Nageur salarié oui

Cour d’Appel de Chambéry Chambre sociale 26 mai 2009 n° 08/02462

Texte intégral :

Cour d’Appel de Chambéry Chambre sociale 26 mai 2009 N° 08/02462
VCF/MFM

M. Andrey KUTUZOV C/ ASSOCIATION CERCLE DES NAGEURS D’AIX-LES-BAINS

APPELANT :

Monsieur Andrey Kutuzov

71 Chemin du Colonel Rollet

73100 AIX LES BAINS

Représentant : Maître Benjamin BEROUD, de la SCP BOISSON & Associes

(avocat au barreau de CHAMBERY)

INTIMEE ET APPELANTE INCIDENTE :

Association cercle des nageurs d’Aix-les-Bains

Place Daniel Rops

73100 AIX LES BAINS

Représentant : Maître AIMONIER-DAVAT, de la SCP AIMONIER-DAVAT -

BAUPLAT - DECALF (avocat au barreau de CHAMBERY)

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors de l’audience publique des débats, tenue le 21 Avril 2009 avec l’ assistance de Madame ALESSANDRINI, Greffier, et lors du délibéré :

Madame BROUTECHOUX, Conseiller faisant fonctions de Président, qui s’est chargée du rapport,

Monsieur GREINER, Conseiller

Madame CAULLIREAU-FOREL, Conseiller

Le Cercle des Nageurs d’AIX LES BAINS, association loi de 1901 , qui notamment, gère l’équipe de water polo de la ville, est amené à embaucher à ce titre quelques joueurs professionnels.

En août 2002, le transfert de deux joueurs russes a été négocié et ceux-ci sont arrivés en France en septembre 2002. L’un d’eux, M. Andrey KUTUZOV, n’a obtenu une carte de séjour "travailleur temporaire" qu’à compter de mai 2003.

De septembre 2002 à juin 2007, il a participé à la vie de l’équipe.

Le Cercle des Nageurs lui a reconnu la qualité de salarié à compter de juin 2003, date à compter de laquelle, des contrats de travail à durée déterminée successifs d’une durée d’une année, ont été conclu, la relation contractuelle étant soumise à la convention collective de l’animation socio-culturelle.

Il a été victime d’un accident du travail le 9 janvier 2007.

La relation contractuelle a pris fin en juin 2007, date d’échéance du dernier contrat de travail à durée déterminée.

Par jugement en date du 18 septembre 2008, le Conseil de Prud hommes d’AIX LES BAINS a requalifié les contrats de travail en un seul contrat à durée indéterminée et dit que ce contrat avait été rompu d’une manière abusive.

Le Cercle des Nageurs a été condamné à payer à M. KUTUZOV les sommes suivantes :

"-" 1.372,74 € à titre d’indemnité de requalification,

"-" 1..372,74 € de dommages-intérêts pour absence de procédure de licenciement,

"-" 2.744,48 € de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

"-" 8.575 € de rappel de salaire pour la saison 2002 / 2003,

"-" 1.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et à lui remettre les bulletins de paye des mois suivants :

"-" septembre 2002 à mai 2003,

"-" juillet, septembre et octobre 2004,

"-" avril et mai 2006,

"-" juillet, août, septembre 2006 et juin 2007.

Le 20 octobre 2008, M. KUTUZOV a interjeté appel de cette décision dont il avait reçu notification le 20 septembre 2008.

Aux termes des écritures des parties, reprises oralement à l’audience et auxquelles il est fait référence pour un plus ample exposé des moyens qui y sont développés, conformément aux articles R. 1451-1 du code du travail et 455 du code de procédure civile, il est demandé à la Cour :

"-" par M. KUTUZOV : cf conclusions reçues au greffe le 11 mars 2009 :

"-" de confirmer le jugement déféré en ce qu’ il a :

* requalifié la relation contractuelle en un contrat à durée indéterminée, les contrats d’une année ayant été conclus en dehors des cas autorisés, ne mentionnant pas les motifs justifiant le recours à de tels contrats, et s’étant succédés sans aucun délai de carence,

* dit que sa rupture constituait un licenciement sans cause réelle et sérieuse et sans observation de la procédure,

* condamné le Cercle des Nageurs à lui payer deux fois la somme de 1.372,74 € à titre d’indemnité de requalification et d’indemnité pour absence de procédure de licenciement,

* ordonné au Cercle des Nageurs de lui remettre certains bulletins de paye, disposition qu’il convient d’étendre aux bulletins des mois de juin, juillet et août 2003,

"-" de l’ infirmer en ses autres dispositions,

"-" de lui allouer 20.000 € de dommages-intérêts pour licenciement abusif,

"-" de constater qu’il n’a pas perçu l’intégralité des salaires convenus et en conséquence, de condamner le Cercle des Nageurs à lui payer :

* pour la saison 2002 / 2003 : 11.327,40 € outre 1.132,74 € de congés payés y afférents et 1.132,74 € d’indemnité de précarité d’emploi,

* pour la saison 2003 / 2004 : 6.370,17 € outre 637,02 € de congés payés y afférents et 1.312,74 € d’indemnité de précarité d’emploi,

* pour la saison 2004 / 2005 : 3.964,35 € outre 396,44 € de congés payés y afférents et 1.372,74 € d’indemnité de précarité d’emploi,

* pour la saison 2005 / 2006 : 3.445,88 € outre 344,59 € de congés payés y afférents et 1.320 € d’indemnité de précarité d’emploi,

* pour la saison 2006 / 2007 : 4.690,66 € outre 469,07 € de congés payés y afférents et 1.200 € d’indemnité de précarité d’emploi,

"-" de condamner le Cercle des Nageurs à lui payer une indemnité de 8.236,44 € de dommages-intérêts pour travail dissimulé,

"-" de lui allouer une indemnité de 2.000 € en vertu de l’article 700 du code de procédure civile,

"-" de dire que toutes les sommes accordées produiront intérêts au taux légal à compter du jour de sa première demande,

"-" par le Cercle des Nageurs : cf conclusions reçues au greffe le 17 avril 2009 :

"-" d’infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

"-" de dire qu’avant mai 2003, aucun contrat de travail ne pouvait être valablement conclu au bénéfice de M. KUTUZOV, au regard de la législation relative au séjour des étrangers en France et que de septembre 2002 à mai 2003, il n’a pas travaillé pour le Cercle des Nageurs, qui lui a seulement consenti, sans aucune contrepartie, la possibilité de disposer des équipements sportifs et de participer aux compétitions, afin de maintenir son niveau, tout en lui assurant son logement, sa nourriture et son entretien,

"-" de constater que les contrats de travail conclus pour les 4 saisons sportives de juin 2002 à juin 2007 l’ont été valablement au regard des dispositions des articles L. 1242-2 et D. 1242-1 du code du travail et aux spécificités des contrats à durée déterminée d’usage,

"-" de constater que M. KUTUZOV a été rempli de tous ses droits, au titre de ses salaires, toute conséquence devant être tirée de son refus de produire aux débats ses relevés bancaires pour la période de septembre 2002 à juin 2007 et a reçu tous ses bulletins de paye,

"-" en conséquence, de débouter M. KUTUZOV de toutes ses demandes,

"-" de le condamner à payer au Cercle des Nageurs :

* la somme de 2.139,20 € correspondant à un trop-perçu au titre de ses salaires et indemnités journalières,

* une indemnité de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

SUR CE

"-" Sur la qualification des relations contractuelles et les conditions de leur rupture

Les relations contractuelles ont été formalisées dans six documents signes par les deux parties :

"-" une proposition de contrat de travail à durée déterminée à temps partiel en date du 3 avril 2003 pour la période du 11 septembre 2002 au 16 juin 2004, M. KUTUZOV étant engagé en qualité de joueur (pièce 1 du cercle),

"-" une proposition de contrat de travail à durée déterminée à temps partiel en date du 3 avril 2003 pour la période du 16 juin 2003 au 16 juin 2004, M. KUTUZOV étant engagé en qualité de joueur, (pièce 3 du salarié),

"-" un contrat de travail pour travailleur étranger non agricole du 4 avril 2003 en qualité de joueur, à effet du 15 septembre 2002,

"-" un contrat de travail à durée déterminée à temps partiel en date du 16 mars 2004 pour la période du 17 juin 2004 au 16 juin 2005,

"-" un contrat de haut niveau du 5 août 2005 d’une durée de 12 mois pour la période du 18 juin 2005 au 17 juin 2006,

"-" un contrat de haut niveau du 4 juin 2006 pour la période du 16 juin 2006 au 15 juin 2007.

Dans chacun de ces contrats, M. KUTUZOV était engagé en qualité de joueur, celui du 16 mars 2004 indiquant qu’il l’était en outre en qualité d’entraîneur des jeunes du club.

Selon l’article L. 1242-2, 3° du code du travail, un contrat à durée déterminée peut, dans certains secteurs d’activité définis par décret ou par convention ou accord collectif, être conclu pour un emploi pour lequel il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de cet emploi.

Le sport professionnel constitue, aux termes de l’article D. 1242-1-5 du code du travail, l’un de ces secteurs d’activité et ce texte réglementaire justifie le recours à la conclusion de contrats à durée déterminée dits d’usage, indépendamment de la convention collective applicable à la relation contractuelle, étant précisé au surplus qu’il n’existe aucune distinction entre les différents sports professionnels pouvant justifier le recours à des contrats de travail à durée déterminée d’usage.

Si aux termes de l’ article L. 1242-12 du code du travail, tout contrat à durée déterminée doit comporter la définition précise de son motif, il convient de constater que dans un contrat à durée déterminée d’usage, le motif de son recours résulte nécessairement de la définition de l’emploi pour lequel le salarié est engagé si cet emploi répond aux critères de l’article L. 1242-2, 3°, ce qui est le cas en l’espèce.

Le motif du recours par le cercle des nageurs d’AIX LES BAINS à des contrats à durée déterminée d’usage est donc régulier.

S’agissant de la durée des contrats et de leur renouvellement, il est d’usage constant dans le domaine du sport, de ne pas employer un joueur professionnel en contrat à durée indéterminée, la nature de l’activité exercée étant étroitement liée aux aléas de la compétition sportive et à la durée de la saison sportive qui s’étale sur une année, qualifiée de saison sportive.

La fonction d’entraîneur des jeunes du club exercée par M. KUTUZOV pour la saison sportive 2004/2005 était accessoire à sa fonction de joueur et pouvait donc ne lui être confiée que pour une seule année dans le cadre d’un contrat à durée déterminée.

En outre les dispositions des articles L. 1244-1 et L. 1244-4 du code du travail permettent expressément la conclusion successive de contrats à durée déterminée, avec le même salarié pour le même poste, sans observation d’un délai de carence.

Il ressort de ce qui précède qu’il n’y a pas lieu de requalifier la relation contractuelle en un contrat à durée indéterminée et que la rupture de la relation de travail intervenue le 15 juin 2007, au terme du dernier contrat à durée déterminée conclu le 4 juin 2006, ne constitue pas un licenciement.

M. KUTUZOV sera donc débouté des demandes présentées à ces fins et aucune des indemnités sollicitées à ce double titre ne lui sera allouée. Le jugement déféré sera en conséquence infirmé sur tous ces points.

"-" Sur le compte entre les parties

"-" Sur la saison 2002 /2003

Il ressort du document signé des deux parties ’’contrat de travail pour travailleur étranger non agricole", adressé à la Direction Départementale du Travail et de l’Emploi, que le contrat relatif à cette saison était conditionné à la délivrance d’une autorisation de travail à M. KUTUZOV, l’engagement d’embauche de l’employeur étant lui-même conditionné au visa favorable de ce document par les services de la DDTE.

S’il est exact que le contrat de travail d’un étranger en situation irrégulière est affecté d’une cause de nullité d’ordre public, il n’en reste pas moins que pour cette saison, M. KUTUZOV est fondé réclamer une rémunération s’il démontre avoir travaillé pour le Cercle des Nageurs.

En l’espèce, la réalité de ses prestations est indubitable et n’est d’ailleurs pas contestée par le Cercle des Nageurs, qui soutient qu’il bénéficiait d’un libre accès à la piscine et aux entraînements pour pouvoir maintenir son niveau sportif et qu’il pouvait librement disposer de son temps. Cette argumentation ne peut être retenue en l’espèce, puisque l’examen des faits justifie de l’existence d’un lien de subordination caractérisé par la conjonction des éléments suivants :

"-" les conditions de l’arrivée en France et plus précisément à AIX LES BAINS de M. KUTUZOV, notamment la négociation préalable à son arrivée et l’objectif poursuivi par le Cercle des Nageurs,

"-" la nature, la fréquence et l’importance de sa participation à la vie du club (tous les entraînements et toutes les compétitions), son statut d’attaquant de pointe et son rôle actif dans la montée du club en Elite,

"-" les conditions de cette participation, identiques à celles qui seront en vigueur à compter de juin 2003, date à compter de laquelle son statut de salarié n’est plus discuté,

"-" le fait qu’il était matériellement dépendant du club et vivait chez le directeur sportif de celui-ci.

En outre, il convient de relever que le Cercle des Nageurs a :

"-" fixé la date d’effet du premier contrat au 11 septembre 2002 (cf le contrat du 3 avril 2003 - pièce 1 et le contrat de travail pour travailleur étranger du 4 avril 2003),

"-" mentionne sur les bulletins de paye de M. KUTUZOV, la date du 15 septembre 2002 comme celle devant être considérée pour le calcul de son ancienneté.

Ces éléments concordants, justifient de l’existence d’un lien de subordination de M. KUTUZOV à compter de septembre 2002 et il sera en conséquence fait droit à la demande en paiement de salaire qu’il a formée.

Pour cette saison, la rémunération brute mensuelle de M. KUTUZOV aurait dû être de 443,95 €, outre 100 € de primes de manifestation, dans la limite de 500 € par mois, outre l’indemnité de congés payés et une indemnité de précarité égale à 10 % de la rémunération globale brute.

Sur la période comprise entre le 11 septembre 2002 et le 15 juin 2003, dans la mesure où la participation de M. KUTUZOV à toutes les manifestations du club n’est pas contestée, il lui sera alloué un salaire brut de 8.495,55 € outre 849,55 € au titre des congés payés y afférents et 849,55 € au titre de l’indemnité de précarité.

"-" Sur la saison 2003 / 2004

Conformément à l’article 1315 du code civil, il appartient à celui qui prétend avoir satisfait à ses obligations de justifier de l’exécution de celles-ci. En conséquence, en l’espèce, il appartient au Cercle des Nageurs de démontrer pour cette saison, comme pour les suivantes, qu’il a réglé l’intégralité des salaires convenus et il appartenait de produire tous documents bancaires utiles à étayer sa position, ce qu’il ne fait pas.

Le contrat du 3 avril 2003 relatif à cette saison fixait la rémunération brute mensuelle de M. KUTUZOV comme suit : 443,95 € bruts mensuel, outre 106 € de primes de manifestation, dans la limite de 530 € par mois, outre l’indemnité de congés payés et une indemnité de précarité égale à 10 % de la rémunération globale brute. M. KUTUZOV n’a rien reçu sur la période du 16 juin au 31 août 2003, pour laquelle il lui sera alloué la somme globale de 2.434,87 € outre 243,49 € de congés payés y afférents et 243,49 € d’indemnité de précarité.

Pour la période septembre 2003 à juin 2004, M. KUTUZOV admet avoir reçu la somme globale nette de 6.370,17 €, alors que le total des sommes nettes figurant sur les bulletins de paye de cette période s’élève à 3.252,46 € au titre de ses seuls salaires fixes, dont il a été intégralement désintéressé.

La différence de 3.117,71 € correspond manifestement aux primes de manifestations dues pour ces 10 mois, lesquelles ne figurent pas sur ses bulletins de paye et faute d’éléments sur le calendrier des manifestations, il convient de considérer que M. KUTUZOV a été rempli de ses droits au titre des primes.

M. KUTUZOV ayant disposé en décembre 2003 et juin 2004 des 15 jours de congés payés auxquels il pouvait prétendre sur la période septembre 2003 /juin

2004, il sera débouté de sa demande en paiement d’une indemnité de congés payés.

Aucune indemnité de précarité ne lui ayant été réglée, il lui sera alloué la somme nette de 637,08 €.

"-" Sur la saison 2004 / 2005

La rémunération nette de M. KUTUZOV était fixée et serait de 1.100 € nets par mois, primes de manifestation et indemnité de précarité comprises, soit 13.200 € nets pour l’année et il ressort des bulletins de paye que le Cercle des Nageurs lui a réglé la somme nette globale de 9.209,90 € que M. KUTUZOV reconnaît avoir reçue. Sa demande en paiement d’un solde dû de 3.964,35 € bruts est donc fondée.

Il sera débouté de sa demande relative aux congés payés puisqu’il a épuisé ses droits à congés payés en prenant 22 jours en août, 16 jours en septembre et 10 jours en décembre 2004. Il sera également débouté de sa demande relative à l’indemnité de précarité comprise dans les sommes déjà reçues ou allouées.

"-" Sur la saison 2005 / 2006

Pour cette saison, sa rémunération annuelle nette était fixée à 13.200 € et elle intégrait les primes de manifestations.

Il ressort des bulletins de salaire que M. KUTUZOV a tous les mois reçu la somme nette de 1.100 € sauf en juin 2006 où il n’a reçu que 1.050 €. Le Cercle des Nageurs reconnaît lui devoir 25 € nets, qui lui seront accordés, le salaire de juin n’étant dû que pour moitié, le contrat prenant effet au 18 juin.

Dans la mesure où M. KUTUZOV ne quantifie pas le nombre de jours de congés auxquels il aurait eu droit, déduction faite des congés pris du 19 au 31 décembre

2005, il sera débouté de sa demande en paiement d’une indemnité compensatrice de congés payés.

Il réclame en revanche légitimement la prime de précarité d’un montant net de 1.320 €, qui n’était plus comprise dans sa rémunération.

"-" Sur la saison 2006 /2007

Il était convenu d’une rémunération annuelle nette de 12.000 €, comprenant les primes de manifestation.

M. KUTUZOV a été victime d’un accident du travail le 9 janvier 2007 mais le Cercle des Nageurs devait à compter de son 91 ème jour d’incapacité, maintenir son salaire conformément aux dispositions de l’article 8-5 de la convention collective de l’animation, ce qu’il a d’ailleurs fait.

En effet, il ressort des bulletins de salaire que M. KUTUZOV a reçu pour cette année la somme de 10.600 € nets. Il a donc été totalement désintéressé de ses droits au titre de son salaire, déduction faite de la période de carence.

Il est seulement fondé à obtenir 1.060 € nets au titre de l’indemnité de congés payés et 1.060 € nets au titre de l’indemnité de précarité.

"-" Sur la demande reconventionnelle.

Les salaires de M. KUTUZOV n’ayant pas été réglés en totalité pour la saison 2004/2005 il en résulte que le cercle des nageurs d’AIX LES BAINS ne peut pas soutenir lui avoir versé une somme excédentaire de 300 €.

Pour la dernière saison, le Cercle des Nageurs soutient que M. KUTUZOV aurait à tort reçu en sus de son salaire maintenu, des indemnités journalières à hauteur de 1.491,60 €, dont il réclame le remboursement. Il sera débouté de sa demande faute de démontrer que M. KUTUZOV a reçu plus que la somme à laquelle il pouvait prétendre, le Cercle des Nageurs n’étant pas recevable à demander le remboursement de sommes qu’il n’a pas servies.

Le Cercle des Nageurs sera également débouté de sa demande en remboursement de la somme de 378 € qu’il affirme avoir avancée au titre de frais médicaux au nom et pour le compte de M. KUTUZOV, puisque cette affirmation, contestée par M. KUTUZOV, n’est corroborée par aucun élément.

"-" Sur les bulletins de salaire.

La Cour confirmera le jugement déféré en ce qu’il a ordonné la remise de bulletins de salaire pour la première saison, sauf à préciser qu’il conviendra de prendre en compte les condamnations prononcées par la présente décision. Elle ordonnera la remise d’un bulletin de salaire pour la période du 16 juin au 31 août 2003. Les bulletins de salaire de juillet, septembre et octobre 2004, d’avril et mai 2006, et de juillet, août et septembre 2006 et juin 2007, figurent au dossier du Cercle des Nageurs et ont été communiqués Ils seront remis à M. KUTUZOV qui prétend ne pas les avoir reçus.

"-" Sur le travail dissimulé

C’est à bon droit que le Conseil de Prud’hommes a débouté M. KUTUZOV de sa demande indemnitaire au motif que les éléments du dossier ne permettaient pas d’établir une volonté délibérée de dissimulation du Cercle des Nageurs, dont la nature associative peut expliquer les erreurs d’analyse, qui ont, pour la plupart, été corrigées au fur et à mesure de la relation entre les parties.

Ainsi, seules les particularités de la situation administrative de M. KUTUZOV, qui pouvait légitimement apparaître comme complexes pour l’employeur, sont à l’origine du contentieux relatif à la première saison, laquelle a été régularisée, les documents contractuels pourtant une date d’engagement au 11 septembre 2002.

Le retard dans le paiement d’un salaire et dans l’émission de bulletins de paye constaté au début de la deuxième saison ne traduit pas la volonté délibéré de l’employeur de dissimuler l’emploi salarié de M. KUTUZOV, alors même qu’un contrat de travail avait été régularisé.

L’absence d’indication des primes sur les bulletins de salaire de la deuxième saison révèle que l’employeur effectuait une distinction erronée entre les primes et le salaire et cette erreur ne s’est pas renouvelée les années suivantes.

Quant à l’absence de remise à M. KUTUZOV de certains bulletins de salaire, elle est exclusive de toute mauvaise foi puisque ces bulletins ont été édités et que les salaires correspondant ont été payés, de même que les charges et cotisations y afférentes.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

INFIRME le jugement du Conseil de Prud’hommes d’AIX LES BAINS du 18 septembre 2008 en ce qu’il a :

"-" requalifié la relation de travail en contrat de travail à durée indéterminée et alloué au salarié l’indemnité de requalification,

"-" dit que la rupture s’analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et a alloué à M. Andrey KUTUZOV des dommages et intérêts au titre du non-respect de la procédure de licenciement et des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

"-" fait droit partiellement à la demande de rappel de salaires,

STATUANT à NOUVEAU sur ces chefs,

DIT que M. Andrey KUTUZOV était lié au cercle des nageurs d’AIX LES BAINS par des contrats de travail à durée déterminée d’usage et le déboute de sa demande de requalification,

DEBOUTE M. Andrey KUTUZOV de sa demande au titre de la rupture du contrat de travail,

CONDAMNE le cercle des nageurs d’AIX LES BAINS à verser à M. Andrey KUTUZOV et avec intérêts au taux légal à compter du 15 septembre 2007 les sommes suivantes :

"-" saison 2002/2003 : 8.495,55 € bruts à titre de rappel de salaires outre 849,55 € bruts au titre des congés payés y afférents et 849,55 € bruts au titre de l’indemnité de précarité,

"-" saison 2003/2004 : 2.434,87 € bruts à titre de rappel de salaires outre 243,49 € bruts de congés payés y afférents et 243,49 € + 637,08 € bruts d’indemnité de précarité,

"-" saison 2004/2005 : 3.964,35 € bruts à titre de rappel de salaire,

"-" saison 2005/2006 : 25 € nets pour juin 2005 et 1.320 € à titre d’indemnité de précarité,

"-" saison 2006/2007 : 1.060 € nets au titre de l’indemnité de congés payes et 1.060 € nets au titre de l’indemnité de précarité,

CONFIRME la décision entreprise en ce qu’elle a :

"-" ordonné au Cercle des Nageurs la remise à M. Andrey KUTUZOV des bulletins de salaire :

* de septembre 2002 au 15 juin 2003, bulletins à établir,

* de juillet, septembre et octobre 2004, d’avril et mai 2006, et de juillet, août et septembre 2006 et juin 2007,

SAUF à préciser que lesdits bulletins devront prendre en compte les condamnations prononcées à titre de rappel de salaires,

"-" débouté M. Andrey KUTUZOV de sa demande en paiement d’une indemnité pour travail dissimulé,

"-" débouté le Cercle des Nageurs de sa demande reconventionnelle,

"-" condamne le Cercle des Nageurs à payer à M. Andrey KUTUZOV la somme de 1.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile,

Y AJOUTANT,

Ordonne au Cercle des Nageurs d’établir un bulletin de paye pour la période du 15 juin au 31 août 2003 et à le remettre à M. Andrey KUTUZOV,

Condamne le Cercle des Nageurs à payer à M. Andrey KUTUZOV la somme complémentaire de MILLE euros (1.000 €) au titre de ses frais irrépétibles en cause d’appel,

Condamne le Cercle des Nageurs aux dépens de première instance et d’appel.

Ainsi prononce publiquement le 26 Mai 2009 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame BROUTECHOUX, Conseiller, faisant fonctions de Président, et Madame ALESSANDRINI, Greffier.

N° arrêt : CHA/2009/25

Fiche N° 45058 :

CA CHAMBERY 26 MAI 2009 KUTUZOV / ASSOCIATION CERCLE DES NAGEURS D’AIX-LES-BAINS

"-" CERIT (Centre d’Etude et de Recherche de l’Institut du Travail - Université Nancy2)

Demandeur : Kutuzov
Défendeur : Association cercle des nageurs d’Aix-les-Bains