Structure en réseau - pénal - faux travailleur indépendant oui

Cour de cassation

chambre criminelle

Audience publique du 2 octobre 2001

N° de pourvoi : 01-82290

Non publié au bulletin

Rejet

Président : M. COTTE, président

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le deux octobre deux mille un, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller ANZANI, les observations de Me CHOUCROY, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général CHEMITHE ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

"-" X... André,

contre l’arrêt de la cour d’appel d’AIX-EN-PROVENCE, 7ème chambre, en date du 5 février 2001, qui l’a condamné, pour marchandage et prêt illicite de main-d’oeuvre, à 50 000 francs d’amende ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L 125-1, L 125-3, L 152-3, L 152-3-1, L 152-2 du Code du Travail, ensemble des articles 551, 565 et 802 du Code de procédure pénale, ensemble 593 du même Code, 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, violation des droits de la défense, défaut de motifs et manque de base légale ;

”en ce que l’arrêt attaqué a rejeté les exceptions de nullité de l’acte de saisine ;

”aux motifs qu’il a été satisfait aux exigences de l’article 551 du Code de procédure pénale par la citation qui mentionne les circonstances de temps et de lieu relatives aux faits poursuivis dès lors qu’elle se combine avec le procès-verbal de l’inspecteur du travail dont le prévenu a eu connaissance avant toute déclaration sur les faits ; qu’en l’espèce, la citation a bien visé le texte de loi de répression ainsi que les faits poursuivis dans des conditions permettant aux prévenus de savoir ce qui leur était reproché afin d’être en mesure d’assurer utilement leur défense ; qu’il suffit de relever que les prévenus ont déposé des conclusions très détaillées tendant à voir dire que le délit n’était pas constitué à leur encontre, démontrant ainsi qu’ils ont été suffisamment informés des faits servant de base à la prévention ;

”alors que la citation du 15 mars 1999 se bornait à indiquer :

”D’avoir à Lavera courant 1996 et en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription, prêté fourni de la main-d’oeuvre à des fins lucratives hors du cadre légal du travail temporaire et ayant eu pour effet de causer un préjudice au salarié concerné ou d’éluder l’application des dispositions légales réglementaires ou contractuelles. Fait constaté le 1996 à Lavera. Ce fait est prévu par les articles L.125.3, L.125.1, L.124.1, L.152.3, L.152.3.1, L.152.2 du Code du Travail” ; qu’ainsi la citation, qui n’était pas accompagnée du procès-verbal de l’inspection du travail et qui ne le visait même pas, qui ne mentionnait pas le “salarié concerné”, qui ne précisait ni la date ni le lieu précis des faits en cause, et qui n’indiquait pas en quoi lesdits faits aurait permis de retenir l’infraction correspondant aux textes visés, n’énonçait pas le fait poursuivi, ce qui faisait grief aux droits de la défense, si bien que l’arrêt est privé de toute base légale” ;

Attendu que, pour rejeter l’exception de nullité de la citation invoquée par le prévenu, les juges se prononcent par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu’en l’état de ces énonciations, desquelles il résulte que le prévenu était suffisamment informé des faits servant de base à la prévention, ainsi que l’exige l’article 551 du Code de procédure pénale, et qu’il avait été à même de préparer ses moyens de défense, la cour d’appel a justifié sa décision ;

D’où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles L 120-3, L 125-1, L 125-3, L 152-3, L 152-3-1, L 152-2 du Code du Travail, ensemble de l’article 593 Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

”en ce que l’arrêt attaqué a confirmé la culpabilité d’André X..., et sa condamnation à une amende de 50 000 francs ;

”aux motifs qu’aux termes du contrat signé, “T.S.F” commercialise les prestations de l’artisan qui doit lui fournir chaque semaine le relevé des travaux réalisés, que les factures sont établies, adressées aux clients puis recouvrées par “T.S.F”, que cette entreprise rappelle dans les documents établis qu’aucun fonds ne doit être adressé à André Y..., qu’elle seule est habilitée à les recevoir “ ; qu’il convient au surplus de relever que “Techniciens sans frontières” s’accorde un droit de regard sur la qualité des travaux effectués, recherche même pour ses adhérents des stages de formation continue ou de perfectionnement ; qu’il en résulte qu’André Y... se trouvait à l’égard de la société “Techniciens sans frontières” dans un état de dépendance économique et de subordination juridique, critère de fait d’un contrat de travail, qu’André X... exerçait ainsi sur l’activité de ce prétendu artisan un réel pouvoir de direction et de contrôle ; qu’André Y... est intervenu dans l’entreprise “Glitsch Field Services” de fait comme un travailleur intérimaire intégré à l’équipe de salariés de cette entreprise, sans autonomie ni tâche spécifique à exécuter ; qu’ainsi sous couvert d’aide apportée à un “artisan” l’entreprise “Techniciens sans Frontières” a effectué une prestation à but lucratif ayant pour objet exclusif le prêt de personnel en dehors du cadre légal du travail temporaire ;

”alors que, d’une part, aux termes de l’article L.120-3 du Code du Travail, un artisan inscrit au registre des métiers est présumé ne pas être lié par un contrat de travail dans l’exercice de son activité, cette présomption ne pouvant être renversée que s’il est établi que l’intéressé à fourni ses prestations dans des conditions de fait caractérisant un lien de subordination juridique permanent ; que, comme l’avait fait valoir André X... dans ses conclusions non réfutées par l’arrêt, André Y... avait fait le choix d’adhérer à un Groupement d’artisans inscrits au registre des métiers, et personnellement assurés ; que les adhérents du Groupement se réservaient expressément la liberté entière d’accepter ou de refuser les commandes, de rechercher d’autres clients, d’exécuter en toute indépendance les contrats d’entreprise démarchés pour leur compte par le Groupement, sauf à garantir une qualité d’exécution de référence ; qu’ainsi le Groupement se bornait à prendre en charge les tâches administratives, comptables et de démarchage des artisans, sans porter atteinte à leur indépendance, et sans les placer dans un lien de subordination ; qu’ainsi la cour d’appel qui n’a pas légalement caractérisé le lien permanent de dépendance économique et de subordination juridique d’André Y... à l’égard du Groupement “T.S.F” a privé sa décision de tout fondement légal ;

”alors, d’autre part, qu’en ne justifiant pas en quoi l’action du Groupement “T.S.F” aurait causé un préjudice à son adhérent travailleur indépendant, ou aurait éludé les dispositions légales, réglementaires ou conventionnelles applicables à ceux-ci, l’arrêt a méconnu les éléments constitutifs du délit de marchandage de main-d’oeuvre et en conséquence est privé de toute base légale” ;

Attendu que les énonciations de l’arrêt attaqué et du jugement qu’il confirme mettent la Cour de Cassation en mesure de s’assurer que la cour d’appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu’intentionnel, les délits dont elle a déclaré le prévenu coupable ;

D’où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l’appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;

Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l’article L.131-6, alinéa 4, du Code de l’organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Anzani conseiller rapporteur, M. Joly conseiller de la chambre ;

Avocat général : M. Chemithe ;

Greffier de chambre : Mme Nicolas ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;

Décision attaquée : cour d’appel d’AIX-EN-PROVENCE, 7ème chambre du 5 février 2001

Titrages et résumés : (Sur le premier moyen) JURIDICTIONS CORRECTIONNELLES - Citation - Enonciations - Enonciations suffisantes - Informations quant aux faits servant de base à la prévention et permettant la préparation des moyens de défense.