La preuve de la pause incombe à l’employeur

Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 19 mai 2021, 19-14.510, Inédit
Cour de cassation - Chambre sociale

N° de pourvoi : 19-14.510
ECLI:FR:CCASS:2021:SO00601
Non publié au bulletin
Solution : Cassation partielle

Audience publique du mercredi 19 mai 2021
Décision attaquée : Cour d’appel de Versailles, du 30 janvier 2019

Président
M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s)
SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

SOC.

CF

COUR DE CASSATION


Audience publique du 19 mai 2021

Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyen faisant fonction de président

Arrêt n° 601 F-D

Pourvoi n° Q 19-14.510

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 19 MAI 2021

Mme [H] [B], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Q 19-14.510 contre l’arrêt rendu le 30 janvier 2019 par la cour d’appel de Versailles (17e chambre civile), dans le litige l’opposant à la société Natural, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Flores, conseiller, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de Mme [B], de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Natural, après débats en l’audience publique du 24 mars 2021 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Flores, conseiller rapporteur, M. Rouchayrole, conseiller, et Mme Piquot, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Versailles, 30 janvier 2019), Mme [B] a été engagée à compter du 1er janvier 2009 par la société Natural (la société) en qualité d’employée commerciale à temps partiel.

2. Le 7 octobre 2015, la salariée a saisi la juridiction prud’homale d’une demande en résiliation judiciaire du contrat de travail et en paiement de diverses sommes au titre de l’exécution et de la rupture du contrat.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa cinquième branche

Enoncé du moyen

3. La salariée fait grief à l’arrêt de la débouter de ses demandes en requalification du contrat de travail en contrat à temps plein et de rappels de salaires et de congés payés afférents, alors « que la preuve du respect des temps de pause incombe à l’employeur ; que pour débouter la salariée de ses demandes, la cour d’appel a jugé que celle-ci ne démontrait pas qu’elle ne pouvait pas toujours prendre sa pause lorsqu’un client était dans l’établissement ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a méconnu la charge de la preuve en violation de l’article L. 3121-33 du code du travail, ensemble l’article 1315 du code civil dans sa version antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

Vu l’article L. 3121-33, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, et l’article 1315, devenu 1353, du code civil :

4. La preuve du respect des temps de pause incombe à l’employeur.

5. Pour débouter la salariée de sa demande en requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat à temps complet et en paiement de rappels de salaire, l’arrêt retient que pour le mois de mars 2013, si la salariée a été rémunérée pour 156,66 heures, son temps de travail n’a été que de 149,2 heures (soit 123,81 + 25,39) ce qui est là encore inférieur à 151,67 heures. Il ajoute que la salariée allègue qu’elle ne pouvait pas toujours prendre sa pause lorsqu’un client était présent dans l’établissement, mais qu’elle n’en rapporte pas la démonstration par la production, par exemple, d’attestations le confirmant.

6. En statuant ainsi, la cour d’appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé les textes susvisés.

Sur les deuxième, troisième et quatrième moyens réunis

Enoncé des moyens

7. Dans son deuxième moyen, la salariée fait grief à l’arrêt de condamner l’employeur au paiement d’une somme à titre de rappel d’heures supplémentaires et de la débouter du surplus de ses demandes, alors « que la cassation à intervenir sur le chef de dispositif concernant la durée du travail effectif s’étendra aux chefs de dispositif relatifs aux heures supplémentaires, en application des articles L. 3121-1, L. 3121-2, L. 3121-10, L. 3121-11, L. 3123-1, L. 3123-7, L. 3123-14 et L. 3171-4 du code du travail dans leur version applicable aux faits, l’article 5-4 de la convention collective nationale de commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire et l’article 1134 du code civil dans sa version antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016, ensemble les articles 624 et 625 du code de procédure civile. »

8. Dans son troisième moyen, la salariée fait grief à l’arrêt de la débouter de sa demande au titre du travail dissimulé, alors « que la cassation à intervenir sur le chef de dispositif concernant la durée du travail effectif s’étendra aux chefs de dispositif relatifs à l’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé, en application des articles L. 3121-1, L. 3121-2, L. 3123-1, L. 3123-14, L. 8221-5 et L. 8223-1 du code du travail dans leur version applicable aux faits, l’article 5-4 de la convention collective nationale de commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire et l’article 1134 du code civil dans sa version antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016, ensemble les articles 624 et 625 du code de procédure civile. »

9. Dans son quatrième moyen, la salariée fait grief à l’arrêt de la débouter de ses demandes d’indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de préavis, de licenciement et de rappel de salaire et congés payés afférents pour le mois d’août 2015 et de la condamner au paiement d’une indemnité de préavis, alors « que lorsque le salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu’il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d’une démission ; que l’absence de paiement d’une partie du salaire de base ou d’heures supplémentaires ou encore la variation de l’horaire contractuel dans des proportions atteignant la durée légale constituent des manquement graves justifiant la requalification de la prise d’acte de la rupture par le salarié en licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que la cassation à intervenir sur les chefs de dispositif concernant la durée du travail effectif et les heures supplémentaires s’étendra aux chefs de dispositif relatifs à la prise d’acte de la rupture, en application des articles L. 3121-1, L. 3121-2, L. 3121-10, L. 3121-11, L. 3123-1, L. 3123-7, L. 3123-14 et L. 3171-4 du code du travail dans leur version applicable aux faits, l’article 5-4 de la convention collective nationale de commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire et l’article 1134 du code civil dans sa version antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016, ensemble les articles 624 et 625 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l’article 624 du code de procédure civile :

10. La cassation sur le premier moyen, du chef de la demande en requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet et en paiement de rappels de salaires entraîne, par voie de conséquence, la cassation sur les chefs de dispositifs visés par les deuxième, troisième et quatrième moyens qui s’y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu’il déboute la société Natural de sa demande de dommages-intérêts pour abus du droit d’ester en justice, l’arrêt rendu le 30 janvier 2019, entre les parties, par la cour d’appel de Versailles ;

Remet, sauf sur ce point, l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel de Versailles autrement composée ;

Condamne la société Natural aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Natural et la condamne à payer à Mme [B] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf mai deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour Mme [B]

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l’arrêt confirmatif attaqué d’AVOIR débouté l’exposante de ses demandes de requalification du contrat de travail en contrat à temps plein et de rappels de salaire et de congés payés y afférents.

AUX MOTIFS propres QUE les parties sont en discussion sur les horaires de travail effectués par Mme [B]. Cette dernière estime : - pour les semaines 14 à 17 de l’année 2013 qu’elles dépassent toutes 35 heures et totalisent 142,75 heures de temps de travail effectif, - que le bulletin de salaire d’avril ajoute 6,19 + 0,88 h de temps de pause non compris dans les 35 heures, - qu’en mars 2013, les semaines 10 à l3 incluses représentent 149,20 heures soit plus de 35 heures par semaine, - que son temps partiel a atteint et dépassé la durée légale du travail (sans temps de pause inclus) ; que la SAS Natural fait valoir que Mme [B] confond son temps de présence et son temps de travail et précise que le temps de pause n’est pas du temps de travail. Elle ajoute que dans les entreprises assujetties à la convention collective du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire, un temps plein (151,67 heures de travail par mois) correspond à un temps de présence de 159,25 heures ; que l’article L. 3123-17 du code du travail dispose en son deuxième alinéa que « Les heures complémentaires ne peuvent avoir pour effet de porter la durée du travail accomplie par un salarié au niveau de la durée légale du travail ou à la durée fixée conventionnellement » ; qu’en cas d’atteinte ou de dépassement de la durée légale du travail, le contrat de travail à temps partiel est automatiquement requalifié en temps complet et ce, à compter de la première irrégularité ; que par ailleurs, en ce qui concerne le temps de travail, sauf assimilation conventionnelle, le temps de pause, qu’il soit ou non rémunéré, n’est pas considéré comme du temps de travail effectif ; que l’article 5.4 de la convention collective du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire du 12 juillet 2001 stipule : « On entend par "pause" un temps de repos - payé ou non - compris dans le temps de présence journalier dans l’entreprise pendant lequel l’exécution du travail est suspendue. » Il en résulte que la convention collective applicable à la relation entre les parties n’assimile pas le temps de pause à du temps de travail effectif ; que le texte ajoute qu’« une pause payée est attribuée à raison de 5% du temps de travail effectif. » ; qu’il faut en déduire, comme le fait la SAS Natural, qu’un temps plein (151,67 heures) correspond à un temps de présence de 159,25 heures (soit 151,67 + 5%) ; que Mme [B] fait valoir que son temps partiel a, courant mars et avril 2013, atteint voire dépassé la durée légale du travail ; qu’elle se fonde pour parvenir à cette conclusion sur sa pièce 13 ; que cette pièce consiste en un planning, pour chaque salarié, de ses heures de présence dans la société pour les semaines 14 à 18 de l’année 2013 et 21 de l’année 2015 ; qu’elle se fonde ensuite (pièce 12) sur son bulletin de paie du mois de mars 2013 ; que s’agissant de sa pièce 13, son examen montre qu’au mois d’avril 2013, Mme [B] a été présente dans l’entreprise durant 157,21 heures ; mais que ce temps inclut des temps de pause qui représentent 5% du temps de présence ; que le temps de travail effectif de Mme [B], sur la semaine considérée, n’est donc que de 149,72 heures, ce qui est inférieur à 151,67 heures ; que s’agissant du mois de mars 2013, le bulletin de paie de Mme [B] montre qu’elle a été rémunérée : - à raison de son « salaire de base » pour 123,81 heures, - à raison de ses heures de pause payées pour 6,19 heures, - à raison de ses « heures complémentaires » pour 25,39 heures, - à raison de ses « heures de pause (régul) » payées pour 1,27 heures (correspondant à 5% de ses heures complémentaires) ; qu’ainsi, pour le mois de mars 2013, si Mme [B] a été rémunérée pour 156,66 heures, son temps de travail effectif n’a été que de 149,2 heures (soit 123,81 + 25,39) ce qui est là encore inférieur à 151,67 heures ; que certes, Mme [B] allègue qu’elle ne pouvait pas toujours prendre sa pause lorsqu’un client était présent dans l’établissement ; que pour autant, elle n’en apporte pas la démonstration par la production, par exemple, d’attestations le confirmant ; qu’il en résulte que Mme [B] n’a pas, sur les mois litigieux, atteint la durée légale du travail.

AUX MOTIFS adoptés QUE la durée du temps de travail de Madame [H] [B] au sein de la SAS NATURAL se calcule sur le temps de travail effectif, comme cela est prévu dans la Convention Collective.

1° ALORS QUE sauf mention contraire, la durée du travail fixée dans le contrat de travail du salarié à temps partiel correspond à la durée du travail effectif ; que la cour d’appel a relevé que la salariée avait été engagée par contrat à durée indéterminée à temps partiel à raison de 30 heures par semaine à compter du 1er janvier 2009, de sorte son volume horaire mensuel était de 130 heures ; que, pour calculer la durée du travail effectif de celle-ci, le cour d’appel s’est fondée sur un salaire de base à 123,81 heures, augmenté de 6,19 heures de pause, de sorte que le travail effectif retenu était de 123,81 heures et non de 130 heures ; qu’en statuant de la sorte, la cour d’appel a méconnu les articles L.3121-1, L.3121-2 du code du travail, L.3123-1 et L.3123-14 du code du travail dans leur version applicable aux faits, ensemble l’article 5-4 de la convention collective nationale de commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire et l’article 1134 du code civil dans sa version antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016.

2° ALORS en outre QUE le contrat de travail stipulait que la rémunération mensuelle brute fixée était la contrepartie du travail effectué dans le cadre d’un horaire hebdomadaire de 30 heures, soit 130 heures mensuelles et que la salariée acceptait les sujétions d’horaires que pouvait imposer la clientèle ; qu’il indiquait un horaire hebdomadaire réparti sur 31 heures ; que, pour calculer la durée du travail effectif de l’exposante, le cour d’appel s’est fondée sur un salaire de base à 123,81 heures, augmenté de 6,19 heures de pause, de sorte que le travail effectif retenu était de 123,81 heures et non de 130 heures ; qu’en statuant de la sorte, la cour d’appel a dénaturé le contrat de travail, en violation de l’article 1134 du code civil dans sa version antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016.

3° ALORS encore QUE le temps de pause, qui n’est pas considéré comme du temps de travail effectif, ne s’impute pas sur celui-ci ; que lorsque durant les pauses, le salarié n’est pas à la disposition de l’employeur, la rémunération du temps de pause doit s’ajouter à celle du temps de travail effectif ; que pour déterminer la durée du travail effectif accompli par la salariée en mars 2013, la cour d’appel a validé la déduction mentionnée sur le bulletin de paye du temps de pause de 6,19 heures sur les 130 heures de travail effectif contractuellement convenue ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a méconnu les articles L.3121-1, L.3121-2 du code du travail, L.3123-1 et L.3123-14 du code du travail dans leur version applicable aux faits, ensemble l’article 5-4 de la convention collective nationale de commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire et l’article 1134 du code civil dans sa version antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016.

4° ALORS également QUE le temps de pause, qui n’est pas considéré comme du temps de travail effectif, ne s’impute pas sur celui-ci ; que lorsque durant les pauses, le salarié n’est pas à la disposition de l’employeur, la rémunération du temps de pause doit s’ajouter à celle du temps de travail effectif ; que pour déterminer la durée du travail effectif accompli par la salariée en avril 2013, la cour d’appel s’est référée aux plannings des horaires établi par la société pour chaque salarié, en considérant que le volume horaire qu’il mentionnait incluait les temps de pause à hauteur de 5% ; qu’en statuant ainsi, sans vérifier que le planning mentionnait les heures de travail effectif ou les heures de présence, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L.3121-1, L.3121-2 du code du travail, L.3123-1 et L.3123-14 du code du travail dans leur version applicable aux faits, ensemble l’article 5-4 de la convention collective nationale de commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire et l’article 1134 du code civil dans sa version antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016.

5° ALORS enfin QUE la preuve du respect des temps de pause incombe à l’employeur ; que pour débouter la salariée de ses demandes, la cour d’appel a jugé que celle-ci ne démontrait pas qu’elle ne pouvait pas toujours prendre sa pause lorsqu’un client était dans l’établissement ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a méconnu la charge de la preuve en violation de l’article L.3121-33 du code du travail, ensemble l’article 1315 du code civil dans sa version antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l’arrêt attaqué de n’AVOIR que condamné l’employeur au paiement de la somme de 7,74 euros à titre de rappel de salaire à titre de rappel d’heures supplémentaires et d’AVOIR débouté l’exposante du surplus de sa demande.

AUX MOTIFS QUE Mme [B] produit sa pièce 13 pour étayer sa demande ; que cette pièce, comme il a été vu plus haut, consiste en des plannings hebdomadaires reflétant un temps de présence dont il faut déduire 5% au titre des temps de pause ; que 35 heures hebdomadaires de temps de travail effectif correspondent donc à un temps de présence dans l’entreprise de 36,75 heures ; que la pièce 13 montre que le temps de présence de Mme [B] dans l’entreprise a été inférieur ou égal à 36,75 heures sauf pour la semaine du 18 au 24 mai 2015, durant laquelle la salariée a eu un temps de présence de 36,92 heures, ce qui représente un temps de travail effectif de 3 5,17 heures, soit un dépassement de 0,17 heures (soit 10 minutes) qu’il conviendra d’arrondir à 1 heure ; que Mme [B] peut donc prétendre à un rappel d’heure supplémentaire de 7,74 euros (6,19+25%) ; que le jugement du conseil de prud’hommes de Chartres sera sur ce point infirmé et, statuant à nouveau, la SAS Natural sera condamnée à payer à Mme [B] la somme de 7,74 euros à titre de rappel de salaire.

ALORS QUE la cassation à intervenir sur le chef de dispositif concernant la durée du travail effectif s’étendra aux chefs de dispositif relatifs aux heures supplémentaires, en application des articles L.3121-1, L.3121-2, L.3121-10, L.3121-11, L.3123-1, L.3123-7, L.3123-14 et L.3171-4 du code du travail dans leur version applicable aux faits, l’article 5-4 de la convention collective nationale de commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire et l’article 1134 du code civil dans sa version antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016, ensemble les article 624 et 625 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l’arrêt confirmatif attaqué d’AVOIR débouté la salariée de sa demande d’indemnité au titre du travail dissimulé.

AUX MOTIFS adoptés QUE l’élément intentionnel de la SAS NATURAL n’est absolument pas caractérisé.

ALORS QUE la cassation à intervenir sur le chef de dispositif concernant la durée du travail effectif s’étendra aux chefs de dispositif relatifs à l’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé, en application des articles L.3121-1, L.3121-2, L.3123-1, L.3123-14, L.8221-5 et L.8223-1 du code du travail dans leur version applicable aux faits, l’article 5-4 de la convention collective nationale de commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire et l’article 1134 du code civil dans sa version antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016, ensemble les article 624 et 625 du code de procédure civile.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR débouté la salariée de ses demandes d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d’indemnité de préavis, d’indemnité de licenciement et de rappel de salaire et congés payés y afférents pour le mois d’août 2015 et de l’AVOIR condamnée au paiement d’une indemnité de préavis.

AUX MOTIFS propres QUE Mme [B] a pris acte de la rupture de son contrat de travail par courrier du 17 novembre 2015 prétextant : « je prends acte de la rupture de mon contrat de travail pour non-respect de vos obligations contractuelles, non paiement d’une partie de mon salaire à partir de mars 2011 à juillet 2015. Absence totale du salaire depuis août 2015, heures supplémentaires payés en prime exceptionnelle. » ; qu’il a été vu précédemment que Mme [B] n’avait pas été accueillie en sa demande de requalification. Elle a en revanche été partiellement accueillie en sa demande de rappel de salaire à raison d’une heure supplémentaire pour la période du 18 au 24 mai 2015 ; que le dépassement de 10 minutes de la durée légale du travail pour la semaine du 18 au 24 mai 2015 n’est pas un grief suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail et que la prise d’acte produise les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu’il apparaît en réalité que Mme [B] souhaitait quitter la SAS Natural puisqu’elle avait, le 10 juin 2015, engagé des pourparlers visant la rupture conventionnelle de son contrat de travail et que l’employeur n’a pas entendu sceller de rupture conventionnelle avec Mme [B], ce qui lui a éte indiqué le 19 juin 2015 ; que certes, Mme [B] a mal vécu ce refus puisqu’elle a été placée en arrêt de travail à partir de cette date. Toutefois, l’employeur ne peut être considéré comme ayant commis une faute en refusant à Mme [B] une rupture conventionnelle ; que l’arrêt de travail de .Mme [B] cessait le 2 juillet 2015 ; qu’elle se devait donc de réintégrer son poste de travail à compter de cette date pour prétendre au versement de son salaire qui en est la contrepartie ; qu’elle n’a pas déféré à la demande de l’employeur, formulée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception le 27 août 2015, l’invitant à reprendre son poste de travail ; que Mme [B] n’a en effet jamais repris son travail ; qu’elle ne pouvait prétendre au paiement de son salaire depuis le mois d’août 2015, n’ayant pas réintégré son travail pour des motifs qui ont été jugés infondés ; qu’il en résulte que la salariée n’établit pas l’existence de manquement rendant impossible la poursuite du contrat de travail ; que la rupture du contrat de travail de Mme [B] s’analyse donc en une démission [?] ; que la rupture du contrat de travail s’analysant en une démission, Mme [B] aurait dû effectuer un préavis d’un mois ; que le fait, pour Mme [B], de ne pas avoir réintégré son poste de travail a eu pour conséquence de désorganiser le service de la SAS Natural ; qu’il en est résulté pour elle un préjudice qui sera intégralement réparé par l’octroi d’une somme de 1 530,39 euros à titre d’indemnité de préavis.

AUX MOTIFS partiellement adoptés QUE Madame [H] [B] a été engagée par la SAS NATURAL par contrat de travail à temps partiel en date du 16 Juin 2008 ; qu’à compter du 1er Janvier 2015, la SAS NATURAL, par avenant portait la durée de présence de Madame [H] [B] à temps plein ; qu’en date du 10 Juin 2015, Madame [H] [B] adressait à la SAS NATURAL un courrier de demande de rupture conventionnelle ; que le 12 Juin 2015, la SAS NATURAL convoquait par lettre recommandée avec accusé de réception Madame [B] à un entretien aux fins de discuter des modalités d’une éventuelle convention de rupture conventionnelle ; que la SAS NATURAL, pour des raisons d’organisation et au vu de sa situation économique, décidait de ne pas donner suite à la demande de Madame [H] [B] sur une rupture conventionnelle ; que Madame [H] [B], dès le 16 Juin 2015, était en arrêt de maladie ; que Madame [H] [B], par télécopie du 17 Juin 2015, réclamait à la SAS NATURAL la somme de 4.900 ? à titre de rappel de salaire ; que la SAS NATURAL, par lettre du 26 Juin 2015, confirmait à Madame [H] [B] de ne pas donner suite à la procédure de rupture conventionnelle, et demandait des explications sur la somme réclamée ; que Madame [H] [B], par télécopie du 27 Juin 2015, transmettait à la SAS NATURAL un tableau sur une page, sans autre explication ; que la SAS NATURAL, par lettre du 03 Juillet 2015, répondait à Madame [H] [B], qu’elle faisait application de son contrat de travail sur la base d’un temps plein depuis Mars 2013 comme stipulé ainsi que dans les avenants successifs ; que Madame [H] [B], par courrier du 09 Juillet 2015 réclamait à la SAS NATURAL de lui transmettre les différents avenants signés ; que la SAS NATURAL indiquait par courrier du 09 Juillet 2015 à Madame [H] [B] que les avenants étaient a sa disposition au sein des locaux de l’entreprise ; que Madame [H] [B] adressait un courrier le 03 Août 2015 à la SAS NATURAL dans elle indiquait « par ce courrier je prends acte de la rupture de mon contrat de travail pour non-respect de vos obligations contractuelles, non-paiement d’une partie de mon salaire à partir de Mars 2011 à Juillet 2015. Absence totale de salaire depuis Août 2015, heures supplémentaires payés en prime exceptionnelle » ; que la SAS NATURAL, par lettres des 27 Août ] et 24 Septembre 2015, mettait en demeure Madame [H] [B] de reprendre son poste et de mettre fin à son absence injustifiée ; [?] que les faits reprochés par Madame [H] [B] à la SAS NATURAL ne sont pas justifiés ; que Madame [H] [B] ne démontre pas les manquements allégués de son employeur ; qu’en tout état de cause, ils ne sont pas réels et suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail ; qu’en conséquence, le Bureau de Jugement considère que la prise d’acte de Madame [H] [B] repose sur une démission ; qu’en conséquence, le Bureau de Jugement déboute Madame [H] [B] de sa demande d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse [?] ; que sur la demande d’indemnité légale de licenciement, Madame [H] [B] a, par lettre du 07 Octobre 2015, mis fin à son contrat de travail ; que le Bureau de Jugement a requalifié la rupture du contrat de travail en démission ; qu’en conséquence, le Bureau de Jugement dit qu’il n’est pas dû à Madame [H] [B] d’indemnité légale de licenciement et la déboute donc de cette demande ; que sur la demande d’indemnité compensatrice de préavis et les congés payés y afférents, Madame [H] [B] n’a pas effectué son préavis ; que de plus, Madame [B] a démissionné de son poste ; qu’en conséquence, le Bureau de Jugement déboute Madame [B] de sa demande d’indemnité compensatrice de préavis ainsi que les congés payés y afférents ; que sur la demande au titre du paiement des salaires et congés payés pour la période du 7 août au 16 août 2015, que Madame [H] [B] n’est plus présente au sein de la SAS NATURAL ; que la SAS NATURAL par lettres des 27 Août 2015 et 24 Septembre 2015 a demandé à Madame [H] [B] de reprendre son poste de travail et de mettre fin à son absence injustifiée ; que pour autant, Madame [H] [B] n’a jamais justifié de son absence auprès de son employeur ; que le Bureau de Jugement a considéré que la prise d’acte de rupture s’analysait en une démission ; qu’en conséquence, le Bureau de Jugement déboute Madame [H] [B] de sa demande de paiement de salaires ainsi que de sa demande au titre des congés payés.

ALORS QUE lorsque le salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu’il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d’une démission ; que l’absence de paiement d’une partie du salaire de base ou d’heures supplémentaires ou encore la variation de l’horaire contractuel dans des proportions atteignant la durée légale constituent des manquement graves justifiant la requalification de la prise d’acte de la rupture par le salarié en licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que la cassation à intervenir sur les chefs de dispositif concernant la durée du travail effectif et les heures supplémentaires s’étendra aux chefs de dispositif relatifs à la prise d’acte de la rupture, en application des articles L.3121-1, L.3121-2, L.3121-10, L.3121-11, L.3123-1, L.3123-7, L.3123-14 et L.3171-4 du code du travail dans leur version applicable aux faits, l’article 5-4 de la convention collective nationale de commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire et l’article 1134 du code civil dans sa version antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016, ensemble les article 624 et 625 du code de procédure civile.ECLI:FR:CCASS:2021:SO00601