Loi impérative plus favorable

Cour de cassation

chambre sociale

Audience publique du 12 mars 2008

N° de pourvoi : 01-44654

Non publié au bulletin

Rejet

M. Bailly (conseiller le plus ancien faisant fonction de président), président

Me Blondel, SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu selon l’arrêt attaqué, (Aix-en-Provence, 2 mai 2001) qu’un contrat à durée déterminée régi par le droit italien a été signé entre M. X... et la société Sportive IL Gabbiano (la société) pour la période du 1er janvier 1998 au 31 décembre 1999 au terme duquel le coureur cycliste professionnel s’engageait à participer à 120 jours au moins de compétition et à s’entraîner consciencieusement ; que par lettre du 30 octobre 1998, la société a informé M. X... de ce qu’elle résiliait ce contrat ; que M. X... a saisi le conseil de prud’hommes de diverses demandes ,

Sur le premier moyen :

Attendu que pour des motifs pris de la violation de l’article 5.1° de la convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 et d’un manque de base légale au regard du même texte, la société fait grief à l’arrêt d’avoir déclaré la juridiction française compétente pour connaître la rupture du contrat de travail ;

Mais attendu que la cour d’appel, qui a constaté, dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, qu’au moment de la rupture du dernier contrat de travail à durée déterminée, M. X... avait accompli en France la majorité des courses pour le compte de la société et qu’il s’entraînait dans ce pays à proximité de son domicile où il revenait après chaque voyage professionnel à l’étranger, a fait une exacte application des dispositions de la convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 modifiée telles qu’interprétées par la Cour de justice des communautés européennes, selon laquelle lorsque l’obligation du salarié d’effectuer les activités convenues s’exerce dans plus d’un Etat contractant, le lieu où il accomplit habituellement son travail est l’endroit où, ou à partir duquel, compte tenu des circonstances du cas d’espèce, il s’acquitte en fait de l’essentiel de ses obligations à l’égard de son employeur ; que le moyen n’est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que, pour des motifs tirés de la violation par fausse application des articles L. 511-1, L. 121-3 et R. 517-1 du code du travail, 55 de la Constitution, 6 et 10 de la convention de Rome du 19 juin 1980, la société fait grief à l’arrêt d’avoir déclaré la juridiction française compétente pour connaître de la rupture du contrat de travail ;

Mais attendu que la clause compromissoire insérée dans un contrat de travail international pour tout litige concernant ce contrat n’est pas opposable au salarié qui a saisi régulièrement la juridiction compétente en vertu des règles applicables, peu important la loi régissant le contrat de travail ; que le moyen n’est pas fondé ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que pour des motifs tirés de la violation de l’article 5.1° de la convention de Bruxelles du 27 septembre 1968, et l’article 6 de la Convention de Rome du 19 juin 1980, la société fait grief à l’arrêt de l’avoir condamnée à payer à M. X... une somme à titre de dommages-intérêts pour rupture du contrat de travail à durée déterminée faite en méconnaissance des dispositions de l’article L. 122-3-8 du code du travail ;

Mais attendu que le choix par les parties de la loi applicable ne peut avoir pour effet de priver le salarié de la protection que lui assurent les dispositions impératives de la loi qui lui serait applicable à défaut de choix et que ces dispositions impératives sont celles auxquelles la loi ne permet pas de déroger par contrat ;

Et attendu que la cour d’appel qui, d’une part, a fait ressortir par une appréciation des éléments de fait et de preuve qui ne peut être discutée devant la Cour de cassation que le pays où M. X... accomplissait habituellement son travail était la France, et qui, d’autre part, et aprés avoir procédé à leur comparaison, a constaté que la loi française d’ordre public régissant la rupture des contrats à durée déterminée est plus favorable que la loi italienne choisie par les parties, en a exactement déduit que ce choix ne pouvait avoir pour effet de priver le salarié de la protection que lui assuraient les dispositions impératives de la loi française qui aurait été applicable à défaut de choix ;

Que le moyen ne peut être accueilli ;

Sur le quatrième moyen :

Attendu que pour des motifs tirés de la violation des articles L. 511-1, L. 121-3 et R. 516-1 du code du travail, 1315 et 1134 et 1147 du code civil, la société fait grief à l’arrêt d’avoir retenu la compétence du juge du contrat de travail et de l’avoir condamnée à une somme à titre de dommages-intérêts pour rupture du contrat de travail à durée déterminée ;

Mais attendu que, sans encourir les griefs du moyen, la cour d’appel a souverainement apprécié le préjudice résultant pour le salarié de la rupture du contrat à durée déterminée et du non-respect par l’employeur des engagements pris à son égard qui relève de la compétence de la juridiction prud’homale ;

Que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Sportive IL Gabbiano Srl aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne la société Sportive IL Gabbiano Srl à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze mars deux mille huit.

Décision attaquée : Cour d’appel d’Aix-en-Provence du 2 mai 2001