Travaux forestiers

Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 5 novembre 2014
N° de pourvoi : 13-83.911
ECLI:FR:CCASS:2014:CR05456
Non publié au bulletin
Solution : Rejet

Audience publique du mercredi 05 novembre 2014
Décision attaquée : Cour d’appel de Caen, du 06 mai 2013

Président
M. Guérin (président)
Avocat(s)
Me Foussard
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

 Mme Done X...,
 M. Murat X...,
 M. Celebi X...,
 M. Ahmet Y...,
 M. Ali X...,
 Mme Sevda X...,
 M. Tashin X...,
 M. Yusuf Z...,
 Mme Estelle X... épouse Z...,
 Mme Behiye X...,
 Mme Donus X... épouse Y...,

contre l’arrêt de la cour d’appel de CAEN, chambre correctionnelle, en date du 6 mai 2013, qui a condamné les deux premiers, pour homicide involontaire, infractions au code du travail et blanchiment, à deux ans d’emprisonnement, dont un an avec sursis, 40 000 euros d’amende et à l’interdiction définitive d’exercer une profession commerciale et de diriger une entreprise, les troisième et quatrième, pour infractions au code du travail et blanchiment, à un an d’emprisonnement avec sursis, 20 000 euros d’amende et cinq ans d’interdiction d’exercer une profession commerciale et de diriger une entreprise et qui, pour blanchiment, a condamné le cinquième à huit mois d’emprisonnement avec sursis, 20 000 euros d’amende et cinq ans d’interdiction d’exercer une profession commerciale et de diriger une entreprise, la sixième à huit mois d’emprisonnement avec sursis et 20 000 euros d’amende, le septième à 300 jours-amende à 100 euros, les huitième et neuvième à 10 000 euros d’amende, les deux dernières à 20 000 euros d’amende ;

La COUR, statuant après débats en l’audience publique du 24 septembre 2014 où étaient présents dans la formation prévue à l’article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, Mme Ract-Madoux, conseiller rapporteur, Mme Nocquet, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Zita ;

Sur le rapport de Mme le conseiller RACT-MADOUX, les observations de Me FOUSSARD, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général BONNET ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu le mémoire produit, commun aux demandeurs ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 407, 591 à 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs ;

" en ce que l’arrêt attaqué a déclaré les prévenus (MM. Done X..., Murat X..., Tashin X..., Célébi X..., Behiye X..., Yusuf Z..., Mme Estelle X... épouse Z..., M. Ahmet Y..., Mme Donus X..., épouse Y..., MM. Ali X..., Sevda X...) coupables des faits qui leur étaient reprochés et les a condamnés en répression à diverses peines ;

" aux motifs que l’affaire a été appelée en audience publique le 3 octobre 2012 en présence de M. Safder Baris B..., 29 ans, ¿, interprète en langue turque, qui a prêté serment « d’apporter son concours à la justice en son honneur et sa conscience » conformément à l’article 407 du code de procédure pénale, en présence de Erdenes Corbel, ¿ interprète en langue turque, qui a prêté serment « d’apporter son concours à la justice en son honneur et sa conscience » conformément à l’article 407 du code de procédure pénale, le recours à ces deux interprètes étant nécessaire pour l’ensemble des débats, certains des prévenus, des témoins et des parties civiles ne maîtrisant pas la langue française » ;

" alors que, l’interprète, lorsqu’il est nécessaire, doit être désigné par le président de la juridiction et que faute de constater que tel a été le cas des deux interprètes qui sont intervenus au cours des débats, l’arrêt est insuffisant au regard des textes susvisés " ;

Attendu que les énonciations de l’arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s’assurer que le recours, pour l’ensemble des débats, à deux interprètes en langue turque a été décidé conformément aux exigences de l’article 407 du code de procédure pénale ;

Que le moyen ne peut donc être admis ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris des articles 121-3 et 221-6 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs ;

" en ce que l’arrêt attaqué, revenant sur la relaxe prononcée en première instance, a déclaré M. Murat X... coupable d’homicide involontaire et l’a condamné en répression à deux ans d’emprisonnement dont un an d’emprisonnement ferme outre 40 000 euros d’amende et une interdiction définitive d’exercer une profession commerciale ou de gérer ;

" aux motifs que le 30 Octobre 2003, Veysel C..., de nationalité turque, marié et père de famille, a été déposé vers 11 heures à l’hôpital de Verneuil par un compatriote, M. D..., qui a pu être identifié grâce à un médecin qui avait relevé la plaque d’immatriculation du véhicule Renault 21 qu’il conduisait dont le certificat d’immatriculation est au nom de M. Done X..., qui n’est pas titulaire du permis de conduire ; que grièvement blessé à la tête, M. Veysel C...faisait un arrêt cardio-respiratoire, semble-t-il, dans la cour de l’hôpital ; que les médecins réussissaient à le réanimer et la plaie frontale qu’il présentait était suturée ; que son état grave exigeait son transfert par hélicoptère à l’hôpital de Rouen où il décédait le 7 novembre 2003 ; que son rapport, le docteur E..., chef de clinique de médecine légale au CHU de Rouen, requis par le parquet, indiquait que la lecture du dossier médical, les examens complémentaires réalisés et notamment le scanner cranio-encéphalique, les constatations faites au cours de l’autopsie, avaient mis en évidence que Veysel C...avait été victime d’un traumatisme crânien à l’origine d’une fracture frontale, d’un fracas du massif facial, d’une atteinte de l’étage antérieur et d’un traumatisme cérébral avec contusion et hémorragie méningée ; qu’il ajoutait que l’évolution avait été émaillée d’un arrêt cardio-respiratoire, et surtout d’un oedème cérébral, à l’origine du décès. ; qu’il faisait état d’un état cardiovasculaire pathologique éventuel qui aurait pu participer au décès ; que le docteur F..., médecin légiste à Caen, commise comme expert, après avoir rappelé que le docteur E...n’avait constaté aucune trace de blessure pouvant faire évoquer des violences provoquées par un tiers et en particulier aucune lésion de prise et de défense, a conclu que le décès de Veysel C...était secondaire à d’importantes lésions encéphaliques consécutives à un violent traumatisme crânio-facial avec un point d’impact en région frontale antérieure paramédiane gauche. ; que selon cet expert, ces lésions avaient vraisemblablement pu être produites par une chute, un choc et/ ou un coup respectivement sur, contre et/ ou par un objet contondant ; que la famille de Veysel C...était informée dans la matinée par M. Mesut D...de l’accident ; que ce jour-là à 12 heures 10, les services de la Mutualité sociale agricole (MSA) recevaient un appel téléphonique, en français, d’un interlocuteur, qui faisait part de l’embauche le matin même de Veysel C...par M. Célébi X... ; qu’était adressée à la MSA une enveloppe doublement oblitérée à deux dates différentes (un tampon manuel du 29 octobre 2003 et trois tampons d’oblitération automatique du 30 octobre 2003) contenant, notamment, une déclaration unique d’embauché au nom de Veysel C...en date du 29 octobre 2003, une déclaration préalable à l’embauche de Veysel C...en date du 30 octobre 2003, une déclaration d’accident de travail au nom de Veysel C...en date du 2 novembre 2003 ; que le contrat de travail à durée indéterminée en date du 29 octobre 2003 souscrit entre M. Done X... et Veysel C...n’était pas signé ; que souhaitant obtenir des informations précises sur la véritable identité de l’employeur, la MSA contactait par téléphone M. Done X..., qui, ne maîtrisant pas la langue Française, orientait son interlocuteur vers M. Donus X... qui confirmait l’embauche de Veysel C...par M. Done X... ; qu’entendus le 5 décembre 2003 par le contrôleur de la MSA, les membres de la famille C...fournissaient une toute autre version et indiquaient que Veysel C..., qui percevait le revenu minimum d’insertion (RMI) après avoir déposé le bilan de son entreprise de bûcheronnage le 30 juin 2002, avait débuté son activité au sein de l’entreprise X... quelques jours avant l’accident ; que M. Murat X..., intervenu comme représentant de l’employeur devant les services de la MSA de l’Orne, prenait soin de signer le procès-verbal d’enquête établi en mentionnant sa qualité de témoin des faits après avoir déclaré qu’il avait, dans la matinée du 30 octobre 2003, visité le chantier en forêt de Montigny sur Avre avec Veysel C...quand ce dernier avait reçu une branche sur la tête ; que le parquet d’Alençon était avisé de ces faits fin décembre par la MSA qui n’avait pu, compte-tenu de ce qui précède, faire de constatations sur les lieux du chantier sur lequel Veysel C...se trouvait au moment de l’accident, susceptibles de correspondre à un chantier situé à Montigny-sur-Avre, à quelques kilomètres de Verneuil-sur-Avre ; qu’on ne sait des circonstances de l’accident que ce que MM. Murat X... et Mesut D..., cité comme témoin par les parties civiles, a pu dire malgré les pressions qu’il a subies de la part de la famille X... ; que M. Mesut D...a ainsi déclaré au cours des débats devant la cour qu’il travaillait depuis 99 jours sur un chantier avec Adil, son frère, en situation irrégulière en France, ainsi qu’avec Veysel C...quand un arbre est tombé sur ce dernier ; qu’il a indiqué que c’était M. Murat X... qui l’avait embauché sans le déclarer, a précisé qu’il était payé en espèces, que la tronçonneuse lui appartenait et qu’il ne leur avait été remis ni casque, ni gants ; qu’il a précisé que Veysel C...portait des chaussures de sécurité ; qu’il a déclaré que ce chantier leur avait été montré par M. Murat X... qui était allé avec lui le soir même de l’accident sur le chantier afin d’aller y chercher les tronçonneuses laissées sur place ; qu’au cours de l’enquête diligentée par la gendarmerie, M. Hanife I...déclarait qu’à l’époque de l’accident, son mari, Veysel C..., travaillait déjà depuis environ deux mois pour la famille X... en compensation d’une dette de trois mille euros qu’il avait envers M. Tashin X... ; qu’elle indiquait que son mari était embauché par l’entreprise de Done X..., qui semblait être dirigée en fait par son mari M. Tashin X... et par son fils aîné M. Murat X... ; qu’elle déclarait que M. Mesut D...venait chercher Veysel C...tous les matins à son domicile pour l’emmener sur les chantiers ; qu’elle expliquait qu’à l’hôpital de Verneuil, M. Mesut D...avait juste eu le temps de lui dire qu’une branche était tombée sur son mari avant que M. Murat X..., lui aussi sur place, intervienne auprès d’elle pour lui demander de taire aux enquêteurs la présence sur le chantier des frères D... ; qu’Ibrahim C...confirmait que son père avait été embauché avant l’accident par l’intermédiaire de M. Murat X... qui s’était ultérieurement déplacé à leur domicile pour proposer de l’argent en échange de leur silence ; que les déclarations de l’épouse de Veysel C...étaient confirmées par celles de ses enfants Yesim C...et Ibrahim C... ; que dans un premier temps, M. Murat X... déclarait que c’était lui qui avait déposé Veysel C..., embauché le matin même par sa mère, à l’hôpital alors qu’il venait d’être blessé à la tête par une branche sur un chantier, qu’il était en train de lui montrer. Les déclarations initiales de Murat X... étaient invalidées par les éléments recueillis au cours de l’enquête, selon lesquels il se trouvait sur un chantier en Seine Maritime avec Vahit G..., lui aussi employé de manière clandestine, quand il avait été avisé par un appel téléphonique de l’accident survenu à Veysel C... ; qu’interrogé par le juge d’instruction, il convenait qu’il ne se trouvait pas sur le chantier avec Veysel C...mais, malgré les nombreuses auditions recueillies tant auprès de sa famille que de salariés ou encore de clients de l’entreprise, selon lesquelles il en était le véritable patron, M. Murat X... se limitait à dire qu’il avait rendu service à sa mère en visitant quelques chantiers ou en finalisant des contrats avec des clients ; que Mme Done X..., gérante de l’entreprise depuis le premier mars 2002, déclarait que Veysel C...avait sollicité du travail auprès de son fils Murat X... et qu’elle avait accepté de l’embaucher ; qu’elle affirmait qu’elle l’avait déclaré à la MSA la veille de l’accident ; qu’il résulte du dossier que Mme Done X..., mère de famille, ne sachant ni lire, ni écrire, ni parler la langue Française, a repris l’activité de son mari Mme Tashin X..., en devenant gérante de l’entreprise le lendemain de la cessation d’activité de son mari, qui a perçu à compter de cette date une pension d’invalidité pour la perte d’un oeil suite à l’abattage d’un arbre ; qu’elle a toujours affirmé que c’était elle qui dirigeait effectivement l’entreprise alors même qu’il résulte de l’enquête que c’était son fils aîné M. Murat X..., qui le nie, qui en était le gérant de fait, à tel point que c’est lui qui a été identifié sur photographie par un client de l’entreprise comme étant Mme Done X... ; que c’est encore lui, ainsi qu’il l’a reconnu, qui a posté la déclaration d’embauché de Veysel C...ou, encore, qui s’est rendu à la convocation de la MSA le 5 décembre 2003 ; qu’à l’audience devant la cour, Mme Done X... persistait à se présenter comme étant la responsable de l’entreprise en affirmant qu’elle dirigeait sur les chantiers alors même qu’il est établi que, lorsqu’il lui arrivait de s’y rendre avec Mme Murat X..., elle restait dans la voiture. Comme l’avait indiqué la veuve de Veysel C..., Mme Done X... déclarait que ce dernier travaillait pour son entreprise pour rembourser une dette qu’il avait suite au prêt que son mari M. Tashin X... et elle-même lui avaient consenti. Interrogée au cours des débats devant la cour sur le lieu du chantier où l’accident dont Veysel C...avait été victime, Mme Done X... était incapable de le situer, d’indiquer le nombre de salariés de son entreprise qui s’y trouvaient, ajoutant qu’il arrivait que des salariés de son entreprise amènent sur les chantiers d’autres personnes ; qu’après avoir déclaré qu’elle avait remis à Veysel C..., comme elle avait l’habitude de le faire pour chacun de ses salariés, un pantalon, des chaussures et un casque, confrontée aux déclarations de Mme Hanife I...veuve C...selon lesquelles son mari avait, à l’exception du casque, tout son matériel, Mme Done X... concédait que Veysel C...avait tout son matériel ; que Mme Done X... affirmait à la fois que c’était elle qui donnait les consignes de sécurité, sans forcément aller sur les chantiers mais qu’elle envoyait ses salariés et ses beaux-fils afin que le travail commence, ce qui revient à dire qu’il n’y avait aucune règle de sécurité définie préalablement au début du chantier alors que Mme Done X..., dont le mari avait été grièvement blessé en abattant un arbre, connaissait parfaitement les risques liés à l’exercice de cette activité de bûcheron ; que manifestement consciente de la gravité des faits à l’origine de la mort de Veysel C..., Mme Done X..., au moment de son interpellation, demandait à sa belle-fille, présente sur les lieux, de ne rien dire ; que vraisemblablement pour protéger son fils Mme Murat X... mais aussi l’ensemble de sa famille, Mme Done X... a toujours revendiqué son rôle de gérante de l’entreprise qui, au-delà du fait qu’elle ne maîtrisait pas du tout la langue française, était un rôle de simple façade puisqu’elle devait faire appel à ses enfants et/ ou beaux-enfants pour la faire fonctionner, étant observé qu’i résulte du dossier et notamment des éléments rappelés ci-dessus que M. Murat X... était le gérant de fait de l’entreprise, dont, au demeurant, les fruits profitaient à toute la famille X... ; que Mme Done X... et M. Murat X... ne contestent pas que l’accident dont Veysel C...a été mortellement victime est le résultat de la chute d’une branche sur sa tête sur un chantier où il travaillait conformément à l’ordre que Mme Done X... dit lui avoir donné. ; queM. Murat X... déclare que c’est lui qui a présenté à Veysel C...ce chantier ; que tous deux affirment qu’il était régulièrement déclaré comme salarié depuis la veille ; qu’audelà de savoir si Veysel C...portait ou non un casque de protection pour travailler sur ce chantier, qui par nature était dangereux, force est de constater notamment à la lumière des débats devant la cour, qu’il n’y avait aucune règle de sécurité définie préalablement au départ du chantier, aucune évaluation des risques, aucune consigne particulière donnée à Veysel C...alors même que M. Murat X... a pourtant indiqué que le jour de l’accident il y avait du vent ; que si aucune constatation n’a pu être effectuée sur les lieux de l’accident, dont il a été permis d’apprendre les circonstances grâce au témoignage de M. Mesut D..., c’est tout simplement parce qu’il n’a pas été porté à la connaissance des autorités auxquelles il aurait pourtant dû l’être par son employeur ; qu’il en résulte que les faits d’homicide involontaire sur Veysel C...reprochés tant à Mme Done X... qu’à M. Murat X..., qui ont failli aux obligations élémentaires de sécurité, sont caractérisés et qu’ils doivent en être déclarés coupables » ;

" 1°) alors qu’en retenant que M. Murat X... avait la qualité de dirigeant de fait de l’entreprise sans constater préalablement que le ministère public rapportait la preuve qu’il avait le pouvoir d’accomplir, dans le cadre de cette entreprise, tous les actes relevant normalement de la compétence du chef d’entreprise, les juges du fond ont entaché leur décision d’une insuffisance de motifs ;

" 2°) alors que la conscience du danger concerne, non pas l’activité elle-même comme l’ont cru les juges du second degré, mais la faute caractérisée imputée au prévenu, ce qui a été perdu de vue et qu’à cet égard également, l’arrêt est entaché d’une insuffisance de motifs, notamment au regard de l’article 121-3 du code pénal ;

" 3°) et alors que, et en tout cas, lorsque sans causer directement le dommage, une personne physique a créé ou contribué à créer une situation qui a permis la réalisation du dommage, ou n’a pas pris les mesures permettant de l’éviter, les juges du fond doivent constater que le ministère public rapporte la preuve qu’elle a violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par les lois et règlements, ou commis une faute caractérisée exposant autrui à un risque d’une particulière gravité qu’elle ne pouvait ignorer ; qu’en se bornant à énoncer qu’il n’y avait aucune règle de sécurité définie préalablement à l’ouverture des chantiers, aucune évaluation des risques, aucune consigne particulière donnée et que M. Murat X... a failli aux obligations élémentaires de sécurité, sans constater soit qu’il avait violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence et de sécurité prévue par les lois et règlements, soit commis une faute caractérisée exposant autrui à un risque d’une particulière gravité qu’il ne pouvait ignorer, les juges du second degré ont entaché leur décision d’une insuffisance de motifs au regard des textes susvisés et notamment au regard de l’article 121-3 du code pénal " ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation 121-3 et 221-6 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs

" en ce que l’arrêt attaqué, infirmant le jugement entrepris, a déclaré M. Done X... coupable d’homicide involontaire et l’a condamnée à deux ans d’emprisonnement dont un an avec sursis et 40 000 euros d’amende ;

" aux motifs que le 30 Octobre 2003, Veysel C..., de nationalité turque, marié et père de famille, a été déposé vers 11 heures à l’hôpital de Verneuil par un compatriote ; que M. Mesut D..., qui a pu être identifié grâce à un médecin qui avait relevé la plaque d’immatriculation du véhicule Renault 21 qu’il conduisait dont le certificat d’immatriculation est au nom de Mme Done X..., qui n’est pas titulaire du permis de conduire ; que grièvement blessé à la tête, Veysel C...faisait un arrêt cardio-respiratoire, semble-t-il, dans la cour de l’hôpital ; que les médecins réussissaient à le réanimer et la plaie frontale qu’il présentait était suturée ; que son état grave exigeait son transfert par hélicoptère à l’hôpital de Rouen où il décédait le 7 novembre 2003 ; que son rapport, le docteur E..., chef de clinique de médecine légale au CHU de Rouen, requis par le parquet, indiquait que la lecture du dossier médical, les examens complémentaires réalisés et notamment le scanner cranio-encéphalique, les constatations faites au cours de l’autopsie, avaient mis en évidence que Veysel C...avait été victime d’un traumatisme crânien à l’origine d’une fracture frontale, d’un fracas du massif facial, d’une atteinte de l’étage antérieur et d’un traumatisme cérébral avec contusion et hémorragie méningée ; qu’il ajoutait que l’évolution avait été émaillée d’un arrêt cardio-respiratoire, et surtout d’un oedème cérébral, à l’origine du décès. ; qu’il faisait état d’un état cardiovasculaire pathologique éventuel qui aurait pu participer au décès ; que le docteur F..., médecin légiste à Caen, commise comme expert, après avoir rappelé que le docteur E...n’avait constaté aucune trace de blessure pouvant faire évoquer des violences provoquées par un tiers et en particulier aucune lésion de prise et de défense, a conclu que le décès de Veysel C...était secondaire à d’importantes lésions encéphaliques consécutives à un violent traumatisme crânio-facial avec un point d’impact en région frontale antérieure paramédiane gauche. ; que selon cet expert, ces lésions avaient vraisemblablement pu être produites par une chute, un choc et/ ou un coup respectivement sur, contre et/ ou par un objet contondant ; que la famille de Veysel C...était informée dans la matinée par M. Mesut D...de l’accident ; que ce jour-là à 12hl0, les services de la Mutualité sociale agricole (MSA) recevaient un appel téléphonique, en français, d’un interlocuteur, qui faisait part de l’embauche le matin même de Veysel C...par Célébi X... ; qu’était adressée à la MSA une enveloppe doublement oblitérée à deux dates différentes (un tampon manuel du 29 octobre 2003 et trois tampons d’oblitération automatique du 30 octobre 2003) contenant, notamment, une déclaration unique d’embauché au nom de Veysel C...en date du 29 octobre 2003, une déclaration préalable à l’embauche de Veysel C...en date du 30 octobre 2003, une déclaration d’accident de travail au nom de Veysel C...en date du 2 novembre 2003 ; que le contrat de travail à durée indéterminée en date du 29 octobre 2003 souscrit entre Mme Done X... et Veysel C...n’était pas signé ; que souhaitant obtenir des informations précises sur la véritable identité de l’employeur, la MSA contactait par téléphone Mme Done X..., qui, ne maîtrisant pas la langue française, orientait son interlocuteur vers Donus X... qui confirmait l’embauche de Veysel C...par Mme Done X... ; qu’entendus le 5 décembre 2003 par le contrôleur de la MSA, les membres de la famille C...fournissaient une toute autre version et indiquaient que Veysel C..., qui percevait le revenu minimum d’insertion (RMI) après avoir déposé le bilan de son entreprise de bûcheronnage le 30 juin 2002, avait débuté son activité au sein de l’entreprise X... quelques jours avant l’accident ; que M. Murat X..., intervenu comme représentant de l’employeur devant les services de la MSA de l’Orne, prenait soin de signer le procès-verbal d’enquête établi en mentionnant sa qualité de témoin des faits après avoir déclaré qu’il avait, dans la matinée du 30 octobre 2003, visité le chantier en forêt de Montigny sur Avre avec Veysel C...quand ce dernier avait reçu une branche sur la tête ; que le parquet d’Alençon était avisé de ces faits fin décembre par la MSA qui n’avait pu, compte-tenu de ce qui précède, faire de constatations sur les lieux du chantier sur lequel Veysel C...se trouvait au moment de l’accident, susceptibles de correspondre à un chantier situé à Montigny-sur Avre, à quelques kilomètres de Verneuil-sur-Avre ; qu’on ne sait des circonstances de l’accident que ce que MM. Murat X... et Mesut D..., cité comme témoin par les parties civiles, a pu dire malgré les pressions qu’il a subies de la part de la famille X... ; que M. Mesut D...a ainsi déclaré au cours des débats devant la cour qu’il travaillait depuis 99 jours sur un chantier avec Adil, son frère, en situation irrégulière en France, ainsi qu’avec Veysel C...quand un arbre est tombé sur ce dernier ; qu’il a indiqué que c’était M. Murat X... qui l’avait embauché sans le déclarer, a précisé qu’il était payé en espèces, que la tronçonneuse lui appartenait et qu’il ne leur avait été remis ni casque, ni gants ; qu’il a précisé que Veysel C...portait des chaussures de sécurité ; qu’il a déclaré que ce chantier leur avait été montré par M. Murat X... qui était allé avec lui le soir même de l’accident sur le chantier afin d’aller y chercher les tronçonneuses laissées sur place ; qu’au cours de l’enquête diligentée par la gendarmerie, M. Hanife I...déclarait qu’à l’époque de l’accident, son mari, Veysel C..., travaillait déjà depuis environ deux mois pour la famille X... en compensation d’une dette de trois mille euros qu’il avait envers M. Tashin X... ; qu’elle indiquait que son mari était embauché par l’entreprise de Mme Done X..., qui semblait être dirigée en fait par son mari M. Tashin X... et par son fils aîné M. Murat X... ; qu’elle déclarait que M. Mesut D...venait chercher Veysel C...tous les matins à son domicile pour l’emmener sur les chantiers ; qu’elle expliquait qu’à l’hôpital de Verneuil, M. Mesut D...avait juste eu le temps de lui dire qu’une branche était tombée sur son mari avant que M. Murat X..., lui aussi sur place, intervienne auprès d’elle pour lui demander de taire aux enquêteurs la présence sur le chantier des frères D... ; qu’Ibrahim C...confirmait que son père avait été embauché avant l’accident par l’intermédiaire de M. Murat X... qui s’était ultérieurement déplacé à leur domicile pour proposer de l’argent en échange de leur silence ; que les déclarations de l’épouse de Veysel C...étaient confirmées par celles de ses enfants Yesim C...et Ibrahim C... ; que dans un premier temps, M. Murat X... déclarait que c’était lui qui avait déposé Veysel C..., embauché le matin même par sa mère, à l’hôpital alors qu’il venait d’être blessé à la tête par une branche sur un chantier, qu’il était en train de lui montrer. Les déclarations initiales de M. Murat X... étaient invalidées par les éléments recueillis au cours de l’enquête, selon lesquels il se trouvait sur un chantier en Seine Maritime avec Vahit G..., lui aussi employé de manière clandestine, quand il avait été avisé par un appel téléphonique de l’accident survenu à Veysel C... ; qu’interrogé par le juge d’instruction, il convenait qu’il ne se trouvait pas sur le chantier avec Veysel C...mais, malgré les nombreuses auditions recueillies tant auprès de sa famille que de salariés ou encore de clients de l’entreprise, selon lesquelles il en était le véritable patron, Mme Murat X... se limitait à dire qu’il avait rendu service à sa mère en visitant quelques chantiers ou en finalisant des contrats avec des clients ; que Mme Done X..., gérante de l’entreprise depuis le premier mars 2002, déclarait que Veysel C...avait sollicité du travail auprès de son fils M. Murat X... et qu’elle avait accepté de l’embaucher ; qu’elle affirmait qu’elle l’avait déclaré à la MSA la veille de l’accident ; qu’il résulte du dossier que Mme Done X..., mère de famille, ne sachant ni lire, ni écrire, ni parler la langue française, a repris l’activité de son mari M. Tashin X..., en devenant gérante de l’entreprise le lendemain de la cessation d’activité de son mari, qui a perçu à compter de cette date une pension d’invalidité pour la perte d’un oeil suite à l’abattage d’un arbre ; qu’elle a toujours affirmé que c’était elle qui dirigeait effectivement l’entreprise alors même qu’il résulte de l’enquête que c’était son fils aîné M. Murat X..., qui le nie, qui en était le gérant de fait, à tel point que c’est lui qui a été identifié sur photographie par un client de l’entreprise comme étant Mme Done X... ; que c’est encore lui, ainsi qu’il l’a reconnu, qui a posté la déclaration d’embauché de Veysel C...ou, encore, qui s’est rendu à la convocation de la MSA le 5 décembre 2003 ; qu’à l’audience devant la cour, Mme Done X... persistait à se présenter comme étant la responsable de l’entreprise en affirmant qu’elle dirigeait sur les chantiers alors même qu’il est établi que, lorsqu’il lui arrivait de s’y rendre avec M. Murat X..., elle restait dans la voiture. Comme l’avait indiqué la veuve de Veysel C..., Mme Done X... déclarait que ce dernier travaillait pour son entreprise pour rembourser une dette qu’il avait suite au prêt que son mari M. Tashin X... et elle-même lui avaient consenti ; qu’interrogée au cours des débats devant la cour sur le lieu du chantier où l’accident dont Veysel C...avait été victime, Mme Done X... était incapable de le situer, d’indiquer le nombre de salariés de son entreprise qui s’y trouvaient, ajoutant qu’il arrivait que des salariés de son entreprise amènent sur les chantiers d’autres personnes ; qu’après avoir déclaré qu’elle avait remis à Veysel C..., comme elle avait l’habitude de le faire pour chacun de ses salariés, un pantalon, des chaussures et un casque, confrontée aux déclarations de Mme Hanife I...veuve C...selon lesquelles son mari avait, à l’exception du casque, tout son matériel, Mme Done X... concédait que Veysel C...avait tout son matériel ; que Mme Done X... affirmait à la fois que c’était elle qui donnait les consignes de sécurité, sans forcément aller sur les chantiers mais qu’elle envoyait ses salariés et ses beaux-fils afin que le travail commence, ce qui revient à dire qu’il n’y avait aucune règle de sécurité définie préalablement au début du chantier alors que Mme Done X..., dont le mari avait été grièvement blessé en abattant un arbre, connaissait parfaitement les risques liés à l’exercice de cette activité de bûcheron ; que manifestement consciente de la gravité des faits à l’origine de la mort de Veysel C..., Mme Done X..., au moment de son interpellation, demandait à sa belle-fille, présente sur les lieux, de ne rien dire ; que vraisemblablement pour protéger son fils M. Murat X... mais aussi l’ensemble de sa famille, Mme Done X... a toujours revendiqué son rôle de gérante de l’entreprise qui, au-delà du fait qu’elle ne maîtrisait pas du tout la langue française, était un rôle de simple façade puisqu’elle devait faire appel à ses enfants et/ ou beaux-enfants pour la faire fonctionner, étant observé qu’i résulte du dossier et notamment des éléments rappelés ci-dessus que M. Murat X... était le gérant de fait de l’entreprise, dont, au demeurant, les fruits profitaient à toute la famille X... ; que Mme Done X... et M. Murat X... ne contestent pas que l’accident dont Veysel C...a été mortellement victime est le résultat de la chute d’une branche sur sa tête sur un chantier où il travaillait conformément à l’ordre que Mme Done X... dit lui avoir donné. ; que M. Murat X... déclare que c’est lui qui a présenté à Veysel C...ce chantier ; que tous deux affirment qu’il était régulièrement déclaré comme salarié depuis la veille ; qu’audelà de savoir si Veysel C...portait ou non un casque de protection pour travailler sur ce chantier, qui par nature était dangereux, force est de constater notamment à la lumière des débats devant la cour, qu’il n’y avait aucune règle de sécurité définie préalablement au départ du chantier, aucune évaluation des risques, aucune consigne particulière donnée à Veysel C...alors même que M. Murat X... a pourtant indiqué que le jour de l’accident il y avait du vent ; que si aucune constatation n’a pu être effectuée sur les lieux de l’accident, dont il a été permis d’apprendre les circonstances grâce au témoignage de M. Mesut D..., c’est tout simplement parce qu’il n’a pas été porté à la connaissance des autorités auxquelles il aurait pourtant dû l’être par son employeur ; qu’il en résulte que les faits d’homicide involontaire sur Veysel C...reprochés tant à Mme Done X... qu’à M. Murat X..., qui ont failli aux obligations élémentaires de sécurité, sont caractérisés et qu’ils doivent en être déclarés coupables » ;

" 1°) alors que, et en tout cas, lorsque sans causer directement le dommage, une personne physique a créé ou contribué à créer une situation qui a permis la réalisation du dommage, ou qui n’a pas pris les mesures permettant de l’éviter, les juges du fond doivent constater que le ministère public rapporte la preuve qu’elle a violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par les lois et règlements, ou commis une faute caractérisée exposant autrui à un risque d’une particulière gravité qu’elle ne pouvait ignorer ; qu’en se bornant à énoncer qu’il n’y avait aucune règle de sécurité définie préalablement pour les chantiers, aucune évaluation des risques, aucune consigne particulière donnée et que Mme Done X... a failli aux obligations élémentaires de sécurité, sans constater que le ministère public produisait des éléments propres à établir, soit que Mme Done X... avait violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par les lois et règlements, soit qu’elle avait commis une faute caractérisée et qu’elle ne pouvait ignorer qu’elle exposait ainsi la victime à un risque d’une particulière gravité, les juges du fond ont entaché leur décision d’une insuffisance de motifs au regard des textes susvisés et notamment de l’article 121-3 du code pénal ;

" 2°) alors que, la conscience du danger concerne, non pas l’activité elle-même, comme l’ont cru les juges du second degré, mais la faute caractérisée imputée au prévenu, ce qui a été perdu de vue ; qu’à cet égard également, l’arrêt est entaché d’une insuffisance de motifs, notamment au regard de l’article 121-3 du code de procédure pénale ;

" 3° alors que, les juges du fond ne pouvaient, sans se contredire, estimer que Mme Done X..., ne sachant ni lire ni écrire, ni parler la langue française, n’avait selon eux qu’un rôle de façade et considéré par ailleurs que l’homicide involontaire lui était imputable quand il supposait soit la violation manifestement délibérée des obligations de prudence ou de sécurité prévues par la loi ou le règlement, soit une faute caractérisée avec conscience que cette faute exposait autrui à un risque d’une particulière gravité ; qu’en statuant ainsi, les juges du fond se sont prononcés par des motifs contradictoires et ont violé les textes susvisés " ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que Mme Done X... et son fils M. Murat X... sont poursuivis, à la suite du décès d’un employé de leur entreprise forestière causé par la chute d’un arbre, du chef d’homicide involontaire pour avoir manqué à une obligation de sécurité imposée par la loi ;

Attendu que, pour déclarer les prévenus coupables de ce délit en qualité, respectivement, de gérante de droit et de gérant de fait de l’entreprise, l’arrêt énonce que la première, ne sachant ni lire ni écrire ni parler la langue française, a succédé à son mari, qui perçoit une pension d’invalidité pour la perte d’un oeil à la suite de l’abattage d’un arbre et connaissait parfaitement les risques liés à l’activité de bûcheron, et que l’enquête a démontré que son fils aîné apparaissait comme le véritable dirigeant aux yeux des membres de la famille, des clients et des employés, qu’il embauchait et auxquels il assignait les tâches à accomplir ; que les juges relèvent qu’il n’y a eu aucune règle de sécurité définie avant le départ du chantier, aucune évaluation des risques, aucune consigne particulière donnée à la victime, alors même que, le jour de l’accident, il y avait du vent ; qu’ils en déduisent que les deux prévenus ont failli aux obligations élémentaires de sécurité ;

Attendu qu’en l’état de ces énonciations, exemptes d’insuffisance comme de contradiction et d’où il résulte que Mme Done X... et M. Murat X..., gérants de droit et de fait de l’entreprise, qui ont contribué à créer la situation ayant permis la réalisation du dommage, ont commis, au sens de l’article 121-3 du code pénal, une faute caractérisée ayant exposé autrui à un risque d’une particulière gravité qu’ils ne pouvaient ignorer, la cour d’appel a justifié sa décision ;

D’où il suit que les moyens doivent être écartés ;

Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 8221-1 et L. 8221-5, L. 8224-1, L. 8224-3 et L. 8224-4 du code du travail (anciens articles L. 324-9, L. 324-10, L. 324-11, L. 362-3, L. 362-4, L. 362-5), L. 8251-1, L. 8256-2, L. 8256-3, L. 8256-4, L. 8256-6 du code du travail (anciens articles L. 341-2, L. 341-6, L. 364-3, L. 364-8 et L. 364-9) 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs ;

" en ce que l’arrêt attaqué a déclaré M. Murat X... et M. Done X... coupables d’avoir omis de procéder à la déclaration nominative d’embauche puis déclaré ces mêmes personnes coupables d’emploi d’étrangers non autorisé à exercer une activité salariée en France, ensemble les a condamnés en répression à deux ans d’emprisonnement dont un an ferme et 40 000 euros d’amende ;

" aux motifs que compte-tenu des développements qui précèdent établissant la qualité de gérant de fait de M. Murat X..., les faits qui lui sont reprochés doivent s’analyser de la même manière que ceux concernant sa mère ; que Mme Done X..., qui était gérante de droit de l’entreprise ; qu’il leur est à tous les deux reproché :- d’avoir à Saint Sulpice sur Risle dans le département de l’Orne et en tout cas sur le territoire national, entre le 1 janvier 2003 et le 15 février 2006, étant employeur, omis intentionnellement de procéder à la déclaration nominative à l’embauche ;- d’avoir dans les mêmes circonstances de temps et de lieu, directement ou par personne interposée, engagé, conservé à son service ou employé pour quelque durée que ce soit des étrangers non munis d’un titre les autorisant à exercer une activité salariée en France ; qu’il résulte du dossier que ces infractions sont caractérisées à leur encontre ; que M. Murat X... a déclaré que s’il avait menti dans un premier temps au sujet de l’accident du travail dont a été victime Veysel C..., c’est parce qu’il ne voulait pas mettre en difficulté M. Mesut D..., qui travaillait sur le même chantier sans être déclaré ; que M. Mesut D..., qui indiquait avoir travaillé pendant six à sept mois en 2003 sans être déclarera dit que sur ce chantier travaillait aussi sans être déclaré son frère Ali D..., qui était de surcroît en situation irrégulière en France ; qu’il sera aussi fait référence aux déclarations de Vahit G..., qui travaillait clandestinement sur un chantier avec M. Murat X... en Seine Maritime, quand il a été avisé de l’accident survenu à Veysel C...ou encore à celles de M. Yasar L...qui, après avoir été salarié en 2004 de l’entreprise de M. Ahmet Y..., déclare qu’il avait eu la surprise d’apprendre de la MSA qu’il avait été employé par l’entreprise de M. Murat X... en décembre 2005 alors que tel n’était pas le cas, ce qui lui laissait penser que la famille X..., qui connaissait son état-civil, avait embauché sous son identité des compatriotes en situation irrégulière ; que les investigations accomplies auprès des habitants de l’Aigle, d’entrepreneurs liés aux établissements X... et l’examen des déclarations d’embauché effectuées sans corrélation avec le nombre des chantiers simultanément en cours permettaient de confirmer les déclarations de M. Mesut D...selon lesquelles la famille X... employait sans les déclarer, de nombreux ressortissants turcs en situation irrégulière qui étaient surnommés « les touristes » et vivaient dans des appartements loués au-dessus du bar des sports à l’Aigle ; qu’il était d’ailleurs saisi au cours de la perquisition chez Mme Done X... un cahier supportant diverses mentions manuscrites relatives à des « turisler » pour la période allant du 31 août 2003 au 1er octobre 2003 pour Ausar, Mahmut, Vahit (vraisemblablement Vahit G...) et Adil (vraisemblablement Adil M...), pour un certain Musa entre le 9 décembre 2003 et le 21 mars 2004, pour M. Yusuf Z...pour une période allant du 9 décembre 2003 au 13 juin 2004 à laquelle il n’était pas déclaré, pour Zeki, Rasit, Baki à des dates allant de janvier 2004 à janvier 2005 » ;

" et aux motifs adoptés que, compte tenu des développements qui précèdent retenant M. Murat X... comme gérant de ait, il résulte de l’information que les faits qui lui sont reprochés ainsi qu’à sa mère, Mme Done X... sont constitués tant en ce qui concerne l’absence de déclaration nominative d’embauche, l’emploi d’étrangers non munis d’un titre les autorisant à exercer une activité salariée en France ¿ » ;

" 1°) alors que, comme il a été établi à propos du deuxième moyen, en retenant que M. Murat X... avait la qualité de dirigeant de fait de l’entreprise sans constater préalablement que le ministère public rapportait la preuve qu’il avait le pouvoir d’accomplir, dans le cadre de cette entreprise, tous les actes relevant normalement de la compétence du chef d’entreprise, les juges du fond ont entaché leur décision d’une insuffisance de motifs ;

" 2°) alors que, ayant relevé qu’elle ne parlait français et qu’elle ne savait ni lire ni écrire, de sorte qu’elle n’exerçait qu’une direction de façade, les juges du fond auraient dû s’expliquer sur le point de savoir si l’élément intentionnel était caractérisé s’agissant de Mme Done X... ; que faute de ce faire, les juges du fond ont entaché leur décision d’une insuffisance de motifs " ;

Attendu que, pour déclarer Mme Done X... et M. Murat X..., en leur qualité de dirigeants, coupables d’omission de déclaration nominative d’embauche et d’emploi d’étrangers non munis d’une autorisation de travail salarié, l’arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu’en l’état de ces énonciations, la cour d’appel a, sans insuffisance ni contradiction, caractérisé en tous leurs éléments, tant matériel qu’intentionnel, les délits reprochés aux prévenus ;

Que le moyen ne saurait, dès lors, être accueilli ;

Sur le cinquième moyen de cassation, pris de la violation des articles 324-1, 324-3, 324-4, 324-5, 324-6, 324-7, 324-8 du code pénal, ensemble les articles 591 à 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs ;

" en ce que l’arrêt attaqué a déclaré les prévenus (Done X..., MM. Murat X..., Tashin X..., Célébi X..., Behiye X..., Yusuf Z..., Mme Estelle X... épouse Z..., M. Ahmet Y..., Mme Donus X..., épouse Y..., Ali X..., Sevda X...) coupables de blanchiment et leur a infligé sur ce fondement des sanctions pénales ;

" aux motifs que dans le prolongement du signalement émanant des services de traitement du renseignement et d’action contre les circuits financiers clandestins (TRACFIN), les investigations entreprises démontraient l’existence d’un réseau de travail dissimulé organisé par les prévenus dont le dénominateur commun est d’appartenir à la famille X... ; qu’ils ont bénéficié de sommes conséquentes sans commune mesure avec leurs ressources déclarées leur offrant des conditions de vie confortables en France et permettant, à plusieurs d’entre eux, de transférer, sans les déclarer, des sommes importantes en Turquie, dont ils sont originaires ; que l’administration des douanes n’ayant pas fait appel des dispositions relatives à ces transferts suspects, pour lesquels le tribunal est entré en voie de relaxe, elles sont définitives ; que certains prévenus ont reconnu les faits de blanchiment, d’autres non ; qu’il résulte néanmoins du dossier que tous ont finalement été les bénéficiaires de fonds d’origine frauduleuse, provenant de clients de leur prospère entreprise (celle dont Mme Done X... était la gérante de droit ou celle de Célébi X...) qui avait habituellement recours à des travailleurs non déclarés, pour certains eu situation irrégulière, étant observé qu’ils ont mis en place, pour rendre opaque tant l’origine des fonds que leur destination, un système élaboré puisque les chèques des clients étaient crédités sur les uns ou les autres des multiples comptes bancaires qu’ils détenaient, certains l’étant au profit de leurs enfants mineurs, étant précisé que par la suite, manifestement toujours dans la même optique de continuer leurs activités illicites (en payant en espèces les ouvriers non déclarés) ainsi que de les dissimuler, des transferts sont intervenus entre les comptes des uns et des autres, de sorte qu’il a fallu une longue enquête pour reconstituer des flux ; qu’en ce qui concerne le couple formé par M. Tashin X... et Mme Done X..., les parents, il a été découvert à leur domicile qui était aussi le siège de l’entreprise dont Mme Done X... était la gérante de fait entre le ler mars 2002 et le 31 décembre 2005, la somme de 37 560 euros en espèces au sujet de laquelle elle a déclaré, au moment de la perquisition : « il s’agit de l’argent pour le salaire des ouvriers » ; qu’en 2003, M. Tashin X... n’a déclaré aucun revenu et son épouse a déclaré un bénéfice industriel et commercial de 23 772 euros ; qu’en 2004, il a déclaré au titre des salaires et assimilés la somme de 2 926 euros dont 2 568 euros d’indemnités journalières et son épouse a déclaré un bénéfice industriel et commercial de 43 612 euros ; qu’en 2005, M. Tashin X... a déclaré au titre des salaires et assimilés la somme de 7 339 euros dont 1 751 euros d’indemnités versées par les ASSEDICS ; son épouse a déclaré un bénéfice industriel et commercial de 6 750 euros ; qu’entre 2003 et 2005, M. Tashin X... avait sept comptes bancaires à son nom tandis que son épouse eu avait trois ; qu’en 2003, alors que le total des sommes créditées sur le compte courant ouvert sous le numéro 38048250111 25 au nom de M. Tashin X... à l’agence du Crédit agricole de l’Aigle était de 6 366 euros, les décaissements en espèces s’élevaient à 35 500 euros, étant précisé qu’un virement de euros était effectué le 24 avril 2003 sur son compte CODEVI tenu à la même agence et un autre vers l’étranger de 3. 000 euros le 28 mai 2003 ; qu’en 2004, une somme de 6 093 euros était portée au crédit de ce compte dont un virement de compte à compte de 4 500 euros tandis qu’il était débité à hauteur de 18 400 euros par des décaissements en espèces ainsi que par un virement à l’étranger de 4 500 euros ; que sur un autre compte courant tenu dans la même agence sous le numéro 38048250001 64, était crédité en 2003 une somme totale de 31 669 euros dont 14 750 euros provenant de virements des entreprises de sylviculture Sylvexfor et Pier-bois ; que les retraits d’espèces s’élevaient pour 2003 à 44 000 euros ; qu’en 2004, après avoir été crédité par deux chèques pour un montant total de 9 971 euros, ce compte était soldé par un retrait d’espèces de 4 875 euros ; qu’en ce qui concerne Mme Done X..., les flux de ses comptes bancaires sont tout aussi révélateurs puisque sur son compte ouvert à la Banque postale de Rouen le 29 mars 2002 ; qu’en 2003, des remises de chèques ont lieu pour 11 500 euros tandis que sept retraits en espèces sont effectués pour un total de 15 300 euros ; qu’en 2004, il est crédité uniquement par des remises de chèques dont certains émanent de clients de l’entreprise (EURL Transcobois pour 6 992 euros le 16 décembre, la SAS Sylvexfor pour 2 300 euros le 28 décembre, la SA Legrand pour 10 730 euros) pour un montant total de 74 836 euros ; que les décaissements en espèces s’élèvent à 57 500 euros dont trois retraits de 10 000 euros chacun les 14 juin, 17 novembre et 25 novembre ; qu’en 2005, ce compte était crédité pour un montant total de 184 167 euros par des chèques provenant pour la plupart de clients de l’entreprise ; qu’il était débité par des décaissements en espèces pour 191 700 euros dont cinq retraits de 10 000 euros chacun ; que le fonctionnement du compte de l’entreprise, tenu à l’agence du Crédit agricole de l’Aigle, attirait aussi l’attention en raison des décaissements en espèces effectués en 2004 pour 67 000 euros et de chèques tirés au profit de MM. Murat X..., Yussuf Z..., de décaissements en espèces pour 46 900 euros en 2005 ainsi que de chèques au profit de MM. Ali X..., Yussuf Z...et Ahmet Y... ; qu’en début d’année 2006, ce compte fonctionnait de la même étonnante façon puisqu’il était débité par un retrait d’espèces de 2 500 euros ainsi que par deux chèques émis au profit de M. Ali X... le 16 janvier 2006 pour 1 600 euros et pour 1 000 euros ; qu’au cours de ses auditions en garde à vue, M. Tashin X... qui déclarait ne percevoir que 850 euros par mois, ne s’expliquait ni sur la somme d’argent conséquente saisie à son domicile, ni sur les importantes sommes créditées sur ses comptes bancaires, ni sur la proximité temporelle entre les sommes créditées et décaissées sur ses comptes, laissant cependant entendre que son épouse, sur laquelle il se déchargeait de ses responsabilités, avait procédé à des décaissements en espèces pour payer une partie du salaire des employés, reconnaissant au demeurant le fonctionnement illicite de l’entreprise dont il avait été à la tête et mise au nom de son épouse au moment même de son accident pour lequel il sollicitait aussitôt des indemnités journalières qui lui étaient versées ; que pour illustrer son comportement, il conviendra aussi de mentionner qu’il a passé, sans le déclarer aux douanes françaises, une somme de 40 000 euros en Turquie correspondant selon lui à des économies ; que son épouse, Mme Done X..., dont il sera rappelé qu’elle ne maîtrise pas la langue française, qui a initialement déclaré qu’elle était femme au foyer avant de revendiquer ses responsabilités de chef d’entreprise, ne s’est pas expliquée sur les annotations figurant sur le cahier saisi à son domicile, manifestement relatives à l’emploi de travailleurs clandestins ; qu’interrogée sur le fonctionnement pour le moins atypique de ses comptes bancaires, elle s’est bornée à dire qu’il s’agissait d’erreurs de gestion de sa part, affirmant devant la cour que ne sachant pas qu’il fallait déposer les chèques des clients de l’entreprise sur son compte professionnel, elle en avait donné à ses enfants avant d’ajouter que c’était elle qui avait, par erreur, déposé les chèques des clients de l’entreprise sur les comptes de ses enfants ; qu’elle niait les faits de blanchiment tout en précisant que les retraits d’espèces étaient destinés au paiement des salaires des ouvriers, dont certains n’étaient pas déclarés, ainsi qu’aux dépenses de la famille ; qu’il résulte de ce qui précède que, comme l’a décidé le tribunal, les faits de blanchiment sont établis à rencontre de M. Tashin X... et de Mme Done X... dont les flux bancaires, rapprochés des circonstances de fonctionnement de l’entreprise familiale mise opportunément au nom de Mme Done X..., étaient révélateurs de leur volonté délibérée aussi bien de générer des espèces pour payer les ouvriers qui travaillaient sans être déclarés que de profiter d’un train de vie confortable, le transfert occulte d’une somme de 40 000 euros en espèces en Turquie signant l’épisode ultime du blanchiment auquel ils se livraient ; qu’en ce qui concerne M. Murat X... ; que marié et père de deux enfants mineurs, propriétaire d’une maison d’une surface habitable de 170 m ² à Saint Sulpice sur Risle, il a perçu en 2003 pour 7 381 euros de salaires et 2 116 euros d’allocations des ASSEDICS et n’était pas imposable ; qu’il en était de même en 2004 où il a perçu pour 9 178 euros de salaires et a déclaré un déficit industriel et commercial de 5 647 euros pour l’exploitation d’un bar situé à Dreux après avoir fait l’acquisition du fonds de commerce le 30 juillet 2004 pour 205 000 euros ; qu’en 2005, son épouse a perçu 5 443 euros de salaires et il a déclaré un bénéfice industriel et commercial de 26 670 euros ; que titulaire de sept comptes bancaires, le fonctionnement de ceux ouverts auprès de l’agence de la Caisse d’épargne à Orléans et du Crédit agricole de l’Aigle retiennent l’attention ; que sur son compte professionnel tenu à la Caisse d’épargne, il était crédité en 2004 une somme totale de 405 138 euros dont un chèque de 103 000 euros déposé à l’ouverture du compte le 15 mai 2004 et des remises en espèces pour 249 825 euros ; qu’en 2005, il était crédité de 893 379 euros dont 686 283 euros de dépôt d’espèces ; du 1er janvier au 8 mars 2006, il y était crédité 198 533 euros dont des remises d’espèces pour 143 847 euros ; que sur son compte ouvert au Crédit agricole, il était crédité en 2004 une somme de 51 000 euros dont un chèque émis par M. Ahmet Y..., son beau-frère et co-prévenu, pour un montant de 3 000 euros le 31 mars et un autre de 3 000 euros émis par M. Meliha X... le 19 avril ; il est aussi à noter deux dépôts d’espèces de 3 000 euros le 5 avril et de 40 000 euros le 9 avril ; que ce compte était notamment débité de 800 euros par virement au profit de Ali X... le 17 mars et le 17 mai d’une somme de 55 000 euros transférés sur un des autres comptes dont M. Murat X... était titulaire ; qu’en 2005, quatre retraits d’espèces étaient effectués pour 11 950 euros ; M. Murat X... était aussi titulaire d’un compte joint avec son épouse à l’agence du Crédit agricole de l’Aigle où, en 2004, le montant total des sommes créditées s’élevait à 117 702 euros constituées notamment par des remises de chèques provenant à hauteur de 57 702 euros de Mmes Done X..., Meliha X..., Behiye X... et Céline X..., membres de sa famille et co-prévenus ; que le 18 mai, ce compte était débité d’un chèque de 103 000 euros ; que Murat X..., qui conteste les faits de blanchiment, n’a fourni aucune explication convaincante sur les flux financiers apparaissant sur ses comptes, affirmant que les sommes versées sur son compte professionnel provenaient exclusivement de l’exploitation de son bar ; que ses déclarations ne sont pas plausibles puisque, pour ne citer que l’année 2006, alors que plus de 890 000 euros ont transité sur son compte, en espèces pour la majeure partie, il évaluait son chiffre d’affaire annuel à un maximum de 146 000 euros ; que l’épouse de M. Murat X... a indiqué que des amis et des membres de la famille avaient aidé son mari à réunir une partie des fonds ayant servi à son investissement dans le bar-tabac de Dreux et a été incapable d’expliquer à qui étaient destinés les fonds ayant fait l’objet de virements en Turquie et en Allemagne ; qu’il résulte de ce qui précède que sans revenir sur la qualité de gérant de fait de l’entreprise de sylviculture mise au nom de sa mère, compte-tenu des problèmes de santé de son père qui dirigeait l’entreprise avant, M. Murat X..., comme l’a décidé le tribunal, s’est rendu coupable de blanchiment ; que les explications qu’il a fournis pour justifier les flux bancaires de ses comptes sont incompatibles avec les constatations effectuées et les analyses fiscales et bancaires réalisées ; qu’en ce qui concerne M. Célébi X... et son épouse Mme Behiye X..., mariés avec trois enfants mineurs à charge, leurs ressources déclarées sont sans corrélation avec les sommes créditées sur leurs très nombreux comptes bancaires (cinq pour lui, douze pour elle et dix pour leurs enfants) et leur train de vie puisqu’en 2003, leurs en cours bancaires étaient supérieurs de euros par rapport à leurs revenus déclarés ; qu’en 2004, ils l’étaient de 220 654 euros, en 2005 de 181 295 euros ; que non imposables en 2003 et 2005, ils ont vendu le 31 janvier 2006 à M. Yusuf Z...et Mme Meliha X... pour 150 000 euros leur maison, dont il avaient acquis comptant pour 100 000 euros le terrain en 1999, que M. Célébi X..., qui a reconnu avoir fait travailler clandestinement des ouvriers sur ses chantiers dont certains étaient en situation irrégulière, a admis qu’il avait déposé des chèques de clients sur ses comptes personnels, ceux de son épouse ou encore ceux de leurs enfants pour un montant de l’ordre de 300 000 euros ; qu’il a reconnu avoir acheminé la somme de 70 000 euros en numéraires en deux voyages faits en Turquie et a déclaré que les retraits d’espèces sur les comptes dont sa femme et lui avaient la disposition servaient à payer les ouvriers non déclarés. Son épouse, fille de M. Tashin X... et de Mme Done X..., était parfaitement informée de la situation puisqu’elle avait un rôle actif dans la commission des infractions ; qu’elle a déclaré qu’elle avait occupé pendant un an un emploi de bûcheron dans l’entreprise dirigée par son père puis, pendant quatre ans, dans celle de son mari, précisant qu’il lui arrivait même de conduire les ouvriers sur des chantiers et de ramasser le bois qu’ils coupaient, ce qui lui procurait un salaire de 1945 euros par mois tout en affirmant qu’elle ne savait pas pour quelle société elle travaillait ; qu’au cours de ses auditions, Mme Behiye X... déclarait avoir déposé, sur les ordres de son mari, des chèques de l’entreprise sur les comptes de ses enfants ou sur les siens ; qu’elle ne donnait aucune explication sur les nombreux virements effectués par ses parents sur ses différents comptes ainsi que sur les retraits d’espèces qui s’en suivaient ; qu’il résulte de ce qui précède que les faits de blanchiment sont établis à rencontre de M. Célébi X..., qui les reconnaît, ainsi qu’à celui de son épouse Mme Behiye X..., épouse X... qui les nie puisqu’il est démontré qu’elle a notamment participé aux importants mouvements de fonds réalisés sur les comptes dont elle avait la disposition et qu’elle ne pouvait en ignorer aussi bien l’origine que la destination finale ; qu’en ce qui concerne M. Ahmet Q...et Mme Donus X..., épouse Y..., non imposables en 2003, 2004 et 2005 et parents de trois enfants mineurs, ils sont propriétaires de leur maison d’habitation à l’Aigle acquise en 2000 pour la somme de 600 000 francs, financée par un prêt ; que leur ressources déclarées sont sans corrélation avec les flux bancaires enregistrés sur leurs comptes ; que M. hmet Y..., qui a reconnu en début de procédure avoir eu recours à des travailleurs clandestins quand il exploitait en nom propre son entreprise de sylviculture du 15 février 2002 au 31 décembre 2003 puis du 4 mars 2005 au 22 avril 2005 avant de créer la SARL Sofpa, dont il a été le gérant au cours du dernier trimestre de l’année 2005/ a aussi indiqué que lui aussi avait travaillé entre 2003 et 2005 sans être déclaré ; qu’il a indiqué que les importantes sommes d’argent créditées sur ses comptes, ceux de son épouse et ceux de leurs enfants provenaient pour l’essentiel de ses activités illicites ; qu’il a précisé que son épouse était parfaitement au courant de la situation d’autant plus que des travaux ont été réalisés dans leur maison avec de l’argent provenant de ces activités délictueuses ; qu’il a d’abord indiqué avoir transporté à deux reprises la somme de 20 000 euros en Turquie en 2003 et 2005 avant de dire qu’il n’avait fait qu’un voyage ; que Mme Donus X..., épouse Y..., après avoir longtemps été évasive sur les provenances et destinations des sommes ayant transité par les comptes bancaires de la famille, déclarait, en contradiction avec son mari, qu’elle ignorait l’origine frauduleuse de l’argent ayant transité sur ces comptes, incapable cependant d’expliquer la disproportion entre les sommes retirées en espèces et les dépenses familiales relatives à des travaux dans la maison, l’achat d’une voiture ou encore des vacances qu’elle mettait en avant pour les justifier ; qu’elle affirmait ignorer les raisons pour lesquelles des chèques de clients de l’entreprise étaient déposés sur son compte dont elle disait pourtant être la seule à assurer la gestion ; que confrontée aux éléments matériels recueillis, elle finissait par dire qu’elle avait agi sur les instructions de son mari ; que malgré ses dénégations, sa culpabilité est avérée puisqu’il résulte de ce qui précède qu’elle a agi en toute connaissance de cause, ayant été informée par son mari des tenants et des aboutissants des mouvements de fonds litigieux sur les comptes bancaires de la famille ; qu’en ce qui concerne M. Yusuf Z...et MmeEstelle X..., épouse Z..., pour eux aussi, leurs ressources déclarées sont sans corrélation avec les flux bancaires enregistrées sur leurs comptes ; que arents d’un enfant, le couple n’était ni imposable en 2003, 2004 et 2005 et il achetait le 31 janvier 2006, auprès de M. X... Célébi et Mme X... Béhiyé, une maison de 164 m2 habitables à ST Sulpice Sur Risle pour 150 000 euros, financés au moyen d’un prêt ; que le compte bancaire commun du couple, à l’agence du Crédit agricole de l’Aigle, totalisait pour 2005 au crédit une somme de 59 055 euros, constituée de quatre remises de chèques en provenance de Donc X... pour un total de 5 055 euros, de virements pour 29 000 euros (25 000 euros de prêts et 4 000 euros de compte à compte), et de deux remises en espèces, intervenues le 9 décembre de 23 000 euros et le 27 décembre pour 2 000 euros ; que le 9 décembre, le compte était débité par virement de 23 801 euros pour un remboursement anticipé du prêt, n’était en outre procédé à deux retraits en espèces pour un total de 3 000 euros ; que Mme Estelle X..., épouse Z...disposait, quant à elle, de huit comptes bancaires ; que sur celui N° 3882710111197, ouvert à l’agence du Crédit agricole de l’Aigle, les crédits, constitués de virements de compte à compte, dont une lettre de change en date du 29 décembre 2003 pour 5 591 euros, s’élevaient à plus de 15 000 euros. ; que deux jours après que la lettre de change soit créditée sur son compte, il était effectué un retrait d’espèces d’un montant voisin (5 600 euros) ; qu’en 2005, le compte fonctionnait de la même manière, avec des décaissements espèces significatifs, le jour même ou juste après la remise de chèques du même montant ; qu’à partir de ce compte, il était aussi effectué des virements pour l’étranger pour 15 000 euros ; que sur un de ses autres comptes, ouvert à la société générale de l’Aigle, on constatait en 2004 quatre remises de chèques pour un total de 19 663 euros, et, en 2005, six remises de chèques pour un total de 25 952 euros ; que sur son compte LEP tenu dans la même banque, il était déposé à cinq reprises en 2003 des espèces pour un total de 7 250 euros ; qu’à cela, il convient d’ajouter qu’il a été retrouvé au domicile du couple la somme de 9 490 euros en espèces au sujet de laquelle M. Yusuf Z...déclarait qu’elle provenait de son travail non déclaré au profit de sa belle-mère Mme Done X... ; que son épouse le confirmait pour partie et précisait que cet argent devait être transféré en Turquie ; que Mme Estelle X... déclarait que les mouvements bancaires intervenus sur ses comptes étaient effectués à la demande de sa mère ; qu’il résulte de ce qui précède que chacun M. Yusuf Z...et Mme Estelle X..., épouse Z..., parfaitement au courant de la provenance douteuse des sommes conséquentes déposées sur leurs comptes, ont participé aux opérations familiales de blanchiment dont certaines sont arrivées à leur terme puisqu’ils ont reconnu avoir emmené en Turquie des espèces ; qu’en ce qui concerne M. Ali X..., en 2003, il a touché de Center Park un salaire de moins de 4 000 euros, qu’en 2004 et 2005, il a déclaré pour un peu plus de 11 000 euros de salaires, étant observé qu’en 2005, 3 620 euros lui ont été versés par son frère ainé M. Murat X..., propriétaire du bar des rosés à Dreux ; que célibataire, sans enfant, et non imposable, M. Ali X... a néanmoins fait l’acquisition le 30 juillet 2004 pour la somme de 60 000 euros, moyennant un prêt, d’un bien immobilier à Dreux, il a pour partie souscrit pour cet immeuble un bail commercial au profit de son frère M. Murat X... pour l’exploitation du bar des rosés ; qu’il y a par ailleurs établi son habitation principale d’une superficie totale de 160 m ² ; que le 13 janvier 2005, Ali X... a acheté pour la somme de 102 000 euros, financée par un prêt, un appartement dans le 14è arrondissement de Paris ; que ce prêt, cautionné par son frère Murat, était remboursé grâce aux loyers commerciaux que lui payait M. Murat X... ; que sa soeur, Mme Sveda X..., occupait gracieusement cet appartement ; que le 28 avril 2006, M. Ali X... a acheté un fonds de commerce de livres-journaux-papeterie pour un montant de 180 000 euros ; que cet achat a été financé par un prêt de 125 000 euros et un apport personnel pour le surplus, 20 à 30 000 euros provenant selon M. Ali X... de son frère Murat ; que ces investissements, impossibles au regard des revenus déclarés par M. Ali X..., ne l’ont été que grâce aux sommes conséquentes portées au crédit de ses comptes bancaires, provenant pour certaines, d’entreprises de sylviculture avec lesquelles l’entreprise familiale était en relation, M. Ali X... a mis en avant qu’il avait perçu un chèque de 40 000 euros de la Française des jeux, ce qui est exact ; ceci étant, l’enquête n’a pu déterminer qu’il était l’acheteur du billet gagnant, s’agissant de Jeux de grattage ; qu’au sujet de la somme de 50 000 euros déposée en espèces sur son compte de la caisse d’épargne d’Orléans le 3 janvier 2006, M. Ali X... indiquait à son banquier qu’elle provenait de Turquie ; qu’au cours de sa garde à vue, M. Ali X... déclarait avoir été salarié au sein de l’entreprise de sa mère, et avoir perçu à ce titre pour plus de 18 000 euros en rémunération d’un emploi qu’il n’avait pratiquement pas occupé ; qu’il disait tout ignorer des autres personnes employées par sa mère et des modalités de paiement des salaires ; qu’il reconnaissait cependant qu’avaient été crédités sur ses comptes, des chèques provenant de l’entreprise forestière de sa mère, à qui il remettait ensuite les sommes en espèces, quand il ne procédait pas, à la demande de sa mère, à des virements à l’étranger ; que compte tenu des nombreux dépôts de chèques et des décaissements d’espèces intervenus juste après, le tout pour des sommes conséquentes, M. Ali X... ne peut utilement soutenir que s’il procédait à des retraits en espèces, c’était pour rembourser sa mère qui se trompait en créditant ses comptes de sommes de l’entreprise ; qu’au vu de l’importance des sommes concernées, de la multiplicité des opérations, des investissements que M. Ali X... a réalisés, grâce aux circuits de blanchiment mis en place au sein de sa famille, l’infraction de blanchiment est caractérisée à son encontre et il devra en être déclaré coupable » ;

" 1°) alors que, sur les poursuites de la direction générale des douanes et droits indirects, les prévenus ont bénéficié d’une relaxe s’agissant du transfert des fonds en Turquie ; qu’il était dès lors exclu que les juges du fond, pour établir le blanchiment, puissent se fonder sur ces transferts, lesquels devaient être considérés comme non-établis ; qu’en se fondant néanmoins sur ces transferts, les juges du fond ont violé les textes susvisés ;

" 2°) alors que, ayant relevé qu’elle ne parlait français et qu’elle ne savait ni lire ni écrire, de sorte qu’elle n’exerçait qu’une direction de façade, les juges du fond auraient dû s’expliquer sur le point de savoir si l’élément intentionnel était caractérisé s’agissant de Mme Done X... ; que faute de ce faire, les juges du fond ont entaché leur décision d’une insuffisance de motifs " ;

Attendu que, pour déclarer chacun des onze prévenus coupable de blanchiment pour avoir effectué des versements et des retraits en espèces sur leurs comptes bancaires alors que les fonds provenaient de travail dissimulé et d’emploi d’étrangers démunis de titres de travail, l’arrêt relève notamment l’existence d’un réseau de travail dissimulé organisé par ceux-ci, tous membres de la famille X..., qui ont bénéficié de sommes importantes sans commune mesure avec leurs ressources déclarées, certaines ayant été transférées sans déclaration en Turquie ;

Attendu qu’en l’état de ces énonciations caractérisant en tous ses éléments, notamment intentionnel, le délit de blanchiment à l’encontre de tous les prévenus, la cour d’appel qui, en constatant l’existence de transferts de fonds en Turquie, n’a fait qu’user de son pouvoir souverain d’appréciation des faits et circonstances de la cause, a justifié sa décision, peu important que les infractions douanières n’aient pas été retenues ;

D’où il suit que le moyen doit être écarté ;

ET attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE les pourvois ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le cinq novembre deux mille quatorze ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
ECLI:FR:CCASS:2014:CR05456