Croix rouge française - salarié oui

Cour de cassation

chambre sociale

Audience publique du 29 janvier 2002

N° de pourvoi : 99-42697

Publié au bulletin

Rejet.

Président : M. Waquet, conseiller doyen faisant fonction. ., président

Rapporteur : Mme Nicoletis., conseiller apporteur

Avocat général : M. Lyon-Caen., avocat général

Avocats : Mme Luc-Thaler, la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin., avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Sur le moyen unique :

Attendu que Mlle Z... et M. Y... ont participé durant plusieurs années, en qualité d’accompagnateurs puis de chefs de convoi, au service d’accompagnement de personnes voyageant seules mis en place par l’association Croix-Rouge française ; que, postérieurement à la cessation de cette activité, ils ont saisi la juridiction prud’homale de demandes tendant à la reconnaissance de l’existence d’un contrat de travail et à l’obtention de diverses sommes consécutives à la rupture de celui-ci ;

Attendu que l’association Croix-Rouge française fait grief à l’arrêt attaqué (Paris, 11 mars 1999) d’avoir dit que Mlle Z... et M. Y... étaient liés par un contrat de travail avec l’association Croix-Rouge française et d’avoir condamné celle-ci à leur payer des indemnités de préavis et de licenciement, des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et des dommages-intérêts en réparation du préjudice causé par le défaut d’affiliation auprès des organismes sociaux, alors, selon le moyen :

1° que l’engagement d’une personne pris à l’égard d’une association d’utilité publique d’accomplir bénévolement des prestations correspondant à son objet est opposable à la demande de paiement d’une rémunération ou d’indemnités et dommages-intérêts, nonobstant le fait que l’intéressé ait reçu des consignes quant aux conditions matérielles d’exécution de cet engagement ; que la Croix-Rouge française faisait valoir dans ces conclusions que M. Y... et Mlle Z..., qui avaient accompagné les convois de l’association en tant que bénévoles pendant plusieurs années, avaient reconnu de façon expresse le caractère bénévole de leur intervention en concluant en 1991 des contrats de bénévolat ; qu’en retenant que les intéressés avaient contesté leur statut de bénévole en 1983, sans rechercher si la conclusion de contrats de bénévoles en 1991, c’est-à-dire plusieurs années après cette contestation, n’impliquait pas qu’ils avaient accepté en toute connaissance de cause le caractère bénévole de leur mission, cette acceptation leur interdisant de se prévaloir ultérieurement d’un contrat de travail rémunéré, la cour d’appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l’article 1134 du Code civil ;

2° que, pour dire que M. Y... et Mlle Z... avaient perçu une rémunération de la Croix-Rouge française, la cour d’appel se fonde sur une enquête, ordonnée dans le cadre d’une procédure intentée par un autre chef de convoi, Mme X..., ayant conclu que les frais professionnels exposés par l’intéressée ne correspondaient qu’au tiers des sommes qui lui avaient été versées à titre de remboursement forfaitaire de frais ; qu’en se bornant à affirmer que les situations de M. Y... et de Mlle Z... étaient tout à fait comparables, sans constater avec précision que les remboursements versés par la Croix-Rouge française aux demandeurs excédaient les frais réellement exposés dans le cadre de leurs missions de convoyeurs, la cour d’appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l’article L. 121-1 du Code du travail ;

Mais attendu que, si dans le cadre d’une association, les membres adhérents de celle-ci peuvent accomplir, sous l’autorité du président de l’association ou de son délégataire, un travail destiné à la réalisation de l’objet social, en ne percevant, le cas échéant, que le strict remboursement des frais exposés par eux, et ceci sans relever des dispositions du Code du travail, la seule signature d’un contrat dit de bénévolat entre une association et une personne n’ayant pas la qualité de sociétaire, n’exclut pas l’existence d’un contrat de travail, dès l’instant que les conditions en sont remplies ;

Et attendu que la cour d’appel, devant laquelle Mlle Z... et M. Y... n’ont jamais prétendus qu’ils étaient sociétaires de la Croix-Rouge française, a relevé que, non seulement les intéressés effectuaient un travail d’accompagnement des voyageurs sous les ordres et selon les directives de l’association, qui avait le pouvoir d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements éventuels, mais encore que les intéressés percevaient une somme forfaitaire dépassant le montant des frais réellement exposés ;

D’où il suit qu’elle a exactement décidé que les intéressés étaient liés à la Croix-Rouge française par un contrat de travail ; que le moyen n’est pas fondé ;

Par ces motifs :

REJETTE le pourvoi.

Publication : Bulletin 2002 V N° 38 p. 35

Décision attaquée : Cour d’appel de Paris, du 11 mars 1999