secrétariat - bénévolat non

Cour de cassation

chambre criminelle

Audience publique du 30 janvier 2001

N° de pourvoi : 00-84433

Non publié au bulletin

Rejet

Président : M. COTTE, président

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trente janvier deux mille un, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller BEYER, les observations de la société civile professionnelle LESOURD, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l’avocat général COMMARET ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

"-" Y... Didier,

contre l’arrêt de la cour d’appel d’AIX-EN-PROVENCE, 7ème chambre, en date du 11 mai 2000, qui, pour travail dissimulé, l’a condamné à 10 000 francs d’amende ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L.324-9, L.324-10 du Code du travail et 593 du Code de procédure pénale ;

”en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Didier Y..., président-directeur général de la société anonyme Cirfo, coupable d’avoir employé clandestinement une salariée du 1er septembre 1996 au 28 février 1997 et l’a condamné à 10 000 francs d’amende ;

”aux motifs qu’il résulte du procès-verbal établi par l’inspecteur du Travail que ce dernier se présentant à cet endroit le 25 septembre 1996 pour vérifier le fonctionnement des diverses structures gérées au ..., en demandant à voir Didier Y..., a été reçu à l’accueil par Sylvie X..., se présentant comme la secrétaire de celui-ci ; que n’ayant pas reçu de réponse à une lettre d’observations du 6 novembre 1996, l’inspecteur du Travail se présentait à nouveau au siège de la société le 10 juin 1997, où il voyait à nouveau à l’accueil Sylvie X..., que les vérifications effectuées ont démontré que cette dernière n’a été déclarée qu’à compter du 1er mars 1997, percevant antérieurement des allocations chômage ; que tant le prévenu que Sylvie X... ont affirmé que jusqu’au 1er mars 1997, celle-ci, qui était également secrétaire de certaines associations, avait seulement une activité bénévole ne percevant que des remboursements de frais ; mais que l’examen des feuilles d’émargement de la société Cirfo a révélé que Sylvie X... avait régulièrement émargé dans cette société au même titre que les autres salariés à raison de 39 heures par semaine ; que, comme l’a relevé l’inspecteur du Travail, une telle présence ne peut correspondre à des tâches liées à des responsabilités au sein des conseils d’administration des associations dont elle était secrétaire ; qu’il est significatif de constater qu’à la date du second contrôle, Sylvie X... se trouvait, comme lors de la première venue de l’inspecteur du Travail, à l’accueil, ce qui démontre que le contrat de travail prenant effet à compter du 1er mars 1997, ne faisait qu’officialiser une relation de travail antérieure dissimulée ;

”alors, d’une part, que les lois pénales de fond, qui prévoient des incriminations plus larges et donc plus sévères pour le prévenu, ne sont pas applicables aux faits commis antérieurement à leur entrée en vigueur ; qu’en statuant sur le fondement de l’article L.324-10 du Code du travail, dans sa rédaction issue de la loi du 11 mars 1997 qui prévoit une répression accrue du travail dissimulé et une incrimination plus sévère dans sa définition du travail clandestin que celles des dispositions de l’article L.324-10, alors seules applicables à des faits commis antérieurement au 1er mars 1997, pour asseoir la déclaration de culpabilité à l’égard de Didier Y..., la cour d’appel a violé les textes précités ;

”alors, d’autre part, qu’est exclu du champ d’application du travail clandestin le travail bénévole, qu’il résulte des déclarations tant du prévenu que de Sylvie X... que jusqu’au 1er mars 1997 celle-ci avait seulement une activité bénévole de secrétaire du bureau de plusieurs associations et ne percevait que des remboursements de frais ; qu’en retenant le prévenu dans les liens de la prévention sur le seul émargement de feuille d’émargement de la société Cirfo par Sylvie X..., la cour d’appel a présumé la culpabilité du prévenu et n’a pas donné de base légale à sa décision ;

”alors, au surplus, que l’infraction de travail clandestin suppose au préalable l’existence d’un contrat de travail ; que dès lors avant d’entrer en voie de condamnation, les juges du fond doivent caractériser l’existence d’un contrat de travail et du lien de subordination, que ceux-ci ne sauraient résulter du simple émargement par Sylvie X... des feuilles d’émargement de la société Cirfo, en l’absence de constatation de l’existence d’un contrat de travail et d’un lien de subordination et sans que soit précisé si des feuilles d’émargement correspondaient à la période du 1er septembre 1996 au 28 février 1997, date à laquelle Sylvie X... a été déclarée par la société Cirfo ; qu’ainsi les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des textes susvisés ;

”et alors, enfin, que seule l’inobservation intentionnelle des formalités limitativement énumérées par l’article L.324-10 du Code du travail caractérise le délit de travail clandestin prévu à l’article L.324-9 du même Code, que la cour d’appel ne pouvait décider que ce délit apparaissait établi contre Didier Y... dès lors qu’il était président-directeur général de la société anonyme Cirfo sans caractériser l’intention délictueuse, laquelle ne pouvait résulter de sa seule qualité de président-directeur général ; qu’ainsi les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des textes susvisés” ;

Attendu qu’en déduisant, par une appréciation souveraine des éléments de fait contradictoirement débattus, que sous couvert d’une activité bénévole, Didier Y..., gérant de la société Circo, a employé Sylvie X..., dans des conditions établissant l’existence d’un lien de subordination, en omettant intentionnellement de procéder aux déclarations exigées par les organismes de protection sociale et par l’administration fiscale, les juges, qui ont fait une exacte application des textes applicables à la date des faits, ont justifié leur décision ;

D’où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l’article L.131-6, alinéa 4, du Code de l’organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Beyer conseiller rapporteur, M. Joly conseiller de la chambre ;

Avocat général : Mme Commaret ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;

Décision attaquée : cour d’appel d’AIX-EN-PROVENCE, 7ème chambre du 11 mai 2000