Modalités de la preuve du respect du droit d’audition consentie

Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 26 novembre 2020, 19-24.303, Inédit
Cour de cassation - Chambre civile 2

N° de pourvoi : 19-24.303
ECLI:FR:CCASS:2020:C201338
Non publié au bulletin
Solution : Rejet

Audience publique du jeudi 26 novembre 2020
Décision attaquée : Cour d’appel d’Amiens, du 12 septembre 2019

Président
M. Pireyre (président)
Avocat(s)
SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SCP Thouin-Palat et Boucard
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

CIV. 2

CH.B

COUR DE CASSATION


Audience publique du 26 novembre 2020

Rejet

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 1338 F-D

Pourvoi n° J 19-24.303

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 NOVEMBRE 2020

La société Inovimo, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° J 19-24.303 contre l’arrêt rendu le 12 septembre 2019 par la cour d’appel d’Amiens (2e chambre, protection sociale), dans le litige l’opposant à l’union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF) du Nord Pas-de-Calais, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Taillandier-Thomas, conseiller, les observations de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la société Inovimo, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de l’union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales du Nord Pas-de-Calais, et l’avis de M. de Monteynard, avocat général, après débats en l’audience publique du 21 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Taillandier-Thomas, conseiller rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Amiens, 12 septembre 2019), à la suite d’un contrôle en vue de la recherche des infractions de travail dissimulé, l’URSSAF du Nord-Pas-de-Calais a adressé à la société Inovimo (la société) une lettre d’observations en date du 26 avril 2013 opérant, pour la période du 13 septembre 2011 au 19 décembre 2012, un redressement, suivie d’une mise en demeure du 8 juillet 2013, puis d’une contrainte en date du 19 août 2013, à laquelle la société a fait opposition devant une juridiction de sécurité sociale.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

2. La société fait grief à l’arrêt de la débouter de ses demandes portant sur la régularité de la procédure de contrôle, alors :

« 1°/ que les auditions auxquelles les agents de contrôle procèdent pour la recherche et le constat des infractions en matière de travail illégal ne peuvent être réalisées qu’avec le consentement des personnes entendues ; qu’elles peuvent faire l’objet d’un procès-verbal qui doit être signé des agents de contrôle et des personnes entendues ; qu’en considérant que l’URSSAF n’est pas tenue de joindre à la lettre d’observations le procès-verbal constatant le délit de travail dissimulé à l’origine du redressement litigieux, que l’inspecteur du recouvrement n’est pas tenu de communiquer au cotisant l’intégralité de son rapport de contrôle dès lors que ce dernier est informé des omissions et erreurs qui lui sont reprochées et des bases de redressement proposé et que l’URSSAF aurait justifié de la reprise du contenu de l’audition de Mme A... à travers la lettre d’observations du 26 avril 2013 et le procès-verbal de contrôle du 12 avril 2013, quand il était impossible de vérifier la régularité de l’audition de Mme A..., faute de production du procès-verbal de cette audition, la cour d’appel a violé l’article L. 8271-6-1 du code du travail ;

2°/ que le juge ne peut retenir un document qui n’a pas été soumis à la discussion contradictoire des parties et la seule reproduction du contenu d’un document, dans un autre document soumis à la contradiction, ne satisfait pas à l’exigence fondamentale du contradictoire ; qu’en estimant que le moyen de l’exposante, tiré de l’irrégularité de la procédure aurait été infondé, sur la seule considération que le contenu de l’audition de Mme A... aurait été repris dans la lettre d’observations et le procès-verbal de contrôle du 12 avril 2013, la cour d’appel a violé l’article 16 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

3. S’il résulte de l’article L. 8271-6-1 du code du travail que les auditions auxquelles les agents de contrôle procèdent pour la recherche et le constat des infractions en matière de travail illégal ne peuvent être réalisées qu’avec le consentement des personnes entendues, la preuve de ce consentement peut résulter du procès-verbal d’audition signé par les agents de contrôle et la personne entendue ou de tout autre document.

4. Ayant constaté que le contenu de l’audition de Mme A... avait été repris dans le procès-verbal de contrôle du 12 avril 2013 et la lettre d’observations du 26 avril 2013, la cour d’appel, à qui il n’était pas demandé de vérifier que l’intéressée avait été entendue avec son consentement, a retenu à bon droit et sans méconnaître le principe du contradictoire, que nonobstant l’absence de communication du procès-verbal d’audition, la procédure de redressement était régulière.

5. Le moyen n’est, dès lors, pas fondé.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

6. La société fait grief à l’arrêt de confirmer le redressement, alors :

« 1°/ qu’il n’est pas permis au juge de dénaturer l’écrit qui lui est soumis ; qu’il est précisé dans la lettre d’observations à propos de l’audition de Mme A... : « la société ne lui met à disposition ni voiture, ni téléphone, ni ordinateur. Elle utilise en conséquence son matériel propre » ; qu’en considérant que les négociateurs en cause « bénéficient du matériel, des marchandises et de l’aménagement mis à disposition par la société », la cour d’appel a dénaturé la lettre d’observations, en violation de l’obligation faite au juge de ne pas dénaturer l’écrit qui lui est soumis ;

2°/ qu’il n’est pas permis au juge de dénaturer l’écrit qui lui est soumis ; qu’il est mentionné au procès-verbal relevant le délit de travail dissimulé à propos de l’audition de Mme A... : « la société ne lui met à disposition ni voiture, ni téléphone, ni ordinateur. Elle utilise en conséquence son matériel propre » ; qu’en considérant que les négociateurs en cause « bénéficient du matériel, des marchandises et de l’aménagement mis à disposition par la société », la cour d’appel a dénaturé le procès-verbal relevant le délit de travail dissimulé, en violation de l’obligation faite au juge de ne pas dénaturer l’écrit qui lui est soumis ;

3°/ qu’en considérant que les négociateurs en cause feraient l’objet de direction et de contrôle hiérarchique de la part de la société, sans motiver cette affirmation, la cour d’appel a méconnu les exigences de l’article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

7. Pour rejeter le recours, l’arrêt retient que Mme A... et MM. J... et L... ne disposent pas de clientèle propre et distincte de celle de la société, qu’ils travaillent dans les locaux de la société, bénéficient du matériel, des marchandises et de l’aménagement mis à disposition par celle-ci et qu’ils sont tenus à des présences régulières et constantes. Il relève qu’ils exercent à titre exclusif pour l’agence, font l’objet de direction et de contrôle hiérarchique de la part de la société, ne fixent pas leurs propres tarifications et commissions et n’assument pas le moindre risque économique. Il ajoute que s’agissant de la carte professionnelle, les intéressés en sont dépourvus, échappant à leurs obligations fixées par le décret n° 2005-1315 du 21 octobre 2005 modifiant le décret n° 72-678 du 20 juillet 1972 fixant les conditions d’application de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d’exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce.

8. De ces constatations, procédant de son appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve débattus par les parties, faisant ressortir que les intéressés effectuaient des prestations en faveur de la société dans des conditions caractérisant l’existence d’un lien de subordination juridique à l’égard de celle-ci, la cour d’appel a, sans dénaturation, exactement déduit, par une décision motivée, que le redressement devait être validé.

9. Le moyen n’est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Inovimo aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Inovimo et la condamne à payer à l’URSSAF du Nord-Pas-de-Calais la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour la société Inovimo.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à la décision attaquée d’avoir débouté la société Inovimo de ses demandes portant sur la régularité de la procédure de contrôle, d’avoir confirmé le redressement de l’Urssaf du Nord pour la somme de 54.615 euros dont 48.220 euros de cotisations, 6.395 euros de majorations et d’avoir condamné la société Inovimo à payer à l’Urssaf du Nord la somme de 54.615 euros dont 48.220 euros de cotisations, 6.395 euros de majorations outre les frais de signification sans préjudice des majorations de retard complémentaires qui ne peuvent être calculées qu’après complet paiement des cotisations ;

d’une part aux motifs que : « *Sur la régularité de la procédure de redressement : En application des dispositions de l’article L.8271-8 du code du travail, les infractions aux interdictions du travail dissimulé sont constatées au moyen de procès-verbaux qui font foi jusqu’à preuve du contraire. Ces procès-verbaux sont transmis directement au procureur de la République. Dans ce cadre, l’Urssaf n’est pas tenue de joindre à la lettre d’observations le procès-verbal constatant le délit de travail dissimulé à l’origine du redressement litigieux. En effet, l’inspecteur du recouvrement n’est pas tenu de communiquer au cotisant l’intégralité de son rapport de contrôle, dès lors que ce dernier est informé des omissions et erreurs qui lui sont reprochées et des bases de redressement proposé. De surcroît, l’Urssaf justifie de la reprise du contenu de l’audition de Madame A... à travers la lettre d’observations du 26 avril 2013 et le procès-verbal de contrôle du 12 avril 2013. Il s’en suit que le moyen opposé par la SARL Inovimo, tiré de l’irrégularité de la procédure de redressement est infondé » ;

alors 1°/ que les auditions auxquelles les agents de contrôle procèdent pour la recherche et le constat des infractions en matière de travail illégal ne peuvent être réalisées qu’avec le consentement des personnes entendues ; qu’elles peuvent faire l’objet d’un procès-verbal qui doit être signé des agents de contrôle et des personnes entendues ; qu’en considérant que l’Urssaf n’est pas tenue de joindre à la lettre d’observations le procès-verbal constatant le délit de travail dissimulé à l’origine du redressement litigieux, que l’inspecteur du recouvrement n’est pas tenu de communiquer au cotisant l’intégralité de son rapport de contrôle dès lors que ce dernier est informé des omissions et erreurs qui lui sont reprochées et des bases de redressement proposé et que l’Urssaf aurait justifié de la reprise du contenu de l’audition de Mme A... à travers la lettre d’observations du 26 avril 2013 et le procès-verbal de contrôle du 12 avril 2013, quand il était impossible de vérifier la régularité de l’audition de Mme A..., faute de production du procès-verbal de cette audition, la cour d’appel a violé l’article L. 8271-6-1 du code du travail ;

d’autre part aux motifs propres que « *Sur le bienfondé du redressement : L’article L 311-2 du code de la sécurité sociale dispose que sont affiliées obligatoirement aux assurances sociales du régime général, quel que soit leur âge et même si elles sont titulaires d’une pension, toutes les personnes quelle que soit leur nationalité, de l’un ou de l’autre sexe, salariées ou travaillant à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs et quels que soient le montant et la nature de leur rémunération, la forme, la nature ou la validité de leur contrat. Il résulte de l’article L 1221-10 du code du travail que l’embauche d’un salarié ne peut intervenir qu’après déclaration nominative accomplie par l’employeur auprès des organismes de protection sociale désignés à cet effet. L’employeur accomplit cette déclaration dans tous les lieux de travail où sont employés des salariés. Conformément à l’article L 8221-1 du code du travail, est interdit le travail totalement ou partiellement dissimulé, défini et exercé dans les conditions prévues aux articles L. 8221-3 et L. 8221-5. De plus, à la lettre de l’article L 8221-5 du code du travail « est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour tout employeur : 1° Soit de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité prévue à l’article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l’embauche ; 2° Soit de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité prévue à l’article L. 3243-2, relatif à la délivrance d’un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d’une convention ou d’un accord collectif d’aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ; 3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l’administration fiscale en vertu des dispositions légales ». Enfin, l’article L 8221-6 du même code, dans sa rédaction applicable au litige, prévoit que sont présumés ne pas être liés avec le donneur d’ordre par un contrat de travail dans l’exécution de l’activité donnant lieu à immatriculation ou inscription les personnes physiques immatriculées au registre du commerce et des sociétés, au répertoire des métiers, au registre des agents commerciaux ou auprès des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales pour le recouvrement des cotisations d’allocations familiales. L’existence d’un contrat de travail peut toutefois être établie lorsque les personnes susmentionnées fournissent directement ou par une personne interposée des prestations à un donneur d’ordre dans des conditions qui les placent dans un lien de subordination juridique permanente à l’égard de celui-ci. Dans ce cas, la dissimulation d’emploi salarié est établie si le donneur d’ordre s’est soustrait intentionnellement par ce moyen à l’accomplissement des obligations incombant à l’employeur mentionnées à l’article L. 8221-5. En application de ces dispositions, la présomption légale de non salariat qui bénéficie aux personnes sous le statut d’autoentrepreneur peut être détruite s’il est établi qu’elles fournissent directement, ou par une personne interposée, des prestations au donneur d’ordre dans des conditions qui les placent dans un lien de subordination juridique permanente à l’égard de celui-ci. En l’espèce, le contrôleur agréé et assermenté a estimé que Madame A..., et Messieurs J... et L... ne se trouvaient pas dans l’exercice de leur profession en situation d’indépendance. Il apparait que ceux-ci ne disposent pas de clientèle propre et distincte de celle de la société, et ne détiennent pas de carte professionnelle permettant l’exercice de la profession. De même, ils travaillent dans les locaux de la société sise à Saint-Pol-sur-Mer, bénéficient du matériel, des marchandises et de l’aménagement mis à disposition par la société, et sont tenus à des présences régulières et constantes. Enfin, il apparait que ces trois personnes qui exercent à titre exclusif pour l’agence, font l’objet de direction et de contrôle hiérarchique de la part de la société, ne fixent pas leurs propres tarifications et commissions, et n’assument pas le moindre risque économique. S’agissant de la carte professionnelle, Madame A..., et Messieurs J... et L... en étaient dépourvus, échappant à leurs obligations fixées par le décret n° 2005-1315 du 21 octobre 2005 modifiant le décret n° 72-678 du 20 juillet 1972 fixant les conditions d’application de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d’exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce. En outre, et sans que ces éléments soient utilement contestés par la SARL Inovimo, il apparaît clairement que Madame A..., et Messieurs J... et L... effectuaient des prestations en faveur du donneur d’ordre dans des conditions qui les plaçaient sous sa dépendance économique ce qui impliquait un lien de subordination juridique avec celui-ci. Il en résulte que ces trois personnes exerçaient en pratique une activité salariée. Par ailleurs, la SARL Inovimo ne conteste pas l’absence de mise en oeuvre des obligations de déclaration préalable à l’embauche conformément aux dispositions prévues à l’article L 1221-10 du code du travail. Dès lors, en l’absence de contestation des montants réintégrés à l’assiette de cotisations et des sommes réclamées en vertu de la contrainte litigieuse, le redressement opéré par l’URSSAF sera déclaré bien fondé et la contrainte validée. Le jugement entrepris sera confirmé de ce chef » ;

aux motifs adoptés que « Lors du contrôle inopiné effectué par l’URSSAF du Nord au sein de la société Inovimo, l’URSSAF du Nord a relevé que Madame S... épouse A..., Monsieur J... Y... et Monsieur L... N... exerçaient leur activité professionnelle sous la dépendance économique de Monsieur B.... Ils relèvent donc d’un lien de subordination juridique et n’ont aucune réelle autonomie nonobstant les apparences que devrait leur donner le statut d’agents commerciaux. Si Madame S... épouse A..., Monsieur J... Y... et Monsieur L... N... relevaient d’un statut indépendant auprès du RSI et l’URSSAF du Nord, ils auraient la mission de prospecter la clientèle pour la société Inovimo, et les affaires traitées ne donneraient lieu qu’à des commissions ce qui nécessite qu’un protocole ait été signé entre Madame S... épouse A..., Monsieur J... Y..., Monsieur L... N... et la société Inovimo afin de définir ces commissions. Si la société Inovimo oppose de nombreux moyens afin de démontrer l’indépendance de Madame S... épouse A..., Monsieur J... Y..., et Monsieur L... N... à l’encontre de la société Inovimo, ces moyens sont inopérants dès lors qu’elle ne démontre en aucun cas, l’indépendance des soit disant auto entrepreneurs et le plus simple serait de préciser comment sont rémunérés Madame S... épouse A..., Monsieur J... Y..., Monsieur L... N... ; or sur ce point elle est taisante et aucun contrat n’est versé aux débats. Aussi, c’est à juste titre que l’URSSAF du Nord a retenu que Madame S... épouse A..., Monsieur J... Y... Monsieur L... N... étaient des salariés de la société Inovimo dont les formalités de déclaration préalable à l’embauche (DPAE) n’ont pas été accomplies. Aux termes de l’article L 8221-5 du code du travail est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour tout employeur de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité prévue à l’article L 1221-10 relatif à la déclaration préalable de l’emploi. La déclaration préalable à l’embauche (DPAE) est obligatoire et elle doit être effectuée dans les huit jours qui précèdent toute embauche de salarié Cette déclaration préalable à l’embauche (DPAE) doit parvenir à l’URSSAF du Nord avant la prise de fonction. L’absence de déclaration préalable à l’embauche (DPAE) est à elle seule constitutive du délit de travail dissimulé par dissimulation d’emplois salariés. Les conditions légales de l’opposition sont prescrites par l’article R 133-3 du code de sécurité sociale. En l’espèce, l’opposition à la contrainte N° [...] a été effectuée dans les délais légaux. Aux termes de l’article R 133-5 du code de la sécurité sociale : « dès qu’il a connaissance de l’opposition, l’organisme créancier adresse au secrétariat du tribunal compétent une copie de la contrainte accompagnée d’une copie de la mise en demeure comportant l’indication du détail des sommes qui ont servi de base à l’établissement de la contrainte ainsi que l’avis de réception, par le débiteur, de ladite mise en demeure". Ces documents ont été versés par l’URSSAF du Nord aux débats. Enfin l’opposition à la contrainte est motivée. Sur la forme, l’opposition à la contrainte Na [...] est recevable. Sur le fond, la société Inovimo n’a pas respecté la législation sur la déclaration préalable à l’embauche (DPAE). Selon l’article L 242-1-2 du code de la sécurité sociale, pour le calcul des cotisations et contributions de sécurité sociale, les rémunérations versées ou dues à un salarié en contrepartie d’un travail dissimulé sont, à défaut de preuve contraire, évaluées forfaitairement. Pour faire obstacle à l’application de l’évaluation forfaitaire de la rémunération servant de base au calcul du redressement, l’employeur doit apporter la preuve non seulement de la durée réelle d’emploi du travailleur dissimulé, mais encore du montant exact de la rémunération versée à ce dernier pendant cette période. Concernant l’évaluation du redressement, les données recueilles à l’occasion du contrôle n’apportent pas d’éléments matériels probants permettant de connaître de manière certaine les rémunérations versées ou dues aux trois salariés. Cette situation a empêché un chiffrage réel des cotisations et contributions sociales à recouvrer et contraint l’URSSAF du Nord à appliquer le forfait « peine plancher » posé à l’article L 242-1-2 du code de la sécurité sociale. Cet article précise qu’à défaut de preuve contraire, en l’espèce, la société Inovimo n’apporte aucun élément, les rémunérations dues à un salarié en contrepartie d’un travail dissimulé sont évaluées forfaitairement à 6 fois le montant mensuel du SMIC brut en vigueur au moment du constat du délit de travail et constituent des sanctions de nature administrative découlant du non versement des cotisations et contributions de sécurité sociale pour le salarié dont l’emploi a été dissimulé, et ce quelle que soit l’amplitude horaire ou la durée du travail. En conséquence, le redressement de l’URSSAF du Nord est justifié et la société Inovimo est déboutée de sa demande. Il en résulte que la créance de l’URSSAF du Nord est certaine, liquide, exigible et non contestable de sorte que la contrainte Na [...] est validée pour la somme de 54 615€ dont 48 220€ de cotisations, 6 395€ de majorations outre les frais de signification sans préjudice des majorations de retard complémentaires qui ne peuvent être calculées qu’après complet paiement des cotisations. La délivrance de la contrainte étant justifiée, les frais de signification de la contrainte seront supportés par la société Inovimo sur le fondement de l’article R 133-6 du code de la sécurité sociale » ;

alors 2°/ que le juge ne peut retenir un document qui n’a pas été soumis à la discussion contradictoire des parties et la seule reproduction du contenu d’un document, dans un autre document soumis à la contradiction, ne satisfait pas à l’exigence fondamentale du contradictoire ; qu’en estimant que le moyen de l’exposante, tiré de l’irrégularité de la procédure aurait été infondé, sur la seule considération que le contenu de l’audition de Mme A... aurait été repris dans la lettre d’observation et le procès-verbal de contrôle du 12 avril 2013, la cour d’appel a violé l’article 16 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt confirmatif attaqué d’avoir confirmé le redressement de l’Urssaf du Nord pour la somme de 54.615 euros dont 48.220 euros de cotisations, 6.395 euros de majorations et d’avoir condamné la société Inovimo à payer à l’Urssaf du Nord la somme de 54.615 euros dont 48.220 euros de cotisations, 6.395 euros de majorations, outre les frais de signification, sans préjudice des majorations de retard complémentaires qui ne peuvent être calculées qu’après complet paiement des cotisations ;

aux motifs propres que « *Sur le bienfondé du redressement : L’article L 311-2 du code de la sécurité sociale dispose que sont affiliées obligatoirement aux assurances sociales du régime général, quel que soit leur âge et même si elles sont titulaires d’une pension, toutes les personnes quelle que soit leur nationalité, de l’un ou de l’autre sexe, salariées ou travaillant à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs et quels que soient le montant et la nature de leur rémunération, la forme, la nature ou la validité de leur contrat. Il résulte de l’article L 1221-10 du code du travail que l’embauche d’un salarié ne peut intervenir qu’après déclaration nominative accomplie par l’employeur auprès des organismes de protection sociale désignés à cet effet. L’employeur accomplit cette déclaration dans tous les lieux de travail où sont employés des salariés. Conformément à l’article L 8221-1 du code du travail, est interdit le travail totalement ou partiellement dissimulé, défini et exercé dans les conditions prévues aux articles L. 8221-3 et L. 8221-5. De plus, à la lettre de l’article L 8221-5 du code du travail « est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour tout employeur : 1° Soit de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité prévue à l’article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l’embauche ; 2° Soit de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité prévue à l’article L. 3243-2, relatif à la délivrance d’un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d’une convention ou d’un accord collectif d’aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ; 3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l’administration fiscale en vertu des dispositions légales ». Enfin, l’article L 8221-6 du même code, dans sa rédaction applicable au litige, prévoit que sont présumés ne pas être liés avec le donneur d’ordre par un contrat de travail dans l’exécution de l’activité donnant lieu à immatriculation ou inscription les personnes physiques immatriculées au registre du commerce et des sociétés, au répertoire des métiers, au registre des agents commerciaux ou auprès des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales pour le recouvrement des cotisations d’allocations familiales. L’existence d’un contrat de travail peut toutefois être établie lorsque les personnes susmentionnées fournissent directement ou par une personne interposée des prestations à un donneur d’ordre dans des conditions qui les placent dans un lien de subordination juridique permanente à l’égard de celui-ci. Dans ce cas, la dissimulation d’emploi salarié est établie si le donneur d’ordre s’est soustrait intentionnellement par ce moyen à l’accomplissement des obligations incombant à l’employeur mentionnées à l’article L. 8221-5. En application de ces dispositions, la présomption légale de non salariat qui bénéficie aux personnes sous le statut d’autoentrepreneur peut être détruite s’il est établi qu’elles fournissent directement, ou par une personne interposée, des prestations au donneur d’ordre dans des conditions qui les placent dans un lien de subordination juridique permanente à l’égard de celui-ci. En l’espèce, le contrôleur agréé et assermenté a estimé que Madame A..., et Messieurs J... et L... ne se trouvaient pas dans l’exercice de leur profession en situation d’indépendance. Il apparait que ceux-ci ne disposent pas de clientèle propre et distincte de celle de la société, et ne détiennent pas de carte professionnelle permettant l’exercice de la profession. De même, ils travaillent dans les locaux de la société sise à Saint-Pol-sur-Mer, bénéficient du matériel, des marchandises et de l’aménagement mis à disposition par la société, et sont tenus à des présences régulières et constantes. Enfin, il apparait que ces trois personnes qui exercent à titre exclusif pour l’agence, font l’objet de direction et de contrôle hiérarchique de la part de la société, ne fixent pas leurs propres tarifications et commissions, et n’assument pas le moindre risque économique. S’agissant de la carte professionnelle, Madame A..., et Messieurs J... et L... en étaient dépourvus, échappant à leurs obligations fixées par le décret n° 2005-1315 du 21 octobre 2005 modifiant le décret n° 72-678 du 20 juillet 1972 fixant les conditions d’application de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d’exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce. En outre, et sans que ces éléments soient utilement contestés par la SARL Inovimo, il apparaît clairement que Madame A..., et Messieurs J... et L... effectuaient des prestations en faveur du donneur d’ordre dans des conditions qui les plaçaient sous sa dépendance économique ce qui impliquait un lien de subordination juridique avec celui-ci. Il en résulte que ces trois personnes exerçaient en pratique une activité salariée. Par ailleurs, la SARL Inovimo ne conteste pas l’absence de mise en oeuvre des obligations de déclaration préalable à l’embauche conformément aux dispositions prévues à l’article L 1221-10 du code du travail. Dès lors, en l’absence de contestation des montants réintégrés à l’assiette de cotisations et des sommes réclamées en vertu de la contrainte litigieuse, le redressement opéré par l’URSSAF sera déclaré bien fondé et la contrainte validée. Le jugement entrepris sera confirmé de ce chef » ;

et aux motifs adoptés que « Lors du contrôle inopiné effectué par l’URSSAF du Nord au sein de la société Inovimo, l’URSSAF du Nord a relevé que Madame S... épouse A..., Monsieur J... Y... et Monsieur L... N... exerçaient leur activité professionnelle sous la dépendance économique de Monsieur B.... Ils relèvent donc d’un lien de subordination juridique et n’ont aucune réelle autonomie nonobstant les apparences que devrait leur donner le statut d’agents commerciaux. Si Madame S... épouse A..., Monsieur J... Y... et Monsieur L... N... relevaient d’un statut indépendant auprès du RSI et l’URSSAF du Nord, ils auraient la mission de prospecter la clientèle pour la société Inovimo, et les affaires traitées ne donneraient lieu qu’à des commissions ce qui nécessite qu’un protocole ait été signé entre Madame S... épouse A..., Monsieur J... Y..., Monsieur L... N... et la société Inovimo afin de définir ces commissions. Si la société Inovimo oppose de nombreux moyens afin de démontrer l’indépendance de Madame S... épouse A..., Monsieur J... Y..., et Monsieur L... N... à l’encontre de la société Inovimo, ces moyens sont inopérants dès lors qu’elle ne démontre en aucun cas, l’indépendance des soit disant auto entrepreneurs et le plus simple serait de préciser comment sont rémunérés Madame S... épouse A..., Monsieur J... Y..., Monsieur L... N... ; or sur ce point elle est taisante et aucun contrat n’est versé aux débats. Aussi, c’est à juste titre que l’URSSAF du Nord a retenu que Madame S... épouse A..., Monsieur J... Y... Monsieur L... N... étaient des salariés de la société Inovimo dont les formalités de déclaration préalable à l’embauche (DPAE) n’ont pas été accomplies. Aux termes de l’article L 8221-5 du code du travail est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour tout employeur de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité prévue à l’article L 1221-10 relatif à la déclaration préalable de l’emploi. La déclaration préalable à l’embauche ( DPAE) est obligatoire et elle doit être effectuée dans les huit jours qui précèdent toute embauche de salarié Cette déclaration préalable à l’embauche ( DPAE) doit parvenir à l’URSSAF du Nord avant la prise de fonction. L’absence de déclaration préalable à l’embauche (DPAE) est à elle seule constitutive du délit de travail dissimulé par dissimulation d’emplois salariés. Les conditions légales de l’opposition sont prescrites par l’article R 133-3 du code de sécurité sociale. En l’espèce, l’opposition à la contrainte N° [...] a été effectuée dans les délais légaux. Aux termes de l’article R 133-5 du code de la sécurité sociale : « dès qu’il a connaissance de l’opposition, l’organisme créancier adresse au secrétariat du tribunal compétent une copie de la contrainte accompagnée d’une copie de la mise en demeure comportant l’indication du détail des sommes qui ont servi de base à l’établissement de la contrainte ainsi que l’avis de réception, par le débiteur, de ladite mise en demeure". Ces documents ont été versés par l’URSSAF du Nord aux débats. Enfin l’opposition à la contrainte est motivée. Sur la forme, l’opposition à la contrainte Na [...] est recevable. Sur le fond, la société Inovimo n’a pas respecté la législation sur la déclaration préalable à l’embauche (DPAE). Selon l’article L 242-1-2 du code de la sécurité sociale, pour le calcul des cotisations et contributions de sécurité sociale, les rémunérations versées ou dues à un salarié en contrepartie d’un travail dissimulé sont, à défaut de preuve contraire, évaluées forfaitairement. Pour faire obstacle à l’application de l’évaluation forfaitaire de la rémunération servant de base au calcul du redressement, l’employeur doit apporter la preuve non seulement de la durée réelle d’emploi du travailleur dissimulé, mais encore du montant exact de la rémunération versée à ce dernier pendant cette période. Concernant l’évaluation du redressement, les données recueilles à l’occasion du contrôle n’apportent pas d’éléments matériels probants permettant de connaître de manière certaine les rémunérations versées ou dues aux trois salariés. Cette situation a empêché un chiffrage réel des cotisations et contributions sociales à recouvrer et contraint l’URSSAF du Nord à appliquer le forfait « peine plancher » posé à l’article L 242-1-2 du code de la sécurité sociale. Cet article précise qu’à défaut de preuve contraire, en l’espèce, la société Inovimo n’apporte aucun élément, les rémunérations dues à un salarié en contrepartie d’un travail dissimulé sont évaluées forfaitairement à 6 fois le montant mensuel du SMIC brut en vigueur au moment du constat du délit de travail et constituent des sanctions de nature administrative découlant du non versement des cotisations et contributions de sécurité sociale pour le salarié dont l’emploi a été dissimulé, et ce quelle que soit l’amplitude horaire ou la durée du travail. En conséquence, le redressement de l’URSSAF du Nord est justifié et la société Inovimo est déboutée de sa demande. Il en résulte que la créance de l’URSSAF du Nord est certaine, liquide, exigible et non contestable de sorte que la contrainte Na [...] est validée pour la somme de 54 615€ dont 48 220€ de cotisations, 6 395€ de majorations outre les frais de signification sans préjudice des majorations de retard complémentaires qui ne peuvent être calculées qu’après complet paiement des cotisations. La délivrance de la contrainte étant justifiée, les frais de signification de la contrainte seront supportés par la société Inovimo sur le fondement de l’article R 133-6 du code de la sécurité sociale » ;

alors 1°/ qu’il n’est pas permis au juge de dénaturer l’écrit qui lui est soumis ; qu’il est précisé dans la lettre d’observations à propos de l’audition de Mme A... : « la société ne lui met à disposition ni voiture, ni téléphone, ni ordinateur. Elle utilise en conséquence son matériel propre » ; qu’en considérant que les négociateurs en cause « bénéficient du matériel, des marchandises et de l’aménagement mis à disposition par la société », la cour d’appel a dénaturé la lettre d’observations, en violation de l’obligation faite au juge de ne pas dénaturer l’écrit qui lui est soumis ;

alors 2°/ qu’il n’est pas permis au juge de dénaturer l’écrit qui lui est soumis ; qu’il est mentionné au procès-verbal relevant le délit de travail dissimulé à propos de l’audition de Mme A... : « la société ne lui met à disposition ni voiture, ni téléphone, ni ordinateur. Elle utilise en conséquence son matériel propre » ; qu’en considérant que les négociateurs en cause « bénéficient du matériel, des marchandises et de l’aménagement mis à disposition par la société », la cour d’appel a dénaturé le procès-verbal relevant le délit de travail dissimulé, en violation de l’obligation faite au juge de ne pas dénaturer l’écrit qui lui est soumis ;

alors 3°/ qu’en considérant que les négociateurs en cause feraient l’objet de direction et de contrôle hiérarchique de la part de la société, sans motiver cette affirmation, la cour d’appel méconnu les exigences de l’article 455 du code de procédure civile.ECLI:FR:CCASS:2020:C201338