Le Conseil d’Etat annule une suspension d’un arrêté préfectoral de fermeture temporaire
Une fermeture administrative de huit semaines, fondée sur un constat de travail dissimulé, ne porte pas une atteinte grave à la liberté du commerce et de l’industrie
Conseil d’Etat statuant en référé ordonnance n° 424480 du 16 octobre 2018
Voir l’ordonnance du Conseil d’Etat
Présentation
Lors d’un contrôle sur deux sites de restauration appartenant à la même société, les agents de contrôle ont constaté l’emploi de trois salariés dissimulés, au sens de l’article L.8221-5 du code du travail, dont l’un, de nationalité étrangère employé sans autorisation de travail.
Sur la base de ce constat, le préfet a pris, en application de l’article L.8272-2 du code du travail, un arrêté de fermeture de ces deux établissements pour une durée de huit semaines.
Saisi par la société, le juge des référés du tribunal administratif de Lille avait suspendu l’exécution de l’arrêté préfectoral au motif que la durée de la fermeture préfectorale excédait cinq jours pour l’un des établissements et trente jours pour l’autre établissement ; la décision du juge suspendait, par voie de conséquence, la mesure d’affichage aux portes des deux établissements, mentionnée dans la décision préfectorale
Le ministère du travail s’est pourvu devant le Conseil d’Etat, statuant en référé, pour obtenir l’annulation de la décision du tribunal administratif de Lille.
Se référant à l’article L.521-2 du code de justice administrative qui précise les conditions du référé-liberté, le Conseil d’Etat a considéré que les fermetures temporaires administratives de ces deux établissements, dont l’une pour une durée de huit semaines, ne portent pas une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté du commerce et de l’industrie. Le Conseil d’Etat a annulé l’ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Lille, rendant ainsi applicable la décision préfectorale de fermeture.
La société dispose de la possibilité d’attaquer la décision préfectorale par la voie de l’excès de pouvoir.
Commentaire
Une décision administrative de fermeture d’établissement ou de suspension d’activité économique crée nécessairement un manque à gagner et une perte du chiffre d’affaires, quel que soit le motif de la fermeture et quelle que soit sa durée (installations classées, débits de boissons, discothèque, hôtel etc). Considérer que les conséquences d’une telle décision portent atteinte à la liberté du commerce et de l’industrie pour l’annuler revient à la priver de sa raison d’être et à interdire d’en faire application.
Le tribunal administratif avait jugé que la durée de la fermeture n’aurait pas dû excéder cinq jours pour un établissement et trente jours pour le second établissement, ce qui pouvait aussi être perçu comme une atteinte grave à la liberté du commerce et de l’industrie. Pour mémoire, le code du travail autorise une durée de fermeture de trois mois.
La décision du Conseil d’Etat rend efficiente la volonté du législateur de sanctionner, par une mesure appropriée, un manquement significatif à la législation du travail.