Médecin

Cour de cassation

chambre sociale

Audience publique du 29 janvier 2014

N° de pourvoi : 12-26940 12-27511

ECLI:FR:CCASS:2014:SO00202

Non publié au bulletin

Rejet

M. Blatman (conseiller le plus ancien faisant fonction de président), président

Me Blondel, SCP Gadiou et Chevallier, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :
Vu leur connexité, joint les pourvois n° F 12-26. 940 et B 12-27. 511 ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 13 septembre 2012), que Mme X..., médecin anesthésiste réanimateur, soutenant avoir travaillé entre mars 2005 et décembre 2008 en qualité de médecin anesthésiste remplaçant dans le cadre d’un lien de subordination, d’abord à l’égard de MM. Y..., Z... et A..., puis à compter de janvier 2008 à l’égard de Mme B..., a saisi la juridiction prud’homale de demandes tendant à la requalification des contrats de remplacement en exercice libéral en contrat de travail à durée indéterminée par employeurs conjoints, au prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de travail et au paiement de diverses indemnités ;
Sur le premier moyen :
Attendu que les employeurs prétendus font grief à l’arrêt de qualifier la relation contractuelle en contrat de travail et de les condamner à payer diverses sommes à la salariée, alors, selon le moyen :
1°/ que le lien de subordination se caractérise par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné, sans avoir lui-même à en référer à quiconque ; que la cour d’appel a expressément relevé que MM. Y..., Z..., A... et Mme B..., médecins anesthésistes à la clinique du Louvre, étaient tenus par « les contraintes gérées par le chef de bloc », par « les contraintes extérieures » et « des sujétions résultant de l’exercice de leurs fonctions au sein de la clinique » ; qu’en retenant l’existence d’un lien de subordination et, partant, d’un contrat de travail entre leur remplaçante, Mme X..., et eux-mêmes, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales s’évinçant de ses propres constatations de ce que l’ensemble des médecins, qu’ils soient remplacés ou remplaçants, étaient soumis aux contraintes imposées par la clinique du Louvre, a violé l’article L. 1221-1 du code du travail ;
2°/ que la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu’en relevant tout à la fois que MM. Y..., Z..., A... et Mme B... étaient tenus par les contraintes gérées par le chef de bloc, les contraintes extérieures et des sujétions résultant de l’exercice de leurs fonctions au sein de la clinique et que ces quatre médecins imposaient les plannings à Mme X..., la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
3°/ qu’en retenant l’existence d’un lien de subordination entre Mme X... et MM. Y..., Z..., A... et Mme B... sans examiner concrètement les conditions d’exercice de Mme X... qui profitait de l’infrastructure de l’établissement de santé privé en terme de personnels, de locaux, de produits et de matériels, et était assujettie à ses horaires, la cour d’appel a derechef privé sa décision de toute base légale au regard de l’article L. 1221-1 du code du travail ;
4°/ qu’en relevant, pour retenir l’existence d’un contrat de travail unissant Mme X... à MM. Y..., Z..., A... et Mme B..., qu’elle n’avait pas de clientèle propre cependant que les médecins anesthésistes n’ont jamais de clientèle propre, la cour d’appel a statué par un motif inopérant en violation de l’article L. 1221-1 du code du travail ;
5°/ que seule la rémunération du médecin remplaçant fixée intégralement par le médecin remplacé ou par la clinique est un indice d’un lien de subordination ; que la cour d’appel a expressément relevé que la partie complémentaire de revenus variables de Mme X... n’était pas fixée forfaitairement et unilatéralement par les médecins remplacés, mais correspondait à un pourcentage de 10 % sur les dépassements facturés aux patients par elle-même dans des proportions librement arrêtées par cette dernière, sans aucune contrainte de la part des médecins remplacés ou de la clinique ; qu’en retenant ce critère comme une manifestation de l’existence d’un contrat de travail, la cour d’appel a violé l’article L. 1221-1 du code du travail ;
6°/ que tout médecin, qu’il exerce à titre libéral ou salarié, est tenu de procéder à un codage de ses actes conforme aux cotations en vigueur ; qu’en relevant, pour retenir l’existence d’un contrat de travail unissant Mme X... à MM. Y..., Z..., A... et Mme B..., que ces derniers ont exercé vis-à-vis d’elle un pouvoir de contrôle et de direction sur la gestion administrative des dossiers en lui reprochant des codifications erronées, la cour d’appel a derechef statué à la faveur de motifs totalement inopérants et a violé l’article L. 1221-1 du code du travail ;
Mais attendu que sous le couvert de prétendues violations de la loi et défauts de base légale, le moyen, pris en ses six branches, tend à remettre en cause l’appréciation souveraine des faits et des preuves par la cour d’appel qui, ayant constaté que Mme X..., médecin anesthésiste remplaçant, ne disposait pas de la liberté d’organiser ses interventions directement en fonction des sujétions résultant de l’organisation de la clinique, mais recevait des consignes de la part des quatre médecins qu’elle remplaçait, lesquels lui imposaient les plannings et l’affectaient à telle ou telle vacation, qu’elle ne disposait pas de la possibilité de se constituer une clientèle propre, qu’elle devait remplir les dossiers administratifs des clients pour le compte des médecins remplacés et que la prétendue liberté de fixer le dépassement d’honoraires était en lien avec le choix du secteur du titulaire pour le compte duquel elle intervenait et qui conservait une partie importante des dépassements, ce qui établissait l’existence d’un lien de subordination, a pu en déduire qu’elle avait exercé ses fonctions dans le cadre d’un contrat de travail ; que le moyen n’est pas fondé ;
Sur les deuxième et troisième moyens :
Attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer sur ces moyens qui ne sont pas de nature à permettre l’admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne la société Docteur Y..., la société Docteur Z..., M. A... et Mme B... aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer à Mme X... la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf janvier deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens identiques produits aux pourvois n° F 12-26. 940 et B 12-27. 511 par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils pour les sociétés Docteur André Y... et Docteur Lionel Z..., M. A... et Mme B...
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’AVOIR dit que Mme X... était engagée dans le cadre d’un contrat de travail à l’égard de la SELARL Y..., de la Selarl Z..., du Dr A... et du Dr B..., de les AVOIR condamnés solidairement à lui verser 21. 928 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis, 2. 192, 80 € à titre de congés payés afférents, 14. 965 € d’indemnité de licenciement, 100. 000 € de dommages-intérêts sur le fondement de l’article L. 1235-5 du code du travail, 3. 000 ¿ de dommages-intérêts pour non respect de la procédure, 5. 000 € de dommages-intérêts en réparation du préjudice distinct résultant des circonstances brutales et vexatoires de la rupture et 2. 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, d’AVOIR condamné solidairement la SELARL Y..., la Selarl Z... et le Dr A... à verser à Mme X... la somme de 38. 978, 80 € au titre du rappel de congés payés sur la période de 2004 à 2008 inclus, d’AVOIR condamné le Dr B..., solidairement avec la SELARL Y..., la Selarl Z... et le Dr A... à verser à Mme X... la somme de 7. 642, 90 € au titre des congés payés pour l’année 2008, enfin d’AVOIR ordonné la remise d’un bulletin de salaire récapitulatif conforme aux termes de l’arrêt depuis le 1er mars 1998, une attestation Pôle emploi et un certificat de travail ;
AUX MOTIFS QUE, sur la demande de requalification des contrats de remplacement en exercice libéral en contrat de travail à durée indéterminée, il convient tout d’abord de relever que d’après les documents produits, Madame X... a signé une seule fois des contrats de remplacement avec les SELARL Docteur Y... et Docteur Z... et le Docteur A..., courant mars 2005 à compter du 31 mars 2005 et ce pour une durée de trois mois ; qu’aux termes des articles 2 et 12 desdits contrats, il était expressément spécifié que « le renouvellement du contrat de remplacement sera authentifié par un document écrit par les deux praticiens, ¿ le contrat de renouvellement devant lui aussi être soumis préalablement à l’autorisation de l’Ordre des médecins de Paris » ; qu’aucun contrat de renouvellement n’a été établi, ni aucune autorisation n’a été demandée à l’Ordre des médecins de PARIS ; que pour autant, il est admis par les parties que le Docteur X... est intervenue, au cours de certaines demi-journées chaque semaine au sein de la CLINIQUE DU LOUVRE aux lieu et place, des Docteurs Y..., A... et Z... à compter de 1998 et du Docteur B... à compter du mois de janvier 2008 et ce jusqu’en décembre 2008 ; que l’existence d’une relation de travail salarié ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination qu’elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité litigieuse ; que de façon plus générale, le contrat de travail se définit comme la convention par laquelle une personne s’engage à mettre son activité à la disposition d’une autre sous la subordination de laquelle elle se place, moyennant rémunération ; qu’outre l’exercice d’une activité professionnelle et la perception d’une rémunération, c’est le lien de subordination qui constitue l’élément déterminant du contrat de travail seul susceptible de le différencier d’autres contrats comportant l’exécution d’une prestation rémunérée ; que ce lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; que les intimés contestent la réalité d’un contrat de travail, affirmant que Madame X... est intervenue comme médecin anesthésiste remplaçant en libéral ; qu’ils précisent que Madame X... prétend à tort avoir perçu une rémunération fixe et régulière dès lors qu’elle percevait en contrepartie de ces prestations outre un montant de rétrocession d’honoraires forfaitaire, une part variable égale à 10 % des dépassements d’honoraires facturés par elle lors de la consultation auprès des patients ; qu’ils en concluent que cette facturation libre des dépassements d’honoraires est incompatible avec le statut de salarié, cette prérogative étant réservée aux seuls praticiens libéraux ; qu’ils font valoir par ailleurs que les anesthésistes ne disposent jamais d’une clientèle personnelle directe celle-ci étant en réalité générée par les autres spécialistes qui font appel, pour leurs patients à tel ou tel anesthésiste, que si les feuilles de soins utilisées étaient au nom du médecin remplacé, ces noms ont été rayés par Madame X... qui inscrivait le sien ce qui établit qu’elle avait une identité professionnelle réelle vis-à-vis des patients ; qu’ils soutiennent que Madame X... a assumé 4 à 5 vacations de remplacement par semaine ce qui lui laissait la possibilité d’exercer son activité ailleurs qu’à la CLINIQUE DU LOUVRE et en relation avec d’autres praticiens ; que s’agissant des modalités d’exercice de l’activité, ils relèvent que Madame X... intervenait dans un service organisé par la clinique et non par eux, dès lors, d’une part, qu’ils fonctionnent en toute indépendance les uns par rapport aux autres, d’autre part, que toutes les contraintes s’imposant à Madame X..., comme à eux-mêmes résultent de l’organisation nécessaire au sein de l’établissement sanitaire ; qu’ils contestent avoir jamais exercé un quelconque pouvoir de direction et de contrôle, en l’absence de toute structure commune des anesthésistes, la masse commune d’honoraires entre la SELARL Y..., la SELARL Docteur Z... et le Docteur A... ne concernant pas l’organisation du travail, laquelle relève du seul ressort de la clinique ; qu’en tout état de cause, ils font observer que Madame X... a librement fixé les modalités de son activité dès lors qu’elle n’a jamais souhaité participer aux gardes du week-end, de nuit ou des jours fériés, qu’elle a exercé ses remplacements en fonction de ses disponibilités ou de ses choix de vacances, qu’enfin ils ont simplement été amenés à informer Madame X... des erreurs et oublis de cotation de sa part préjudiciables pour la clinique et les clients ; qu’enfin, ils font observer que la rupture des relations professionnelles résulte du seul refus de Madame X... de poursuivre ses remplacements à titre libéral en dépit des correspondances qui lui ont été adressées le 19 décembre 2008 pour lui proposer la signature de contrats de remplacement ; que d’après les éléments communiqués, il apparaît que les quatre intimés exercent leur activité en tant qu’anesthésistes du secteur « gastro » de la CLINIQUE DU LOUVRE, qu’ils sont les interlocuteurs de la direction de la clinique s’agissant des modalités de leurs interventions ; qu’un document communiqué intitulé « communication à CME du mardi 8 juillet 2008 » montre que « des entretiens des réunions ont eu lieu entre la direction et les quatre médecins anesthésistes plein-temps du secteur gastro de la clinique afin de préciser les conditions et les objectifs qui présidaient courant 2007 à la décision conjointe de la clinique et des trois médecins plein-temps du recrutement d’un quatrième anesthésiste contractuel associé de plein droit » et « pour offrir aux patients une information préalable transparente quant à leurs honoraires conformément à l’évolution récente du code de la santé publique » ; que ce document avait « pour finalité, en total accord avec la direction de définir les règles de fonctionnement des quatre médecins pour les consultations et les actes techniques » ; qu’il était notamment spécifié que « la décision d’intégrer un quatrième plein-temps avait notamment pour objectif d’accroître et de pérenniser le potentiel humain de l’équipe du service d’anesthésie » ; qu’il en résulte que bien qu’exerçant à titre libéral et de manière indépendante, les quatre médecins anesthésistes du secteur « gastro » de la clinique formaient une équipe et étaient amenés à organiser entre eux leurs interventions respectives ainsi que celles de ceux qui pouvaient être amenés à intervenir en leurs lieux et places en tenant compte des besoins des chirurgiens et des contraintes gérées par le chef de bloc ; que dans le cadre de leur organisation propre, et dans le respect de ces contraintes extérieures, ils avaient la maîtrise de l’élaboration de leurs plannings d’intervention et des actions des anesthésistes intervenant en leurs lieux et places ; que l’examen des documents communiqués montre que Madame X... est intervenue, au niveau des consultations, au niveau du bloc, aux lieu et place de l’un ou l’autre des quatre anesthésistes, et ce, à raison de plusieurs demi-journées chaque semaine, ses interventions pouvant avoir lieu indifféremment, au cours des jours de semaine en dehors du dimanche, des nuits et des jours fériés ; qu’à titre d’exemples pour le mois de janvier 2008, elle est intervenue aux lieu et place - du Docteur B... à raison de 13 demi-journées,- du Docteur A..., trois demi-journées,- du Docteur Y..., 1, 5 demi-journées,- du Docteur Z..., deux demi-journées ; qu’au cours du mois de février 2008, elle a assuré aux lieu et place,- du Docteur B..., 1, 95 demi-journées,- du Docteur Y..., 7 demi-journées,- du Docteur A..., 7 demi-journées,- du Docteur Z..., 5 demi-journées ; que Madame C..., secrétaire médicale en formation dans le service des consultations d’anesthésie de mars 2007 à mars 2008 atteste qu’« à l’arrivée du Dr B..., le planning du Dr X... a été modifié par les Docteurs Y..., Z... et A... » ; que ce témoin précise que « le Docteur X... passait la majorité de son temps en consultation, celui lui étant imposé par les Docteurs Y..., Z..., A... (...) et par le Docteur B..., qu’elle faisait de très nombreuses heures de consultation voire même des journées entières qui pouvaient durer tard le soir parfois jusqu’à 20 h 00 à raison d’un rendez-vous toutes les 10 minutes sans qu’aucun autre anesthésiste ne vienne la remplacer ou l’aider, qu’elle se retrouvait au bloc opératoire surtout le samedi car les autres anesthésistes ne souhaitaient pas faire les permanences du samedi » ; qu’il résulte en conséquence de ces éléments que Madame X... travaillait selon les plannings décidés par les anesthésistes titulaires, en fonction de leurs propres interventions au regard des sujétions résultant de l’exercice de leurs fonctions au sein de la clinique, qu’elle ne disposait d’aucune latitude d’organisation, qu’ils exerçaient ensemble le pouvoir d’organiser son emploi du temps en dehors des gardes de nuit, de dimanches et de jours fériés dès lors qu’il n’est pas contesté qu’elle n’interviendrait pas dans ce cadre ; que Madame X... n’est pas non plus utilement contredite quand elle fait écrire qu’elle disposait d’une latitude limitée pour les congés d’été puisqu’elle devait être présente dès la réouverture de la clinique, les anesthésistes titulaires ne prévoyant pas d’être présents à ce moment ; qu’il est également avéré que Madame X... ne pouvait se constituer une clientèle propre ; qu’outre que les vacations pouvaient lui être confiées tous les jours de la semaine, à l’initiative des médecins titulaires sans lui permettre d’organiser la mise en place de consultations personnelles et par suite de se constituer une clientèle propre dans un autre cadre, force est de relever qu’elle exerçait son activité auprès des quatre médecins anesthésistes, pour leur compte, les patients rencontrés étant en réalité les patients adressés par les chirurgiens aux quatre médecins titulaires ; qu’il doit être observé que les médecins, qu’ils soient salariés ou non, conservent toujours leur indépendance professionnelle au regard de l’acte médical qu’ils posent, que ce principe déontologique incontournable n’est pas exclusif d’un exercice salarié de la fonction si ce médecin est effectivement soumis à un lien de subordination en ce qui a trait à l’organisation de son travail, à la gestion administrative et financière de ses interventions ; que s’agissant de la rémunération, force est de relever que Madame X... percevait des revenus en fonction du nombre de vacations effectuées, celles-ci faisant l’objet d’une fixation forfaitaire décidée par les Docteurs A... et B... et les SELARL Y... et Z... à partir des recommandations du syndicat national des anesthésistes réanimateurs ainsi qu’ils l’admettent ; qu’ils font eux-mêmes valoir qu’il existait une masse commune d’honoraires ; qu’elle percevait aussi une part complémentaire de revenus, variable, correspondant à un pourcentage (10 %) des dépassements d’honoraires facturés aux patients ; que pendant plusieurs années, elle est intervenue pour le compte des SELARL Y..., Z... et du Docteur A..., tous en secteur 1 ; qu’à compter de janvier 2008, elle est aussi intervenue pour le compte du Docteur B..., exerçant en secteur 2 ; que soutenir qu’elle facturait librement ses dépassements d’honoraires, prérogative normalement attachée au médecin exerçant en libéral est dans ce contexte pour le moins inapproprié dans la mesure où, intervenant aux lieu et place des anesthésistes titulaires exerçant soit en secteur 1, soit en secteur 2, et conservant 90 % des dépassements opérés, il lui revenait en effet dans le cadre de la collaboration de tenir compte des attentes du titulaire en fonction du secteur choisi par chacun pour fixer les dépassements d’honoraires en fonction des situations financières des patients ; que Madame Marie Aude D..., attachée de gestion expose qu’elle avait pour mission de recueillir auprès des médecins remplaçants le montant de leurs dépassements d’honoraires qui devaient leur être rétrocédés en sus du montant de leurs vacations de remplacement, que Madame X... notait ses dépassements sur les feuilles de jour et lui en communiquaient le montant total, qu’elle la croyait sur parole sans vérifier la justesse de ses calculs ce qui était impossible car elle emportait ses feuilles de jour avec elle et qu’elle n’avait aucune copie ; que pour autant, les quatre intimés ont fait écrire que la part des dépassements d’honoraires revenant à Madame X... était limitée à 10 %, qu’il n’est pas pertinent de soutenir par la voie de ce témoignage qu’aucun contrôle n’était exercé sur les dépassements réglés par les patients ; qu’enfin, les intimés ne peuvent soutenir utilement qu’ils se sont limités à « répercuter » à Madame X... les erreurs commises par elle dans les cotations, alors que lesdites erreurs n’ont pas été dénoncées directement par la Haute autorité ou les organismes concernés au Docteur X..., mais aux titulaires, qu’ils l’ont interpellée après avoir opéré un contrôle des 15 dossiers remplis par elle et avoir relevé des erreurs dans un dossier sur deux ; qu’ils ont ainsi exercé un pouvoir de contrôle et de direction sur la gestion administrative des dossiers qui lui étaient confiés, légitimement d’ailleurs, dès lors qu’elle intervenait en leurs lieu et place et remplissait les documents à caractère administratif essentiellement pour leur compte ; qu’il s’ensuit que Madame X... a exercé ses fonctions dans le cadre d’un lien de subordination dès lors qu’elle ne disposait pas de la liberté d’organiser ses interventions directement en fonction des sujétions résultant de l’organisation de la clinique, mais qu’elle recevait des consignes de la part des quatre médecins, imposant les plannings et en l’affectant à telle ou telle vacation, qu’elle ne disposait pas de la possibilité de se constituer une clientèle propre, qu’elle devait remplir les dossiers administratifs des clients pour le compte des intimés, que la prétendue liberté de fixer le dépassement d’honoraires était en lien avec le choix du secteur du titulaire pour le compte duquel elle intervenait et qui conservait une partie importante des dépassements ; qu’enfin, les intimés ne peuvent soutenir que le refus opposé par Madame X... de signer des contrats de remplacement en janvier 2009, après qu’elle avait été priée de quitter le cabinet par l’un des médecins titulaires, pendant ou juste après une consultation, ce qu’aucun ne conteste utilement, est à l’origine de la cessation de toute collaboration avec Madame X... dès lors qu’ils ont postérieurement à ce renvoi de la clinique, tous subordonné la poursuite des interventions de celle-ci à cette signature, et qu’ils ont unilatéralement cessé de fournir du travail à Madame X... ; qu’ils communiquent aussi le témoignage déjà évoqué de Madame Marie Aude D... qui fait état des retards de Madame X... tant pour la prise de ses fonctions qu’au cours des vacations ; que ce témoin ajoute qu’à compter du mois de septembre 2008, le comportement de Madame X... a changé prenant avec légèreté et détachement les conséquences de ses multiples retards et l’embarras dans lequel elle mettait les patients et les collègues ; qu’en demandant d’abord à Madame X... de quitter la clinique puis en subordonnant la fourniture de travail et la poursuite de la relation professionnelle à la signature de contrats de remplacement, dans ce contexte décrit par le témoin, les intimés ont en réalité exercé leur pouvoir de sanction disciplinaire, en tant qu’employeur ; que la demande tendant à retenir la réalité d’un contrat de travail sera accueillie ; que, sur les demandes subséquentes, sur la demande d’indemnité compensatrice de congés payés sur la période non prescrite, que se fondant sur les sommes perçues au cours des années 2004 à 2008, Madame X... est fondée à solliciter 10 % des rémunérations correspondantes à l’indemnité compensatrice de congés payés soit 38 978, 80 euros, étant précisé que les intimés ne formulent aucune objection particulière sur le montant des sommes réclamées à cet égard se limitant à soutenir qu’elle ne peut réclamer des congés payés à défaut d’avoir exercé ses missions dans le cadre d’un lien de subordination ; que les SELARL Y..., Z... et le Docteur A... seront solidairement condamnés au paiement de cette somme de 38 978, 80 euros ; que le Docteur B... sera condamnée solidairement avec les trois autres intimés au paiement de la somme de 7 642, 90 euros au titre des congés payés pour l’année 2008 ; que sur la demande au titre des indemnités de rupture et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, qu’aux termes de la lettre que chacun des intimés a adressée à la salariée le 19 décembre 2008, force est de relever qu’ils ont contesté toute revendication salariale de la part de Madame X... sans formuler aucun grief la concernant ; que tout au plus, ont-ils expliqué que les remarques faites au sujet des problèmes de cotation résultent de « l’exigence légitime de conformité des prestations aux exigences des CPAM », et exprimé le « souhait que les explications fournies permettraient de rétablir des relations conformes à la sérénité qui avait jusque-là caractérisé leurs rapports professionnels » ; qu’en conclusion, chacun des intimés explique être disposé à régulariser des contrats de remplacement si Madame X... souhaitait continuer à le remplacer ; que cette lettre notifiant une rupture des relations professionnelles décidée unilatéralement par chacun des intimés dès lors que Madame X... n’acceptait pas de signer des contrats de remplacement, ne comporte aucun grief ; que la rupture est donc dépourvue de cause réelle et sérieuse ; que Madame X... est en conséquence fondée à réclamer les indemnités de rupture, c’est-à-dire une indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents et une indemnité de licenciement ainsi que des dommages et intérêts, en fonction du préjudice subi en application des dispositions de l’article L. 1235-5 du Code du travail ; que la moyenne des trois derniers mois de salaire dont le montant n’est pas discuté s’est élevée à la somme de 7 309, 30 euros, l’indemnité compensatrice de préavis correspondant en conséquence à la somme de 21 928 euros ; que les intimés seront solidairement condamnés au paiement de cette somme ainsi qu’à celle de 2 192, 80 euros au titre des congés payés afférents ; que l’indemnité de licenciement correspond à un cinquième de mois par année d’ancienneté et à un quinzième de mois par année d’ancienneté au-delà de 10 ans ; que Madame X... a débuté son activité auprès de l’équipe des anesthésistes de la clinique à compter de mars 1998 ; qu’elle avait une ancienneté de 10 ans et 9 mois lors de la rupture des relations contractuelles étant observé que la date de la rupture découle de la lettre valant lettre de licenciement ; que l’indemnité de licenciement s’élève donc à la somme de 14 965 euros, somme que les intimés seront condamnés solidairement à verser à Madame X... ; que sur la demande de dommage-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, que compte tenu de l’ancienneté de Madame X..., de sa qualité de son expérience professionnelle, de sa rémunération, des circonstances de la rupture, de ce qu’elle n’a pu percevoir aucune allocation de la part du Pôle emploi, qu’elle a pu exercer de nouveau son activité professionnelle auprès de l’Assistance Publique des hôpitaux de PARIS à compter du 1er mai 2009 mais avec une rémunération moindre, la Cour est en mesure de fixer à la somme de 100 000 euros le montant des dommages-intérêts à lui revenir en réparation du préjudice subi, ainsi que le prévoit l’article L. 1235-5 du Code du travail ; que sur les dommages-intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement, qu’il résulte des circonstances propres à l’espèce que Madame X... n’a effectivement pas été convoquée à un quelconque entretien préalable et n’a donc pu être assistée ; que le préjudice résultant nécessairement de l’absence d’entretien et surtout de l’assistance d’un conseiller justifie l’octroi d’une indemnité de 3 000 euros à ce titre ; que sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice distinct, que Madame X... est fondée à se prévaloir d’un préjudice distinct de celui qui résulte de la rupture de la relation de travail en raison du caractère brutal et vexatoire de son renvoi même si elle n’établit pas la réalité de faits laissant présumer un harcèlement moral, charge qui lui incombe normalement en application des dispositions des articles 1152-1 et suivants du Code du travail ; que ce préjudice sera justement réparé par l’allocation d’une somme de 5 000 euros ; que sur la demande de remise de bulletins de salaire, d’une attestation Pôle emploi et d’un certificat de travail, que cette demande de remise de documents sociaux est légitime ; qu’il y sera fait droit ; qu’aucune astreinte ne sera toutefois prononcée en l’absence de démonstration de circonstances particulières pertinentes la justifiant ;
ALORS QUE, D’UNE PART, le lien de subordination se caractérise par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné, sans avoir lui-même à en référer à quiconque ; que la Cour d’appel a expressément relevé que les Dr Y..., Z..., B... et A..., médecins anesthésistes à la Clinique du Louvre, étaient tenus par « les contraintes gérées par le chef de bloc », par « les contraintes extérieures » et « des sujétions résultant de l’exercice de leurs fonctions au sein de la clinique » (arrêt, p. 5, 6ème et 7ème considérants ; p. 6, 3ème considérant) ; qu’en retenant l’existence d’un lien de subordination et, partant, d’un contrat de travail entre leur remplaçante, le Dr X..., et eux-mêmes, la Cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales s’évinçant de ses propres constatations de ce que l’ensemble des médecins, qu’ils soient remplacés ou remplaçants, étaient soumis aux contraintes imposées par la Clinique du Louvre, a violé l’article L. 1221-1 du code du travail ;
ALORS QUE, D’AUTRE PART, la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu’en relevant tout à la fois que les Dr Y..., Z..., B... et A... étaient tenus par les contraintes gérées par le chef de bloc, les contraintes extérieures et des sujétions résultant de l’exercice de leurs fonctions au sein de la clinique (arrêt, p. 5, 6ème et 7ème considérants ; p. 6, 3ème considérant) et que ces quatre médecins imposaient les plannings à Mme X... (arrêt, p. 7, 7ème considérant), la Cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
ALORS, DE TROISIEME PART, QU’en retenant l’existence d’un lien de subordination entre le Dr X... et les Dr Y..., Z..., B... et A... sans examiner concrètement les conditions d’exercice du Dr X... qui profitait de l’infrastructure de l’établissement de santé privé en terme de personnels, de locaux, de produits et de matériels, et était assujettie à ses horaires, la Cour d’appel a derechef privé sa décision de toute base légale au regard de l’article L. 1221-1 du code du travail ;
ALORS, DE QUATRIEME PART, QU’en relevant, pour retenir l’existence d’un contrat de travail unissant le Dr X... aux Dr Y..., Z..., B... et A..., qu’elle n’avait pas de clientèle propre cependant que les médecins anesthésistes n’ont jamais de clientèle propre, la Cour d’appel a statué par un motif inopérant en violation de l’article L. 1221-1 du code du travail ;
ALORS, DE CINQUIEME PART, QUE seule la rémunération du médecin remplaçant fixée intégralement par le médecin remplacé ou par la clinique est un indice d’un lien de subordination ; que la Cour d’appel a expressément relevé (p. 6, 8ème considérant à la p. 7, 4ème considérant) que la partie complémentaire de revenus variables du Dr X... n’était pas fixée forfaitairement et unilatéralement par les médecins remplacés mais correspondait à un pourcentage de 10 % sur les dépassements facturés aux patients par elle-même dans des proportions librement arrêtées par cette dernière, sans aucune contrainte de la part des médecins remplacés ou de la Clinique ; qu’en retenant ce critère comme une manifestation de l’existence d’un contrat de travail, la Cour d’appel a violé l’article L. 1221-1 du code du travail ;
ALORS, ENFIN, QUE tout médecin, qu’il exerce à titre libéral ou salarié, est tenu de procéder à un codage de ses actes conforme aux cotations en vigueur ; qu’en relevant, pour retenir l’existence d’un contrat de travail unissant le Dr X... aux Dr Y..., Z..., B... et A..., que ces derniers ont exercé vis-à-vis d’elle un pouvoir de contrôle et de direction sur la gestion administrative des dossiers en lui reprochant des codifications erronées, la Cour d’appel a derechef statué à la faveur de motifs totalement inopérants et a violé l’article L. 1221-1 du code du travail ;
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR condamné solidairement la Selarl Y..., la Selarl Z... et le Dr A... à verser au Dr X... la somme de 38. 978, 80 ¿ au titre du rappel de congés payés sur la période 2004 à 2008 inclus et d’AVOIR condamné le Dr B..., solidairement avec la Selarl Y..., la Selarl Z... et le Dr A..., à régler au Dr X... la somme de 7. 642, 90 ¿ au titre des congés payés pour l’année 2008 ;
AUX MOTIFS QUE, sur la demande d’indemnité compensatrice de congés payés sur la période non prescrite, se fondant sur les sommes perçues au cours des années 2004 à 2008, Madame X... est fondée à solliciter 10 % des rémunérations correspondantes à l’indemnité compensatrice de congés payés soit 38 978, 80 euros, étant précisé que les intimés ne formulent aucune objection particulière sur le montant des sommes réclamées à cet égard se limitant à soutenir qu’elle ne peut réclamer des congés payés à défaut d’avoir exercé ses missions dans le cadre d’un lien de subordination ; que les SELARL Y..., Z... et le Docteur A... seront solidairement condamnés au paiement de cette somme de 38 978, 80 euros ; que le Docteur B... sera condamnée solidairement avec les trois autres intimés au paiement de la somme de 7 642, 90 euros au titre des congés payés pour l’année 2008 ;
ALORS QU’un préjudice ne peut pas être indemnisé deux fois ; qu’en condamnant deux fois les médecins à indemniser Mme X... au titre de ses congés payés pour l ¿ année 2008, la Cour d’appel a violé le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime, ensemble l’article 1382 du code civil ;
TROISIEME MOYEN DE CASSATION
Il est grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR condamné solidairement la Selarl Y..., la Selarl Z..., le Dr A... et le Dr B... à verser au Dr X... 5. 000 ¿ à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice distinct résultant des circonstances brutales et vexatoires de la rupture ;
AUX MOTIFS QUE sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice distinct, que Madame X... est fondée à se prévaloir d’un préjudice distinct de celui qui résulte de la rupture de la relation de travail en raison du caractère brutal et vexatoire de son renvoi même si elle n’établit pas la réalité de faits laissant présumer un harcèlement moral, charge qui lui incombe normalement en application des dispositions des articles 1152-1 et suivants du Code du travail ; que ce préjudice sera justement réparé par l’allocation d’une somme de 5 000 euros
ALORS QU’en se bornant à relever que Mme X... est fondée à se prévaloir d’un préjudice distinct de celui qui résulte de la rupture de la relation de travail en raison du caractère brutal et vexatoire de son renvoi sans caractériser les circonstances prétendument vexatoires ou brutales qui auraient précédé son départ, la Cour d’appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l’article 1382 du code civil.

Décision attaquée : Cour d’appel de Paris , du 13 septembre 2012