Emploi de faux travailleurs indépendants par le biais d’une plateforme en ligne - fermeture préfectorale

Emploi de faux travailleurs indépendants moniteurs d’auto-école par le biais d’une plateforme de mise en relation en ligne avec les candidats au permis de conduire

Le tribunal administratif de Lyon valide dans son principe la décision préfectorale de fermeture temporaire de l’auto-école et de la plateforme en ligne

Voir la décision du tribunal administratif du 20 novembre 2018

Présentation
L’article L.8272-2 du code du travail permet au préfet de prononcer, sur un rapport de l’inspection du travail, la fermeture temporaire d’un établissement ayant servi à commettre notamment l’infraction de travail dissimulé ; la fermeture ne peut pas excéder trois mois.
L’inspection du travail avait constaté qu’une auto-école avait employé, sur une période deux ans, 49 moniteurs juridiquement subordonnés et donc abusivement présentés comme des travailleurs indépendants, ce qui constitue l’infraction de travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié. Les candidats au permis de conduire s’inscrivaient par le biais d’une plateforme en ligne, gérée par l’auto-école, qui mettait en relation les candidats avec les moniteurs pour l’apprentissage de la conduite, dans les conditions fixées par l’auto-école.
Prenant acte de la commission de cette infraction, le préfet a ordonné la fermeture temporaire pour une durée de trois mois des locaux de l’auto-école et de la plateforme de mise en relation.
Le tribunal administratif de Lyon a validé dans son principe la décision préfectorale de fermeture, mais en réduisant la durée de la fermeture à un mois et demi.

Commentaire
.1) La décision du tribunal administratif rappelle implicitement, mais à bon escient, que, sous le contrôle du juge administratif, le préfet dispose, dans la sphère de la lutte contre le travail illégal, de la faculté de requalifier la situation d’activité économique ou de la relation de travail apparente. On rappellera à cet égard que les premières requalifications prononcées par l’autorité administrative dans ce domaine sont intervenues dans le cadre du recouvrement de la contribution spéciale pour l’emploi de salarié étranger sans titre de travail, lorsque celui-ci était employé par un prétendu donneur d’ordre, requalifié en employeur de fait, en présence d’une opération de fausse sous-traitance (voir la jurisprudence).
Le développement des plateformes de mise en relation par voie électronique pour réaliser une prestation de travail, en raison des modalités originales ou atypiques de leur modèle économique, suscite de façon récurrente des interrogations sur le statut réel des personnes qui effectue cette prestation de travail.
La nature de cette prestation reste nécessairement binaire, soit salariée ou accomplie à titre indépendant. Seuls l’examen et l’analyse des conditions de travail et de l’organisation du modèle économique, sous le contrôle du juge, sont susceptibles de bien qualifier le statut des personnes qui travaillent par le biais de cette mise en relation électronique.
Dans le cas présent, trois autorités, l’inspection du travail, le préfet et le tribunal administratif, ont considéré que ces personnes étaient juridiquement subordonnées et, donc, salariées. Cette analyse a conduit à constater l’infraction de travail dissimulé, par dissimulation d’emploi salarié, ce qui fondait juridiquement la mise en œuvre de l’article L.82272-2 du code du travail.

.2) Le tribunal administratif valide non seulement la fermeture temporaire des locaux physiques dans lesquels l’activité de la société est réalisée, mais valide également la suspension temporaire de l’activité de la plateforme numérique de mise en relation, installée sur internet, puisqu’elle a participé à la commission de l’infraction de travail dissimulé.

La décision du tribunal administratif de Lyon est susceptible de faire l’objet d’un appel dans les deux mois de sa notification.