Bénévolat après contrat de travail oui

Cour de cassation

chambre sociale

Audience publique du 4 novembre 2015

N° de pourvoi : 14-16582

ECLI:FR:CCASS:2015:SO01812

Non publié au bulletin

Rejet

Mme Goasguen (conseiller le plus ancien faisant fonction de président), président

SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Douai, 31 mai 2013), que M. X... a été engagé par l’association sportive Marck Football en vertu d’un contrat unique d’insertion conclu en application de l’article L. 5134-19-1 du code du travail pour une durée de six mois à compter du 1er août 2010 ; que soutenant avoir bénéficié de la part de l’association d’engagements contractuels dont il ressort que son contrat à durée déterminée devait se terminer le 1er août 2012 et qu’il a continué de travailler au sein du club jusqu’au 30 avril 2011 sans être rémunéré, il a saisi la juridiction prud’homale de diverses demandes ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l’arrêt de le débouter de ses demandes alors, selon le moyen :
1°/ qu’en présence d’un contrat de travail apparent, il appartient à celui qui invoque son caractère fictif d’en apporter la preuve ; qu’il résulte des énonciations de l’arrêt attaqué que M. Mathieu X... a été embauché par l’association sportive Marck football selon contrat à durée déterminée portant sur la période du 1er août 2010 au 31 janvier 2011 et qu’à l’issue de ce contrat, M. Mathieu X... a poursuivi son activité au sein de l’association ; qu’en reprochant à M. Mathieu X... de ne pas faire la preuve d’un contrat de travail le liant à ladite association, la cour d’appel qui n’a tenu aucun compte de ce contrat de travail apparent, n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard des articles 1315 du code civil et L. 1221-1 du code du travail ;
2°/ qu’en opposant à M. Mathieu X... l’allégation de bénévolat dont se prévalait l’employeur quand la preuve de ce bénévolat devait être rapportée par l’association qui l’invoquait, la cour d’appel a de nouveau violé les articles 1315 du code civil et L. 1221-1 du code du travail ;
3°/ que M. Mathieu X... produisait aux débats deux actes émanant du secrétaire général de l’association établissant l’engagement de cette dernière de poursuivre le contrat à durée déterminée jusqu’au 31 juillet 2012 et de l’embaucher ensuite, actes confirmant l’existence du contrat de travail dont se prévalait M. Mathieu X... ; qu’en retenant, pour néanmoins écarter l’existence d’un contrat de travail, que « les attestations émanant de M. Z..., en date du 26 juillet 2010, ne constituent pas un contrat de travail et se trouve, pour l’une d’entre elles, en contradiction avec la réalité des relations conventionnelles existant entre les parties telles qu’elles sont établies sans ambiguïté par le contrat en ce qu’elle concerne une promesse d’embauche », la cour d’appel a statué par des motifs inintelligibles en violation de l’article 455 du code de procédure civile ;
4°/ qu’en affirmant que l’acte portant promesse d’embauche serait « en contradiction avec la réalité des relations conventionnelles existant entre les parties telles qu’elles sont établies sans ambigüité par le contrat » quand il ne résulte aucune contradiction de la conclusion d’un contrat à durée déterminée et de l’engagement de poursuivre la relation contractuelle au-delà du terme de ce contrat, la cour d’appel a violé l’article 1134 du code civil ;
5°/ qu’en retenant que les « attestations émanant de M. Z..., en date du 26 juillet 2010, ne constituent pas un contrat de travail » sans rechercher si, émanant du secrétaire général et responsable administratif de l’association qui avait signé l’ensemble des documents de rupture et disposait ainsi d’un pouvoir de représentation au moins apparent, elles ne valaient pas à tout le moins promesse d’embauche engageant l’association, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard de l’article 1134 du code civil ;
6°/ qu’en toute hypothèse, en excluant l’existence d’un contrat de travail sans aucunement se prononcer au regard des critères définissant le lien de subordination et des conditions de travail de M. Mathieu X..., et sans rechercher notamment si dans les faits l’association sportive Marck football n’avait pas le pouvoir de lui donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et d’en sanctionner les manquements, la cour d’appel a violé les articles 1134 du code civil, L. 1221-1 et L. 1221-3 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d’appel, appréciant souverainement la valeur et la portée des attestations produites et sans avoir à s’expliquer sur celles qu’elle écarte ou retient, a constaté que la convention signée entre le président de l’association sportive et M. X... a été conclue pour six mois, du 1er août 2010 au 31 janvier 2011, dans les mêmes termes que le contrat unique d’insertion signé entre les trois parties les 9 juin et 26 juin 2010 et que postérieurement à son échéance, M. X... a poursuivi une activité au sein de l’association en qualité de bénévole, ce qui ne saurait constituer un contrat de travail apparent ; que sans inverser la charge de la preuve ni avoir à effectuer des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, elle a pu en déduire que le contrat de travail qui liait les parties a pris fin à l’échéance conventionnelle le 31 janvier 2011 ; que le moyen n’est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen annexé qui n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre novembre deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR débouté Monsieur Mathieu X... de sa demande tendant au paiement des salaires des mois de janvier à avril 2011, des congés payés y afférents, de sa demande de dommages-intérêts pour travail dissimulé, de sa demande de dommages-intérêts pour rupture anticipée d’un contrat à durée déterminée, et de sa demande de dommages-intérêts pour rupture abusive d’un contrat à durée indéterminée.
AUX MOTIFS QUE les parties sont liées par un contrat de travail intitulé contrat unique d’insertion signé les 9 et 25 juin 2010, conclu pour une durée de 6 mois à effet au 1er août 2010 et devant se terminer le 31 janvier 2011 ; que ce contrat, conclu en application de l’article L. 5134-19-1 du Code du travail est une convention signée entre le conseil général, l’AS Marck Football et Mathieu X... ; que son renouvellement ne peut renouveler que d’une convention entre ces mêmes parties ; que pour prétendre que le contrat de travail s’est renouvelé au-delà de l’échéance du 31 janvier 2011 Mathieu X... invoque un engagement contractuel jusqu’au 31 juillet 2010 ; qu’or, la convention signée entre Monsieur A..., président de l’association sportive et Mathieu X..., qui ne porte aucune date de signature, est conclue pour 6 mois, du 1er août 2010 au 31 janvier 2011 ; qu’elle est rédigée dans les mêmes termes que le contrat unique d’insertion qui sera signé entre les trois parties les 9 juin et 26 juin 2010 ; que les attestations émanant de Monsieur Z..., en date du 26 juillet 2010, ne constituent pas un contrat de travail et se trouve, pour l’une d’entre elles, en contradiction avec la réalité des relations conventionnelles existant entre les parties telles qu’elles sont établies sans ambigüité par le contrat en ce qu’elle concerne une promesse d’embauche Monsieur Z... indiquant que Mathieu X... « sera embauché dans notre structure » ; que quant à la troisième attestation rédigée par Monsieur Z... le 8 avril 2011, soit postérieurement à l’échéance du contrat de travail, elle confirme qu’à cette date Mathieu X... n’est plus salarié de l’AS Marck Football, qu’il perçoit des frais de déplacement mensuels de 200 euros et que dès que les critères du contrat unique d’insertion seront réunis il sera engagé à mi-temps par l’association sportive ; que les attestations versées par ailleurs par Mathieu X... démontrent qu’il a poursuivi son activité au sein de l’AS Marck Football, ce que ne conteste pas celle-ci qui indique qu’il a repris son activité en qualité de bénévole, qualité justifiant la perception des frais de déplacement relatée par Monsieur Z..., sans démontrer qu’il bénéficiait d’un contrat de travail auprès de l’association ; qu’il s’en déduit que le contrat de travail qui liait les parties a pris fon à son échéance conventionnelle le 31 janvier 2011 ; (...) ; qu’il ressort de ce qui précède que Mathieu X... doit être débouté de ses autres demandes en paiement relatives au rappel de salaires, à l’indemnité pour travail dissimulé, aux dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail et indemnité de procédure.
ALORS QU’en présence d’un contrat de travail apparent, il appartient à celui qui invoque son caractère fictif d’en apporter la preuve ; qu’il résulte des énonciations de l’arrêt attaqué que Monsieur Mathieu X... a été embauché par l’association sportive Marck Football selon contrat à durée déterminée portant sur la période du 1er août 2010 au 31 janvier 2011 et qu’à l’issue de ce contrat, Monsieur Mathieu X... a poursuivi son activité au sein de l’association ; qu’en reprochant à Monsieur Mathieu X... de ne pas faire la preuve d’un contrat de travail le liant à ladite association, la Cour d’appel qui n’a tenu aucun compte de ce contrat de travail apparent, n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard des articles 1315 du Code civil et L. 1221-1 du Code du travail.
ET QU’en opposant à Monsieur Mathieu X... l’allégation de bénévolat dont se prévalait l’employeur quand la preuve de ce bénévolat devait être rapportée par l’association qui l’invoquait, la Cour d’appel a de nouveau violé les articles 1315 du Code civil et L. 1221-1 du Code du travail.
ALORS de plus QUE Monsieur Mathieu X... produisait aux débats deux actes émanant du secrétaire général de l’association établissant l’engagement de cette dernière de poursuivre le contrat à durée déterminée jusqu’au 31 juillet 2012 et de l’embaucher ensuite, actes confirmant l’existence du contrat de travail dont se prévalait Monsieur Mathieu X... ; qu’en retenant, pour néanmoins écarter l’existence d’un contrat de travail, que « les attestations émanant de Monsieur Z..., en date du 26 juillet 2010, ne constituent pas un contrat de travail et se trouve, pour l’une d’entre elles, en contradiction avec la réalité des relations conventionnelles existant entre les parties telles qu’elles sont établies sans ambigüité par le contrat en ce qu’elle concerne une promesse d’embauche », la Cour d’appel a statué par des motifs inintelligibles en violation de l’article 455 du Code de procédure civile.
QU’en tout cas, en affirmant que l’acte portant promesse d’embauche serait « en contradiction avec la réalité des relations conventionnelles existant entre les parties telles qu’elles sont établies sans ambigüité par le contrat » quand il ne résulte aucune contradiction de la conclusion d’un contrat à durée déterminée et de l’engagement de poursuivre la relation contractuelle au-delà du terme de ce contrat, la Cour d’appel a violé l’article 1134 du Code civil.
ET QU’en retenant que les « attestations émanant de Monsieur Z..., en date du 26 juillet 2010, ne constituent pas un contrat de travail » sans rechercher si, émanant du secrétaire général et responsable administratif de l’association qui avait signé l’ensemble des documents de rupture et disposait ainsi d’un pouvoir de représentation au moins apparent, elles ne valaient pas à tout le moins promesse d’embauche engageant l’association, la Cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard de l’article 1134 du Code civil.
ET ALORS en toute hypothèse QU’en excluant l’existence d’un contrat de travail sans aucunement se prononcer au regard des critères définissant le lien de subordination et des conditions de travail de Monsieur Mathieu X..., et sans rechercher notamment si dans les faits l’association sportive Marck Football n’avait pas le pouvoir de lui donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et d’en sanctionner les manquements, la Cour d’appel a violé les articles 1134 du Code civil, L. 1221-1 et L. 1221-3 du Code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR débouté Monsieur Mathieu X... de sa demande tendant au paiement du solde de salaire du mois de janvier 2011.
AUX MOTIFS QUE le contrat de travail qui liait les parties a pris fin à son échéance conventionnelle le 31 janvier 2011 ; qu’il est établi que les salaires ont été versés jusqu’à cette date.
ALORS QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; que Monsieur Mathieu X... poursuivait le paiement d’un solde de salaire au titre du mois de janvier 2011 ; qu’en se bornant à dire qu’il est établi que les salaires ont été versés sans aucunement préciser les éléments sur lesquels elle entendait fonder une telle assertion, la Cour d’appel a statué par voie de simple affirmation en violation de l’article 455 du Code de procédure civile.

Décision attaquée : Cour d’appel de Douai , du 31 mai 2013