Représentation permanente en France

Cour de cassation

chambre criminelle

Audience publique du 20 juin 2017

N° de pourvoi : 14-85879

ECLI:FR:CCASS:2017:CR01397

Publié au bulletin

Rejet

M. Guérin (président), président

SCP Boullez, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l’arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

 M. Emile X...,

contre l’arrêt de la cour d’appel d’AIX-EN-PROVENCE, 7e chambre, en date du 1er juillet 2014, qui, pour travail dissimulé et abus de confiance, l’a condamné à un an d’emprisonnement avec sursis et mise à l’épreuve, cinq ans d’interdiction de gérer, et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l’audience publique du 10 mai 2017 où étaient présents : M. Guérin, président, M. Talabardon, conseiller rapporteur, M. Straehli, Mme Durin-Karsenty, MM. Larmanjat, Ricard, Parlos, Bonnal, Mme Ménotti, conseillers de la chambre, MM. Barbier, Ascensi, conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Cordier ;
Greffier de chambre : Mme Guichard ;
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire TALABARDON, les observations de la société civile professionnelle BOULLEZ, avocat en la Cour, et les conclusions de M. le premier avocat général CORDIER ;
Vu le mémoire et les observations complémentaires produits ;
Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué, du jugement qu’il confirme partiellement et des pièces de procédure qu’un groupe de personnes d’origine comorienne résidant à Marseille y a conclu avec la société Comores Construction, constituée aux Comores par M. Emile X..., ressortissant français lui-même domicilié à Marseille, des contrats en vue de la construction, dans ce pays, de maisons individuelles ; que les contrats stipulaient que le financement de l’opération serait assuré, suivant une pratique locale s’apparentant à la tontine, au moyen du versement, par chaque souscripteur, d’un acompte puis de mensualités, l’ordre d’exécution des travaux devant être arrêté par décision du groupe ou par tirage au sort ; que les souscripteurs, estimant que la société Comores Construction n’avait pas tenu ses engagements en ce que les constructions promises n’ont été que partiellement réalisées, ont porté plainte contre M. X... du chef d’escroquerie ; qu’à l’issue de l’information ouverte sur les faits, celui-ci a été renvoyé devant le tribunal correctionnel pour, notamment, travail dissimulé par dissimulation d’activité et abus de confiance ; que les juges du premier degré l’ont déclaré coupable de ces chefs et ont prononcé sur les intérêts civils ; que le prévenu, à titre principal, et le ministère public, à titre incident, ont relevé appel de la décision ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation, après avis de la chambre commerciale, pris de la violation des articles L. 8221-3 du code du travail, 121-3 du code pénal, 593 du code de procédure pénale, défaut, insuffisance et contradiction de motifs, manque de base légale ;
” en ce qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir confirmé le jugement entrepris sur la déclaration de culpabilité du chef d’exécution de travail dissimulé et de l’avoir condamné à la peine de douze mois d’emprisonnement assortis du sursis avec mise à l’épreuve durant deux ans comportant l’obligation d’indemniser les victimes et d’avoir prononcé, à titre de peine complémentaire, l’interdiction pendant une durée de cinq ans de diriger, de gérer ou de contrôler à titre quelconque directement ou indirectement pour son propre compte ou pour le compte d’autrui une entreprise commerciale ou industrielle ;
” aux motifs que, dissimulation d’activité : la prescription de l’action publique ne peut s’appliquer en l’espèce ; qu’en effet le premier acte de poursuite est le soit transmis du procureur de la République pour enquête du 13 septembre 2007 ; qu’en conséquence la recherche des faits délictueux peut remonter au 13 septembre 2004 ; qu’il apparaît que la déconfiture des activités de M. X... peut être fixée au 30 mars 2007 ; qu’ainsi, antérieurement à cette date, M. X..., résidant en France, a exercé une activité commerciale sans être immatriculé au répertoire des métiers ou au RCS et sans procéder aux déclarations exigées par les organismes sociaux et fiscaux ; que si les constructions devaient avoir lieu aux Comores, l’activité commerciale s’exerçait en France puisque les contrats étaient signés et que les versements étaient effectués en France, les clients résidant également en France ; que la matérialité des faits délictueux a été reconnue par l’intéressé ; que l’existence d’une société immatriculée aux Comores relayant son activité en France ne dispensait nullement M. X... de se soumettre à la législation française régie par les articles L. 8221-1 à L. 8224-6 du code du travail ; qu’en outre, M. X..., en l’absence de comptabilité véritable, n’a pas procédé aux déclarations qui doivent être faites aux organismes de protection sociale ou à l’administration fiscale en vertu des dispositions légales en vigueur ; qu’il convient en conséquence de confirmer la déclaration de culpabilité de M. X... sur ce point ;/ …/ ; que, sur la peine, il y a lieu d’infirmer le jugement et de condamner M. X... à une peine d’emprisonnement de douze mois assortis d’un sursis avec mise à l’épreuve pour une durée de deux ans avec obligation d’indemniser les victimes ; qu’il échet, en outre, à titre de peine complémentaire de prononcer l’interdiction pendant une durée de cinq ans de diriger, de gérer ou de contrôler à titre quelconque directement ou indirectement pour son propre compte ou pour le compte d’autrui une entreprise commerciale ou industrielle ;
” 1°) alors que l’article L. 8221-3 du code du travail répute travail dissimulé par dissimulation d’activité, l’exercice à but lucratif d’une activité de production, de transformation, de réparation ou de prestation de services ou l’accomplissement d’actes de commerce par toute personne physique ou morale qui, soit n’a pas procédé à son inscription au registre du commerce et des sociétés, soit n’a pas procédé aux déclarations qui doivent être faites aux organismes de protection sociale ou à l’administration fiscale en vertu des dispositions légales en vigueur ; qu’en l’espèce, la seule activité à but lucratif exercée par le demandeur relevait de la construction de maisons individuelles aux Comores ; que le demandeur était inscrit au registre du commerce et du crédit comorien ; que l’inscription en France au registre du commerce et des sociétés de sa société comorienne ne s’imposait pas, le demandeur n’y exerçant aucune activité lucrative autonome ; que la cour d’appel a constaté que les constructions s’effectuaient aux Comores ; qu’en constatant que l’activité lucrative s’effectuait aux Comores, tout en considérant que le demandeur exerçait son activité commerciale en France, la cour d’appel a entaché sa décision d’une contradiction de motifs et a violé l’article L. 8221-3 du code du travail ;
” 2°) alors que l’article L. 8221-3 du code du travail répute travail dissimulé par dissimulation d’activité, l’exercice à but lucratif d’une activité de production, de transformation, de réparation ou de prestation de services ou l’accomplissement d’actes de commerce par toute personne physique ou morale qui, soit n’a pas procédé à son inscription au registre du commerce et des sociétés, soit n’a pas procédé aux déclarations qui doivent être faites aux organismes de protection sociale ou à l’administration fiscale en vertu des dispositions légales en vigueur ; qu’il en résulte que, dès lors qu’un dirigeant oeuvre en France de manière temporaire pour le compte de sa société étrangère et dans le but de poursuivre le seul objet social de cette dernière, le délit de travail dissimulé n’est pas constitué ; qu’en décidant du contraire, alors que le demandeur ne faisait que prospecter en France les propriétaires terriens comoriens y résidant, condition préalable et indivisible de la construction d’une maison sur leurs terrains sis aux Comores, la cour d’appel a violé l’article L. 8221-3 du code du travail ;
” 3°) alors que seule entre dans les prévisions de l’article L. 8221-3 du code du travail, l’absence d’inscription au registre du commerce et des sociétés ou de déclarations qui doivent être faites aux organismes de protection sociale ou à l’administration fiscale par une personne exerçant une activité de production, de transformation, de réparation ou de prestation de services, ou l’accomplissement d’actes de commerce ; qu’il en résulte que les juges du fond doivent établir avec précision l’activité objet de la dissimulation ; qu’en n’indiquant pas quelle activité avait exercé le prévenu en France, la cour d’appel, qui n’a pas mis la Cour de cassation en mesure de savoir si ladite activité rentrait dans les prévisions de l’article L. 8221-3 du code du travail, a entaché sa décision d’une insuffisance de motifs ;
” 4°) alors qu’en vertu des articles et L. 8221-3 du code du travail, le délit de travail dissimulé est intentionnel ; que le délit de travail dissimulé implique donc l’intention d’exercer une activité que l’on sait devoir faire l’objet d’une immatriculation au registre du commerce et des sociétés ou d’une déclaration qui doit être faite aux organismes de protection sociale ou à l’administration fiscale ; qu’en ne constatant pas une telle intention, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions précitées “ ;
Attendu que, pour déclarer M. X... coupable de travail dissimulé par dissimulation d’activité, l’arrêt, par motifs propres et adoptés, énonce que l’intéressé, après la liquidation du commerce de vente de meubles qu’il tenait à Marseille à l’enseigne “ faubourg de l’habitat “, a diffusé auprès de sa clientèle d’origine comorienne, et sous la même enseigne, une offre commerciale en vue de la construction de maisons individuelles aux Comores ; que les juges retiennent que, ce faisant, l’intéressé a exercé en France une activité commerciale, en ce que les contrats conclus par la société Comores construction, à l’issue de cette campagne promotionnelle, ont été signés à Marseille, où résidait la clientèle, où ont été effectués les règlements et où le prévenu était domicilié et disposait d’une boîte aux lettres pour les besoins de son activité ; qu’ils ajoutent que la circonstance que ladite société était immatriculée aux Comores, où elle relayait l’activité commerciale de M. X..., ne dispensait pas celui-ci de se soumettre à la législation française en matière d’immatriculation et de procéder aux déclarations devant être faites, en France, aux organismes de protection sociale ou à l’administration fiscale, et qu’en sa qualité de commerçant, l’intéressé ne pouvait ignorer ses obligations en la matière ;
Attendu qu’en l’état de ces motifs, exempts d’insuffisance comme de contradiction, d’où il résulte que la société Comores construction disposait en France, au domicile de son gérant, d’une représentation permanente pour les besoins de son activité commerciale, laquelle valait ouverture d’un premier établissement sur le territoire national, et dès lors qu’une société commerciale immatriculée dans un pays étranger est tenue de s’immatriculer au registre du commerce et des sociétés français, sur le fondement des dispositions des articles L. 123-1, l, 3°, L. 123-11 et R. 123-35 du code de commerce, lorsqu’elle ouvre un tel établissement dans un département français, la cour d’appel, qui a ainsi caractérisé en tous ses éléments constitutifs le délit de travail dissimulé par dissimulation d’activité dont elle a déclaré le prévenu coupable, a justifié sa décision ;
D’où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-1 et 314-1 du code pénal, 593 du code de procédure pénale, insuffisance de motifs, défaut de base légale, ensemble le principe constitutionnel de responsabilité personnelle ;
” en ce qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir déclaré le demandeur coupable d’abus de confiance et de l’avoir condamné à la peine de douze mois d’emprisonnement assortis du sursis avec mise à l’épreuve durant deux ans comportant l’obligation d’indemniser les victimes et d’avoir prononcé, à titre de peine complémentaire, l’interdiction pendant une durée de cinq ans de diriger, de gérer ou de contrôler à titre quelconque directement ou indirectement pour son propre compte ou pour le compte d’autrui une entreprise commerciale ou industrielle ;
” aux motifs que l’abus de confiance : en ce qui concerne la prescription de l’action publique soulevée par le prévenu, il convient d’examiner la date à laquelle les parties civiles ont eu connaissance ou pris conscience du délit, étant précisé que le premier acte de poursuite du parquet est du 13 septembre 2007 ; que M. Amimbari E...a signé son contrat le 19 septembre 1999 et versé le même jour la somme de 30 000 frs ; qu’elle précise dans sa plainte que quelques temps après elle a été informée par sa famille que les travaux n’avançaient pas et que M. X... était un escroc ; qu’elle ajoute avoir fait stopper les prélèvements mensuels de 1 500 frs en juillet 2002 et que pour conserver ses droits elle a demandé à un huissier de procéder à un constat d’état des lieux qui a été fait le 7 septembre 2004 démontrant qu’aucune rénovation ou entreprise sérieuse quelconque n’avait débuté ; que dans plusieurs courriers de 2003, elle informe son contractant que celui-ci n’ayant pas respecté ses obligations, elle estime que le contrat est résilié et sollicite en conséquence le remboursement des sommes versées ; qu’elle ajoute dans un courrier du 22 janvier 2003 qu’à défaut elle contactera son avocat qui saisira le tribunal civil ou pénal et un huissier pour faire une saisie ; qu’au regard de ces éléments, plus de trois ans s’étant écoulés entre le moment où l’intéressé a été informé du comportement délictueux de M. X... et la poursuite du procureur de la République, il convient de constater la prescription de l’action publique et de renvoyer des fins de la poursuite le prévenu pour les faits concernant cette partie civile ; que M. Said Z...ayant versé des mensualités de 153 euros jusqu’au 16 juin 2006, il apparaît que son action ne peut être atteinte par la prescription ; qu’en ce qui concerne ce chantier, il apparaît que le contrat a été signé le 11 mai 1999 ; que M. X... dans un courrier du 21 avril 2006 signé à la fois par lui-même et par M. Said Z...expose que celui-ci ne voulait plus construire sur le terrain prévu initialement ayant acquis depuis à nouveau un terrain sur lequel il souhaitait que la construction se fasse ; qu’en outre, ce courrier indique que M. Said Z...souhaitait être sur place pour le démarrage du chantier mais que des raisons de santé l’en empêchaient ; qu’il apparaît de surcroît que M. Said Z...a reçu le 15 novembre 2006 une somme de 5 000 euros à remettre à son chef de chantier pour que la poursuite de la construction ne soit pas interrompue, un reçu de cette somme signé par le contractant étant produit par le prévenu ; que M. Said Z...n’a donné aucune réponse aux explications et aux arguments présentés par M. X... ; qu’il convient, au regard de ces éléments, de constater que l’abus de confiance en l’espèce n’est pas constitué et de renvoyer des fins de la poursuite celui-ci de ce chef au préjudice de M. Said Z... ; que Mme Zainaba A..., veuve Issa C..., victime non partie civile, précise dans son audition qu’elle s’est rendue aux Comores pour la première fois en 2006, qu’elle a constaté qu’aucune construction n’avait été commencée mais qu’avant d’aller aux Comores, elle avait demandé à M. X... d’annuler le contrat, voulant récupérer son argent, proposition à laquelle il avait acquiescé, qu’à son retour des Comores, elle n’a plus réussi à avoir des contacts avec M. X..., soit à partir de 2006 ; qu’au vu de ces éléments la prescription ne peut être acquise pour cette victime ; qu’en ce qui concerne M. Moindje D...et Mme Fatouma E..., épouse D..., les plaignants ont indiqué avoir versé au départ une somme de 50 000 frs, le contrat prévoyant des échéances de 2 000 frs par mois qu’ils n’ont pas honoré pour plus de sécurité ; que par la suite ils ont accepté de verser 40 000 frs en espèces pour faire démarrer les travaux ; qu’au jour de la plainte soit le 20 novembre 2007 leur construction était inhabitable seuls les murs maîtres et la dalle de béton étant existants ; que Mme Fatouma E..., épouse D..., a eu la certitude que M. X... les avait « escroqués » courant 2005, ayant tenté une transaction en déposant trois lettres dans sa boîte fin 2005, ces courriers réclamant le montant des sommes engagées ou la proposition de terminer le chantier ; que Mme Fatouma E..., épouse D..., précise qu’aucune réponse n’été donnée à ces courriers ; que moins de trois ans s’étant écoulés entre la découverte de l’abus de confiance et le premier acte de poursuite la prescription de l’action publique ne peut être acquise ; qu’en ce qui concerne la plainte de Mme Mzouhali Msa G...dont le concubin est M. Ahmed H..., ce dernier n’étant pas cité comme victime dans l’ordonnance de renvoi du juge d’instruction, il apparaît, au vu des pièces bancaires transmises, qu’elle a payé M. X... jusqu’en juin 2006 ; qu’en conséquence pour les raisons déjà exposées plus haut, l’action publique n’est pas prescrite ; que pour ce chantier suivant les explications de M. H..., il a été amené à verser suite à la signature du contrat la somme de 30 000 frs en espèces, étant convenu que dans cet engagement il devait verser tous les mois la somme de 2 000 frs par prélèvement bancaire ; qu’ils précisent que le 10 mai 2006 il a mis fin à l’autorisation de prélèvement automatique car il s’apercevait qu’aucun travaux n’était fait hormis des murs et quelques cloisons la maison étant inhabitable ; que Mme Fatima D...a signé son contrat le 27 mai 1998 puis un avenant au contrat le 5 mars 2004 ; que dans un courrier du 15 avril 2004, Comores construction met en cause cette cliente contre l’intervention de personnes extérieures au chantier et notamment les membres de sa famille ; que Mme D...précise qu’après s’être rendue aux Comores, elle a vu que rien n’avait été fait malgré le paiement de son échéancier mensuel et a accepté la signature de l’avenant pour sortir du système de groupe, restant sur place pour surveiller le chantier jusqu’en septembre 2004 ; que s’apercevant de l’absence d’une poursuite réelle des travaux, elle a tenté après le retour en France de rencontrer M. X... sans succès, celui-ci évitant à chaque fois les rendez-vous et changeant son numéro de téléphone ; que la découverte par Mme D...de son infortune s’étant produite postérieurement à septembre 2004, la prescription de l’action publique ne peut être acquise pour les motifs déjà évoqués plus haut ; que l’abus de confiance est le fait par une personne de détourner au préjudice d’autrui des fonds, des valeurs ou biens quelconques qui lui ont été remis et qu’elle a accepté à charge de les rendre, de les représenter ou d’en faire un usage déterminé ; que les sommes versées par les contractants aboutissaient dans un pot commun destiné à financer suivant un tirage au sort exposé plus haut la construction de maisons ; qu’il ressort des plaintes, des photographies, des constats que les maisons ou les constructions prévues par les contrats des parties ont été très partiellement réalisées ; que si pour expliquer cette carence, M. X... allègue que les contractants étaient de mauvais payeurs ou adoptaient un comportement irrationnel, il appartenait au constructeur de mettre en oeuvre les pénalités prévues ; que suivant l’expertise financière ordonnée la totalité des sommes versées par tous les contractants (une vingtaine suivant les déclarations de M. X..., y compris les plaignants) s’élevait à 478 000 euros ; que les sommes affectées à l’achat des matériaux, salaires et autres frais se sont élevés à 223 768 euros ; qu’ainsi, en retenant les pièces communiquées par M. X... et en faisant abstraction des justifications réelles par factures, une somme a minima de 255 032 euros n’a pas été affectée à l’exécution de ses obligations contractuelles, ce chiffre constituant le montant minimum de l’abus de confiance ; qu’il ne peut être contesté, au vu de ces précisions, que les parties civiles, à l’exception de Amimbari E...pour lequel la prescription de l’action publique est acquise et de M. Said Z..., ont été victimes de ce délit, dès lors que des sommes affectées à la construction n’ont en définitive jamais été utilisées à cette fin ; qu’il convient en conséquence de confirmer la déclaration de culpabilité de M. X... de ce chef au préjudice de Mme Zainaba A..., veuve Issa C..., M. Moindje D..., Mme Fatouma E..., épouse D..., Mmes Fatima D...et Mzouhali Msa G... ; que, sur la peine, il y a lieu d’infirmer le jugement et de condamner M. X... à une peine d’emprisonnement de douze mois assortis d’un sursis avec mise à l’épreuve pour une durée de deux ans avec obligation d’indemniser les victimes ; qu’il échet, en outre, à titre de peine complémentaire de prononcer l’interdiction pendant une durée de cinq ans de diriger, de gérer ou de contrôler à titre quelconque directement ou indirectement pour son propre compte ou pour le compte d’autrui une entreprise commerciale ou industrielle ; qu’en ce qui concerne l’action civile, il y a lieu de relever que les parties civiles M. Moindje D..., Mmes Fatouma E..., épouse D..., Fatima D...et Mzouhali Msa G...se sont trouvés dans des situations inextricables en étant propriétaires de maisons à peine ébauchées, inachevées et en tous les cas inutilisables ; que l’évaluation du préjudice subi par chacune de ces parties a été justement évaluée par le tribunal ; qu’il convient en conséquence de confirmer le jugement sur le préjudice matériel ; qu’en outre, ces mêmes parties civiles ont subi un préjudice moral qu’il convient d’indemniser aux sommes fixées par les premiers juges ; que l’équité commande de confirmer les sommes allouées à ces parties civiles par le tribunal ;

” 1°) alors que le délit d’abus de confiance n’existe que si le détournement a été commis avec une intention frauduleuse ; qu’en l’espèce, pour rentrer en voie de condamnation, la cour d’appel a établi que les sommes versées par les parties civiles aboutissaient dans un pot commun destiné à financer la construction des maisons selon un système de tirage au sort, que les constructions étaient inachevées et que le demandeur, qui alléguait l’interruption des versements contractuellement prévus, n’a pourtant pas mis en oeuvre les pénalités prévues ; qu’en faisant reposer le détournement sur le constat de non achèvement des travaux et sur l’absence de mise en oeuvre des pénalités prévues, alors même que l’arrêt des travaux était dû au comportement des parties civiles et que les contrats prévoyaient que le non-respect par les cocontractants de leurs obligations contractuelles contraindrait le constructeur, non à recourir à des pénalités, mais à leur adresser des courriers de rappel, simples ou recommandés, ce qui a été effectué, la cour d’appel, qui n’a pas caractérisé l’intention frauduleuse du prévenu, a violé l’article 341-1 du code pénal et a entaché sa décision d’une insuffisance de motifs ;
” 2°) alors que, nul n’est responsable que de son propre fait ; que ce n’est donc qu’es qualité de dirigeant de la société Comores construction que l’exposant pouvait être poursuivi pour détournement des sommes versées, le contrat n’ayant été conclu que par ladite société ; que la cour d’appel ne pouvait ainsi, sans méconnaître le principe susvisé, condamner, à titre personnel, le prévenu pour abus de confiance ; qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel a violé l’article 121-1 du code pénal “ ;
Attendu que, pour dire établi, au préjudice de cinq parties civiles, le délit d’abus de confiance et confirmer, dans cette mesure, le jugement déféré, l’arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu’en l’état de ces énonciations, d’où il résulte que le prévenu a disposé d’une partie des fonds perçus à des fins autres que l’exécution des obligations contractuelles qu’il avait souscrites au nom de la société Comores construction, la cour d’appel, qui a ainsi caractérisé l’intention frauduleuse de l’intéressé, a justifié sa décision ;
D’où il suit que le moyen, qui, en sa première branche, critique pour le surplus un motif surabondant de l’arrêt, et, en sa seconde branche, est nouveau et mélangé de fait et, comme tel, irrecevable, ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt juin deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Publication :

Décision attaquée : Cour d’appel d’Aix-en-Provence , du 1 juillet 2014