Partie civile urssaf
Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du 10 septembre 2014
N° de pourvoi : 13-84776
ECLI:FR:CCASS:2014:CR03932
Non publié au bulletin
Rejet
Mme Nocquet (conseiller doyen faisant fonction de président), président
SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l’arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
"-"
"-"
M. Marc X...,
M. Murat Y...,
contre l’arrêt de la cour d’appel de POITIERS, chambre correctionnelle, en date du 30 mai 2013, qui les a condamnés, le premier, pour prêt illicite de main d’oeuvre en récidive, complicité de travail dissimulé et d’emploi d’un étranger non muni d’une autorisation de travail salarié, à huit mois d’emprisonnement avec sursis, 50 000 euros d’amende, à la publication de la décision et à la confiscation des biens saisis, le second, pour travail dissimulé, prêt illicite de main d’oeuvre et usage de faux, à trois mois d’emprisonnement avec sursis, 5 000 euros d’amende et cinq ans d’interdiction professionnelle, et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l’audience publique du 12 juin 2014 où étaient présents dans la formation prévue à l’article 567-1-1 du code de procédure pénale : Mme Nocquet, conseiller doyen faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Soulard, conseiller rapporteur, M. Bayet, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Leprey ;
Sur le rapport de M. le conseiller SOULARD, les observations de la société civile professionnelle CÉLICE, BLANCPAIN ET SOLTNER et de la société civile professionnelle HÉMERY ET THOMAS-RAQUIN, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l’avocat général CABY ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits ;
Sur le premier moyen de cassation proposé pour M. X..., pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 63-1 à 63-4, 802, 591 et 593 du code de procédure pénale, manque de base légale, contradiction et défaut de motifs ;
« en ce que l’arrêt attaqué a rejeté les exceptions de nullité formulées relativement aux procès-verbaux de garde à vue de toutes les personnes entendues sans avoir été informées de leur droit à l’assistance d’un avocat, à l’ensemble des actes de procédure subséquents dont ces procès-verbaux sont le support nécessaire, à savoir la totalité des actes de procédure postérieurs aux premières mesures de garde à vue irrégulières prononcées le 25 novembre 2010 et aux poursuites à l’encontre de M. X... ;
« aux motifs que sur les exceptions de nullité : c’est à juste titre que le tribunal correctionnel a prononcé la nullité des procès-verbaux de placement, de renouvellement et de fin de garde à vue ainsi que des procès-verbaux d’audition, de perquisitions et de fouilles de véhicules effectuées pendant la garde à vue des trois prévenus dans la mesure où il apparaît effectivement qu’ils n’ont pas été informés de leur droit à l’assistance d’un avocat tout au long de la mesure ni de leur droit de garder le silence, s’agissant de garde à vue intervenues avant la loi du 14 avril 2011 ; que c’est encore par une exacte application de la loi que la juridiction de première instance a refusé d’étendre la nullité ainsi prononcée à la garde à vue d’autres personnes que les prévenus eux-mêmes dès lors que la méconnaissance des formalités substantielles auxquelles est subordonnée la garde à vue ne peut être invoquée, à l’appui d’une demande d’annulation d’acte ou de pièces de procédure, que de la partie qu’elle concerne ; qu’il convient enfin de rappeler que la garde à vue n’est pas le support nécessaire de la saisine du tribunal correctionnel en cas de poursuite par convocation en justice ; qu’il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris en ce qui concerne les exceptions de nullité ;
« alors que les déclarations faites par des personnes mises en garde à vue et qui sont susceptibles d’incriminer le prévenu font griefs à ce dernier lorsqu’elles constituent le fondement essentiel des poursuites diligentées à son encontre ; qu’il en résulte que ce dernier a incontestablement intérêt à invoquer l’irrégularité de ces gardes à vue lorsque les personnes qu’elles concernent ne sont pas poursuivies et ne sont donc pas elles-mêmes en mesure de solliciter l’annulation de la mesure diligentée en méconnaissance de leurs droits ; qu’en estimant que M. X... était sans intérêt à invoquer l’irrégularité des procès-verbaux de garde à vue qui ne le concernaient pas, cependant que ces procès-verbaux constituaient le fondement essentiel des poursuites exercées à son encontre et qu’ils concernaient des personnes qui n’avaient pas fait l’objet de poursuites et n’avaient donc pas été elles-mêmes en mesure de demander l’annulation du procès-verbal de garde à vue les concernant, la cour d’appel a violé les textes visés au moyen » ;
Sur le premier moyen de cassation proposé pour M. Y..., pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, 390-1, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
« en ce que l’arrêt attaqué, rejetant le surplus des exceptions de nullité soulevées, s’est borné à annuler les seuls procès-verbaux de garde à vue de MM. Y..., X... et S...mais a refusé d’annuler les actes subséquents de la procédure ;
« aux motifs propres que, c’est encore par une exacte application de la loi que la juridiction de première instance e refusé d’étendre la nullité ainsi prononcée à la garde à vue d’autres personnes que les prévenus eux-mêmes dès lors que la méconnaissance des formalités substantielles auxquelles est subordonnée la garde à vue ne peut être invoquée à l’appui d’une demande d’annulation d’acte ou de procédures que de la partie qu’elle concerne ; qu’il convient enfin de rappeler que la garde à vue n’est pas le support nécessaire de la saisine du tribunal correctionnel en cas de poursuite par convocation en justice ; qu’il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris en ce qui concerne les exceptions de nullité ;
« et aux motifs des premiers juges que seules seront annulées les pièces susvisées ; les pièces subséquentes et les citations dont elles ne sont pas les supports exclusifs ni nécessaires, ne doivent pas être annulées ;
” 1°) alors que la nullité des procès-verbaux de garde à vue entraîne la nullité de tous les actes subséquents dont elles sont le support nécessaire ; que des gardes à vue annulées constituent le support nécessaire d’une convocation à comparaître devant le tribunal correctionnel dès lors qu’il n’est pas établi que les poursuites peuvent trouver leur support dans d’autres actes que ceux entachés de nullité ; qu’en partant, au contraire, du principe que dans tous les cas, la garde à vue ne serait pas le support nécessaire de la saisine du tribunal correctionnel en cas de poursuite par convocation en justice et en s’abstenant, en conséquence, d’indiquer les raisons pour lesquelles elles ne le seraient pas en l’espèce, la cour d’appel a méconnu les textes susvisés ;
” 2°) alors qu’en toute hypothèse, qu’en se bornant, par motif adopté des premiers juges, à affirmer, sans autre explication, que « les pièces subséquentes et les citations dont elles ne sont pas les supports exclusifs ni nécessaires ne doivent pas être annulées », sans indiquer, même sommairement, en quoi ces actes subséquents n’auraient pas pour support nécessaire les actes annulés et seraient fondés sur d’autres éléments que ceux obtenus lors des gardes à vue litigieuses, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés » ;
Sur le quatrième moyen de cassation proposé pour M. Y..., pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, 63-1, 63-4, 802, 591 et 593 du code de procédure pénale, manque de base légale, contradiction et défaut de motifs ;
” en ce que l’arrêt attaqué a rejeté les exceptions de nullité formulées relativement aux procès-verbaux de garde à vue de toutes les personnes entendues sans avoir été informées de leur droit à l’assistance d’un avocat, à l’ensemble des actes de procédure subséquents dont ces procès-verbaux sont le support nécessaire, à savoir la totalité des actes de procédures postérieurs aux premières mesures de garde à vue irrégulières prononcées le 25 novembre 2010 et aux poursuites à l’encontre de M. Y... ;
” aux motifs propres sur les exceptions de nullité : c’est à juste titre que le tribunal correctionnel a prononcé la nullité des procès-verbaux de placement, de renouvellement et de fin de garde à vue ainsi que des procès-verbaux d’audition, de perquisitions et de fouilles de véhicules effectuées pendant la garde à vue des trois prévenus dans la mesure où il apparaît effectivement qu’ils n’ont pas été informés de leur droit à l’assistance d’un avocat tout au long de la mesure ni de leur droit de garder le silence, s’agissant de garde à vue intervenues avant la loi du 14 avril 2011 ; que c’est encore par une exacte application de la loi que la juridiction de première instance a refusé d’étendre la nullité ainsi prononcée à la garde à vue d’autres personnes que les prévenus eux-mêmes dès lors que la méconnaissance des formalités substantielles auxquelles est subordonnée la garde à vue ne peut-être invoquée, à l’appui d’une demande d’annulation d’acte ou de pièces de procédure, que de la partie qu’elle concerne ; qu’il convient enfin de rappeler que la garde à vue n’est pas le support nécessaire de la saisine du tribunal en cas de poursuite par convocation en justice ; qu’il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris en qui concerne les exceptions de nullité ;
” alors que les déclarations faites par des personnes mises en garde à vue et qui sont susceptibles d’incriminer le prévenu font griefs à ce dernier lorsqu’elles constituent le fondement essentiel des poursuites dilligentées à son encontre ; qu’il en résulte que ce dernier a incontestablement intérêt à invoquer l’irrégularité de ces gardes à vue lorsque les personnes qu’elles concernent ne sont pas poursuivies et ne sont donc pas elles-mêmes en mesure de solliciter l’annulation de la mesure dilligentée en méconnaissance de leurs droits ; qu’en estimant que M. Y... était sans intérêt à invoquer l’irrégularité des procès-verbaux de garde à vue qui ne le concernaient pas, cependant que ces procès-verbaux constituaient le fondement essentielle des poursuites exercées à son encontre et qu’ils concernaient des personnes qui n’avaient pas fait l’objet de poursuites et n’avaient donc pas été elles-mêmes en mesure de demander l’annulation du procès-verbal de garde à vue les concernant, la cour d’appel a violé les textes visés au moyen. “ ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que, pour d’une part, rejeter les exceptions de nullité concernant les procès-verbaux d’audition en garde à vue de personnes non poursuivies, d’autre part, dire que l’annulation des procès-verbaux d’audition en garde à vue de MM. X... et Y... n’entraîne pas celle des poursuites dont ils font l’objet, l’arrêt prononce par les motifs repris aux moyens ;
Attendu qu’en l’état de ces énonciations, et dès lors que la méconnaissance des formalités substantielles auxquelles est subordonnée la garde à vue ne peut être invoquée à l’appui d’une demande d’annulation d’acte ou pièce de la procédure que par la partie qu’elle concerne, la cour d’appel a justifié sa décision ;
Qu’il s’ensuit que les moyens doivent être écartés ;
Sur le second moyen de cassation proposé pour M. X..., pris de la violation des articles 7 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 121-1, 121-2 et 121-7 du code pénal, L. 8241-1, L. 8243-1, L. 8221-1 à L. 8221-5 et L. 8224-1 à L. 8224-4 du code du travail et 593 du code de procédure pénale, manque de base légale, défaut et contradiction de motifs ;
« en ce que l’arrêt attaqué a, sur l’action publique, déclaré M. X... coupable des faits qui lui étaient reprochés et condamné ce prévenu à une peine de huit mois d’emprisonnement avec sursis, à une amende délictuelle de 50 000 euros et ordonné la publication de la décision dans deux journaux et, sur l’action civile, condamné M. X... à verser une somme de 10 000 euros de dommages-intérêts à l’RSSAF de Poitou-Charentes ;
« aux motifs que sur l’action publique : A-Relativement aux faits reprochés à M. X... : s’agissant du prêt de main-d’oeuvre à but lucratif hors du cadre légal du travail temporaire : qu’il est reproché à M. X... d’avoir réalisé des opérations à but lucratif ayant pour objet le prêt de main-d’oeuvre en dehors du cadre légal du travail temporaire, par le biais de contrats de sous-traitance respectivement conclus avec les sociétés Rewi Bat, Saffat Concept, Pro Carrelage, SMR et Prestige Sols ; qu’il y a sous-traitance lorsqu’une entreprise se voit confier, par une autre entreprise, l’exécution d’une tâche définie sous sa propre responsabilité et avec le concours de son propre personnel ; que pour qu’une opération de sous-traitance ne soit pas analysée en un prêt de main-d’oeuvre illicite, prohibé par le code du travail, il importe que l’opération soit engagée pour l’exécution d’une tâche nettement définie, sous la direction exécutive du sous-traitant qui percevra une rémunération forfaitaire et aura recours, pour ce faire, à son propre matériel et aux matériaux qu’il aura fourni ; qu’il n’est pas contesté que le suivi des chantiers sous-traités par le groupe X..., se faisait par le biais d’un conducteur de travaux ; qu’en ce qui concerne le chantier sous-traité à la société SMR : seul le chantier « Le Madrigal » à Chambray-Les-Tours (37) figure à la procédure pour avoir fait l’objet d’un contrat litigieux de sous-traitance avec Marc X... en date du 4 septembre 2006 ; qu’il a eu pour objet la réalisation de travaux de « revêtements durs » : carrelage scellé, plinthes et faïence pour un prix global et forfaitaire de 36 294, 23 euros TTC. Le gérant de cette société, M. Serdar Z..., a déclaré lors de son audition qu’en réalité c’était son oncle qui assurait la gestion de la société SMR mais celui-ci n’a pu être entendu. Il a expliqué qu’il évaluait les prix « en gros dans ma tête, par ma connaissance et par rapport à mes concurrents » que pour ce chantier le groupe X... lui avait proposés des prix qu’il avait acceptés ; qu’il ressort des auditions des salariés que de les instructions sur le chantier étaient données par un prénommé Sener (phonétique) « qui appelle un prénommé Philippe du groupe X... ou par Mustapha A... » ; que ces derniers fixaient notamment les horaires de travail dans le cadre de « possibilités d’horaires de travail sur le chantier » sur un panel hebdomadaires de 46 heures 15 ; qu’il apparaît encore que le petit matériel fourni aux ouvriers appartenait à l’entreprise sous-traitante et que le groupe X... fournissait les matériaux ainsi que le gros matériel ; que la collaboration avec le groupe X... représentait 75 % du chiffre d’affaires de cette société ; qu’en ce qui concerne les chantiers sous-traités à la société Prestige Sols : 16 contrats ont été joints au dossier dans le cadre de l’enquête relativement à l’année 2011, dont le « Les Maisons Serenides » à Verrières (86) qui a fait l’objet d’un contrat de sous-traitance en date du 17 novembre 2011 ; que ce contrat a eu pour objet la réalisation de « travaux de revêtement de sols durs » pour un prix global et forfaitaire de 1 648, 40 euros TTC ; que le gérant de cette société, a précisé que dans ses relations avec le groupe X..., en ce qui concerne les prix « il n’y a pas de négociation » ; que les salariés de prestige sol disposaient de leur propre matériel, la bétonnière et les matériaux étant fournis par le groupe X... ; qu’en ce qui concerne les chantiers sous-traités à la société Rewi Bat : vingt et un contrats ont été saisis lors de la perquisition du 25 novembre 2010 dans les locaux du service sous-traitance du groupe X... ; qu’il ressort des déclarations du gérant de cette société, M. Tarik B..., que c’est le groupe X..., qui représente environ 90 % du chiffre d’affaires de la société, qui établit le prix de la pose du carrelage : « je ne fais jamais de devis car c’est M. X... qui nous donnait les prix appliqués ». Il reconnaît une marge de négociation du prix qui varie entre 0, 50 centime et 1 euro « mais uniquement lorsque c’est un grand chantier comme Bourges (64 logements) » ; que MM. Orhan et Alain C..., salariés de la société Rewi Bat, confirment ces déclarations ; que pour le premier « on travaille toujours pour le groupe X... (..) ; c’est le groupe X... qui nous donne les prix que l’on doit appliquer » ; pour le second « nous ne discutons pas les prix, nous acceptons les conditions fixées par X... sinon le chantier est donné à quelqu’un d’autre (..) c’est M. X... qui décide les prix, qui donne les instructions aux conducteurs de travaux ; qu’eux nous appellent, nous acceptons ou nous refusons le travail mais si nous refusons, ils vont voir ailleurs (..) sur les factures nous mettons ce que X... nous dit de mettre » ; que M. D..., conducteur de travaux, convenait qu’en cas de sous-traitance « c’est le conducteur de travaux qui passe sur le chantier » pour donner les ordres aux ouvriers », et lorsqu’il lui était demandé si « du début à la fin » les sous-traitant ne font qu’obéir à des ordres, il répondait : « oui, pour moi c’est plus du travail à la tâche » ; qu’il apparaissait également qu’en ce qui concerne le chantier du centre Leclerc de Surgères, le sous-traitant avait dû faire travailler ces ouvriers le dimanche afin de pouvoir finir le chantier à la date convenue ; que M. Hamit C..., gérant de fait de la société Rewi Bat, a également observé que 90 % du chiffre d’affaires de cette entreprise était contractualisé avec le groupe X... ; * en ce qui concerne les chantiers sous-traités à la société Saffat Concept (deux contrats concernés) : pour M. Hamit C..., qui reconnaît y avoir été employé « au noir » pendant trois mois dans le cadre d’un contrat de sous-traitance, « chez X... tu ne peux pas décider des prix, ça se passe comme ça avec eux. Le prix est le même pour tout le monde » ; que M. Kevin E..., aide-conducteur de travaux de la société X..., précise lui-même que dans le cadre des relations professionnelles qu’il entretenait avec M. Hamit C..., concernant le chantier de Montreuil-en-Touraine, il lui avait demandé s’il était intéressé par le chantier et par les prix et qu’« il acceptait ou il refusait ; les prix sont ceux qui nous sont donnés par le patron ». Alors qu’il était interrogé sur la liberté d’action des sous-traitants, il répondait : « ils obéissent aux ordres », ordres que lui-même tenait de son chef d’agence ; qu’en ce qui concerne les chantiers sous-traités à la société Pro Carrelage : quarante-trois contrats ont été saisis lors de la perquisition précitée ; que M. F..., employé comme conducteur de travaux par le groupe X..., précise que dans le cadre des contrats de sous-traitance « si le sous-traitant n’est pas d’accord avec nos prix, il ne signe pas » ; qu’il ajoute appliquer la grille tarifaire fournie par son employeur et que « cela évite les discussions avec les sous-traitants » ; que ce salarié a également travaillé avec la société Rewi Bat et les observations précitées peuvent se rapporter aux contrats de sous-traitance signés avec elle ; que 78, 5 % du chiffre d’affaires de la société Pro Carrelage ont été réalisé au cours de l’année 2010 avec le groupe X... ; qu’il découle de ce qui précède que si les deux premières conditions relatives à la licéité des contrat de sous-traitance sont réunies, l’une des deux autres ou les deux ne le sont pas : qu’il apparaît, en effet, clairement que les ouvriers de l’entreprise sous-traitante se trouvaient bien sous la subordination du groupe X... en ce qui concerne les sociétés Rewi Bat, Saffat Concept, Pro Carrelage et Prestige Sols qui n’avaient aucun pouvoir de négociation sur les prix pratiqués et voyait son personnel placé sous l’autorité directe des conducteurs de travaux du groupe X... ; que M. X..., ès qualités de président du directoire du groupe X..., a déjà été condamné pour des faits semblables par jugement du 6 mars 2008, du tribunal de grande instance de Bayonne confirmé par un arrêt de la cour d’appel de Pau en date du 18 décembre 2012 ; qu’il apparaît, en conséquence, que les éléments constitutifs de l’infraction de prêt de main-d’oeuvre à but lucratif hors du cadre légal du travail temporaire sont réunis à l’encontre de M. X... ; que le jugement entrepris sera, en conséquence, confirmé de ce chef, à l’exception des faits imputés à M. X... au titre du contrat de sous-traitance signé avec la société SMR ; * s’agissant de l’exécution d’un travail dissimulé : M. X..., dans ses conclusions, ne remet pas en cause le fait que les salariés dont le nom figure à ce titre dans la prévention ont été employés sans déclaration nominative préalable à l’embauche ; que dans leur déclaration, MM. Y..., Erdal Y... et R... ont reconnu avoir travaillé pour la société Pro Carrelage pendant plusieurs mois sans être déclarés ; qu’il en est allé de même pour M. R... ; que lors du contrôle du chantier de Verrières le 21 novembre 2011, deux travailleurs s’y trouvaient qui n’avaient pas été déclarés : MM. T... et R... et Dogan R... ; qu’il apparaissait également que MM. Ertan Q..., Kurt G..., Yunus H..., Halil I... et Ibrahim J... n’étaient pas déclarés lors du contrôle du chantier de Chambray-les-Tours, le 28 septembre 2006 ; que ces divers éléments apportent la démonstration que contrairement aux déclarations de Mme K..., responsable de la sous-traitance au sein du groupe X..., la vérification des déclarations uniques d’embauche et des identités n’était pas effectuée ; que Mme K... observait également qu’une copie des pièces d’identité était transmise aux conducteurs de travaux censés vérifier les visages, ce qui n’avait pas été fait relativement chantier de Verrières ; qu’il apparaissait également, que la déclaration unique d’embauche de M. C..., interlocuteur habituel du groupe X... pour le compte de la société Rewi Bat, ne figurait pas dans le dossier administratif de cette dernière, ce que Mme K... qualifiait de « gros loupé » ; qu’il découle de ces éléments que la procédure de contrôle mise en place au sein du groupe X... n’était manifestement pas respectée, bien que le contrôle de la liste du personnel devant être présent sur le chantier apparaisse comme un préalable nécessaire à la signature du contrat ; que ce manque répété de rigueur ne peut être la conséquence d’une inattention ponctuelle d’autant qu’il est apparu que certains salariés pouvaient être recrutés dans la journée du vendredi pour le lundi suivant ce qui mettait manifestement l’entreprise sous-traitante dans l’impossibilité de constituer leur dossier administratif d’embauche, avant leur prise de fonction ; que M. X... a précédemment été reconnu coupable de l’infraction de prêt de main-d’oeuvre à but lucratif hors du cadre légal du travail temporaire au vu notamment du lien de subordination exercé, en pratique, par le groupe X... sur la main-d’oeuvre sous-traitée ; que c’est donc à juste titre que le tribunal correctionnel, dont la décision sera confirmée, est entrée en voie de condamnation à l’encontre de M. X..., de ce chef ; que s’agissant de l’emploi d’un étranger non muni d’une autorisation de travail salarié : alors qu’il travaille habituellement dans le cadre de contrats sous-traitance avec des entreprises turques employant leurs nationaux, il incombait également au groupe X..., préalablement à la signature de contrats, de s’assurer que les salariés qui lui étaient proposés se étaient titulaires d’un titre de travail ce qui n’était manifestement pas le cas de M. Dogan R..., ainsi qu’il résulte du contrôle du 21 novembre 2011 ; que cette défaillance caractérise l’infraction relevée à juste titre par le tribunal correctionnel à l’encontre de M. X... ; qu’une partie des faits commis par M. X... l’a été en état de récidive légale ; que toutefois, en considération des garanties d’insertion présentées par le prévenu, il convient de prononcer une peine inférieure au seuil prévu par l’article 132-19-1, premier alinéa, du code pénal ; que la peine de huit mois d’emprisonnement, prononcée par le tribunal sera, dès lors, confirmée en ce qu’elle répond aux exigences des alinéas 1 et 2 de l’article 132-24 du code pénal ; qu’elle sera, dans ses modalités, affectée d’un sursis simple ; qu’il convient également de confirmer la peine d’amende prononcée par le tribunal correctionnel ainsi que la mesure de publication qu’il a ordonnée ;
« 1°) alors que n’est pas constitutif d’un prêt de main d’oeuvre, l’exécution par une entreprise d’un chantier clairement défini dans le cadre d’un contrat de sous-traitance pour le compte d’une autre entreprise moyennant une rémunération forfaitaire avec un personnel et du matériel qui lui sont propres ; que le caractère forfaitaire de la rémunération versée à l’entreprise qui effectue les travaux, indépendamment du nombre d’heures effectivement accomplies par les travailleurs, est constitutif d’un indice d’un véritable contrat de sous-traitance ; que l’existence d’une certaine dépendance économique entre le donneur d’ordre et le sous-traitant n’est, en revanche, pas susceptible de constituer un indice de l’existence d’une opération de prêt de main d’oeuvre ; qu’en prétendant se fonder sur l’absence de négociation des prix par les entreprises sous-traitantes de la société groupe X... et sur le fait que celles-ci réalisaient la plus grande partie de leur chiffre d’affaires avec la société groupe X... pour caractériser le délit de prêt de main d’oeuvre illicite, la cour d’appel s’est fondée sur un motif inopérant et a violé les texte visés au moyen ;
« 2°) alors que n’est pas constitutif d’un prêt de main-d’oeuvre l’exécution par une entreprise d’un chantier clairement défini dans le cadre d’un contrat de sous-traitance pour le compte d’une autre entreprise moyennant une rémunération forfaitaire avec un personnel et du matériel qui lui sont propres ; que la requalification du contrat de sous-traitance en prêt de main d’oeuvre suppose que soit caractérisée l’existence d’un pouvoir de direction et de contrôle effectif exercé par le donneur d’ordre sur les salariés du prétendu sous-traitant au cours de l’exécution de leur prestation ; que, s’agissant des chantiers sous-traités par la société groupe X... aux sociétés Prestige Sol et Pro Carrelage, la cour d’appel n’a pas caractérisé l’existence d’un quelconque pouvoir de direction exercé par les conducteurs de travaux de la société groupe X... sur l’activité des salariés de ces deux entreprises sous-traitantes ;
« 3°) alors que n’est pas constitutif d’un prêt de main-d’oeuvre l’exécution par une entreprise d’un chantier clairement défini dans le cadre d’un contrat de sous-traitance pour le compte d’une autre entreprise moyennant une rémunération forfaitaire avec un personnel et du matériel qui lui sont propres ; que la requalification du contrat de sous-traitance en prêt de main-d’oeuvre suppose que soit caractérisée l’existence d’un pouvoir de direction et de contrôle effectif exercé par le donneur d’ordre sur les salariés du prétendu sous-traitant au cours de l’exécution de leur prestation ; que la seule existence d’instructions données aux sous-traitants quant à la prestation à accomplir relève de l’exécution normale du contrat de sous-traitance et ne saurait suffire à établir l’existence d’un prêt de main-d’oeuvre ; que, s’agissant des chantiers sous-traités par la société groupe X... aux sociétés Rewi Bat et Saffat Concept, la cour d’appel s’est bornée à relever l’existence d’« ordres » donnés par les conducteurs de travaux aux sous-traitants ; qu’en statuant de la sorte, sans caractériser la nature, la fréquence, ni même les destinataires de ces ordres, ni l’existence d’un contrôle permanent exercé par les conducteurs de travaux de la société groupe X... sur l’activité des salariés employés par les société sous-traitantes, la cour d’appel n’a pas caractérisé l’existence d’un prêt de main-d’oeuvre et n’a donné de base légale à sa décision au regard des textes visés au moyen » ;
Sur le deuxième moyen de cassation proposé pour M. Y..., pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, L. 8221-3, L. 8224-1, L. 8224-3, L. 8241-1 et L. 8243-1 du code du travail, 441-3 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
« en ce que l’arrêt attaqué a déclaré M. Y... coupable des délits d’exécution de travail dissimulé, de prêt Illicite de main-d’oeuvre à but lucratif et de détention frauduleuse de plusieurs faux documents administratifs, l’a, en répression, condamné à des peines d’emprisonnement avec sursis, d’amende et d’interdiction d’exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, administrer, gérer ou contrôler une entreprise ou une société et statué sur les intérêts civils ;
« aux motifs propres que s’agissant de l’exécution d’un travail dissimulé ; que dans ses écritures, M. Y... ne conteste pas qu’un certain nombre de salariés de la société Pro Carrelage n’étaient pas déclarés ; qu’il se contente de remettre en question sa qualité de gérant de fait en se déclarant seulement « chef de chantier » ; que ses propres déclarations sont cependant combattues par celles du gérant de droit, M. L... qui a reconnu que toute l’activité professionnelle de la société Pro Carrelage reposait sur M. Y... g, que lui-même ne servait que de boîte aux lettres car le milieu du bâtiment lui était totalement inconnu ; qu’il précise encore que M. Y... était sur les chantiers et s’occupait du recrutement ; que c’est lui qui signait les contrats de sous-traitance ; qu’il disposait de la carte bancaire de la société ainsi que du chéquier ; qu’il bénéficiait d’une délégation de pouvoir pour ce faire ; que ces déclarations apparaissent conformes à la réalité dans la mesure où l’enquête a mis en évidence que M. Y..., qui avait pouvoir de signature, était le seul interlocuteur de Mme K... qui ne connaissait pas M. L... et que c’était effectivement, selon l’un des ouvriers, M. R..., M. Y... qui comptait les jours travaillés, louait l’hôtel et montrait le travail à faire ; que c’est donc à juste titre que le tribunal correctionnel a considéré qu’il exerçait, dans la réalité, les fonctions de gérant de fait de la société Pro Carrelage et qu’il l’a retenu, de ce chef, dans les liens de la prévention ; * s’agissant du prêt de main-d’oeuvre à but lucratif hors du cadre légal du travail temporaire : que M. Y..., en sa qualité de gérant de fait de la société Pro Carrelage, a procédé au recrutement des ouvriers carreleurs employés par le groupe X... dans le cadre de contrats de sous-traitance dont il ne pouvait ignorer qu’ils ne remplissaient pas les conditions légales d’un prêt temporaire de main-d’oeuvre à but lucratif, compte tenu notamment de l’absence totale de marge de discussion sur les prix ; qu’il a cependant volontairement accepté de contracter avec le groupe X... pour remporter un marché, faisant fi des conditions légales devant encadrer la transaction ; qu’il convient, en conséquence, de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a retenu le prévenu, de ce chef, dans les liens de la prévention ; que s’agissant de la détention frauduleuse de plusieurs faux documents administratifs : qu’il est établi que M. Y... était le seul interlocuteur du groupe X... au regard de la fourniture des pièces nécessaires à l’établissement des contrats de sous-traitance établis entre ce dernier et la société Pro Carrelage, notamment pour la constitution des dossiers du personnel ; qu’une perquisition effectuée dans les locaux du groupe X..., hors garde à vue des prévenus, de permis de découvrir :- un faux titre de séjour valable du 11 avril 2010 au 10 avril 2011 établi au nom de M. Y...,- un faux titre de séjour au nom de M. M...,- un faux titre de séjour au nom de M. N...,- un faux titre de séjour au nom de M. O... R... ; que devant le tribunal correctionnel, M. Y... a reconnu s’être fait faire un faux titre de séjour car il se trouvait sans papiers ; que c’est donc à juste titre que le premier juge, dont la décision sera confirmée, a retenu le prévenu, de ce chef, dans les liens de la prévention ;
« et aux motifs des premiers juges que « M. Y... est poursuivi pour travail clandestin, prêt de main-d’oeuvre illicite au bénéfice de la société X... et détention de faux documents administratifs ; que M. L..., gérant de droit de la société Pro Carrelage, expliquait qu’il avait créé cette société en 2008 avec M. Y... ; que M. Y... n’était pas déclaré pour une quelconque activité au sein de la société et cette personne bénéficiait d’une carte de séjour valable du 9 avril 2010 au 8 juillet 2010 ne lui permettant pas de travailler en France ; que néanmoins l’enquête montrait que M. Y... avait adressé des virements pour des sommes importantes en Turquie (290 260 euros entre le 27 février 2006 et le 13 septembre 2010) ; qu’il s’avérait que sans avoir d’autorisation de travail et sans avoir fait jamais aucune déclaration aux organismes sociaux ou fiscaux, M. Y... se comportait en gérant de droit de la société Pro Carrelage qui travaillait en sous-traitance avec le groupe X... ; qu’à l’audience, M. Y... reconnaît avoir été gérant de droit de la société Pro Carrelage, ce qui coïncide parfaitement avec les déclarations de :- Mme K..., qui indiquait qu’il était son seul interlocuteur pour ce qui concerne la société Pro Carrelage dont elle ne connaît pas le gérant de droit,- M. R... qui déclarait que les salariés de la société Pro Carrelage ne connaissaient pas le gérant et que M. Y... comptait lés jours travaillés, louait l’hôtel et montrait le travail à faire,- M. L... qui disait que M. Y... trouvait les chantiers, recrutait les ouvriers, donnait les ordres et payait les salaires et les factures et que pour ce faire I1 disposait des chéquiers et de la carte bancaire de la société Pro Carrelage ; qu’il indique qu’il n’a jamais fait travailler personne sans le déclarer ce qui entre en contradiction avec les déclarations de MM. Erin et Nihat Y... qui indiquaient avoir travaillé au noir pour la société Pro Carrelage ; qu’il apparaissait que la société Pro Carrelage travaillait pour l’année 2010 à-78, 5 % de son chiffre d’affaires pour le groupe X... ; que l’imbrication des sociétés et des amitiés était telle qu’il s’avérait que sur le chantier sis à Naintré effectué pour la société SEM Habitat dont le lot de carrelage était confié à la société X... et qui avait fait l’objet d’un « contrat de sous-traitance » à la société Rewi Bat, on trouvait le 3 novembre 2010 les véhicules de MM. Murat et Nihat Y... (qui reconnaissait travailler au noir pour la société Pro Carrelage) ; que M. Y..., gérant de fait, signait des contrats de sous-traitance avec le groupe X... et remettait des documents concernant les ouvriers censés travailler sur les chantiers ; que c’est ainsi que lors de la perquisition effectuée dans les locaux du groupe X... ; on découvrait :- un faux titre de séjour valide du 11 avril 2010 au 10 avril 2020 au nom de M. Y... qui n’était, rappelons-le, bénéficiaire que d’une carte de séjour valable du 9 avril 2010 au 8 juillet 2010 ne lui permettant pas de travailler en France,- un faux titre de séjour au nom de M. M...,- un faux titre de séjour au nom de M. N...,- un faux titre de séjour au nom de M. R... ; que ces documents falsifiés remis par M. Y... venaient constituer un dossier de sous-traitance établi entre la société Pro Carrelage et le groupe X... ; que leur caractère faux n’était pas détecté par le groupe X... malgré les explications de Mme K... indiquant que pour les étrangers, on Interrogeait la préfecture qui devait répondre dans les 48 heures ; que ceci prouve que la démarche n’était pas faite ; qu’à l’audience, M. Y... reconnaît s’être fait faire un faux titre de séjour car il se trouvait sans papier ; que la non vérification administrative et la non vérification sur les lieux de la concordance des identités des ouvriers présents avec les identités des ouvriers déclarés suffisent à démontrer que l’établissement de contrats de sous-traitance très imparfaits n’avait pour but que de faire croire à la régularité de l’intervention d’ouvriers turcs dans le cadre d’un prêt de main-d’oeuvre mal maquillé en prêt de main-d’oeuvre licite ; qu’au vu de tous ces éléments, il convient de déclarer M. Y... coupable des faits qui lui sont reprochés ;
« alors que le gérant de fait est celui qui exerce, en toute indépendance et de manière habituelle, des actes positifs de gestion et de direction de la société ; qu’en l’état des constatations de l’arrêt, qui font uniquement apparaître que M. Y... encadrait le travail effectué sur les chantiers et servait, à cette occasion, d’interlocuteur avec la société X..., et non qu’Il assurerait effectivement la direction de la société Pro Carrelage, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés » ;
Sur le troisième moyen de cassation proposé pour M. Y..., pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, L. 8241-1 et L. 8243-1 du code du travail, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
« en ce que l’arrêt attaqué a déclaré M. Y... coupable de prêt Illicite de main-d’oeuvre à but lucratif, l’a, en répression, condamné à des peines d’emprisonnement avec sursis, d’amende et d’interdiction d’exercer une profession commerciale ou Industrielle, de diriger, administrer, gérer ou contrôler une entreprise ou une société et statué sur les intérêts civils ;
« aux motifs propres que M. Y..., en sa qualité de gérant de fait de la société Pro Carrelage, a procédé au recrutement des ouvriers carreleurs employés par le groupe X... dans le cadre de contrats de sous-traitance dont il ne pouvait ignorer qu’ils ne remplissaient pas les conditions légales d’un prêt temporaire de main-d’oeuvre à but lucratif, compte tenu notamment de l’absence totale de marge de discussion sur les prix ; qu’il a cependant volontairement accepté de contracter avec le groupe X... pour remporter un marché, faisant fi des conditions légales devant encadrer la transaction ; qu’il convient, en conséquence, de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a retenu le prévenu, de ce chef, dans les liens de la prévention ; que s’agissant de la détention frauduleuse de plusieurs faux documents administratifs : qu’il est établi que M. Y... était le seul interlocuteur du groupe X... au regard de la fourniture des pièces nécessaires à l’établissement des contrats de sous-traitance établis entre ce dernier et la société Pro Carrelage, notamment pour la constitution des dossiers du personnel ; qu’une perquisition effectuée dans les locaux du groupe X..., hors garde à vue des prévenus, a permis de découvrir :- un faux titre de séjour valable du 11 avril 2010 au 10 avril 2011 établi au nom de M. Y...,- un faux titre de séjour au nom de M. M...,- un faux titre de séjour au nom de M. N...,- un faux titre de séjour au nom de M. P... R... ; que devant le tribunal correctionnel, M. Y... a reconnu s’être fait faire un faux titre de séjour car il se trouvait sans papiers ; que c’est donc à juste titre que le premier juge, dont la décision sera confirmée, a retenu le prévenu, de ce chef, dans les liens de la prévention ;
« et aux motifs des premiers juges que « M. Y... est poursuivi pour travail clandestin, prêt de main-d’oeuvre illicite au bénéfice de la société X... et détention de faux documents administratifs ; que M. L..., gérant de droit de la société Pro Carrelage, expliquait qu’il avait créé cette société en 2008 avec M. Y... ; que M. Y... n’était pas déclaré pour une quelconque activité au sein de la société et cette personne bénéficiait d’une carte de séjour valable du 9 avril 2010 au 8 juillet 2010 ne lui permettant pas de travailler en France ; que néanmoins l’enquête montrait que M. Y... avait adressé des virements pour des sommes importantes en Turquie (290 260 euros entre le 27 février 2006 et le 13 septembre 2010) ; qu’il s’avérait que sans avoir d’autorisation de travail et sans avoir fait Jamais aucune déclaration aux organismes sociaux ou fiscaux, M. Y... se comportait en gérant de droit de la société Pro Carrelage qui travaillait en sous-traitance avec le groupe X... ; qu’à l’audience, M. Y... reconnaît, avoir été gérant de droit de la société Pro Carrelage, ce qui coïncide parfaitement avec les déclarations de :- Mme K..., qui indiquait qu’il était son seul interlocuteur pour ce qui concerne la société Pro Carrelage dont elle ne connaît pas le gérant de droit,- M. R... qui déclarait que les salariés de la société Pro Carrelage ne connaissaient pas le gérant et que M. Y... comptait les jours travaillés, louait l’hôtel et montrait le travail à faire,- M. L... qui disait que M. Y... trouvait les chantiers, recrutait les ouvriers, donnait les ordres et payait les salaires et les factures et que pour ce faire il disposait des chéquiers et de la carte bancaire de la société Pro Carrelage ; qu’il indique qu’il n’a jamais fait travailler personne sans le déclarer ce qui entre en contradiction avec les déclarations de MM. Erin et Nihat Y... qui indiquaient avoir travaillé au noir pour la société Pro Carrelage ; qu’il apparaissait que la société Pro Carrelage travaillait pour l’année 2010 à 78, 5 % de son chiffre d’affaires pour le groupe X... ; que l’imbrication des sociétés et des amitiés était telle qu’il s’avérait que sur le chantier sis à Naintré effectué pour la société SEM Habitat dont le lot de carrelage était confié à M. X... et qui avait fait l’objet d’un « contrat de sous-traitance » à la société Rewi Bat, on trouvait le 3 novembre 2010 les véhicules de MM. Murat et Nihat Y... (qui reconnaissaient travailler au noir pour la société Pro Carrelage) ; que M. Y..., gérant de fait, signait des contrats de sous-traitance avec le groupe X... et remettait des documents concernant les ouvriers censés travailler sur les chantiers ; que c’est ainsi que lors de la perquisition effectuée dans les locaux du groupe X..., on découvrait :- un faux titre de séjour valide du 11 avril 2010 au 10 avril 2020 au nom de M. Murat Y... qui n’était, rappelons-le, bénéficiaire que d’une carte de séjour valable du 9 avril 2010 au 8 juillet 2010 ne lui permettant pas de travailler en France-un faux titre de séjour au nom de M. M...,- faux titre de séjour au nom de M. N..., un faux titre de séjour au nom de M. R... ;
que ces documents falsifiés remis par M. Murat Y... venaient constituer un dossier de sous-traitance établi entre la société Pro Carrelage et le groupe X... ; que leur caractère faux n’était pas détecté par le groupe X... malgré les explications de Mme K... indiquant que pour les étrangers, on interrogeait la préfecture qui devait répondre dans les quarante-huit heures ; que ceci prouve que Ia démarche n’était pas faite qu’à l’audience, M. Y... reconnaît s’être fait faire un faux titre de séjour car Il se trouvait sans papier ; que la non vérification administrative et la non vérification sur les lieux de la concordance des identités des ouvriers présents avec les identités des ouvriers déclarés suffisent à démontrer que l’établissement de contrats de sous-traitance très imparfaits n’avait pour but que de faire croire à la régularité de l’intervention d’ouvriers turcs dans le cadre d’un prêt de main-d’oeuvre mal maquillé en prêt de main-d’oeuvre licite ; qu’au vu de tous ces éléments, il convient de déclarer M. Y... coupable des faits qui lui sont reprochés ;
” 1°) alors que l’exécution d’un contrat de sous-traitance n’est pas, en soi, constitutive d’un prêt de main-d’oeuvre Illicite ; que le seul fait que le prix de la prestation du sous-traitant soit imposé par le donneur d’ordre n’est pas de nature à caractériser l’Infraction, dès lors que cette rémunération est fixée de manière forfaitaire ; qu’en relevant, pour juger que les faits de prêt illicite de main-d’oeuvre seraient établis, que la société Pro Carrelage ne disposait d’aucune marge de manoeuvre sur les prix des prestations qu’elle facturait, dans le cadre des contrats de sous-traitance la liant à la société X..., la cour d’appel s’est déterminée par un motif inopérant et a méconnu les textes susvisés ;
” 2°) alors que la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu’en retenant, pour juger que les faits de prêt illicite de main-d’oeuvre seraient établis, que les ouvriers de la société Pro Carrelage se trouvaient placés sous « l’autorité directe » des conducteurs de travaux du groupe X... (cf. arrêt, p. 12, §. 2), tout en relevant que c’est M. Y... qui leur montrait le travail à faire (cf. arrêt, p. 13), la cour d’appel a entaché son arrêt d’une contradiction de motifs ;
” 3°) alors que le prêt de main-d’oeuvre n’est pas prohibé lorsqu’il est la conséquence nécessaire de la transmission d’un savoir-faire ou de la mise en oeuvre d’une technicité qui relève de la spécificité propre de l’entreprise prêteuse ; qu’en retenant que M. Y... s’était rendu coupable de prêt de main-d’oeuvre illicite, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les ouvriers de la société Pro Carrelage ne possédaient pas un savoir-faire spécifique de pose de carrelage à l’ancienne, la cour d’appel n’a pas justifié légalement son arrêt au regard des textes susvisés » ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les énonciations de l’arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s’assurer que la cour d’appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé la qualité de gérant de fait de la société Pro carrelage de M. Y..., ainsi que tous les éléments, tant matériels qu’intentionnel, des délits dont elle a déclaré les prévenus coupables ;
D’où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l’appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;
Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix septembre deux mille quatorze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Décision attaquée : Cour d’appel de Poitiers , du 30 mai 2013