Dumping social dans le transport routier communautaire : vote du 4 avril 2019 du Parlement européen
Salarié en mobilité transnationale dans le transport routier de marchandises et de passagers : le Parlement européen adopte le Paquet Mobilité
Voir le communiqué de presse du Parlement européen
Présentation
A la suite de l’accord trouvé le 3 décembre 2018 au sein du Conseil européen (voir la rubrique Actualités du 17 décembre 2018), le Parlement européen a adopté un texte modifiant les règles du transport routier à l’intérieur de l’Union européenne.
A titre principal, ce texte, en discussion entre la Commission, le Conseil européen et le Parlement européen, porte d’une part, sur les dispositions sociales applicables aux chauffeurs routiers effectuant des transports routiers intra communautaires et d’autre part, sur les modalités du cabotage au sein des Etats de l’Union européenne.
.1) Le Parlement européen confirme que le transport routier intracommunautaire, y compris au titre du cabotage et de transport transfrontalier, constitue de la prestation de services et que les chauffeurs routiers sont des salariés détachés qui doivent bénéficier du statut social sur le détachement, notamment en termes de rémunération.
Le Parlement européen valide cependant la double exception à ce principe, insérée dans le texte initial de la Commission, outre les opérations de transit dans un Etat de l’Union européenne, concernant les opérations bilatérales simples (c’est-à-dire un aller-retour) entre deux Etats membres, ainsi que les opérations bilatérales suivies d’un chargement ou d’un déchargement dans chaque sens.
.2) Le Parlement européen interdit la prise de repos hebdomadaire normal du chauffeur dans la cabine du véhicule. A cet égard, le Parlement, à l’identique de l’accord trouvé au sein du Conseil européen, formalise l’interdiction de cette pratique, telle qu’elle résulte d’un arrêt Vaditrans du 20 décembre 2017 de la Cour de justice de l’Union européenne (voir la décision). Dans cette affaire, la CJUE a jugé que le chauffeur routier ne pouvait pas prendre son repos hebdomadaire normal dans la cabine du véhicule qu’il conduit. Mais a contrario, la CJUE autorise la prise de repos réduit dans la cabine.
.3) Le texte voté par le Parlement confirme la position du Conseil sur le droit pour le chauffeur à un retour régulier dans son pays toutes les quatre semaines.
.4) Le texte fixe de nouvelles règles pour le cabotage routier, qui sont différentes de celles adoptées par le Conseil. Le texte voté remplace la limitation du nombre d’opérations de cabotage dans l’Etat de destination par la limitation de la durée du cabotage dans cet Etat qui est fixée à trois jours, sans limitation du nombre d’opérations. Par ailleurs, pour éviter du cabotage systématique et permanent, le Parlement porte de cinq (position du Conseil) à six jours le délai de carence dans l’Etat d’origine, c’est-à-dire le temps d’attente d’un véhicule qui vient d’effectuer une opération de cabotage hors de cet Etat.
.5) Le Parlement confirme que tous les véhicules de plus de 3,5 tonnes effectuant du transport routier de marchandises (TRM) l’international devront être équipés pour la fin de l’année 2024 (2022 pour les véhicules neufs) d’un tachygraphe dit intelligent de la deuxième génération. Cet appareil enregistrera notamment les passages de frontière, ainsi que les activités de chargement et de déchargement. Le tachygraphe dit intelligent permet aux services de contrôle de connaître à distance les informations stockées dans l’appareil, avec des relevés de position du véhicule.
.6) Enfin, le texte voté au Parlement prévoit également un meilleur contrôle des fraudes à l’établissement et des fraudes au détachement par le biais des sièges sociaux et des domiciliation de complaisance dans des Etats de l’Union européenne considérés comme à bas coût. Ce montage permet à des entreprises de déclarer une simple adresse dans un de ces Etats et d’exercer effectivement leur activité depuis un autre Etat. L’accord renforce la condition d’établissement d’une entreprise de transport en lien avec son activité dans l’Etat où elle se domicilie.
Commentaire
Pour l’essentiel, le texte voté par le Parlement européen se cale sur celui adopté par le Conseil européen (voir le commentaire), excepté sur les modalités de limitation du cabotage dans l’Etat de destination.
Ces dispositions, dénommées Paquet mobilité (détachement, temps de conduite, temps de repos, temps de pause, repos hebdomadaire, géolocalisation par tachygraphe et règles professionnelles applicables au secteur du transport routier) doivent désormais faire l’objet du trilogue Commission, Conseil et Parlement, en vue de leur adoption définitive, si possible avant le terme des mandats de la Commission et des députés européens à la fin du mois de mai prochain.