Employeur de fait

Le : 21/10/2011

Cour de cassation

chambre criminelle

Audience publique du 22 juin 1999

N° de pourvoi : 98-87130

Non publié au bulletin

Rejet

Président : M. GOMEZ, président

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-deux juin mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire DESPORTES, les observations de Me BLANC, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général LAUNAY ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

"-" TURCO Jean-Pierre,

contre l’arrêt de la cour d’appel de POITIERS, chambre correctionnelle, en date du 22 octobre 1998, qui, pour travail clandestin, l’a condamné à 8 mois d’emprisonnement avec sursis et à 12 000 francs d’amende ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 324-9, L. 324-10 du Code du travail, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

”en ce que l’arrêt attaqué a déclaré coupable de travail clandestin Jean-Pierre Z..., gérant de la société maître de l’ouvrage, en raison de l’emploi de salariés par un entrepreneur, M. X..., sans tenue d’un livre de paie et d’un registre du personnel ;

”aux motifs que l’entreprise Gouraud effectuait sur le chantier des travaux de pose de cloisons sèches ; que dix salariés travaillaient sur le chantier sans qu’aucune déclaration préalable n’ait été enregistrée par l’URSSAF, sans que le livre de paie et le registre unique du personnel aient été ouverts, sans qu’aucune cotisation sociale n’ait été versée à l’URSSAF ; que si M. X... avait reconnu avoir recruté dix personnes, les ordres étaient donnés soit par Jean-Pierre Z... soit par son représentant M. Y... ;

que sous couvert d’une sous-traitance, il existait un prêt de main-d’oeuvre au profit essentiellement du donneur d’ouvrage ; que si les éléments du marchandage et du prêt de main-d’oeuvre illicite n’étaient pas nettement caractérisés, il convenait de dépasser l’écran formé par l’entreprise sous-traitante de façade pour retenir la responsabilité du donneur d’ouvrage, véritable employeur ;

”alors que l’infraction de travail clandestin suppose qu’une personne ait volontairement eu recours directement ou par personne interposée aux services de celui exerçant un travail dissimulé sans vérifier la régularité de la situation de ce dernier ;

que la cour d’appel, qui a constaté que seul l’entrepreneur, M. X..., avait procédé à l’embauche des dix salariés présents sur le chantier, ne pouvait retenir dans les liens de la prévention le maître de l’ouvrage, qui n’avait pas procédé aux formalités d’embauche du personnel, et qui avait obtenu de l’entrepreneur une attestation de ne pas employer de travailleurs clandestins, en raison du seul fait qu’il s’était immiscé dans le chantier en donnant directement des ordres aux salariés” ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué qu’en 1996, sur un chantier de construction, ouvert au profit de la SCI du Parc, les services de l’inspection du travail, ont constaté la présence de plusieurs salariés employés sans qu’aient été effectuées au moins deux des formalités prévues par l’article L. 324-10, 3 ancien du Code du travail ; que Jean-Pierre Z..., représentant légal de la SARL Conseil, Coordination, Construction, Gestion, elle-même gérante de la SCI du Parc, a été poursuivi pour travail clandestin ;

Attendu que, pour établir que le prévenu était le véritable employeur des ouvriers concernés, présentés par lui comme les salariés d’un entrepreneur sous-traitant, la cour d’appel retient qu’aucun contrat de sous-traitance n’avait été signé par cet entrepreneur, qui travaillait exclusivement pour la SCI du Parc dans une situation de totale dépendance économique ; qu’elle ajoute que les ordres relatifs à la conduite du chantier étaient donnés soit par Jean-Pierre Z..., soit par son représentant et que la SCI payait elle-même par des chèques établis sans indication du bénéficiaire, tant les salariés que les matériaux utilisés ;

Attendu qu’en l’état de ces énonciations, d’où il résulte que Jean-Pierre Z... a employé en connaissance de cause des travailleurs dissimulés, la cour d’appel a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;

D’où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l’article L. 131-6, alinéa 4, du Code de l’organisation judiciaire : M. Gomez président, M. Desportes conseiller rapporteur, M. Milleville conseiller de la chambre ;

Avocat général : M. Launay ;

Greffier de chambre : Mme Nicolas ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;

Décision attaquée : cour d’appel de Poitiers, chambre correctionnelle du 22 octobre 1998

Titrages et résumés : TRAVAIL - Travail clandestin - Activités professionnelles visées par l’article L324-10 du code du travail - Eléments constitutifs - Elément matériel.

Textes appliqués :
* Code du travail L324-9 et L324-10