obligation du contradictoire - article R.133-8 du css

Cour de cassation

chambre civile 2

Audience publique du 9 novembre 2017

N° de pourvoi : 16-23051

ECLI:FR:CCASS:2017:C201443

Non publié au bulletin

Rejet

Mme Flise (président), président

SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Piwnica et Molinié, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal des affaires de sécurité sociale de Pau, 28 avril 2016), rendu en dernier ressort, qu à la suite d’un contrôle diligenté par un inspecteur du travail et un agent de contrôle de la caisse de mutualité sociale agricole Sud-Aquitaine (la caisse), celle-ci a notifié à la société Fipso industrie un redressement fondé sur la constatation d’une infraction de travail dissimulé ; que cette dernière a saisi d’un recours une juridiction de sécurité sociale ;

Attendu que la caisse fait grief au jugement d’annuler la procédure de redressement et la mise en demeure subséquente, alors, selon le moyen, que les dispositions de l’article R. 133-8 du code de la sécurité sociale s’appliquent exclusivement aux redressements consécutifs à un contrôle qui n’est pas effectué en application des dispositions des articles L. 243-7 du code de la sécurité sociale et L. 724-7 du code rural et de la pêche maritime ; que l’article L. 724-7 du code rural et de la pêche maritime régit tous les contrôles opérés par un agent agréé et assermenté des caisses de mutualité sociale agricoles seul, ou conjointement avec l’inspecteur du travail ; qu’ainsi, seuls les articles L. 722-27, R. 725-6, D. 724-9 et suivants du même code peuvent être évoqués utilement concernant les contrôles et leur régularité ; qu’en l’espèce, le tribunal a constaté que le contrôle de la société Fipso industrie le 3 juillet 2012 avait été effectué par l’inspecteur du travail et par un agent de contrôle de la CMSA Sud-Aquitaine et que le procès-verbal en résultant avait été établi conjointement par ces deux agents ; qu’en jugeant néanmoins, pour annuler la procédure et la mise en demeure subséquente, que la procédure initiée avait pour fondement l’article R. 133-8 du code de la sécurité sociale, et en retenant que les formalités prévues par ce texte n’avaient pas été respectées, en raison de la mention de l’application de ce texte par la caisse dans sa lettre d’observations du 25 septembre 2013, tandis que l’indication erronée desdites dispositions n’était pas de nature à exclure l’application des dispositions l’article L. 724-7 du code rural et de la pêche maritime, le tribunal a violé les articles R. 133-8 du code de la sécurité sociale et L. 724-7 du code rural et de la pêche maritime ;

Mais attendu que l’article L. 724-9 du code rural et de la pêche maritime et les dispositions réglementaires prises pour son application ne régissant pas les opérations ayant pour objet ma recherche et la constatation d’infractions constitutives de travail illégal, engagées sur le fondement des articles L. 8271-1 et suivants du code du travail ;

Et attendu qu’ayant constaté que le procès verbal dressé par l’inspecteur du travail et l’agent de la caisse ayant procédé au contrôle concluait à l’existence d’une infraction de travail dissimulé, de sorte que le redressement consécutif n’avait pas pour seule finalité le recouvrement des cotisations, le tribunal en a exactement déduit que la procédure initiée par la caisse était fondée sur les dispositions de l’article R. 133-8 du code de la sécurité sociale ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la caisse de mutualité sociale agricole Sud-Aquitaine aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la caisse de mutualité sociale agricole Sud-Aquitaine et la condamne à payer à la société Fipso industrie la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf novembre deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour la caisse de mutualité sociale agricole Sud-Aquitaine

IL EST FAIT GRIEF au jugement (n° 19-2016) attaqué d’avoir infirmé la décision implicite de la commission de recours amiable, d’avoir annulé la procédure de redressement et la mise en demeure subséquente et d’avoir débouté la CMSA Sud-Aquitaine de ses demandes ;

AUX MOTIFS QUE, sur la nullité de la procédure, le 3 juillet 2012, M. X..., inspecteur du travail et Mme Y..., agent de contrôle agréé et assermenté de la MSA Sud-Aquitaine, ayant qualité pour constater et relever des infractions en matière de travail dissimulé en application des articles L. 8271-7 et L. 8271-8 du code du travail, se sont rendus dans les locaux de la société Fipso Industrie ; qu’il n’est pas contesté que l’objet du contrôle était d’examiner les conditions dans lesquelles M. Z..., exploitant agricole à Caussade Rivière, a exercé une activité de transport de porcs dans le cadre d’une convention de prestation de services conclue avec la société Fipso Industrie en date du 13 janvier 2008 ; que le 24 janvier 2013, M. X... et Mme Y... ont clôturé leur procès-verbal, en mentionnant « il est établi que l’infraction de travail dissimulé a été commise par M. A..., organe de la société Fipso Industrie en sa qualité de directeur général, qui a recouru sciemment aux services de M. Z... sans respecter les formalités relatives à l’emploi d’un salarié » ; que selon ce même procès-verbal, M. B... représentant légal de la société Fipso Industrie a été informé conformément aux dispositions de l’alinéa 3 de l’article L. 8113-7 du code du travail par lettre recommandée avec avis de réception en date du 13 février 2013, des faits susceptibles de constituer une infraction à l’article L. 8221-1 du code du travail sanctionnée des peines prévues par l’article L. 8824-1 du même code ; qu’en parallèle, la MSA Sud-Aquitaine selon lettre recommandée en date du 25 septembre 2013 notifiait conformément aux articles R. 133-8 du code de la sécurité sociale et L. 8271-8-1 du code du travail, ses observations résultant des infractions de travail dissimulé, constatées et relevées à l’encontre de la société Fipso Industrie selon procès-verbal du 24 janvier 2013 ; qu’en ce courrier, la MSA mentionnait qu’elle envisageait un redressement d’un montant de 2.440,16 euros au titre des prestations effectuées par M. Z... pour la période du 13 janvier 2008 au 28 octobre 2011 et qu’en vertu des dispositions de l’article R. 133-8 du code de la sécurité sociale, information était donnée que la société Fipso Industrie disposait d’un délai de trente jours à compter de la réception dudit courrier pour formuler ses observations éventuelles ; que la société Fipso accusait réception du courrier précité, le 2 octobre 2013 ; que la société Fipso, par courrier du 23 octobre 2013 faisait valoir ses observations aux termes desquelles, elle indiquait notamment que la MSA Sud-Aquitaine, en son courrier du 9 octobre 2013, avait considéré à tort que constituaient ses observations en réplique, au visa de l’article R. 133-8 du code de la sécurité sociale, le courrier qu’elle lui avait adressé le 27 septembre 2013, lequel était relatif aux émissions de bulletins rectificatifs de sorte qu’il ne pouvait s’inscrire dans le cadre de la procédure contradictoire en la cause eu égard à son contenu et à la chronologie ci-dessus rappelée ; que la MSA Sud-Aquitaine a maintenu sa position en délivrant la mise en demeure litigieuse, le 7 novembre 2013 ; que de ce rappel, il s’avère sans doute aucun que la procédure que la MSA a initiée à l’égard de la société Fipso a pour fondement au contradictoire, l’article R. 133-8 du code de la sécurité sociale ; qu’il importe peu que ce fondement procède d’une erreur commise par la MSA et reconnue a posteriori par celle-ci dès lors que ce seul fondement a régi les droits et obligations entre les parties en la cause, ainsi que la procédure au terme de laquelle la mise en demeure a été délivrée ; qu’il sera en ces motifs, tenu pour régulier ; qu’il incombe donc à la juridiction en ce seul fondement d’examiner si la MSA Sud-Aquitaine a respecté les obligations qui lui incombaient relativement au principe du contradictoire ; que cet article énonce que « tout redressement consécutif au constat d’un délit de travail dissimulé est porté à la connaissance de l’employeur ou du travailleur indépendant par un document daté et signé par le directeur de l’organisme de recouvrement, transmis par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Le document rappelle les références du procès-verbal pour travail dissimulé établi par un des agents mentionnés à l’article L. 8271-7 du code du travail et précise la nature, le mode de calcul, et le montant du redressement envisagé. Il informe l’employeur ou le travailleur indépendant qu’il a la faculté de présenter ses observations dans un délai de trente jours et de se faire assister par une personne ou un conseil de son choix. A l’expiration de ce délai et, en cas d’observation de l’employeur ou du travailleur indépendant, après lui avoir confirmé le montant des sommes à recouvrer, le directeur de l’organisme met en recouvrement les sommes dues selon les règles et les garanties applicables au recouvrement des cotisations de sécurité sociale » ; qu’en premier lieu, il sera relevé que l’article R. 133-8 du code de la sécurité sociale instauré par décret du 11 juin 2008 a été publié au journal officiel le 14 juin 2008 ; que ce faisant cet article ne peut recevoir application qu’à des faits constitutifs d’un délit de travail dissimulé à partir du 14 juin 2008 ; que tel n’est pas le cas puisque la période en litige s’étend du 13 janvier 2008 au 28 octobre 2011 ; que dès lors, du 13 janvier 2008 au 14 juin 2008, la procédure telle qu’appliquée est nulle pour ne pas être en vigueur sur cette période ; qu’en second lieu, le document visé par l’article R. 133-8 du code de la sécurité sociale en date du 25 septembre 2013 ne comportait que la date du procès-verbal de travail dissimulé et non ses références, ce qui rend cet envoi non conforme aux exigences dudit article ; qu’en dernier lieu, cette réponse vise en son corps uniquement un courrier de la société Fipso en date du 27 septembre 2013, soit un courrier antérieur à la procédure de redressement dont la société Fipso n’a eu connaissance que le 2 octobre 2013 ainsi qu’en atteste le versement de l’accusé de réception ; qu’en conséquence, le courrier de la MSA Sud-Aquitaine du 9 octobre 2013 ne saurait valoir réponse aux observations notifiées par la société comme ne se rattachant nullement à la procédure en cause ; qu’en ce constat, il s’avère qu’à l’expiration du délai de trente jours et malgré les observations dument notifiées par la société Fipso, la MSA Sud-Aquitaine en violation et prescription de l’article R. 133-8 du code de la sécurité sociale a émis la mise en demeure, sans avoir au préalable confirmé le montant des sommes à recouvrer ; qu’en l’ensemble de ces motifs, il résulte que la procédure diligentée par la MSA sur la base tenue pour régulière de l’article R. 133-8 du code de la sécurité sociale a été menée en violation du principe du contradictoire ce dont il résulte que les droits de la société Fipso à faire valoir sa défense n’ont pas été sauvegardés ; qu’il convient en conséquence d’annuler la procédure et la mise en demeure qui lui est subséquente ;

ALORS QUE les dispositions de l’article R. 133-8 du code de la sécurité sociale s’appliquent exclusivement aux redressements consécutifs à un contrôle qui n’est pas effectué en application des dispositions des articles L. 243-7 du code de la sécurité sociale et L. 724-7 du code rural et de la pêche maritime ; que l’article L. 724-7 du code rural et de la pêche maritime régit tous les contrôles opérés par un agent agréé et assermenté des caisses de mutualité sociale agricoles seul, ou conjointement avec l’inspecteur du travail ; qu’ainsi, seuls les articles L. 722-27, R. 725-6, D. 724-9 et suivants du même code peuvent être évoqués utilement concernant les contrôles et leur régularité ; qu’en l’espèce, le tribunal a constaté que le contrôle de la société Fipso Industrie le 3 juillet 2012 avait été effectué par l’inspecteur du travail et par un agent de contrôle de la CMSA Sud-Aquitaine (jugt, p. 4 § 2) et que le procès-verbal en résultant avait été établi conjointement par ces deux agents (jugt, p. 4 § 4) ; qu’en jugeant néanmoins, pour annuler la procédure et la mise en demeure subséquente, que la procédure initiée avait pour fondement l’article R. 133-8 du code de la sécurité sociale, et en retenant que les formalités prévues par ce texte n’avaient pas été respectées, en raison de la mention de l’application de ce texte par la caisse dans sa lettre d’observations du 25 septembre 2013, tandis que l’indication erronée desdites dispositions n’était pas de nature à exclure l’application des dispositions l’article L. 724-7 du code rural et de la pêche maritime, le tribunal a violé les articles R. 133-8 du code de la sécurité sociale et L. 724-7 du code rural et de la pêche maritime.

Décision attaquée : Tribunal des aff. de sécurité sociale des Pyrénées-Atlantiques , du 28 avril 2016