Employeur étranger sans titre de travail

Cour de cassation

chambre criminelle

Audience publique du 8 août 2018

N° de pourvoi : 17-84920

ECLI:FR:CCASS:2018:CR01649

Publié au bulletin

Rejet

M. Straehli (conseiller le plus ancien faisant fonction de président), président

SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

 M. Ahmet Y...,

contre l’arrêt de la cour d’appel d’ORLÉANS, chambre correctionnelle, en date du 14 février 2017, qui, pour emploi d’un étranger non muni d’une autorisation de travail salarié, faux dans un document administratif, détention de faux document administratif et déclaration mensongère à une administration publique en vue d’obtenir un avantage indu, l’a condamné à 2 000 euros d’amende, dont 1 000 euros avec sursis, et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l’audience publique du 5 juin 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l’article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. STRAEHLI, conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Talabardon, conseiller rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Zita ;

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire Talabardon, les observations de la société civile professionnelle BARADUC, DUHAMEL et RAMEIX, avocat en la Cour, et les conclusions de M.l’avocat généralCROIZIER ;

Vu le mémoire produit ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué, du jugement qu’il confirme, après requalification d’un des faits poursuivis, et des pièces de procédure que M. Y..., gérant d’une société exploitant une entreprise de construction, a été convoqué devant le tribunal correctionnel des chefs susmentionnés pour avoir embauché, le 5 mai 2013, M. D... C... , ressortissant turc, qui prétendait répondre à l’identité d’E... B..., et avoir déclaré sous cette fausse identité l’accident du travail dont l’intéressé a été victime dès le lendemain, alors que M. C... n’était pas muni d’un titre l’autorisant à exercer une activité salariée en France et que M. Y... a été trouvé en possession d’une photocopie du titre de séjour de M. B..., qu’il a reconnu avoir falsifiée en y apposant la photographie de M. C... ; que les juges du premier degré, après avoir écarté une exception de nullité de la convocation en justice du prévenu, ont déclaré l’intéressé coupable des faits et, sur les intérêts civils, l’ont condamné à payer à la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) du Loiret la somme principale de 22 655,16 euros en remboursement des prestations d’accident du travail servies à M. C... ; que le prévenu, la partie civile et le ministère public ont relevé appel de la décision ;

En cet état ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 390, 390-1, 550 et suivants du code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, défaut de motifs et manque de base légale ;

”en ce que l’arrêt attaqué a rejeté les exceptions de nullité soulevées par M. Y... tenant à l’existence de deux convocations distinctes portant la même date et ne visant pas les mêmes infractions ;

”aux motifs que M. Y... justifie de ce qu’il a reçu et signé deux convocations en justice, l’une mentionnant trois délits : le délit d’emploi d’un étranger non muni d’une autorisation de travail salarié, le délit de faux dans un document administratif et le délit de détention frauduleuse d’un faux document administratif, et la seconde reprenant ces trois préventions et y ajoutant le délit de déclaration inexacte pour obtenir de l’Etat ou d’un organisme public un paiement indu ; que les deux convocations ont été signées par le prévenu qui ne le conteste pas ; que de plus, elles respectent chacune les prescriptions édictées par l’article 390-1 du code de procédure pénale selon lesquelles « la convocation énonce le fait poursuivi, vise le texte de loi qui le réprime et indique le tribunal saisi, le lieu, la date et l’heure de l’audience » ; que M. Y... soutient que, de la délivrance de ces deux convocations, est résulté pour lui un préjudice, en ce qu’il ne savait pas exactement quels délits lui étaient reprochés ; que toutefois, dans la mesure où la deuxième convocation contient rigoureusement les mêmes préventions que la première, outre une prévention supplémentaire, il ne peut être considéré qu’il subsistait pour le prévenu une incertitude sur les infractions reprochées ; que M. Y... soutient encore qu’alors que les deux convocations portent la même date, à savoir le 12 décembre 2013, la convocation faisant mention de quatre chefs de prévention lui a été délivrée le 13 décembre 2013 ; que dans la mesure, cependant, où M. Y... ne démontre pas en quoi cette différence de date - alors que les deux convocations visant l’ensemble des délits qui lui sont reprochés lui ont été délivrées dans les formes et délais légaux - lui causerait grief au sens de l’article 802 du code de procédure pénale, ce moyen est inopérant ; qu’enfin, sur l’argument tenant à la rédaction de la citation à comparaître devant la cour d’appel délivrée par voie d’huissier, il doit être rappelé qu’en application de l’article 509 du code de procédure pénale, l’affaire est dévolue à la cour d’appel dans la limite fixée par l’acte d’appel et par la qualité de l’appelant et que la citation à comparaître devant la cour d’appel a seulement pour objet de donner connaissance aux parties de la date d’audience ; que le moyen de nullité ne saurait dès lors prospérer ;

”alors que la convocation énonce le fait poursuivi, vise le texte de loi qui le réprime et indique le tribunal saisi, le lieu, la date et l’heure de l’audience ; que l’envoi de deux convocations distinctes, datées du même jour et qui ne portent pas sur les mêmes infractions, ne permet pas au prévenu de connaître les infractions exactes pour lesquelles il est poursuivi, ce qui est pourtant nécessaire aux droits de la défense, et le prive ainsi du droit à un procès équitable ; que la cour d’appel a constaté que les deux convocations reçues par M. Y..., datées du 12 décembre 2013, portaient sur des infractions distinctes, dès lors que l’une des convocations faisait mention du délit de déclaration inexacte pour obtenir de l’Etat ou d’un organisme public un paiement indu, et que ce délit n’était pas visé par l’autre convocation ; que M. Y... ne pouvait ainsi savoir avec certitude s’il était poursuivi pour ce dernier délit, qui constituait le soutien de la constitution de partie civile de la CPAM ; que la cour d’appel ne pouvait donc pas juger que M. Y... avait été régulièrement convoqué à l’audience du tribunal correctionnel d’Orléans du 15 mai 2014” ;

Attendu que, pour confirmer la disposition du jugement écartant l’exception de nullité de la saisine de la juridiction correctionnelle, prise de ce que le prévenu s’étant vu délivrer deux convocations en justice datées du même jour, mais dont la seconde mentionnait une infraction supplémentaire, il n’a pas été en mesure de connaître précisément ce qui lui était reproché et, partant, d’organiser efficacement sa défense, l’arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu’en l’état de ces énonciations, et dès lors que la seule circonstance que la convocation délivrée en second lieu mentionnait une infraction non visée par la première n’a pu induire l’intéressé en erreur sur le nombre et la nature des faits qui lui étaient reprochés en définitive et que, d’ailleurs, ainsi que l’ont relevé les premiers juges, son avocat s’est expliqué dans ses conclusions écrites sur les quatre infractions poursuivies, la cour d’appel a justifié sa décision ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 8251-1 et L. 8256-2 du code du travail, 111-2 à 111-4, 121-3 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motif et manque de base légale ;

”en ce que l’arrêt attaqué a déclaré M. Y... coupable des faits d’emploi d’un étranger non muni d’une autorisation de travail salarié ;

”aux motifs que s’agissant du délit d’emploi d’un étranger non muni d’une autorisation de travail salarié, il n’est pas contesté que M. D... C... était dépourvu de tout titre l’autorisant à exercer une activité salariée en France, lorsqu’il a été embauché par M. Y... ; que toutefois, celui-ci conteste l’élément intentionnel de l’infraction ; qu’il explique que lorsqu’il a rencontré M. C..., rue [...], alors qu’il cherchait quelqu’un à embaucher, il lui a demandé une copie de sa pièce d’identité et de sa carte vitale ; que celui-ci lui a remis un peu plus tard la copie d’une pièce d’identité au nom de M. E... B... ; qu’entendu sur le point de savoir comment il n’avait pas remarqué que la photo figurant sur cette pièce d’identité ne correspondait pas à la personne qui était avec lui, il a déclaré, lors de son audition du 3 juin 2013 à 18 heures 10 : “j’ai pris cette copie et j’ai regardé un peu la photo, je me suis douté un petit peu en regardant M. C... qu’il y avait un petit problème. C’était déjà par rapport aux cheveux, il en avait plus en vrai que sur la photo” ; qu’il admet donc avoir pu, dès cet instant, se rendre compte de ce que M. C... n’était pas celui qu’il prétendait être ; que par ailleurs, ainsi que les gendarmes le lui ont fait observer, M. Y... n’a pas respecté les précautions qu’il prenait habituellement en cas d’embauche d’un salarié : qu’en effet, dans sa première audition, il a expliqué que lorsqu’il rencontrait quelqu’un qu’il souhaitait employer, il lui demandait les originaux des documents utiles dont ils faisaient les photocopies ensemble ; que s’agissant de M. C..., M. Y... a reconnu s’être contenté des photocopies remises par l’intéressé, sans exiger la production des originaux ; qu’il en résulte donc que M. Y... avait nécessairement remarqué que M. C... ne lui avait pas présenté les documents à-son nom ; qu’en sa qualité d’associé gérant de la SARL Met-Ba, il se devait de vérifier la situation du salarié étranger qu’il souhaitait embaucher ; que l’infraction est donc caractérisée ;

”alors que le simple doute de l’employeur sur l’identité du salarié qu’il embauche ne caractérise pas l’élément intentionnel du délit d’emploi d’un étranger non muni d’une autorisation de travail salarié ; que pour déclarer M. Y... coupable de ce délit, la cour d’appel a estimé que le prévenu avait eu un doute sur la véracité des documents d’identité présentés par M. C... sous le nom de M. B... et n’avait pas procédé à des vérifications en exigeant les originaux de ces documents ; qu’en statuant par de tels motifs, impropres à caractériser la connaissance par M. Y... de ce que M. C... était dépourvu de tout titre l’autorisant à exercer une activité salariée en France et l’intention de commettre le délit, la cour d’appel a privé sa décision de base légale” ;

Attendu que, pour dire établi le délit d’emploi d’un étranger non muni d’une autorisation de travail salarié, l’arrêt, par les motifs repris au moyen, énonce que M. Y..., après avoir pu se rendre compte de ce que M. C... n’était pas la personne répondant au nom d’E... B..., dont il lui présentait une copie de la pièce d’identité, s’est abstenu, non seulement de solliciter la production de l’original de ce document, comme il en prenait habituellement la précaution, mais aussi, et, en tout état de cause, de vérifier la situation de ce salarié étranger qu’il s’apprêtait à embaucher ;

Attendu qu’en l’état de ces énonciations, procédant de son appréciation souveraine des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, d’où il résulte que le prévenu, en s’abstenant de vérifier si le travailleur étranger qu’il envisageait de recruter était autorisé à exercer une activité salariée sur le territoire français, a sciemment commis le délit qui lui est reproché, la cour d’appel a justifié sa décision ;

D’où il suit que le moyen ne peut qu’être écarté ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 111-2 à 111-4, 121-3, 441-6 et 441-10 du code pénal, 2, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motif et manque de base légale ;

”en ce que l’arrêt attaqué a déclaré M. Y... coupable des faits de déclaration mensongère à une administration publique en vue d’obtenir un avantage indu, l’a condamné à une amende de 2 000 euros, l’a déclaré entièrement responsable du préjudice subi par la Caisse primaire d’assurance maladie du Loiret et l’a condamné à payer à la Caisse, partie civile, la somme de 22 655,16 euros au titre du préjudice financier subi ;

”aux motifs que, s’agissant du délit de déclaration inexacte pour obtenir de l’Etat ou d’un organisme public un paiement indu, M. Y... fait valoir que les textes sur lesquels se fondent la poursuite ne font pas partie de la législation en vigueur, et qu’une erreur de base légale a été commise ; que les faits reprochés à M. Y... l’ont été au visa des articles 22, § 11,§ I de la Loi 68-690 du 31 juillet 1968,et L. 161 du Livre des procédures fiscales ; qu’il appartient à la cour d’appel de restituer aux faits leur exacte qualification ; qu’en l’espèce, les faits tombent sous le coup des articles 441-6, 441-9, 441-10 et 441-11 du code pénal, dans leur rédaction en vigueur jusqu’au 25 décembre 2013, sanctionnant d’une peine de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende la déclaration mensongère à une administration publique en vue d’obtenir un avantage indu ; que M. Y... soutient, sur le fond, qu’il n’a pas eu l’intention de faire une déclaration inexacte s’agissant de la déclaration d’accident du travail faite au nom de M. E... B..., ignorant au moment où il l’a établie que son salarié avait usurpé cette identité ; que cependant, même s’il assure n’avoir su qu’après l’établissement de la déclaration d’accident du travail, que son salarié se nommait D... C... et non E... B..., il a été déjà été indiqué que dès son embauche, il a émis des doutes quant à l’adéquation entre la personne qu’il embauchait et les papiers qu’il présentait ; (

) qu’il explique que lorsqu’il a rencontré M. D... C... , rue [...], alors qu’il cherchait quelqu’un à embaucher, il lui a demandé une copie de sa pièce d’identité et de sa carte vitale ; que celui-ci lui a remis un peu plus tard la copie d’une pièce d’identité au nom de M. E... B... ; qu’entendu sur le point de savoir comment il n’avait pas remarqué que la photo figurant sur cette pièce d’identité ne correspondait pas à la personne qui était avec lui, il a déclaré, lors de son audition du 3 juin 2013 à 18 heures 10 : “j ‘ai pris cette copie et j’ai regardé un peu la photo, je me suis douté un petit peu en regardant D... C... qu’il y avait un petit problème. C’était déjà par rapport aux cheveux, il en avait plus en vrai que sur la photo” ; qu’il admet donc avoir pu, dès cet instant, se rendre compte de ce que M. C... n’était pas celui qu’il prétendait être (

) ; que par ailleurs, M. C... déclare que son patron a su dès son hospitalisation qu’il n’était pas B..., mais sans que cela ne lui pose de problème puisqu’il a dit à son salarié hospitalisé qu’il était entré avec l’identité B... et qu’il devait donc sortir avec la même identité, et qu’il établirait la déclaration au nom de B... ; que de plus, à considérer que M. Y... n’ait pas su au moment de l’établissement de la déclaration d’accident du travail que son salarié avait fourni une identité erronée, il n’a pas, par la suite, modifié la déclaration ou signalé les faits à la CPAM ; que bien plus, si l’on en croit ses explications, c’est à ce moment-là qu’il a entrepris de falsifier la copie de la pièce d’identité de B... en y apposant la photographie d’C... ; que dans ces conditions, l’infraction est caractérisée en tous ses éléments constitutifs, sauf à requalifier les faits ainsi qu’il est dit au dispositif du présent arrêt ;

”1°) alors que le délit de déclaration inexacte pour obtenir de l’Etat ou d’un organisme public un paiement indu n’est constitué que si le déclarant connaissait, au jour de la déclaration litigieuse, son caractère mensonger ou inexact ; qu’un simple doute de l’employeur sur l’identité du salarié pour lequel il effectue une déclaration d’accident du travail ne caractérise pas sa connaissance de la fausse identité du salarié et, par conséquent, le caractère mensonger ou inexact de la déclaration d’accident du travail le concernant ; que pour condamner M. Y... pour les faits de déclaration inexacte pour obtenir de l’Etat ou d’un organisme public un paiement indu, la cour d’appel a estimé que le prévenu avait émis des doutes quant à l’adéquation entre la personne qu’il embauchait et les papiers qu’il présentait et que le salarié avait affirmé que M. Y... avait appris sa véritable identité après son hospitalisation ; qu’en statuant par de tels motifs, impropres à caractériser la connaissance de la fausse identité de M. C... au jour de la déclaration d’accident du travail, la cour d’appel a privé sa décision de base légale ;

”2°) alors que pour condamner M. Y... pour les faits de déclaration inexacte pour obtenir de l’Etat ou d’un organisme public un paiement indu, la cour d’appel a estimé que le prévenu n’avait pas, après avoir eu connaissance de ce que M. C... s’était fait embaucher sous une fausse identité, modifié sa déclaration ou déclaré les faits à la CPAM ; qu’en statuant par de tels motifs, tandis que le délit ne sanctionne que la fausse déclaration ou la déclaration inexacte, sans que la révélation ultérieure du faux à l’auteur de la déclaration soit sanctionnée, la cour d’appel a violé les textes visés ci-dessus ;

”3°) alors que le délit de fourniture d’une déclaration mensongère pour obtenir des allocations ou indemnités n’est caractérisé que si celles-ci ne sont pas dues ; que le caractère indu des allocations ne peut se déduire de la seule fausseté de la déclaration effectuée par le prévenu ou de son seul caractère incomplet ; que pour condamner M. Y... pour des faits de déclaration inexacte pour obtenir de l’Etat ou d’un organisme public un paiement indu, la cour d’appel a constaté que le prévenu avait effectué une fausse déclaration et que la CPAM avait versé à M. C..., victime d’un accident déclaré sous le nom de M. B..., les prestations habituelles en la matière ; qu’en statuant ainsi, sans constater que ces prestations n’étaient pas dues, la cour d’appel a privé sa décision de base légale ;

”4°) alors que l’auteur d’une infraction pénale ne peut être tenu de réparer que le préjudice subi par ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par l’infraction ; que M. Y... faisait valoir que la CPAM avait continué à verser à M. C... des prestations après avoir appris que ce dernier avait été embauché sous une fausse identité et que l’accident du travail dont il avait été victime avait été déclaré sous cette fausse identité ; qu’il en résultait que le préjudice résultant, pour la CPAM, du versement de prestations, à les supposer indues, après connaissance de la fausse déclaration, était sans lien de causalité avec l’infraction ; qu’en ne recherchant pas si le versement de prestations par la CPAM après que celle-ci avait eu connaissance de la fausse déclaration avait un lien de causalité avec l’infraction reprochée à M. Y..., la cour d’appel a privé sa décision de base légale” ;

Attendu que, pour dire établi, après requalification des faits objet de la poursuite, le délit de déclaration mensongère à une administration publique en vue d’obtenir un avantage indu, l’arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu’en cet état, les griefs allégués ne sont pas encourus ;

Qu’en premier lieu, en retenant, par une appréciation souveraine des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, que le prévenu a sciemment procédé à une déclaration d’accident du travail pour un salarié dont il n’ignorait pas qu’il ne répondait pas à l’identité indiquée à la caisse primaire d’assurance maladie, les juges ont justifié le caractère mensonger de cette déclaration ;

Qu’en deuxième lieu, le motif de l’arrêt, critiqué à la deuxième branche du moyen, étant surabondant, le grief allégué est inopérant ;

Qu’en troisième lieu, présentent un caractère indu, au sens de l’article 441-6, alinéa 2, du code pénal, les prestations versées par un organisme de sécurité sociale à une personne prise en charge sous une fausse identité, quels que soient les droits auxquels l’intéressée peut prétendre en son nom propre ;

Qu’en quatrième lieu, l’article L. 471-1, alinéa 3, du code de la sécurité sociale dispose que la caisse primaire d’assurance maladie recouvre auprès de l’employeur de toute personne étrangère travaillant ou ayant travaillé pour le compte de celui-ci, sans satisfaire aux conditions légales de régularité de séjour et de travail en France, l’indu correspondant à la totalité des dépenses qu’elle supporte pour cette personne au titre de la législation sur les accidents du travail ;

Qu’il en résulte que le moyen soumis aux juges du fond par M. Y..., pris de ce que le préjudice invoqué par la CPAM du Loiret, consistant en l’intégralité des débours versés pour le compte de M. C... à la suite de son accident du travail, n’entretenait pas un lien de causalité avec le délit imputé au prévenu, tenant à la déclaration de l’accident sous une fausse identité de la victime, dès l’instant où la caisse, bien qu’ayant acquis la connaissance du caractère mensonger de cette déclaration, avait continué de servir des prestations au salarié, était inopérant en ce que ce dernier avait été employé sans être titulaire d’une autorisation de travail salarié en France ;

Que, dès lors, il ne peut être fait grief à la cour d’appel de n’avoir pas mieux répondu à l’argumentation qui lui était présentée ;

D’où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le huit août deux mille dix-huit ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre. Publication :

Décision attaquée : Cour d’appel d’Orléans , du 14 février 2017