Petit fils - livraison de pain - salarié non

Cour de cassation

chambre sociale

Audience publique du 21 juin 1995

N° de pourvoi : 92-40212

Non publié au bulletin

Cassation

Président : M. WAQUET conseiller, président

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société anonyme Alphapain, dont le siège est ... (Tarn-et-Garonne), en cassation d’un arrêt rendu le 8 octobre 1991 par la cour d’appel d’Agen (chambre sociale), au profit de M. Patrick X..., demeurant Résidence d’Olts, Terre Rouge, Cahors (Lot), défendeur à la cassation ;

LA COUR, composée selon l’article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l’organisation judiciaire, en l’audience publique du 10 mai 1995, où étaient présents : M. Waquet, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, Mme Ridé, conseiller rapporteur, MM. Ferrieu, Desjardins, conseillers, Mlle Sant, Mmes Bourgeot, Verger, conseillers référendaires, M. Chauvy, avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme le conseiller Ridé, les conclusions de M. Chauvy, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, qu’en soutenant avoir été embauché le 15 mars 1989 par la société Alphapain pour assurer la vente de produits de boulangerie sur le circuit exploité par son grand-père M. Y... jusqu’au 31 janvier 1989, date à laquelle celui-ci avait cessé son activité de boulanger et s’était fait radier du régistre du commerce, M. X... a saisi le conseil de prud’hommes pour faire constater qu’il avait fait l’objet, le 31 août 1989, d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse et sans respect de la procédure de licenciement et obtenir des indemnités de rupture et des dommages-intérêts ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société Alphapain fait grief à l’arrêt de l’avoir condamnée au paiement de sommes à M. X... en décidant que les parties avaient été liées par un contrat de travail, alors, selon le moyen, qu’ayant constaté que, par jugement du tribunal correctionnel de Montauban du 28 septembre 1990, M. Soulié, président directeur général de la société, avait été relaxé du chef du délit d’emploi d’un travailleur clandestin et que, dans les motifs de son jugement, le Tribunal avait relevé “il est certain que M. Soulié n’est intervenu que pour permettre la poursuite de la livraison à domicile du pain aux clients de M. Y..., ce que M. X... s’est bien gardé de dire lorsqu’il a été entendu par les services de police”, c’est en méconnaissance de l’autorité de chose jugée attachée à cette décision, que la cour d’appel a statué comme elle l’a fait ;

Mais attendu que l’autorité de la chose jugée au pénal ne s’attache qu’au dispositif de la décision et aux motifs qui en sont le soutien nécessaire ;

que le tribunal correctionnel ayant relaxé le prévenu exclusivement au motif “qu’il n’avait pas eu l’intention délibérée de violer les dispositions du Code du travail relatives à l’infraction de recours aux services d’un travailleur clandestin” et en précisant qu’il ne prenait pas parti sur l’existence d’un contrat de travail entre les parties, en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel a justifié sa décision ;

Mais sur les deuxième et troisième moyens :

Vu l’article L. 121-1 du Code du travail ;

Attendu que, pour décider que les parties étaient liées par un contrat de travail et accueillir les demandes, la cour d’appel a énoncé que M. X... effectuait les livraisons de pain avec le véhicule appartenant à la société, qu’il était parfois accompagné par le directeur de cette société et qu’il percevait, sur le montant des factures de pain, des ristournes assimilables à une rémunération ;

Qu’en statuant par ces seuls motifs, sans rechercher si la société Alphapain pouvait donner des ordres à M. X... et en contrôler l’exécution, la cour d’appel qui n’a pas caractérisé le lien de subordination qui conditionne l’existence d’un contrat de travail, n’a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur le quatrième moyen ;

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 8 octobre 1991, entre les parties, par la cour d’appel d’Agen ;

remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Bordeaux ;

Condamne M. X..., envers la société Alphapain, aux dépens et aux frais d’exécution du présent arrêt ;

Ordonne qu’à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d’appel d’Agen, en marge ou à la suite de l’arrêt annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par M. le président en son audience publique du vingt-et-un juin mil neuf cent quatre-vingt-quinze.

Décision attaquée : cour d’appel d’Agen (chambre sociale) , du 8 octobre 1991