Faux mandat de gérance

Cour de cassation

chambre sociale

Audience publique du 27 mai 2003

N° de pourvoi : 01-41896

Non publié au bulletin

Rejet

Président : M. SARGOS, président

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur les trois moyens réunis, tels qu’ils figurent en annexe :

Attendu que M. X... et Mme Y... ont constitué une société (SARL) dénommée Sylco, dont ils étaient les seuls associés et avaient la qualité de cogérants ; que cette société avait pour objet “l’animation commerciale” de magasins de vente ; que par contrats qualifiés de mandat, la société Besson chaussures a confié à la société Sylco l’exploitation et la gestion d’un fonds de commerce de vente de chaussures ; que, par lettre du 26 mars 1997, la société Besson chaussures a mis fin à ce contrat ; que M. X... et Mme Y... ont engagé une action devant le conseil de prud’hommes à l’encontre de la société Besson chaussures pour faire constater la fictivité de la société Sylco, faire requalifier les contrats de mandat en contrat de travail et obtenir la condamnation de cette dernière au paiement des indemnités subséquentes pour chacun d’eux ; que la société Besson chaussures a soulevé l’incompétence de la juridiction prud’homale au profit de la juridiction commerciale ;

Attendu que la société Besson chaussures fait grief à l’arrêt confirmatif attaqué (Versailles, 25 janvier 2001) d’avoir, pour retenir la compétence de la juridiction prud’homale, constaté le caractère fictif de la société Sylco et requalifié les contrats de mandat conclus entre la société Besson chaussures et la société Sylco en contrat de travail de M. X... et de Mme Y... avec la société Besson chaussures, d’avoir jugé que la rupture de ce contrat de travail était sans cause réelle et sérieuse et d’avoir accueilli les demandes subséquentes de M. X... et de Mme Y... en invoquant des moyens tirés de la violation des articles 14 du nouveau Code de procédure civile et 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 1134, 1844-14 et 1844-15 du Code civil ainsi que des articles 1832 et suivants et 34 et suivants de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966, 455 du nouveau Code de procédure civile et L. 781-1 du Code du travail ;

Mais attendu, d’abord, qu’aucune demande n’étant dirigée contre la société Sylco, il ne peut être reproché à l’arrêt attaqué d’avoir statué sans qu’elle ait été appelée en la cause ;

Attendu, ensuite, que la cour d’appel, procédant à l’analyse des éléments de fait et de preuve versés aux débats dont elle a souverainement apprécié la valeur et la portée, a constaté que M. X... et Mme Y... ne disposaient d’aucune autonomie dans l’animation du magasin qui était la propriété de la société Besson chaussures, qu’un employé de cette société était chargé de superviser leur travail pour le compte de cette dernière, qu’ils avaient l’interdiction de s’adresser à d’autres fournisseurs et de vendre d’autres produits que ceux proposés par la société Besson chaussures, qu’ils étaient tenus de se conformer aux instructions permanentes et précises de cette société concernant la fixation des prix, la gestion des stocks, la répartition des invendus et plus globalement la stratégie commerciale de même que les conditions de travail, que leur rémunération s’apparentait à un salaire mensuel ; que, de ces constatations, elle a pu déduire que, sous couvert d’un montage juridique de façade constitué par une société fictive et un mandat apparent, les intéressés se trouvaient placés dans un état de subordination caractérisant l’existence d’un contrat de travail ; que les moyens ne peuvent être accueillis ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Besson chaussures aux dépens ;

Vu l’article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Besson chaussures à payer à Mme Y... et M. X..., chacun, la somme de 1 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept mai deux mille trois.

Décision attaquée : cour d’appel de Versailles (5e Chambre, Section B) du 25 janvier 2001