Collaborateur non - salarié oui

Cour de cassation

chambre sociale

Audience publique du 8 mars 2000

N° de pourvoi : 98-14222

Publié au bulletin

Rejet.

Président : M. Waquet, conseiller doyen faisant fonction. ., président

Rapporteur : M. Soury., conseiller apporteur

Avocat général : Mme Barrairon., avocat général

Avocats : la SCP Nicolay et de Lanouvelle, la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez., avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Donne acte à Mme Mady, veuve X..., Mme Julie X..., épouse Vieux, MM. Olivier et Jean-Baptiste X... et Mlle Charlotte X... de ce que, en tant qu’héritiers de M. Patrick X..., qui est décédé le 13 juillet 1998, ils reprennent l’instance contre lui introduite ;

Attendu que M. X... a été engagé pour une durée de 2 ans par la société civile professionnelle d’avocats (SCPA) Bordas-Morenvillez en qualité d’avocat collaborateur, suivant un contrat de collaboration signé le 9 septembre 1991 ; que ce contrat s’est poursuivi au-delà de sa durée, jusqu’au 15 avril 1997, date à laquelle les parties ont signé un document portant résiliation dudit contrat ; que M. X... a saisi le bâtonnier de l’ordre des avocats pour obtenir la requalification de son contrat de collaboration en contrat de travail et le paiement de diverses indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que la régularisation de sa situation au regard des organismes sociaux et fiscaux et la remise de divers documents ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société d’avocats Bordas-Morenvillez fait grief à l’arrêt attaqué (Bordeaux, 7 avril 1998) d’avoir requalifié le contrat de collaboration en contrat de travail et de l’avoir condamnée à payer à M. X... des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen, que le contrat est et reste régi, notamment pour sa qualification, par la loi applicable lors de sa formation, nonobstant le caractère d’ordre public de la loi nouvelle, dès lors que cette dernière ne dispose pas expressément sa propre application aux contrats en cours ; que la cour d’appel a constaté que le contrat de collaboration avait été conclu avant l’entrée en vigueur de la loi n° 90-1259 du 31 décembre 1990 modifiant la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, ce dont il résultait que la qualification de contrat de travail était exclue ; qu’en se fondant sur le caractère d’ordre public de la loi nouvelle pour en appliquer les dispositions et retenir néanmoins cette qualification, la cour d’appel a violé l’article 2 du Code civil ;

Mais attendu que la loi n° 90-1259 du 31 décembre 1990 a modifié la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 pour créer une nouvelle profession d’avocat issue des anciennes professions d’avocat et de conseil juridique et pour autoriser l’exercice de cette profession en qualité d’avocat salarié ; que ce nouveau statut d’ordre public s’est immédiatement appliqué aux professionnels ayant intégré la nouvelle profession d’avocat le 1er janvier 1992, date d’entrée en vigueur de la loi du 31 décembre 1990 ;

Et attendu qu’en décidant, après avoir constaté que le contrat de collaboration souscrit par M. X... ne lui permettait pas de développer une clientèle personnelle, de requalifier ce contrat, à compter du 1er janvier 1992, en contrat de travail, la cour d’appel n’a pas fait rétroagir la loi du 31 décembre 1990 mais n’a fait qu’appliquer à bon droit, à sa date d’entrée en vigueur, le nouveau statut issu de cette loi à un membre de la nouvelle profession d’avocat ;

Que le moyen n’est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que la société d’avocats Bordas-Morenvillez fait grief à l’arrêt d’avoir dit qu’elle devrait régulariser la situation de M. X... au regard de la TVA et lui rembourser la TVA versée dans le cas où le Trésor public refuserait de la lui rembourser, alors, selon le moyen, que toute personne mentionnant, même par erreur, la TVA sur une facture ou tout autre document en tenant lieu est redevable de la taxe du seul fait de sa facturation ; que la cour d’appel a constaté que M. X... avait, au cours de son exercice professionnel pour la société, facturé la TVA à cette dernière, ce dont il résultait qu’il avait été personnellement redevable de la taxe et qu’il ne pouvait obtenir du Trésor public remboursement des sommes versées à ce titre ; qu’en condamnant la société à garantir un remboursement auquel M. X... n’avait pas droit, la cour d’appel a violé les dispositions d’ordre public de l’article 283-3 du Code général des impôts ;

Mais attendu que la cour d’appel, après avoir décidé que M. X... avait la qualité d’avocat salarié, a constaté qu’il avait été, à tort, assujetti à la TVA ; qu’elle a apprécié l’indemnisation qu’il convenait de lui allouer au titre de ce chef de préjudice ; que le moyen, qui, sous couvert du grief non fondé de violation de la loi, ne tend qu’à remettre en cause cette indemnisation, ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

Publication : Bulletin 2000 V N° 91 p. 71

Décision attaquée : Cour d’appel de Bordeaux, du 7 avril 1998

Titrages et résumés : AVOCAT - Exercice de la profession - Avocat salarié - Définition - Loi du 31 décembre 1990 - Application dans le temps . Une cour d’appel qui requalifie, à compter du 1er janvier 1992, le contrat de collaboration souscrit par un avocat antérieurement à cette date en contrat de travail, au motif que ce contrat ne lui permettait pas de développer une clientèle personnelle, n’a pas fait une application rétroactive de la loi du 31 décembre 1990 mais n’a fait qu’appliquer à bon droit, à sa date d’entrée en vigueur, le nouveau statut issu de cette loi à un membre de la nouvelle profession d’avocat.

CONTRAT DE TRAVAIL, FORMATION - Définition - Lien de subordination - Avocat collaborateur - Développement d’une clientèle personnelle - Impossibilité AVOCAT - Exercice de la profession - Avocat salarié - Définition - Loi du 31 décembre 1990 - Lien de subordination - Critères - Développement d’une clientèle personnelle - Impossibilité

Textes appliqués :
* Loi 90-1259 1990-12-31