Formateur occassionnel non - critères

Arrêt n° 616 du 9 mai 2019 (18-11.158) - Cour de cassation - Deuxième chambre civile - ECLI:FR:CCASS:2019:C200616
Sécurité sociale
Rejet
Demandeur(s) : Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales d’Ile-de-France ; et autres
Défendeur(s) : société Demos, société anonyme

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 16 novembre 2017), qu’à la suite d’un contrôle portant sur la période de 2010 à 2012, l’URSSAF d’Ile-de-France (l’URSSAF) a notifié à la société Demos (la société), entreprise de formation, un redressement résultant notamment de la réintégration dans l’assiette des cotisations à l’assurance chômage, au régime de garantie des créances des salariés et du versement de transport, des rémunérations versées aux formateurs occasionnels ; que l’URSSAF lui ayant notifié une mise en demeure, puis signifié une contrainte, la société a saisi une juridiction de sécurité sociale d’une contestation de la décision de rejet de la commission de recours amiable ainsi que d’une opposition à la contrainte ;
Attendu que l’URSSAF fait grief à l’arrêt d’accueillir ces recours, alors, selon le moyen :
1°/ qu’un formateur occasionnel affilié au régime général de la sécurité sociale est un salarié de droit commun soumis à l’ensemble des cotisations sociales dues pour l’emploi des salariés ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a constaté d’une part que les formateurs occasionnels étaient affiliés au régime général de la sécurité sociale salarié, d’autre part que la société Demos s’était acquittée des cotisations sociales d’assurance sociales, d’accident du travail et d’allocations familiales dues au titre de ces emplois ; qu’en retenant que la société Demos n’était pas redevable des cotisations chômage et d’assurance garantie d’emploi car les formateurs occasionnels qu’elle employait n’auraient pas été des salariés classiques, la cour d’appel a violé l’arrêté du 28 décembre 1987, ensemble les articles L. 5422-13, L. 1221-1 du code du travail ;
2°/ que la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu’en excluant la qualité de salariés des formateurs occasionnels en affirmant d’une part que l’URSSAF Ile-de-France ne rapportait pas la preuve d’une relation de travail subordonnée tout en constatant d’autre part que cette catégorie de professionnels était affiliée au régime général de la sécurité sociale des salariés, la cour d’appel s’est prononcé par des motifs contradictoires et a violé l’article 455 du code de la sécurité sociale ;
3°/ que les personnes assujetties au versement de transport sont celles qui, employant plus de neuf salariés, dont le lieu de travail est situé dans la région d’Ile-de-France, sont tenues de payer des cotisations de sécurité sociale ou d’allocations familiales ; que la cour d’appel a constaté d’une part que les formateurs occasionnels auxquels la société Demos faisait appel étaient affiliés au régime de la sécurité sociale, d’autre part cette dernière s’était acquittée des cotisations de sécurité sociales dues au titre de l’emploi de cette catégorie de professionnels ; qu’en jugeant néanmoins que la société Demos n’était pas redevable du versement transport la cour d’appel a violé les articles L. 2531-2, L. 2531-3 et R. 2531-7 du code général des collectivités territoriales, dans leur version applicable au litige ;
4°/ que, subsidiairement, en présence d’un contrat de travail apparent il appartient à celui qui en conteste la réalité d’en rapporter la preuve ; qu’en l’espèce, l’URSSAF d’Ile-de-France soutenait que la qualité d’employeur de la société Demos résultait notamment de plusieurs éléments concordants en faveur de l’existence d’une relation de travail salariée puisque l’organisme de formation acquittait directement les cotisations sociales et patronales et que les formateurs occasionnels n’étaient pas immatriculés en qualité de travailleurs indépendants, recevaient tous après leurs missions, une fiche de paie et une rémunération nette de charge, et avaient fait l’objet d’une déclaration unique d’embauche ; qu’en reprochant cependant à l’URSSAF d’Ile-de-France de ne pas rapporter la preuve de l’existence d’une relation de travail subordonnée lorsqu’il lui appartenait, en présence d’un contrat de travail apparent, de rechercher si la preuve de son caractère fictif était rapportée par la société Demos qui l’invoquait, la cour d’appel a inversé la charge de la preuve et violé l’article 1315 du code civil dans sa version applicable au litige, ensemble l’article L. 1221-1 du code du travail ;
5°/ que les juges du fond ne peuvent statuer par voie de simples affirmations sans préciser l’origine de leurs constatations ; qu’en affirmant que les formateurs occasionnels fournissaient leurs prestations sur le contenu desquelles la société Demos n’avait pas de droit de regard, avec une indépendance certaine et qu’ils n’étaient pas soumis à respecter un programme élaboré par l’organisme de formation, qui ne disposait pas d’un pouvoir de sanction à leur égard, sans même préciser d’où elle tirait de telles affirmations qui ne résultaient d’aucun document de preuve produit par la société Demos, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que, selon les articles L. 3253-6 et L. 5422-13 du code du travail, dans leur rédaction applicable à la date d’exigibilité des cotisations litigieuses, l’obligation d’affiliation, respectivement, à l’assurance de garantie des salaires et au régime d’assurance chômage s’applique à tout salarié, y compris les salariés détachés à l’étranger ainsi que les travailleurs français expatriés ; que, selon l’article L. 2531-2 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008, applicable à la date d’exigibilité des contributions litigieuses, le versement de transport est dû, dans la région d’Ile-de-France, pour les personnes physiques ou morales qu’il mentionne, lorsqu’elles emploient plus de neuf salariés ; qu’il résulte de ces dispositions qu’une personne physique ou morale ne saurait être tenue au paiement des contributions, cotisations et impositions qu’ils prévoient que pour celles des personnes qu’elle emploie dans des conditions caractérisant, au sens de chacun de ces textes, l’existence d’un lien de subordination juridique dans la relation de travail ; que le versement des cotisations de sécurité sociale n’implique pas par lui-même l’existence d’un tel lien pour l’application des règles d’assujettissement à des régimes distincts ou au paiement d’une taxe locale ;
Et attendu que l’arrêt retient, par motifs propres, que les constatations de l’URSSAF ne décrivent pas l’existence d’un contrat de travail, les conditions dans lesquelles les formations sont dispensées, le nombre de formateurs, ni le volume d’heures de formation et, par motifs adoptés, que les formateurs occasionnels fournissent leurs prestations sur le contenu desquelles la société Demos n’a pas de droit de regard, avec une indépendance certaine ; qu’ils ne sont pas soumis à respecter un programme élaboré par cette dernière, laquelle ne dispose pas de pouvoir de sanction à leur égard ;
Que de ces constatations procédant de son pouvoir souverain d’appréciation des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d’appel a exactement déduit, sans encourir les griefs du moyen, que n’ayant pas rapporté la preuve de l’existence d’un lien de subordination, au sens des textes susmentionnés, entre la société et chacun des formateurs occasionnels employés par celle-ci, l’URSSAF ne pouvait pas procéder au redressement des contributions à l’assurance chômage, des cotisations AGS et du versement de transport dus par la société ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi

Président : Mme Flise
Rapporteur : Mme Palle, conseiller référendaire
Avocat général : M. de Monteynard
Avocat : SCP Gatineau et Fattaccini