Collaborateur non - salarié oui

Cour de cassation

chambre sociale

Audience publique du 11 juillet 2012

N° de pourvoi : 11-13809

Non publié au bulletin

Rejet

M. Linden (conseiller le plus ancien faisant fonction de président), président

SCP Fabiani et Luc-Thaler, SCP Vincent et Ohl, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Colmar, 10 janvier 2011), que Mme X... a exercé à compter de novembre 1995 comme avocate au sein de la société d’avocats C...-I... (la société) ; que le 11 juillet 2007, la société a rompu le contrat la liant à l’intéressée ; que cette dernière a saisi le bâtonnier de l’ordre des avocats de Strasbourg pour obtenir la requalification du contrat litigieux en contrat de travail ainsi que le paiement de diverses sommes au titre de l’exécution et de la rupture de ce contrat ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société fait grief à l’arrêt de dire que Mme X... était liée par un contrat de travail, alors, selon le moyen :
1°/ que l’avocat titulaire d’un contrat de collaboration libérale ne peut prétendre à la requalification de celui-ci en un contrat de travail que s’il ne dispose pas d’une clientèle personnelle ou si celle-ci s’avère dérisoire ; que la preuve du caractère dérisoire de sa clientèle incombe au collaborateur qui entend faire requalifier son contrat de collaboration ; qu’en affirmant que la clientèle de Mme X... était « dérisoire » dès lors qu’il résultait d’une liste fournie par celle-ci, que la cour d’appel a déclaré « sincère », qu’elle n’aurait traité que 23 dossiers personnels en 12 ans de collaboration quand il résulte par ailleurs des motifs de son arrêt, d’une part, que Mme X... avait traité au moins 8 autres dossiers retrouvés par la SCP C...-I... après son départ et, d’autre part, qu’elle avait écrit à l’un de ses confrères être en charge d’un important contentieux dans lequel elle avait été mandatée par 60 salariés, ce dont il résultait que la liste fournie par celle-ci n’était pas sincère et ne pouvait dès lors pas faire la preuve du caractère dérisoire de la clientèle personnelle de Mme X..., la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les articles 7 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, 18 de la loi n° 2005-882 du 2 août 2005, 129 et suivants du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 et 14. 1 à 14. 3 du règlement intérieur national de la profession d’avocat ;
2°/ qu’en retenant encore la sincérité des déclarations de Mme X... quant au montant total des honoraires perçus par elle, au titre de son activité personnelle, dont elle affirmait qu’ils s’élevaient à 3 767 euros en 12 ans quand il résulte de ses constatations que Mme X... avait au moins perçu 5 000 euros de plus, de sorte qu’elle avait là encore fourni aux juges des chiffres inexacts, insusceptibles de faire la preuve du caractère dérisoire de sa clientèle personnelle, la cour d’appel a violé les articles 7 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, 18 de la loi n° 2005-882 du 2 août 2005, 129 et suivants du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 et 14. 1 à 14. 3 du règlement intérieur national de la profession d’avocat ;
qu’en statuant de la sorte, la cour d’appel a entaché sa décision d’une contradiction de motifs et a ainsi méconnu les exigences résultant de l’article 455 du code de procédure civile ;
3°/ qu’il appartient aux juges du fond d’examiner l’ensemble des pièces soumises à leur examen ; qu’en affirmant que la SCP C...-I... ne serait parvenue à ajouter à la liste fournie par Mme X... que « huit dossiers » et que, pour le surplus, elle ne procéderait que par voie de « suppositions » quand la SCP C...-I... avait produit aux débats, en original, deux autres dossiers personnels de Mme X..., les dossiers Ludwiller/ SCI Clé des champs et Zapico/ pension alimentaire, la cour d’appel, qui n’a manifestement pas examiné l’ensemble des pièces soumises à son examen, a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
4°/ que même lorsqu’il ne dispose que d’une clientèle personnelle « dérisoire », l’avocat titulaire d’un contrat de collaboration ne peut prétendre à la requalification de celui-ci en un contrat de travail que s’il ne dispose pas des moyens matériels et humains nécessaires à la création et au développement de sa clientèle personnelle ; qu’en l’espèce, la cour d’appel, qui a requalifié le contrat de collaboration de Mme X... au regard, non des moyens matériels et humains mis à sa disposition par la SCP C...-I..., mais uniquement au regard de la charge de travail qui était la sienne au sein de ce cabinet et du fait qu’elle était soumise, dans le cadre de son activité pour le compte du cabinet, à certaines contraintes inhérentes à l’organisation de celui-ci, tel que, notamment, l’organisation des congés, a statué selon des motifs inopérants et a privé sa décision de base légale au regard des articles 7 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, 18 de la loi n° 2005-882 du 2 août 2005, 129 et suivants du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 et 14. 1 à 14. 3 du règlement intérieur national de la profession d’avocat ;
5°/ qu’en statuant de la sorte quand elle avait par ailleurs constaté que Mme X... disposait de l’ensemble « des moyens matériels, bureau individuel, matériel téléphonique et informatique, utiles au développement de sa clientèle personnelle » et relevé que trois secrétaires du cabinet avaient attesté n’avoir jamais refusé de taper les courriers personnels de Mme X..., ni de lui transmettre ses messages, ce dont il résultait que Mme X... disposait de l’ensemble des moyens matériels et humains nécessaires au développement de sa clientèle, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles 7 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, 18 de la loi n° 2005-882 du 2 août 2005, 129 et suivants du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 et 14. 1 à 14. 3 du règlement intérieur national de la profession d’avocat ;
Mais attendu, d’abord, que sous couvert de violation de la loi, le moyen, en ses deux premières branches, ne tend qu’à remettre en cause l’appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve par la cour d’appel qui a estimé que la clientèle développée par l’intéressée présentait un caractère dérisoire ;
Attendu, ensuite, qu’ayant relevé que la subordination totale imposée par les associés hostiles au développement de toute clientèle personnelle et caractérisée par une charge de travail supposant une activité exercée à temps plein, faisait obstacle au développement par l’intéressée de sa propre clientèle et que la surcharge de travail imposée au secrétariat excluait qu’elle puisse demander de travailler à la dactylographie de ses quelques dossiers personnels, la cour d’appel en a souverainement déduit que les conditions réelles d’exercice d’activité de cette avocate ne lui permettaient pas de développer effectivement une clientèle personnelle ;
D’où il suit que le moyen, inopérant en sa troisième branche, n’est pas fondé pour le surplus ;
Sur le second moyen :
Attendu que la société fait grief à l’arrêt de la condamner au paiement de sommes au titre des charges patronales, alors, selon le moyen, que dans ses conclusions d’appel, la SCP C...-I... avait contesté la somme de 14 011 euros réclamée par Mme X... au titre des charges patronales en faisant valoir que les pièces versées par celle-ci aux débats aux fins d’en justifier étaient incohérentes et contradictoires ; qu’en fixant néanmoins à 14 011 euros la somme due à ce titre, sans s’expliquer sur les raisons l’ayant conduit à retenir ce chiffre, la cour d’appel a méconnu les exigences de l’article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d’appel, qui s’est fondée sur le montant du salaire mensuel brut de l’avocate, a motivé sa décision ; que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société C...-I... aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne la société C...-I... à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze juillet deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat aux Conseils, pour la SCP C...-I....
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR dit que Me X... a été liée à la SCP C...-I... par un contrat de travail salarié ;
AUX MOTIFS, PREMIEREMENT, QUE concernant l’étendue de la clientèle personnelle de Maître X..., s’avèrent d’abord sans emport, les détails de l’argumentation de la SCP-dans lesquels la Cour n’a pas à entrer, d’autant que pour partie ils pourraient relever d’un procès d’intention-consistant à soutenir que l’appelante aurait été réticente, voire aurait usé de moyens malicieux, pour minorer le nombre de ses propres dossiers ; que désormais Maître X... soumet à la Cour un récapitulatif des dossiers traités personnellement par elle au cours de chacune de ses douze années d’activité au sein de la SCP dont le nombre total s’établit à vingt-trois ; que la sincérité de cette liste déclarative n’est pas valablement remise en cause par la SCP ; qu’en effet, malgré le recours à des éléments du reste de faible valeur probante-la mémoire de ses associés ou l’exploitation d’une “ arborescence informatique “ la SCP ne parvient à ajouter à rémunération de Maître X... que huit dossiers ; que pour le surplus ce n’est que par voie de suppositions que la SCP tente de soutenir que cette clientèle aurait amené Maître X... à traiter personnellement un nombre important de dossiers ; qu’un courrier envoyé par Maître X... à l’employeur de Mme Y... où elle mentionnait être mandatée par 60 autres salariés est à lui seul insuffisant ; qu’il s’évince du tout que le nombre de dossiers au regard de la durée d’activité est demeuré très faible ; que Maître X... justifie également du caractère modeste des honoraires qu’elle a perçus en contrepartie même s’il peut être admis que pour quelques clients qui étaient des proches cette circonstance résultait de sa propre volonté ; que Maître X... avance avoir au total pour ses dossiers personnels reçu la somme de 3. 767 euros en douze années, à laquelle au moyen de quelques factures retrouvées la SCP entend ajouter environ 5. 000 euros ; que ces montants en tout état de cause très modestes sont corroborés par la production aux débats par Maître X... de ses déclarations fiscales pour les années 2003 à 2007 qui font ressortir en moyenne une déclaration annuelle de recettes de 48. 107 euros – ce qui équivaut sensiblement aux honoraires rétrocédés par la SCP – et un résultat Fiscal annuel moyen de 26. 430 euros ; qu’au surplus – ce qui prive de pertinence les allégations de la SCP quant à une minoration de ces déclarations-Maître X... verse aux débats une attestation de M. Z..., Directeur du Centre de Gestion, du 4 janvier 2010, qui expose que celle-là est adhérente depuis 1995 et que ses déclarations professionnelles ont fait l’objet d’un contrôle de cohérence ;
ALORS, D’UNE PART, QUE l’avocat titulaire d’un contrat de collaboration libérale ne peut prétendre à la requalification de celui-ci en un contrat de travail que s’il ne dispose pas d’une clientèle personnelle ou si celle-ci s’avère dérisoire ; que la preuve du caractère dérisoire de sa clientèle incombe au collaborateur qui entend faire requalifier son contrat de collaboration ; qu’en affirmant que la clientèle de Mme X... était « dérisoire » dès lors qu’il résultait d’une liste fournie par celle-ci, que la cour d’appel a déclaré « sincère », qu’elle n’aurait traité que 23 dossiers personnels en 12 ans de collaboration quand il résulte par ailleurs des motifs de son arrêt, d’une part, que Me X... avait traité au moins 8 autres dossiers retrouvés par la SCP C...-I... après son départ et, d’autre part, qu’elle avait écrit à l’un de ses confrères, être en charge d’un important contentieux dans lequel elle avait été mandaté par 60 salariés, ce dont il résultait que la liste fournie par celle-ci n’était pas sincère et ne pouvait dès lors pas faire la preuve du caractère dérisoire de la clientèle personnelle de Mme X..., la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les articles 7 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, 18 de la loi n° 2005-882 du 2 août 2005, 129 et suivants du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 et 14. 1 à 14. 3 du Règlement intérieur national de la profession d’avocat ;
ALORS, D’AUTRE PART, QU’en retenant encore la sincérité des déclarations de Me X... quant au montant total des honoraires perçus par elle, au titre de son activité personnelle, dont elle affirmait qu’ils s’élevaient à 3. 767 € en 12 ans quand il résulte de ses constations que Me X... avait au moins perçu 5. 000 € de plus, de sorte qu’elle avait là encore fourni aux juges des chiffres inexacts, insusceptibles de faire la preuve du caractère dérisoire de sa clientèle personnelle, la cour d’appel a violé les articles 7 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, 18 de la loi n° 2005-882 du 2 août 2005, 129 et suivants du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 et 14. 1 à 14. 3 du Règlement intérieur national de la profession d’avocat ;
ALORS, A TOUT LE MOINS, QU’en statuant de la sorte, la cour d’appel a entaché sa décision d’une contradiction de motifs et a ainsi méconnu les exigences résultant de l’article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS, DE TROISIEME PART, QU’il appartient aux juges du fond d’examiner l’ensemble des pièces soumises à leur examen ; qu’en affirmant que la SCP C...-I... ne serait parvenue à ajouter à la liste fournie par Mme X... que « huit dossiers » et que, pour le surplus, elle ne procéderait que par voie de « suppositions » quand la SCP C...-I... avait produit aux débats, en original, deux autres dossiers personnels de Mme X..., les dossiers L...-R.../ SCI CLE DES CHAMPS et Z.../ PENSION ALIMENTAIRE, la cour d’appel, qui n’a manifestement pas examiné l’ensemble des pièces soumises à son examen, a violé l’article 455 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS, DEUXIEMEMENT, QUE s’agissant de l’imputabilité de cette situation, sont indifférentes à la solution du litige, les pièces éparses (une lettre d’un clients transmission de pièces oubliées par elle au cabinet...) au moyen desquelles la SCP entend démontrer que Maître X... aurait négligé ses clients et que partant, là résiderait la cause d’un faible développement de sa clientèle, alors que l’intimée ne justifie pas de reproches qu’elle aurait eu à formuler en douze années à l’encontre de la compétence et du travail fourni par l’appelante, rien de tel n’étant d’ailleurs évoqué dans la lettre de rupture du 11 juillet 2007, la SCP faisant au contraire part de son regret de ne pouvoir poursuivre avec Maître X..., à défaut d’association, au moins une collaboration ; qu’au moyen d’éléments circonstanciés et concordants Maître X... contribue à prouver qu’en conséquence de la charge de travail que lui imposait la SCP son activité était exercée à temps plein pour celle-ci, ce qui de fait la plaçait sous sa totale subordination, faisant obstacle au développement de sa propre clientèle ; qu’à cette fin Maître X... excipe de deux attestations régulières en la forme et non arguées de faux émanant de Maître A... et Maître B..., qui ont respectivement oeuvré au sein de la SCP de 1994 à 1999 et 2000 à 2005, soit simultanément avec l’appelante, et qui relatent en termes précis et circonstanciés, que bien que liées par une convention de collaboration, l’attitude générale des associés, qui leur confiaient du travail à temps complet, a fait les concernant obstacle à toute création d’une clientèle personnelle effective et non dérisoire ; que l’une et l’autre décrivent les demandes intempestives des associés de se rendre à des audiences ou d’assurer des rendez-vous, les interruptions par ceux-ci des rares rendez-vous avec des clients personnels ou au cours de gardes pénales, la charge de travail dans leur dossier et la difficulté de confier des tâches afférentes à leurs propres dossiers à un secrétariat toujours débordé ; que Maître B... déclare qu’en cinq années elle n’a pu traiter que 16 dossiers personnels et qu’il a été mis fin brutalement à sa collaboration après qu’elle avait informé Maître C... de son souhait d’accroître sa propre clientèle ; que deux autres collaborateurs de la SCP Maître D... (de 1996 à 1999) et Maître E... (de 2001 à 2007) décrivent en termes tout aussi précis et circonstanciés les mêmes conditions de travail et l’attitude hostile des associés de la SCP au développement de leur clientèle personnelle ; que la valeur probante de ces témoignages, où figurent toutes les mentions exigées par l’article 202 du code de procédure civile, signées par leurs auteurs qui ont manuscritement apposé la mention afférente aux conséquences d’une fausse déclaration, n’est pas entamée par la circonstance que les déclarations soient dactylographiées, chaque feuillet étant de surcroît paraphé ; que les déclarations précitées sont corroborées par les attestations régulières et non arguées de faux des secrétaires qui ont travaillé pour la SCP en présence de Maître X... : Mme F... (de 1999 à 2004) Mme G... (de 1992 à 1999) Mme H... (de 2004 à 2006) ; que les deux dernières insistent sur l’amplitude du temps de travail consacré par Maître X... aux dossiers de la SCP en notant que si cette dernière s’absentait toujours pour raison personnelle religieuse le vendredi après-midi, elle récupérait cette disponibilité le dimanche, l’importance des travaux à effectuer (cassettes à taper) émanant de celle-ci qu’elles trouvaient le lundi matin à leur arrivée vers 7h30 en témoignant ; que Mme F... ajoute, ainsi que cela a notamment été détaillé par Maître B..., le comportement habituellement très exigeant des associés envers leurs collaborateurs (obligations d’audiences ou de rendez-vous à assurer de manière imprévue, allers et venues fréquents vers les juridictions) et elle confirme la surcharge de travail du secrétariat qui excluait quasiment toute possibilité de taper pour les quelques clients personnels des collaborateurs ; que pour démontrer que ses conditions de travail personnelles s’avéraient comparables à celle-ci avant décrites Maître X... produit des documents nombreux ; que sont versés pour toutes les années considérées les rôles des dossiers de l’étude suivis par elle dans les juridictions (mise en état, plaidoirie) du ressort de la Cour de céans, mais aussi à l’extérieur ; que les très nombreux messages électroniques-dont beaucoup contrairement à ce qu’affirme l’intimée-sont antérieurs à la notification de la rupture (2005, 2006) émanant de Maître I... qui avait l’habitude de transmettre ainsi ses préconisations à Maître X..., font apparaître à la charge de cette dernière l’obligation fréquente de répondre en urgence et surtout de rendre compte de toutes ses interventions dans les dossiers, caractérisant un contrôle extrême, dont il y a d’autant lieu de s’étonner que l’expérience et les compétences de l’appelante n’ont jamais été critiquées ; que se trouvent ainsi des instructions sur la tournure des courriers, des demandes de paiement, sur le détail des actes à effectuer (par exemple 13 mars 2006 “ relancer l’huissier par fax + l’appeler + faire courrier au client pour le tenir informé des diligences + copie du courrier de relance + lui dire ce que l’huissier a dit + te noter le dossier pour relancer l’huissier) ; que le 11 mai 2007 Maître I... demandait à Maître X... de ne plus confier de travail aux stagiaires sans lui en parler ; que Maître X... produit encore des courriers rédigés par elle (Maerf du 12. 10. 2007, Securitas du 11. 04. 2007) corrigés manuscritement par Maître I... sur des détails formels comme l’ajout d’adverbes... ; que Maître X... établit encore que Maître I... entendait-et les circonstances que cet ordre aurait été peu suivi sont indifférentes-encadrer très rigoureusement les congés des collaborateurs puisque par un message électronique du 10 juillet 2006 à l’intention de Mme H... secrétaire (dont le témoignage a été ci-avant analysé) elle précisait : “ II est important de noter les vacances de chacun, merci de demander à chaque avocat collaborateur quelles sont les journées de congés prises depuis janvier 2006 ainsi que les projets d’été. Il faudra tenir un tableau de bord pour chaque armée “ et le même jour cette exigence était transmise par Mme H... aux intéressés dont Maître X..., puis réitérée le 6 décembre 2006 en ces termes : “ Maître I... m’a chargée dans le futur de noter les congés pour chaque collaborateur donc quand vous prenez des jours de congés je vous remercie de bien vouloir m’en faire part “ ; que pour sa part la SCP souligne qu’elle offrait à Me X... les moyens matériels, bureau individuel, matériel téléphonique et informatique …, utiles au développement de sa clientèle ; que ce point est acquis aux débats, mais cette circonstance au vu de tout ce qui précède ne remet pas en cause la caractérisation de la subordination de Maître X... en ce qui concernait l’amplitude et l’organisation de son temps de travail ; qu’il en est de même des attestations des autres collaborateurs dont la régularité et la sincérité ne sont pas suspectes-à l’exclusion de celle de Maître Olivier C... qui est le fils de Maître André C... associé de la SCP-mais qui sont dépourvues de valeur probante alors que ces personnes du fait de leur arrivée récente dans le cabinet n’ont quasiment pas oeuvré en même temps que Maître X..., ni qu’aucun des autres témoins déjà cités ; qu’ainsi Maître J... est entrée le 1er mars 2007, Maître K... le 5 décembre 2007 et Maître L... le 2 novembre 2007 ; que s’agissant des témoignages des secrétaires, celui de Mme M...- dont un autre témoin Mme F... a relevé sans être contredite qu’elle était la compagne de Maître Olivier C...- doit être écarté ; que Mmes O..., Q... et R... en déclarant qu’elles n’ont jamais refusé de taper des courriers pour Maître X... pu de lui transmettre des messages électroniques, n’apportent pas d’éléments contredisant ceux plus précis émanant de leurs collègues ; que pour le surplus la SCP s’avère taisante sur l’organisation du temps de travail de Maître X... et sur la charge des dossiers à traiter qu’elle lui confiait ; que l’absence de réclamation de Maître X... ne saurait s’analyser comme une approbation lui interdisant de contester la nature juridique de son contrat de travail ; qu’au surplus il ne peut être exclu, au vu de ce qu’a relaté Maître B... quant aux circonstances de la rupture de son contrat, que Maître X... ait craint de perdre son emploi ; que les relations d’amitié qui ont un temps existé entre Maître X... et Maître I...- décrites par les témoins et ressortant de certains courriers-peuvent aussi expliquer cette situation conjuguée de surcroît avec le projet d’une association ; que sur ce dernier point, la Cour ne dispose pas d’éléments suffisants pour mesurer les mérites de la proposition formulée-dont le refus est l’unique cause de la rupture-et tel n’est d’ailleurs pas l’objet du litige mais il convient de relever que si dans son attestation M. P... expert-comptable de la SCP relate les conditions de son élaboration, qu’il avait d’ailleurs déconseillée, puis les circonstances de sa présentation à Maître X..., il demeure très imprécis sur l’avantage qu’il aurait procuré à cette dernière ; que de l’ensemble de cette analyse il résulte que c’est du fait de la SCP que Maître X..., placée sous la totale subordination de cette dernière, a été empêchée de développer sa clientèle personnelle demeurée dérisoire ;
ALORS, DE QUATRIEME PART, QUE même lorsqu’il ne dispose que d’une clientèle personnelle « dérisoire », l’avocat titulaire d’un contrat de collaboration ne peut prétendre à la requalification de celui-ci en un contrat de travail que s’il ne dispose pas des moyens matériels et humains nécessaires à la création et au développement de sa clientèle personnelle ; qu’en l’espèce, la cour d’appel, qui a requalifié le contrat de collaboration de Mme X... au regard non des moyens matériels et humains mis à sa disposition par la SCP C...-I..., mais uniquement au regard de la charge de travail qui était la sienne au sein de ce cabinet et du fait qu’elle était soumise, dans le cadre de son activité pour le compte du cabinet, à certaines contraintes inhérentes à l’organisation de celui-ci, tel que, notamment, l’organisation des congés, a statué selon les motifs inopérants et a privé sa décision de base légale au regard des articles 7 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, 18 de la loi n° 2005-882 du 2 août 2005, 129 et suivants du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 et 14. 1 à 14. 3 du Règlement intérieur national de la profession d’avocat ;
ALORS, DE CINQUIEME PART ET SURTOUT, QU’en statuant de la sorte quand elle avait par ailleurs constaté que Mme X... disposait de l’ensemble « des moyens matériels, bureau individuel, matériel téléphonique et informatique, utiles au développement de sa clientèle personnelle » et relevé que trois secrétaires du cabinet avaient attesté n’avoir jamais refusé de taper les courriers personnels de Me X..., ni de lui transmettre ses messages, ce dont il résultait que Me X... disposait de l’ensemble des moyens matériels et humains nécessaires au développement de sa clientèle, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles 7 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, 18 de la loi n° 2005-882 du 2 août 2005, 129 et suivants du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 et 14. 1 à 14. 3 du Règlement intérieur national de la profession d’avocat.

SECOND MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR condamné la SCP C...-I... à payer la somme de 14. 011 € au titre des charges patronales ;
AUX MOTIFS QUE c’est conformément aux dispositions légales et conventionnelles que Mme X... démontre que son salaire mensuel brut s’établit à la somme de 5. 326 € et que partant la SCP doit être condamnée à lui payer la somme de 14. 011 euros au titre des charges patronales ;
ALORS QUE, dans ses conclusions d’appel (cf. p. 47), la SCP C...-I... avait contesté la somme de 14. 011 € réclamée par Mme X... au titre des charges patronales en faisant valoir que les pièces versées par celle-ci aux débats aux fins d’en justifier étaient incohérentes et contradictoires ; qu’en fixant néanmoins à 14. 011 € la somme due à ce titre, sans s’expliquer sur les raisons l’ayant conduit à retenir ce chiffre, la cour d’appel a méconnu les exigences de l’article 455 du Code de procédure civile.
Décision attaquée : Cour d’appel de Colmar du 10 janvier 2011