Conditions de validité

Cour de cassation

chambre sociale

Audience publique du 17 mars 2010

N° de pourvoi : 08-43368

Non publié au bulletin

Cassation partielle

Mme Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président), président

SCP Laugier et Caston, SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 11 janvier 1993, en qualité d’ingénieur en calcul de structures, par la société Teuchos exploitation, a été licencié le 23 juin 2004 pour non-respect d’une clause de mobilité ; qu’il a saisi la juridiction prud’homale de diverses demandes relatives notamment à sa classification et à cette rupture ;
Sur le troisième moyen :
Attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l’admission du pourvoi ;
Mais sur le premier moyen :
Vu l’article L. 1221-1 du code du travail, ensemble l’article 1134 du code civil ;
Attendu qu’une clause de mobilité doit définir de façon précise sa zone géographique d’application et qu’elle ne peut conférer à l’employeur le pouvoir d’en étendre unilatéralement la portée ;
Attendu que pour déclarer le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et débouter le salarié de ses demandes relatives à la rupture du contrat de travail, l’arrêt retient que le contrat de travail, tout en précisant que le lieu de travail est fixé en région parisienne, prévoit une clause de mobilité stipulant que “ compte tenu de la nature des activités de la société le salarié pourra être appelé à exercer ses fonctions dans les installations de ses entreprises clientes “, que l’employeur ne pouvant connaître à l’avance quels seront ses clients futurs et leur lieu d’établissement, il ne peut renseigner plus son salarié sur l’étendue de la clause dont le caractère général ne résulte que de la nature des activités exercées par l’employeur pour lesquelles le salarié est embauché en connaissance de cause et que le fait que cette clause est complétée par une mention relative aux autres lieux d’exercice de son activité où pourra être muté le salarié ne peut entraîner sa nullité alors que tout au long de sa carrière M. X... a été affecté chez des clients de la région parisienne puis à Lyon et qu’il lui est reproché d’avoir refusé des propositions de mutation dans la région parisienne qui est le lieu même du travail fixé par le contrat ;
Qu’en statuant ainsi, par un motif inopérant tiré de la mobilité effective du salarié au cours de sa carrière, et alors qu’elle constatait l’indétermination de l’étendue géographique de la clause de mobilité qui dépendait de futurs clients, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le deuxième moyen :
Vu l’annexe II de la convention collective des bureaux d’étude techniques, cabinets d’ingénieurs conseils et sociétés de conseils du 15 décembre 1987 ;
Attendu que pour débouter le salarié de ses demandes à titre de rappel de salaire fondée sur la classification 3. 1 et en dommages-intérêts pour “ discrimination salariale “, l’arrêt retient, d’une part, que cette position doit inclure, ce qui n’est pas le cas en l’espèce, les conditions de la position 2. 3, notamment le fait d’assumer des responsabilités pour diriger les employés, techniciens ou ingénieurs, d’autre part, qu’en l’absence de tout panel de comparaison nominatif et détaillé, M. X..., classé en catégorie 2. 2, tout en percevant un salaire moyen proche de celui des cadres de catégorie 3. 1, sur lesquels il ne dit rien de concret, ne présente pas d’élément de fait laissant supposer l’existence d’une inégalité de traitement ;
Qu’en statuant ainsi, alors que l’annexe II de la convention collective ne prévoit pas, pour la position 3. 1 la nécessité de remplir, outre les conditions prévues pour celle-ci, celles relatives à une autre position, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a déclaré fondé le licenciement, a débouté le salarié de ses demandes relatives à ce licenciement, à la classification 3. 1 et à la “ discrimination salariale “ et a rejeté celle tendant à la remise de bulletins de paie et de documents rectifiés, l’arrêt rendu le 19 mai 2008, entre les parties, par la cour d’appel de Grenoble ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Lyon ;
Condamne la société Teuchos aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Teuchos et condamne celle-ci à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mars deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION (sur la rupture)
Le moyen reproche à l’arrêt attaqué d’AVOIR dit le licenciement de M. X... justifié par une cause réelle et sérieuse, et de l’avoir en conséquence débouté de ses demandes d’indemnité pour licenciement non causé ;
AUX MOTIFS propres QUE l’activité de la société TEUCHOS fait que ses ingénieurs doivent, selon la nature des missions qui leur sont confiées, effectuer leurs prestations techniques dans les locaux même des entreprises clientes ; que le contrat de travail signé par Monsieur X..., qui précise que son lieu de travail est fixé en région parisienne où se trouve le siège de l’entreprise, prévoit aussi une clause de mobilité en ce sens que, “ compte tenu de la nature des activités de la société le salarié pourra être appelé à exercer ses fonctions dans les installations de ses entreprises clientes “ ; Que l’employeur ne pouvant à l’avance connaître quels seront ses clients futurs et leur lieu d’établissement, il ne peut renseigner plus son salarié sur l’étendue de la clause dont le caractère général ne résulte que de la nature des activités exercées par l’employeur pour lesquelles le salarié est embauché en toute connaissance de cause ; Que si la clause de mobilité est complétée par une mention relative aux autres lieux d’exercice de son activité où pourra être muté le salarié, elle ne peut entraîner sa nullité alors que tout au long de sa carrière Monsieur X... n’a été affecté que chez des clients dans la région parisienne puis à LYON et qu’il lui est reproché dans le cadre de son licenciement d’avoir refusé des propositions de mutation dans la région parisienne qui est le lieu même de travail fixé par son contrat ; que c’est donc à bon droit que le Conseil de Prud’hommes a dit que la clause de mobilité n’est pas nulle ; que Monsieur X... ne justifie d’aucune promesse qui lui aurait été faite avant son embauche de travailler en province ; que l’attestation d’un collègue de travail de l’époque ne peut suffire à l’établir alors qu’eu égard à son niveau de qualification, il a signé son contrat de travail en toute connaissance de cause d’une affectation contractuelle en région parisienne avec possibilité d’être envoyé en mission en province en application de la clause de mobilité ; qu’il a d’ailleurs travaillé en région parisienne pendant près de trois ans jusqu’en 1996 date de son envoi en mission chez le client RVI à LYON ; que si dans son entretien individuel du 28 mars 1994 il a manifesté le souhait d’une mobilité dans la moitié sud de la France il n’a jamais évoqué une promesse qui lui aurait été faite en ce sens ; qu’il ne peut être reproché à la société TEUCHOS d’avoir ensuite, à sa demande, exaucé son souhait en l’envoyant en mission à LYON, non pas dans le cadre d’une mutation interne en un autre lieu d’établissement de l’entreprise mais en mission chez un client, cette affectation ne pouvant qu’être temporaire jusqu’au terme de la mission ; que la longueur de la mission ne peut pas plus faire que Monsieur X... serait au bénéfice d’un droit acquis à rester en région lyonnaise, ce qu’il ne soutient d’ailleurs pas ; qu’il fonde sa demande, la clause de mobilité étant déclarée valable, sur un usage abusif de celle-ci ; qu’il convient de rappeler qu’au terme de sa mission chez le client RVI Monsieur X... est parti en congé de formation en octobre 2001 pour un an, interrompu par un long arrêt pour maladie prolongé jusqu’au 28 février 2004 ; qu’il ne peut dans ces conditions être reproché à la société TEUCHOS de ne pas avoir sérieusement cherché une nouvelle mission dans la région lyonnaise pouvant lui être proposée dès la fin de son arrêt de travail dont la date lui était inconnue et alors que les missions demandées par les clients potentiels doivent être pourvues à court terme ; qu’il est donc normal qu’au cours de son arrêt maladie son employeur n’a pu qu’évoquer de manière vague d’éventuelles missions en province sans lui donner de détail tant que sa date de reprise du travail n’était pas connue ; que c’est par une première lettre du 20 février 2004 que Monsieur X... a évoqué une possibilité de reprise au 27 février date de fin de prolongation de son dernier arrêt de travail ; que dès cette correspondance Monsieur X... a évoqué son souhait réitéré de ne pas être éloigné de son domicile et l’absence de communication avec la société pendant son absence et fait état d’autres doléances en manifestant la volonté de se réinvestir dans un travail qui lui serait confié dans un secteur géographique “ raisonnable “, faisant ainsi prévaloir ses exigences quant à un maintien en province ; que le 28 février 2004 il a confirmé sa reprise du travail à cette date et sa volonté de réintégrer les effectifs de la société ; que pour des raisons étrangères à la société TEUCHOS la visite de reprise, qui seule marque juridiquement la fin de la période de suspension du contrat de travail pour cause de maladie, est intervenue le 31 mars 2004 ; que la société TEUCHOS ne pouvait donc dans l’intervalle pas faire de proposition précise à Monsieur X... tant que son aptitude après un long arrêt pour maladie ne serait pas constatée ; que dès le 19 mars 2004 la société TEUCHOS, prenant note du souhait de Monsieur X... d’être affecté en un lieu proche de son domicile, lui a proposé un rendez vous pour le 31 mars en l’informant de ce qu’elle allait entreprendre des recherches de missions dans le périmètre géographique fixé par son contrat de travail en faisant des efforts pour trouver une mission en un lieu conforme à ses préférences ; qu’alors que Monsieur X... a été en situation d’inter mission après la visite de reprise, il ne peut être reproché à la société TEUCHOS de ne pas lui avoir fait de proposition dès le 31 mars 2004 alors que cela supposait que des clients se soient récemment manifestés, que des missions ou projets de mission à pourvoir existent et que son souhait géographique était restreint ; que si ce n’est que par lettre du 6 mai 2004 que la société TEUCHOS lui a proposé de se positionner sur deux missions dans la région parisienne c’est après lui avoir expliqué que malgré ses recherches entreprises en priorité sur la région lyonnaise elle n’avait aucune opportunité à lui proposer dans cette région, ceci expliquant le retard apporté à la proposition ; que si un délai de 48 heures lui a été donné pour répondre aux deux offres précitées c’est parce qu’elles ne correspondaient pas l’une et l’autre à son souhait géographique et qu’il fallait d’abord qu’il indique s’il était ou non intéressé par l’une d’elle avant que soit mise en oeuvre la procédure habituelle tant en interne qu’auprès du client ce qui nécessite une intervention rapide pour s’assurer de l’effectivité du contrat ; que dans une longue lettre en réponse du 12 mai 2004 Monsieur X... a alors reproché à son employeur de ne pas lui avoir fait de proposition significative en Rhône Alpes correspondant à sa volonté de stabilisation dans ce secteur géographique ; qu’en des termes vifs où il évoque notamment un “ harcèlement moral “ et “ une volonté délibérée de mettre en péril son avenir professionnel et sa santé en lui proposant des postes à 600 kilomètres de son domicile “, il n’a apporté aucune réponse aux deux propositions qui lui ont été faites et a au contraire, en des termes polémiques, opposé à son employeur un refus sans équivoque puisqu’il demande un réexamen de sa situation et des recherches de postes situés dans son bassin géographique actuel faute de quoi il saisirait le Conseil de Prud’hommes ; que la société TEUCHOS quant à elle, faute d’une réponse rapide à ses propositions du 6 mai, a convoqué Monsieur X... à un entretien préalable prévu pour le 24 mai ; que postérieurement à cet entretien elle a, par lettre du 3 juin 2004, répondu, en des termes courtois mais circonstanciés, aux multiples griefs exposés dans la lettre précitée du 12 mai 2004 ; qu’elle lui a notamment rappelé qu’il était nécessaire qu’il donne rapidement une indication sur ses préférences entre les deux missions proposées du fait de la forte réactivité dont elle devait faire preuve face aux clients en l’informant à ce propos que la mission chez PSA n’était plus d’actualité puisqu’elle avait été entre temps pourvue ; qu’elle lui a rappelé qu’elle n’avait trouvé malgré ses recherches aucune mission à lui proposer en région lyonnaise comme cela avait déjà été évoqué précédemment ; que surtout, la seconde mission proposée chez le client EDF étant toujours disponible, elle lui a maintenu son offre et lui a demandé de lui indiquer clairement dans un délai de huit jours après réception du courrier s’il l’acceptait ; qu’aucune précipitation ne peut donc lui être reprochée ; qu’en l’absence de réponse c’est donc légitimement que la société TEUCHOS, par lettre motivée du 23 juin rédigée au-delà du délai imparti, a notifié à Monsieur X... son licenciement pour avoir refusé l’affectation proposée en région parisienne en infraction à son obligation contractuelle de mobilité ; que c’est à tort que Monsieur X... prétend que les deux propositions contenues dans la lettre du 6 mai 2004 sont imprécises alors que les missions correspondantes sont définies, les clients et les programmes concernés nommés et complétés par des indications détaillées sur les prestations demandées et les connaissances requises ; que c’est en vain que Monsieur X... reproche à la société TEUCHOS de ne pas lui avoir proposé d’autres missions correspondant à son profil au cours du premier semestre 2004 alors que toutes étaient sur la région parisienne et que certaines, soumises en janvier 2004, ont été rapidement pourvues ; que Monsieur X... ne démontre enfin pas qu’entre les mois de mars et juin 2004 la société TEUCHOS aurait pu lui proposer une mission dans la région lyonnaise ; qu’il ne procède sur ce point que par affirmation en produisant aux débats des offres de mission mais qui n’émanent pas de la société TEUCHOS, ou ne concernent pas des prestations d’étude que lui auraient confiées ses sociétés clientes et dont la plupart était à exécuter dans la région parisienne sauf deux, la première proposée en ILE DE FRANCE et en RHONE ALPE mais par une société B21 ingénierie dont rien ne permet de penser qu’elle a un rapport avec la société TEUCHOS et la seconde en Normandie en un lieu encore plus éloigné de son domicile et par une entreprise qui n’est pas nommée ; Qu’à supposer qu’une mission ait été disponible en région Rhône Alpes, encore faut-il qu’elle corresponde aux domaines de compétence de Monsieur X..., ce qu’il ne démontre pas, alors en outre que les activités de la société TEUCHOS sont essentiellement concentrées en région parisienne où se trouve son siège et son bureau d’étude ; que le seul exemple qu’il donne concerne la recherche d’un ingénieur mécanicien spécialisé en calcul crash et éléments finis avec une expérience dans la simulation de choc piéton, compétences dont il ne justifie pas qu’il les possède et alors en outre que l’annonce en question précise que la mission devait se dérouler dans l’Ain puis en région parisienne ; que c’est donc à bon droit que le Conseil de Prud’hommes, au vu de l’ensemble de ces éléments, a considéré que la société TEUCHOS n’avait pas fait un usage abusif de la clause de mobilité et dit en conséquence que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse ;
ET AUX MOTIFS adoptés des premiers juges que l’employeur invoque comme motif de licenciement le non respect de la clause de mobilité ; que cette clause de mobilité figure explicitement dans le contrat de travail de Monsieur X..., en son article IV-Lieu de travail : qu’ainsi le lieu de travail du salarié est fixé en région parisienne, mais que le salarié pourra être appelé à exercer ses fonctions dans les installations des entreprise clientes ; que cette clause de mobilité a d’ailleurs d’ores et déjà été mise en oeuvre entre juin 1996 et juin 2001 quand Monsieur X... a travaillé dans les locaux de la société RVI en région lyonnaise ; qu’en outre, cette clause de mobilité est très importante et nécessaire pour la Société car les salariés ingénieurs qu’elle emploie sont destinés à aller travailler dans les locaux des entreprises clientes, par nature dans des lieux géographiques différents ; qu’il convient ensuite de vérifier si cette clause de mobilité n’a pas été appliquée par l’employeur avec trop de célérité ; qu’à ce titre Monsieur X... souligne que la Société TEUCHOS EXPLOITATION ne lui laisse que deux jours pour accepter ses propositions, dans un courrier du 6 mai 2004 ; que pourtant, dès le 31 mars des propositions ont été faites à Monsieur X... ; ainsi son responsable lui a proposé d’étudier des mutations dans d’autres sociétés du groupe, à Toulouse, Cannes et Vitrolles (pièces 73 du défendeur), affirmation que n’a pas démentie Monsieur X... ; que si, dans le courrier du 6 mai, l’employeur demande une réponse sous 48 heures, le non respect de ce délai n’a entraîné aucun préjudice pour le salarié ; qu’ainsi, même s’il a été convoqué rapidement à un entretien préalable au licenciement, la Société TEUCHOS EXPLOITATION a, dans un courrier du 3 juin, proposé un nouveau délai à Monsieur X... ; qu’enfin la lettre de licenciement n’a été envoyée que le 23 juin 2004 ; qu’en conséquence il ressort que l’employeur a attendu près de trois mois entre le moment où il a commencé à faire des propositions à Monsieur X... (le 31 mars) et la prise de décision définitive suite au refus de Monsieur X... (le 23 juin) ; qu’ainsi la clause de mobilité n’a pas été appliquée à l’encontre de Monsieur X... avec trop de célérité, qu’il apparaît alors que le salarié a refusé d’exécuter une des clauses primordiales de son contrat, et que c’est pour une cause réelle et sérieuse que son employeur l’a licencié ensuite.
ALORS d’une part QU’une clause de mobilité doit définir de façon précise sa zone géographique d’application et ne peut conférer à l’employeur le pouvoir d’en étendre unilatéralement la portée ; qu’après avoir constaté que le contrat de travail signé par Monsieur X... précisait que son lieu de travail est fixé en région parisienne et prévoyait aussi une clause de mobilité prévoyant que, “ compte tenu de la nature des activités de la société le salarié pourra être appelé à exercer ses fonctions dans les installations de ses entreprises clientes “, sans autre limitation géographique, ce dont il se déduisait que la clause ne comportait aucune limitation géographiques, la Cour d’appel, en disant pourtant valable la clause de mobilité insérée au contrat de travail de M. X..., a violé l’article L121-1 devenu L 1221-1 du code du travail, ensemble les articles 1174 et 1134 du code civil ;
ALORS D’AUTRE PART QU’une clause de mobilité doit définir de façon précise sa zone géographique d’application et ne peut conférer à l’employeur le pouvoir d’en étendre unilatéralement la portée ; que la portée d’une clause de mobilité ne peut pas être étendue aux établissements de l’entreprise n’existant pas au moment de la signature du contrat de travail ; que le contrat de travail prévoyait que « la société se réserve le droit de procéder à la mutation du salarié dans l’ensemble des zones géographiques en France ou à l’étranger où elle exerce ou exercera son activité » ; que le salarié en déduisait la nullité de la clause (conclusions P. 53 et 54) ; qu’en affirmant la validité de la clause, sans répondre à ce chef des conclusions, la Cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
ALORS DE TROISIEME PART QU’une clause de mobilité doit définir de façon précise sa zone géographique d’application et ne peut conférer à l’employeur le pouvoir d’en étendre unilatéralement la portée ; qu’après avoir constaté le caractère indéterminé de la zone géographique d’intervention potentielle du salarié, en disant pourtant valable cette clause, motif pris de ce que l’employeur ne pouvant à l’avance connaître quels seraient ses clients futurs et leur lieu d’établissement, il ne peut renseigner plus son salarié sur l’étendue de la clause dont le caractère général ne résulte que de la nature des activités exercées par l’employeur pour lesquelles le salarié est embauché en toute connaissance de cause, la Cour d’appel a statué par un motif inopérant et a violé l’article L121-1 devenu L 1221-1 du code du travail, ensemble les articles 1174 et 1134 du code civil ;
ALORS DE QUATRIEME PART QUE la validité d’une clause de mobilité ne peut être conditionnée aux modalités de sa mise en oeuvre ; qu’en retenant que le salarié ne pouvait se prévaloir de la nullité de la clause de mobilité, dès lors que tout au long de sa carrière il n’a été affecté que chez des clients dans la région parisienne puis à LYON, et qu’il lui est reproché dans le cadre de son licenciement d’avoir refusé des propositions de mutation dans la région parisienne qui est le lieu même de travail fixé par son contrat, la Cour d’appel a conditionné la validité de la clause de mobilité aux modalités de sa mise en oeuvre, violant ainsi l’article 1134 du code civil ;
ALORS DE CINQUIEME PART ET SUBSIDIAIREMENT QUE le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi ; qu’agit avec une légèreté blâmable l’employeur qui décide de mettre en oeuvre une clause de mobilité figurant dans le contrat de travail d’un salarié à son retour de congé de longue durée, lui imposant un changement de domicile familial, alors qu’il connaît les difficultés familiales subies par son salarié et la nécessité rencontrée par ce dernier de demeurer à proximité de l’hôpital où est pris en charge son fils ; que le salarié faisait valoir dans ses conclusions (p. 56 et suivantes) que la société connaissait les contraintes familiales de M. X... et que ce dernier ne pouvait pas décider dans un délai de 48 heures une mutation en région parisienne sans prendre le temps nécessaire de consulter le corps médical à propos de son fils ; qu’en s’abstenant de répondre à ce chef péremptoire des conclusions de l’exposant, la Cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
ALORS DE SIXIEME PART ET SUBSIDIAIREMENT ENCORE QUE par lettre du 6 mai 2004, il était demandé au salarié de se positionner sous 48 heures sur deux propositions de postes emportant modification de son lieu de travail et de son domicile ; que faute de positionnement dans un délai aussi court, la société a convoqué le salarié à un entretien préalable en vue de son licenciement par courrier en date du 14 mai 2004, pour un entretien fixé au 24 mai, le licenciement pour refus de mobilité ayant été notifié le 23 juin 2004 ; qu’en retenant qu’aucune précipitation ne pouvait être reprochée à la société dans la mise en oeuvre de la clause de mobilité, dès lors que postérieurement à l’entretien préalable, l’employeur avait prorogé le délai de réponse octroyé au salarié, la Cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l’article 1134 du code civil ;
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION (sur la classification et la discrimination salariale)
Le moyen reproche à l’arrêt attaqué d’avoir débouté M. X... de ses demandes liées à la reconnaissance de la classification 3. 1 de la convention collective des bureaux techniques d’étude, de sa demande en dommages et intérêts pour violation du principe à travail égal, salaire égal, et de la demande de remise de bulletins de paie rectifiés sous astreinte journalière ;
AUX MOTIFS QUE Monsieur X... a été embauché par contrat écrit du 17 décembre 2002 en qualité d’ingénieur position 2. 1 de la convention collective SYNTEC ; que ses rapports d’entretien individuel font état, au titre de sa formation initiale et de ses diplômes, du DUT génie mécanique, MST sciences et technologies des matériaux et du diplôme d’ingénieur matériaux ISIM ; qu’il bénéficiait d’une expérience professionnelle antérieure de près de 5 ans en qualité d’ingénieur calculs de structures ; que son classement à l’embauche n’est pas anormal, les positions inférieures 1. 1 et 1. 2 étant réservées aux débutants, la position 2. 1 concernant les ingénieurs ou cadres ayant au moins deux ans de pratique de la profession, ce qui était son cas ; que la convention collective ne fixe pas d’autre durée de pratique professionnelle à l’embauche ; que rien ne permet de considérer eu égard à ses diplômes et à son expérience professionnelle passée qu’il aurait dû être classé à un niveau supérieur ; qu’il ne justifie pas de particularité qui aurait fait de lui un ingénieur au-dessus du niveau normal d’un ingénieur de sa catégorie, notamment dans son précédent emploi, la seule pièce produite aux débats sur ce point étant un CV récent établi par lui-même ; qu’il est exact que Monsieur X... a émis le souhait d’une évolution de carrière ; qu’il produit pour en justifier des entretiens individuels ; qu’au cours de ces entretiens il a sollicité une révision de sa position, sans préciser laquelle et une révision salariale “ à la mesure de la satisfaction donnée au client et à la durée des contrats décrochés “ ; qu’il a été classé à la position 2. 2 en 1998 qu’il n’a pas en son temps contestée ; qu’à la fin de sa dernière mission en 2001 il ne l’a pas remise en cause ni formé réclamation ; qu’il a au contraire sollicité et obtenu de son employeur un congé de formation d’un an sans présenter la moindre doléance sur sa situation au sein de l’entreprise ; que la société TEUCHOS justifie quant à elle qu’il a fait l’objet d’augmentations individuelles de salaire régulières ; qu’il résulte de cette progression salariale que le niveau de rémunération de Monsieur X... a été supérieur aux minima conventionnels, non seulement des niveaux 2. 2 ou 2. 3 de la convention collective mais aussi du niveau 3. 1 revendiqué à compter de 1998 ; qu’il en résulte que, à supposer même qu’il relève du niveau 3. 1, il ne pourrait prétendre à des rappels de salaires sur la base de ces minima ; qu’il en convient, sa demande consistant à réclamer le versement d’un salaire supérieur à la moyenne des salaires versés aux salariés positionnés 3. 1 eu égard à ses compétences et expériences particulières relevant de celles d’un “ expert “ ; que le fondement juridique d’une telle prétention, la qualification d’expert n’existant pas dans la convention collective, ne peut être que celui de la discrimination salariale, d’ailleurs qualifiée de la sorte pour les mêmes motifs dans ses conclusions de première instance ; que la position 3. 1 doit inclure les conditions de la position 2. 3, notamment le fait d’assumer des responsabilités pour diriger les employés, techniciens ou ingénieurs ; que pour en justifier Monsieur X... ne produit aux débats qu’un entretien individuel de janvier 1997 qui au titre de la description de ses activités porte la mention suivante : “ assure l’encadrement d’un technicien et la formation d’un ingénieur à l’analyse des structures “ ; que cette unique mention, non reprise dans l’entretien du mois de décembre de la même année, ne suffit pas à démontrer qu’au titre des fonctions réellement exercées Monsieur X... assurait des responsabilités de direction d’employés, de techniciens ou d’ingénieurs, cette condition supposant une certaine permanence non démontrée en l’espèce ; qu’aucun document émanant des clients chez lesquels il a effectué ses missions, même de longue durée, ne décrit une fonction de direction de personnel ; que les attestations qu’il produit aux débats de Messieurs Y..., Z..., A... ou encore B... ne font que développer les activités techniques qu’il a exercées avec grande compétence et à la satisfaction de tous mais sans jamais faire état d’une fonction de direction de personnel ; que ces compétences et fonctions techniques, exercées dans un domaine spécifique, les calculs des structures, constituent l’essence même des fonctions d’un ingénieur d’expérience, chargé d’effectuer des analyses et études complexes pour le compte d’entreprises clientes qui attendent de lui des propositions concrètes dans le cadre des projets sur lesquels il est affecté ; qu’alors qu’il percevait une rémunération supérieure au minimum conventionnel de la position 3. 1 revendiquée, il appartient à Monsieur X... d’apporter des éléments laissant penser qu’il a été victime d’une inégalité de traitement avec des salariés placés dans une situation identique, peu important d’ailleurs leur positionnement ; qu’il ne fournit cependant aucun élément de comparaison avec d’autres salariés, lesquels doivent en outre appartenir à la même entreprise ; que dés lors sa référence à un “ argus des salaires “ publié dans la revue CHALLENGES, qui n’est qu’un inventaire de qualifications multiples aussi diverses que variées dans lequel figure celle de “ consultant expert “ dont on ne sait ce qu’elle recouvre et qui ne concerne pas des salariés de la société TEUCHOS, est inopérante ; qu’il en est de même de la référence à un tableau anonyme relatif aux salaires versés aux cadres de la société TEUCHOS par position qui ne permet aucune comparaison avec d’autres salariés nommément désignés et dont aucun élément ne permet de penser qu’ils exerçaient des fonctions identiques ou seraient dans une situation similaire ; qu’en l’absence de tout panel de comparaison nominatif et détaillé, force est de constater que Monsieur X... ne présente pas d’élément de fait laissant supposer l’existence d’une inégalité de traitement alors que, classé au niveau 2. 2, il percevait un salaire dont il admet lui-même qu’il était proche du salaire moyen versé aux cadres de la catégorie 3. 1, sur lesquels il ne dit rien de concret quant aux fonctions et responsabilités exercées ; que le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu’il a débouté Monsieur X... de ses demandes résultant du positionnement revendiqué et de l’inégalité de traitement alléguée ; que pour les mêmes raisons il sera débouté de sa demande faite à titre subsidiaire ;
ALORS D’UNE PART QUE le bénéfice de la position 3. 1 de la convention collective des bureaux d’études techniques, cabinets d’ingénieurs conseils et sociétés de conseils du 15 décembre 1987 doit être accordé aux « ingénieurs et cadres placés sous les ordres d’un chef de service et qui exercent des fonctions dans lesquelles ils mettent en oeuvre non seulement des connaissances équivalant à celles sanctionnées par un diplôme, mais aussi des connaissances pratiques étendues sans assurer, toutefois, dans leurs fonctions, une responsabilité complète et permanente qui revient en fait à leur chef ; que le bénéfice de cette position n’est pas subordonné à la condition d’assurer des responsabilités de direction d’employés, de techniciens ou d’ingénieurs ; qu’en subordonnant la reconnaissance de cette classification à une telle condition, la Cour d’appel a violé l’annexe II de la convention collective susvisée ;
ALORS D’AUTRE PART ET SUBSIDIAIREMENT QU’à supposer qu’une telle condition soit requise, son caractère permanent ne l’est pas ; qu’en subordonnant le bénéfice de la position 3. 1 à une certaine permanence dans l’exercice de responsabilités de direction de personnel, la Cour d’appel a ajouté une condition à l’application de l’article 3. 1 de l’annexe II de la convention collective des bureaux d’études techniques, cabinets d’ingénieurs conseils et sociétés de conseils du 15 décembre 1987, le violant ainsi ;
ALORS DE TROISIEME PART QUE le bénéfice de la position 3. 1 de la convention collective des bureaux d’études techniques, cabinets d’ingénieurs conseils et sociétés de conseils du 15 décembre 1987 doit être accordé aux « ingénieurs et cadres placés sous les ordres d’un chef de service et qui exercent des fonctions dans lesquelles ils mettent en oeuvre, non seulement des connaissances équivalant à celles sanctionnées par un diplôme, mais aussi des connaissances pratiques étendues sans assurer, toutefois, dans leurs fonctions, une responsabilité complète et permanente qui revient en fait à leur chef » : qu’après avoir constaté que M. X... avait exercé ses compétences dans un domaine spécifique et avait effectué des analyses et études complexes, ce dont il résultait qu’il avait mis en oeuvre des connaissances pratiques étendues, la Cour d’appel, en refusant pourtant de reconnaître au salarié la classification 3. 1 de la convention collective susvisée, n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l’annexe II de la convention collective des bureaux d’études techniques, cabinets d’ingénieurs conseils et sociétés de conseils du 15 décembre 1987, et l’a violé ;
ALORS DE QUATRIEME PART QUE le silence gardé par un salarié ne peut valoir acceptation de sa part du maintien de sa rémunération et de sa classification ; qu’en affirmant, pour débouter M. X..., de sa demande tendant à se voir reconnaître la position 3. 1 de la convention collective, qu’il n’avait pas contesté son classement en position 2. 2 en 1998 et qu’il ne l’avait pas remis en cause ni formé réclamation à la fin de sa dernière mission en 2001, la cour d’appel a statué par un motif inopérant et a violé ensemble l’annexe II (article. 3. 1) à la convention collective des bureaux d’études techniques, cabinets d’ingénieurs conseils et sociétés de conseils du 15 décembre 1987 et l’article 1134 du code civil ;
ALORS DE CINQUIEME PART et en toute hypothèse QU’il appartient au salarié qui se prétend victime d’une inégalité salariale sur le fondement du principe à travail égal, salaire égal, d’établir les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération ; que pour l’application du principe à travail égal, salaire égal, sont placés dans une situation de fait comparables les salariés de l’entreprise bénéficiant d’une classification conventionnelle identique ; qu’en imposant à M. X... d’établir un panel de comparaison nominatif et détaillé, et en refusant de prendre en considération les éléments d’information fournis par l’employeur au comité d’entreprise, relatifs aux salaires minima, moyens et maxima des salariés de l’entreprise placés en position 3. 1 de la convention collective, éléments démontrant l’inégalité de rémunération subie par M. X..., et imposant de la part de l’employeur une explication objective susceptible de justifier une telle inégalité, la Cour d’appel a violé l’article 140-2, devenu L 3221-2 du code du travail ;
ALORS DE SIXIEME PART enfin QUE la justification d’une différence de rémunération au regard du principe à travail égal, salaire égal, peut être apportée par la preuve de la moindre qualité professionnelle ; qu’après avoir constaté que les appréciations des supérieurs hiérarchiques étaient toutes élogieuses en ce qui concerne le travail fourni par M. X..., ce dont il résultait que l’employeur ne pouvait pas justifier objectivement d’une moindre qualité professionnelle du salarié l’autorisant à lui allouer une rémunération inférieure à celle de la moyenne de ses collègues de l’entreprise TEUCHOS, la cour d’appel, en refusant de faire droit à la demande en réparation du salarié fondé sur le principe à travail égal, salaire égal, a violé ledit principe.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION (sur le marchandage et le prêt illicite de main d’oeuvre)
Le moyen reproche à l’arrêt attaqué débouté M. X... de ses demandes de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par le marchandage et de prêt illicite de main d’oeuvre dont il a été victime,
AUX MOTIFS PROPRES QU’aucun document émanant des clients chez lesquels il a effectué ses missions, même de longue durée, ne décrit une fonction de direction de personnel ; que les attestations qu’il produit aux débats de Messieurs Y..., Z..., A... ou encore B... ne font que développer les activités techniques qu’il a exercées avec grande compétence et à la satisfaction de tous mais sans jamais faire état d’une fonction de direction de personnel ; que ces compétences et fonctions techniques, exercées dans un domaine spécifique, les calculs des structures, constituent l’essence même des fonctions d’un ingénieur d’expérience, chargé d’effectuer des analyses et études complexes pour le compte d’entreprises clientes qui attendent de lui des propositions concrètes dans le cadre des projets sur lesquels il est affecté ;
ET AUX MOTIFS QUE l’activité même de la société TEUCHOS fait que ses ingénieurs doivent, selon la nature des missions qui leur sont confiées, effectuer leurs prestations techniques dans les locaux même des entreprises clientes, ce que le contrat de travail de Monsieur X... prévoit expressément ; que Monsieur X..., ingénieur en calculs de structures, ne peut sérieusement contester que les missions qui lui ont été confiées d’abord à RUEIL puis chez RVI à LYON nécessitaient qu’il travaille sur place eu égard aux études et tests à effectuer sur des éléments, par exemple de véhicules, que seuls le client détenait ou des logiciels et méthodes de calculs RENAULT et avec des matériels, notamment informatiques, spécifiques ; que les témoignages qu’il produit aux débats, s’ils confirment une forte intégration au sein des sociétés clientes, ne décrivent pas l’existence d’une subordination juridique mais l’exécution de prestations de service de la compétence d’un ingénieur expérimenté ; que ces prestations ne pouvaient s’exécuter que selon les exigences techniques des clients avec lesquels il devait nécessairement échanger pour leur soumettre ses propositions, analyses et résultats dans le cadre de l’élaboration de projets à mener à bonne fin ; que les croquis et notes qu’il invoque n’ont qu’un caractère technique et ne concernent que les missions techniques sur lesquelles il a été affecté en fonction de son savoir faire spécifique chez un client qui ne le possédait pas et dans le cadre d’un cahier des charges signé entre les sociétés TEUCHOS et RVI ; que Monsieur X... ne peut sérieusement prétendre comme il le dit dans ses écritures n’avoir été affecté, au sein de l’entreprise utilisatrice, à “ aucune tâche spéciale nettement définie “ alors que dans le CV qu’il produit aux débats il fait état, comme confirmé oralement à l’audience, de sa contribution, chez le client RVI, à des projets précis à savoir la mise au point d’un tracteur châssis pour l’Australie, des tests de fonctionnalité d’un logiciel et l’amélioration du confort vibratoire de l’AE ; que c’est toujours la société TEUCHOS qui a assuré le suivi administratif et de gestion de Monsieur X..., aucun échange autre que technique n’étant justifié avec les sociétés clientes ; que jamais en leur temps Monsieur X... n’a dénoncé ses conditions d’emploi chez les deux clients successifs, ni pendant ni au terme de ses missions qui ont normalement pris fin après réalisation des prestations prévues ; que la longueur de la deuxième mission chez le client RVI est insuffisante à démontrer l’existence d’un marchandage alors qu’elle a consisté, comme décrit dans le CV précité, en la réalisation de projets importants qui ont nécessité plusieurs années ; que dans sa lettre du 31 mai 2001 aux termes de laquelle Monsieur X... a sollicité un congé de formation externe d’un an il explique au contraire que celle-ci lui permettra une ouverture vers des clients potentiels plus large ce qui démontre qu’il n’a jamais remis en cause son intégration professionnelle au sein de la société TEUCHOS ; que si l’inspection du travail est intervenue, c’est sur une demande de sa part formulée le 27 juillet 2004 soit plusieurs années après la fin de sa dernière mission ; que dans une première réponse du 4 août 2004 l’administration ne fait que s’interroger sur l’existence d’une mise à disposition illégale de main d’oeuvre, ce qui ne suffit pas à caractériser une infraction dans tous ses éléments constitutifs pour ensuite, dans une seconde lettre du 20 août 2004, conclure qu’aucune enquête n’était possible compte tenu de l’ancienneté des faits, aucune suite n’ayant ainsi été donnée à sa réclamation ; que c’est donc à bon droit que le Conseil de Prud’hommes a considéré que le délit de prêt de main d’oeuvre illicite n’est pas caractérisé ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE Monsieur X... n’apporte aucun élément prouvant qu’il ait subi un quelconque préjudice du fait de travailler dans des entreprises clientes autre de TEUCHOS Exploitation ; qu’il n’apporte aucun élément prouvant qu’à ce titre, la société TEUCHOS Exploitation a éludé la loi, les règlements ou autre convention, accord collectif ;
ALORS D’UNE PART QUE constitue le prêt de main d’oeuvre illicite toute opération à but lucratif ayant pour objet exclusif le prêt de main d’oeuvre, moyennant rémunération, qui intervient dans le domaine d’activité de la société utilisatrice, sans être passé par l’entremise d’une entreprise de travail temporaire ; que le prêt de main d’oeuvre illicite se distingue du contrat d’entreprise ou de sous-traitance en ce qu’il ne trouve sa justification dans aucune technicité, aucune spécificité de la prestation accomplie par l’entreprise prêteuse par rapport à l’activité de l’entreprise utilisatrice ; qu’après avoir constaté que M. X... avait été affecté au sein de l’entreprise RVI, Renault Véhicules Industriel, entreprise construisant notamment des camions, pour effectuer des études notamment la mise au point d’un tracteur châssis pour l’Australie, des tests de fonctionnalité d’un logiciel et l’amélioration du confort vibratoire de l’AE, à la satisfaction de Messieurs Y..., Z..., responsables hiérarchiques de M. X... et salariés de l’entreprise utilisatrice, ce dont il résultait que M. X... exerçait dans le coeur de métier de l’entreprise utilisatrice, où il avait procédé à des missions d’études techniques pendant près de six ans, la Cour d’appel, en retenant, pour écarter le prêt de main d’oeuvre illicite, que M. X... avait mis en oeuvre un savoir faire spécifique chez un client qui ne le possédait pas, n’a pas tiré les conséquences légales qui s’évinçaient de ses propres constatations au regard de l’article L 125-3 devenu L 8241-1 et 2 du code du travail ;
QU’A TOUT LE MOINS en ne précisant pas en quoi le savoir faire de Monsieur X... se distinguait de celui de l’entreprise utilisatrice, elle a privé sa décision de base légale au regard desdites dispositions ;
ALORS D’AUTRE PART QUE le marchandage s’entend de toute opération à but lucratif de fourniture de main d’oeuvre qui a pour effet de causer un préjudice au salarié qu’elle concerne ; qu’il appartient au juge de rechercher si le personnel de l’entreprise prestataire est placé sous l’autorité hiérarchique de l’entreprise utilisatrice, si cette dernière s’adresse directement au personnel placé en son sein, si elle lui fournit le matériel, ordinateur, carte de visite et téléphone à son nom, ou encore si elle a inclus dans sa messagerie interne l’adresse du salarié du prestataire ; que M. X... faisait valoir dans ses conclusions qu’il recevait exclusivement ses instructions de l’encadrement de Renault, société qui contrôlait elle-même le suivi et définissait tant ses taches que les lieux d’exécution, qu’il exerçait avec le matériel informatique et bureautique de RVI, qu’il était soumis à des horaires identiques à ceux du personnel de RVI ; qu’il soulignait dans ses conclusions que l’encadrement technique était assuré par les interlocuteurs Renault (ccl p. 41), à qui il devait rendre compte, suivre leur recommandations, qui répartissait et distribuait les taches aux prestataires en leur expliquant dans les moindres détails ; qu’il faisait valoir également que les annuaires internes Renault mentionnaient son nom ; qu’il poursuivait en faisant valoir que les conditions de sa mise à disposition au sein de l’entreprise RVI étaient strictement identiques, qu’il ne recevait pas d’instruction directe de la part d’un supérieur hiérarchique de chez TEUCHOS ; que toute directive de travail était fournie par les supérieurs de la société RVI ; qu’en s’abstenant de répondre à ces chefs déterminants des conclusions, démontrant tout à la fois l’existence d’un prêt de main d’oeuvre illicite et d’un marchandage, la Cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
ALORS ENCORE QUE le salarié faisait valoir que ce marchandage avait engendré un préjudice pour M. X..., en ce qu’il n’avait jamais bénéficié de l’un des multiples avantages sociaux offerts au personnel de la société RVI, ni des RTT, des retraites CASA, des institutions représentatives du personnel, ou des dispositions de la convention collective de la métallurgie, plus favorable que celle des bureaux d’études techniques ; qu’en retenant, par motifs adoptés des premiers juges, que M. X... n’apportait aucun élément de nature à prouver son préjudice, sans répondre à ce chef des conclusions, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
Décision attaquée : Cour d’appel de Grenoble du 19 mai 2008

Textes appliqués :
• Cour d’appel de Grenoble, 19 mai 2008, 06/03216