compte : l’autorité et le contrôle de l’employeur et les conditions matérielles d’exercice de l’activité ; qu’en premier lieu, en ce qui concerne l’autorité et le contrôle de l’employeur, il est vrai que, comme le souligne la défense, il n’existe en soi aucune preuve formelle attestant de ce que « les élèves déféraient aux ordres et sanctions des salariés de la SCEA » et « que les enseignants et dirigeants de l’Institut présents sur le site déféraient aux ordres et sanctions des salariés de la SCEA » ; qu’en outre, selon les mêmes conclusions, il ne pouvait y avoir subordination du fait de l’absence d’intégration dans un service organisé compte tenu, notamment, du caractère éphémère de la présence des élèves, or si l’argument pouvait convaincre en présence de véritables stages découverte de deux jours, il en est tout autrement face à des stagiaires qui ont été sur le terrain, pour plus de la moitié d’entre eux, au moins cinq jours voire même huit jours ; que compte tenu du très faible degré de qualification requis pour vendanger, il ne pouvait plus s’agir de découverte ; que d’ailleurs, plusieurs autres éléments de fait s’articulent pour attester de l’assimilation des stagiaires à de véritables subordonnés par la SCEA X... ; qu’ainsi, le vocabulaire utilisé par les élèves-stagiaires est très éloquent ; qu’ils parlent de travail et à aucun moment, ils n’émettent l’idée qu’ils ne devaient pas s’astreindre aux directives de la SCEA X.... ; qu’au contraire, comme l’explique notamment Mélanie Y..., il y avait « un employé de l’entreprise qui commandait le travail » ; que certes, des professeurs étaient également sur le terrain pour encadrer les stagiaires ; que cependant, les professeurs étaient présents pour travailler ; qu’ils étaient donc logiquement eux-mêmes encadrés par les employés de la SCEA X... ; qu’en effet, comme l’explique Stéphanie A... : « dans les vignes nous étions encadrés par des employés de l’entreprise X... et par nos professeurs qui eux aussi travaillaient puisqu’ils participaient au voyage » ; que dès lors, les professeurs ont constitué un relais des directives qui émanaient de la SCEA X... ; que partant, les élèves-stagiaires ont exécuté des tâches de même nature et dans des conditions de subordination semblables à celles des préposés de ces mêmes structures, sans recevoir de formation particulière, ce qui les place dans une situation de travailleurs salariés ; qu’en second lieu, les élèves-stagiaires étaient soumis aux conditions matérielles d’exercice de l’activité que ce soit en ce qui concerne le lieu de travail, les horaires, ou la fourniture du matériel ; que l’élément le plus éloquent concerne les horaires ; que cet élément est d’ailleurs soulevé par la défense qui énonce que « certains stagiaires se permettaient de venir quand ils voulaient ainsi que le reconnaît un des témoins » ; que toutefois, les différents témoignages rendent en réalité compte d’horaires précis ; que le seul fait qu’Emilie Z... explique ne pas être venue durant la totalité du stage mais seulement deux jours pour raisons familiales n’est pas de nature à contredire le fait que les stagiaires n’étaient pas maîtres de leur temps de présence ; que dès lors, en tant que maître de stage M. X... a donné son accord à l’absence d’Emilie Z... ; qu’il ne peut alors pas, par la suite, légitimement affirmer que les stagiaires venaient à leur guise en se fondant sur la situation de cette seule stagiaire ; que certes, cette soumission à des contraintes horaires n’et pas en soi incompatible avec une situation de stage, surtout qu’elle est, en l’espèce, prévue par les conventions de stage (article 3) ; que, néanmoins, M. X... a fait usage de son pouvoir de direction d’une telle manière qu’il a placé les stagiaires dans une situation de salariés intégrés à l’organisation de la SCEA X... ; qu’en effet, comme le relate Leslie B..., elle a travaillé « du lundi au vendredi sauf un après-midi où il n’y avait plus de raisins à ramasser en raison de la maturé » ; qu’autrement dit, M. X... a renvoyé les stagiaires car il n’y avait plus de travail à effectuer ; que si les élèves avaient vraiment été sur place en tant que stagiaires pour recevoir une formation et découvrir le milieu professionnel, leur maître de stage aurait pu en profiter pour les former sur des thèmes indépendants de la coupe du raisin en tant que telle, comme la gestion des stocks ou les relations clients puisque, si l’on suit la logique globale de défense de la SCEA X..., les stages étaient motivés par des objectifs plus larges que l’action de vendanger ; que dès lors, même si l’on devait accepter les objectifs du stage diffusés par l’IREO pourtant non opposables juridiquement, on se rend compte ici que ces objectifs n’ont pas été mis en oeuvre sur le terrain ; qu’en d’autres termes, Pascal X... n’a pas adopté un comportement de maître de stage ; qu’au contraire, il s’est comporté comme un employeur dirigeant ses salariés ; que toutes ces considérations emportent la conviction que les conventions de stage doivent être requalifiées en de véritables contrats de travail ; que M. X... connaît précisément les conditions et les coûts relatifs à l’embauche de salariés pour la récolte du raisin ; qu’en signant des conventions de stage en nombre, il ne peut ignorer le profit tiré de l’activité des jeunes sur son exploitation ; que l’élément intentionnel du délit de travail dissimulé se caractérise par la conjonction de plusieurs faits ; que la défense avance le montant d’une libéralité de 15 000 euros au lieu de 17 300 euros, ramène le nombre des stagiaires à 86 au lieu de 91, affirme que les stages découverte étaient de deux jours alors que seuls trois des 91 stagiaires n’ont effectué que deux jours, les autres ayant effectué jusqu’à huit jours ; qu’enfin, entérine l’erreur de la citation et affirme qu’il s’agit de 1204 heures de stage au lieu de 3220 heures, une simple opération de récolement conduit à ce résultat ; que cette déformation systématique de la vérité démontre la mauvaise foi manifeste de M. X... et partant de la personne morale dont il est le représentant légal ; que si l’objectif pédagogique d’une telle implication des élèves dans l’aboutissement d’un projet d’envergure (financement d’un voyage sur deux ans) est louable, il n’en reste pas moins que de telles ambitions doivent se réaliser dans le respect de la loi ; que si la majorité des actions menées par les élèves sont compatibles avec la loi (vente de brioche, organisation d’un loto par exemple), faire des vendanges en tant que stagiaire en contrepartie du versement d’une libéralité à l’établissement scolaire ne l’est pas ; qu’une telle prestation constitue un véritable travail rémunéré qui appelle une nouvelle qualification des conventions de stage en véritables contrats de travail ; que cette nouvelle qualification contribue alors à la caractérisation du délit de travail dissimulé ; que c’est donc par des motifs pertinents, adoptés par la cour, outre ceux rapportés ci-dessus, que les premiers juges ont retenu la culpabilité des prévenus ;

"-" que sur la peine : les peines prononcées ne sont pas adaptées à la nature des faits commis, notamment au regard des véritables chiffres, tels qu’ils résultent d’une étude attentive du dossier de la procédure ; que le jugement dont appel sera donc infirmé en ce qui concerne le montant de l’amende, lequel sera porté à 20 000 euros ;

”alors que les juridictions correctionnelles ne peuvent retenir des circonstances non prévues à la poursuite que si le prévenu a été mis en mesure et a accepté de s’expliquer sur ces éléments nouveaux de prévention ; qu’au cas d’espèce, la cour d’appel ne pouvait donc condamner la SCEA X..., citée pour l’emploi prétendument dissimulé de 86 stagiaires représentant 1204 heures de travail, du chef de l’emploi de 91 stagiaires représentant un total de 3220 heures, sans inviter la SCEA à s’expliquer sur les emplois non visés dans la prévention qu’elle entendait retenir” ;

Les moyens étant réunis :

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure que la prévenue, société civile d’exploitation agricole, a été poursuivie devant le tribunal correctionnel du chef de travail dissimulé par dissimulation d’emplois salariés pour avoir omis de procéder à la déclaration préalable d’embauche de quatre-vingt-six stagiaires qui, en réalité, avaient occupé des postes de travail encadrés par des salariés de la société en effectuant des vendanges à la main pendant 1 204 heures ;

Attendu que, pour dire établi le délit de travail dissimulé dans les termes de la prévention, l’arrêt prononce par les motifs repris aux moyens ;

Attendu qu’en l’état de ces motifs, dont il résulte que les stagiaires ont réalisé une prestation de travail non qualifiée, sans bénéficier de formation, au profit de la société, sous le contrôle de ses salariés et moyennant un rémunération indirecte, la cour d’appel a, sans insuffisance ni contradiction, sans excéder les limites de sa saisine et sans méconnaître les dispositions conventionnelles alléguées, justifié sa décision au regard des articles L. 8221-1 et L. 8221-5 du code du travail ;

D’où il suit que les moyens ne peuvent être accueillis ;

Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l’article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, Mme Degorce conseiller rapporteur, M. Blondet conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Téplier ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.

Décision attaquée : Cour d’appel d’Angers du 10 septembre 2009