dissimulation d’heures de travail

Cour de cassation

chambre sociale

Audience publique du 22 septembre 2010

N° de pourvoi : 09-40978

Non publié au bulletin

Cassation partielle sans renvoi

Mme Collomp (président), président

SCP Didier et Pinet, SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. X..., employé par la société Transports Michel en qualité d’adjoint au service personnel d’assurance du 16 août 2000 au 1er février 2006, a saisi la juridiction prud’homale d’une demande de paiement de diverses sommes au titre tant de l’exécution que de la rupture de son contrat de travail ;

Sur la première branche du premier moyen :

Attendu que l’employeur fait grief à l’arrêt de l’avoir condamné à payer une indemnité pour travail dissimulé, alors, selon le moyen, que la dissimulation d’emploi salarié n’est caractérisée que s’il est établi que l’employeur a, de manière intentionnelle, mentionné sur le bulletin de paie un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement effectué ; qu’en se bornant à relever, pour retenir que la dissimulation d’emploi était caractérisée, que la société Transports Michel n’avait pas payé l’intégralité des heures supplémentaires et des repos compensateurs du salarié, qu’elle n’avait pas respecté les contingents d’heures supplémentaires et que les bulletins de paye étaient dépourvus de mention sur le volume des heures travaillées, ce qui ne caractérisait aucun élément intentionnel de sa part, la cour d’appel a violé les articles L. 8221-3 et L. 8223-1 du code du travail ;

Mais attendu que l’arrêt, qui a relevé que le non-paiement des heures supplémentaires et des repos compensateurs dus au salarié, lié à l’absence de toute mention sur ses bulletins de paie relative au volume des heures travaillées depuis son embauche jusqu’au 31 mai 2005, date à laquelle un forfait horaire a été convenu entre les parties, caractérisait l’intention de la société de dissimuler les heures réellement effectuées, n’encourt pas le grief du moyen ;

Mais sur la seconde branche du même moyen :

Vu l’article L. 324-11-1, devenu L. 8223-1 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable ;

Attendu qu’aux termes de ces dispositions, le salarié auquel un employeur a eu recours en violation des dispositions de l’article L. 324-10 a droit en cas de rupture de la relation de travail à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire, à moins que l’application d’autres règles légales ou conventionnelles ne conduise à une solution plus favorable ;

Attendu que l’arrêt condamne l’employeur à payer la somme de 18 498 euros à titre d’indemnité pour travail dissimulé et celle de 5 241,10 euros à titre d’indemnité de licenciement ;

Qu’en statuant ainsi, alors que l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement ne se cumule pas avec l’indemnité forfaitaire légale pour travail dissimulé, seule la plus élevée devant être allouée au salarié, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

Et attendu qu’en application de l’article 627 du code de procédure civile, il y a lieu de casser sans renvoi en appliquant la règle de droit appropriée ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur le second moyen qui ne serait pas de nature à permettre l’admission du pourvoi :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a alloué à M. X... une indemnité de licenciement, l’arrêt rendu le 9 janvier 2009, entre les parties, par la cour d’appel de Nancy ;

Dit n’y avoir lieu à renvoi de ce chef ;

Déboute M. X... de sa demande d’indemnité de licenciement ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux septembre deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt.

Moyens produits par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour la société Transports Michel.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR condamné la société Transports Michel à payer à monsieur X... les sommes de 18.498 euros à titre d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé et de 5.241,10 euros à titre d’indemnité de licenciement ;

AUX MOTIFS QU’au vu de la condamnation de la société Transports Michel au versement de rappel d’heures supplémentaires et de repos compensateurs et eu égard à la persistance manifeste de l’employeur de ne pas respecter les contingents d’heures supplémentaires s’agissant de l’ampleur des tâches fournies par monsieur X... dont les bulletins de paye ont été dépourvus de toute mention sur le volume des heures travaillées depuis son embauche initiale le 16 août 2000 jusqu’au 31 mai 2005, tous éléments caractérisant la volonté de la société Transports Michel de dissimuler les heures réellement effectuées par monsieur X..., il sera fait droit à la demande d’indemnité pour travail dissimulé (arrêt p. 6, dernier §) ; qu’il sera alloué à monsieur X... une indemnité de licenciement s’élevant à 5.241,10 € correspondant, au prorata des années exercées par l’intéressé, à trois dixièmes de mois par année de présence dans les catégories « techniciens et agents de maîtrise et Employés », et à quatre dixièmes de mois par année de présence dans les catégories « ingénieurs et cadres » (cf. arrêt p. 7, dernier §) ;

1) ALORS QUE la dissimulation d’emploi salarié n’est caractérisée que s’il est établi que l’employeur a, de manière intentionnelle, mentionné sur le bulletin de paie un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement effectué ; qu’en se bornant à relever, pour retenir que la dissimulation d’emploi était caractérisée, que la société Transports Michel n’avait pas payé l’intégralité des heures supplémentaires et des repos compensateurs du salarié, qu’elle n’avait pas respecté les contingents d’heures supplémentaires, et que les bulletins de paye étaient dépourvus de mention sur le volume des heures travaillées, ce qui ne caractérisait aucun élément intentionnel de sa part, la cour d’appel a violé les articles L. 8221-3 et L. 8223-1 du code du travail ;

2) ALORS QUE (subsidiairement) l’indemnité forfaitaire prévue par l’article L. 8223-1 du code du travail en cas de dissimulation d’activité ne se cumule pas avec l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement, seule la plus élevée des deux devant être allouée au salarié ; qu’en condamnant cumulativement la société Transports Michel au paiement de 18.498 euros à titre d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé et de 5.241,10 euros à titre d’indemnité de licenciement, la cour d’appel a violé l’article L. 8223-1 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR condamné la société Transports Michel à payer à monsieur X... 20.112,67 euros à titre d’indemnité compensatrice de repos compensateur ;

AUX MOTIFS QUE, conformément aux dispositions de l’article L. 3121-26 du code du travail relatives aux entreprises de plus de 20 salariés selon lesquelles les heures supplémentaires ouvrent droit à un repos compensateur obligatoire dont la durée est égale à 50 % du temps de travail accompli en heures supplémentaires au-delà des 41 heures de travail effectif hebdomadaire jusqu’à atteinte du contingent conventionnel successivement plafonné à 130, 180 puis 200 heures pour le personnel non roulant, et à 100 % au-delà de ce contingent, monsieur X... est fondé à réclamer une indemnité compensatrice du repos non pris destinée à compenser la fatigue occasionnée par le surplus de travail, laquelle cependant a le caractère de salaire et est soumise à la prescription quinquennale de sorte que sa demande ne sera examinée qu’à dater du 1er mai 2001 ; qu’en outre, il convient de déduire des sommes obtenues sur la base de calcul non remise en cause par la société Transports Michel pour l’année entière les périodes de congés payés égales à 3.377,82 euros chaque année de 2001 à 2004 à raison de cinq semaines par an, ce qui donne pour 2001 une indemnité de 4 659,73 euros, pour 2002 une indemnité de 7 416,31 euros, pour 2003 une indemnité de 5.112,21 euros et pour 2004 une indemnité de 2.448,97 euros ; que, s’agissant de l’année 2005, et au vu de ce qui précède, monsieur X... n’est fondé à réclamer une indemnité compensatrice de congés payés que pour les quatre premiers mois, soit la somme de 475,45 euros, de sorte que l’indemnité compensatrice de repos compensateurs globale due au salarié s’élève à la somme de 20 112,67 euros ;

ALORS QU’en retenant, pour fixer à 20.112,67 euros le montant de l’indemnité compensatrice de repos compensateur due au salarié, que la société Transports Michel ne contestait pas la base de calcul retenue par monsieur X..., la cour d’appel a dénaturé les conclusions d’appel de la société Transports Michel en violation de l’article 4 du code de procédure civile.
Décision attaquée : Cour d’appel de Nancy du 9 janvier 2009