établissement secondaire

Le : 23/04/2012

Cour de cassation

chambre criminelle

Audience publique du 15 mars 2011

N° de pourvoi : 09-84998

Non publié au bulletin

Rejet

M. Louvel (président), président

SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

"-" M. Sylvain X...,

"-" M. Philippe Y...,

"-" La société X...- Y...,

contre l’arrêt de la cour d’appel de RENNES, 3e chambre, en date du 18 juin 2009, qui a condamné, les deux premiers, respectivement à 15 000 euros d’amende et à 60 000 euros d’amende dont 30 000 euros avec sursis, ainsi qu’à cinq ans d’interdiction de gérer une société commerciale, des chefs de travail dissimulé et d’obstacle aux fonctions d’agents de contrôle de la sécurité sociale et de la caisse de mutualité sociale agricole, et la troisième, à 20 000 euros d’amende pour travail dissimulé ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

I-Sur le pourvoi de M. X... :

Attendu qu’aucun moyen n’est produit ;

II-Sur les pourvois de M. Y... et de la société X...- Y... :

Vu le mémoire produit, commun aux demandeurs ;

Attendu qu’il ressort de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. André X... a créé près de Guingamp (Côtes-d’Armor), un élevage de volailles auquel il a, par la suite, adjoint une activité de sexage de poussins pour laquelle il employait exclusivement des “ sexeurs “ d’origine japonaise ou coréenne, puis une société dénommée “ SNC X... et Nipponjie “, dont il était le gérant, et qui avait pour associés des sexeurs d’origine japonaise ; que M. Sylvain X..., son fils, a repris l’activité de sexage et créé la Sarl “ X... Sexage “, qui comportait, comme associés cogérants non-salariés, d’anciens salariés de M. André X... ; que, par ailleurs, MM. Sylvain X... et Philippe Y... ont oeuvré, en qualité de gérants, au sein de la Sarl “ X...- Y... “, et que cette dernière société a racheté le fonds de commerce de M. André X..., en s’engageant à fournir aux sociétés de sexage, dans les domaines administratif, comptable et de gestion, une assistance financière, commerciale, juridique et fiscale ;

Attendu que, saisi par l’inspection du travail en agriculture et par la mutualité sociale agricole qui remettaient en cause la qualité de travailleurs indépendants des sexeurs associés au sein des sociétés de sexage, le procureur de la République a requis l’ouverture d’une information judiciaire à l’issue de laquelle MM. X..., Y..., ainsi que la Sarl “ X...- Y... “ ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel, des chefs, notamment, de travail dissimulé par dissimulation de salariés et par dissimulation d’activité, et d’obstacle à l’exercice des fonctions d’agents de contrôle de la sécurité sociale et de la caisse de mutualité sociale, chargée des contrôles de l’application des dispositions relatives aux régimes de protection sociale des non-salariés et des salariés agricoles ; que le tribunal ayant dit la prévention non établie, le ministère public a relevé appel de cette décision ;

En cet état ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 1221-1, L. 8221-1, L. 8221-5, L. 8221-6, L. 8224-1, L. 8224-3 L. 121-1, L. 324-9, L. 324-10, L. 120-3, L. 362-3 et L. 362-4 anciens du code du travail, L. 144-1 et suivants du code de commerce, 1134 du code civil, 121-1 et 121-2 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, dénaturation d’un écrit, défaut de motifs et manque de base légale ;

” en ce que l’arrêt infirmatif attaqué a déclaré M. Y... et la SARL X... Y... coupables de travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié et les a condamnés, pour M. Y..., à une peine de 60 000 euros d’amende dont 30 000 euros avec sursis et à une interdiction d’exercer l’activité de gérant d’une société commerciale pendant une durée de cinq ans, et pour la SARL X... Y..., à une amende de 20 000 euros ;

” aux motifs qu’au départ en retraite de M. André X..., et suivant contrat du 23 décembre 1999, son fonds de commerce comportant une activité de management de sexeurs de volailles et une clientèle de couvoirs a été vendu non aux sociétés de sexage, mais à la SARL X... Y... ; qu’il est ainsi établi que bien qu’inscrits au registre des métiers en qualité de travailleurs indépendants, les sexeurs associés des sociétés de sexage n’exploitaient aucune clientèle qui leur soit personnelle, mais travaillaient bien pour le compte d’autrui, à savoir la SARL X... Y..., propriétaire de la dite clientèle ; qu’ainsi M. Y... ne peut sérieusement prétendre que les sociétés d’accouvage lui sont inconnues et que la situation préexistait à son arrivée, puisque jusqu’à la “ dénonciation rétroactive “ de la convention le fonds de commerce était donné en location gérance à la SNC Etablissement X... et Nipponjie qui réunissait, outre M. X..., les sexeurs non salariés de son entreprise, et que ce n’est que par l’effet des conventions signées en 1999 que la société X... et Nipponjie s’est trouvée dépossédée de la clientèle des couvoirs au profit de la SARL ; qu’ainsi, sur toute la période visée à la prévention les sociétés de sexage ont travaillé pour une clientèle, propriété de la SARL X... Y..., exploitée dans des locaux propres à cette SARL qui avait aussi pris à bail commercial les locaux commerciaux dépendant du fonds de commerce de M. X... ; que la SARL X... Y... a par ailleurs passé un contrat, dénommé “ convention d’assistance “ avec chacune des sociétés de sexage ; qu’aux termes du contrat versé au dossier, la SARL :- s’engageait à mettre en relation les sociétés d’accouvage avec les sociétés de sexage,- se réservait un droit exclusif de recherche et de placement de sexeurs qualifiés de la part de la société Zen Nippon CI-IICK Sexing association, société émanant du ministère de l’agriculture japonais qui assure le recrutement et la formation des sexeurs de poussins,- se proposait d’assister les sociétés de sexage, dirigées et exclusivement composées de sexeurs de nationalité japonaises et coréenne peu au fait des obligations administratives, juridiques et comptables inhérentes à toute entreprise située sur le territoire national, notamment dans l’exécution et le suivi de ces obligations légales et réglementaires ; que lors de la signature de ces contrats, les sociétés de sexage ont été représentées par leurs gérants de l’époque qui étaient M. André X... pour la SNC Etablissements X... et Nipponjie, MM. Philippe Y... et Sylvain X..., gérants statutaires pour la SARL X... Sexage ; que le fonctionnement attesté par ces dispositions contractuelles est corroboré par les auditions des sexeurs qui révèlent que, s’ils exerçaient pour certains quelques attributions techniques et d’encadrement dans l’organisation matérielle de leur travail, aucun d’entre eux n’avait connaissance des rapports juridiques liant les sociétés de sexage et les prévenus ; que ces derniers n’avaient pas la maîtrise du coût des prestations qu’ils effectuaient qui ne pouvait à l’évidence être négocié qu’avec la SARL X... Y..., à la fois propriétaire de la clientèle de couvoirs et manager des sociétés de sexage ; que les flux financiers entre les sociétés de sexage et la SARL X... Y... ne laissaient dans les comptes des premières que les sommes nécessaires au paiement des charges fiscales et sociales ainsi que des rémunérations, qu’il est notamment établi à ce sujet que les sommes versées à la SARL X... Y... au titre des prestations de conseil et d’assistance sont sans commune mesure avec celles perçues par les sexeurs, qu’à titre d’exemple les enquêteurs ont relevé des mouvements de fonds de X...- Sexage vers la SARL X... Y... de plus de cinq millions de francs en 2000, sans qu’aucun dividende n’apparaisse pour les associés ; qu’en 2001, trois millions de francs a été encaissé par la SARL X... Y..., alors que seulement un peu plus de 1 million de francs a bénéficié aux sexeurs cette même année ; qu’il résulte enfin des auditions de ces derniers que l’augmentation des charges sociales qu’ils ont supportée les années suivantes a fait baisser sensiblement leur rémunération ; qu’au demeurant, s’agissant de la société X...- Sexage, M. Y... avait précisé dans une lettre adressée à la direction du travail des Côtes d’armor le 20 janvier 2000 que les sexeurs percevaient Une rémunération fixe et mensuelle ; que peu importe dans ces conditions que des assemblées générales annuelles des sociétés de sexage aient été organisées pour approbation des comptes et répartition des dividendes puisque les sexeurs, méconnaissant les conventions d’origine dont ils n’étaient pas signataires, ne maîtrisaient en rien les éléments de rentabilité des sociétés de sexages et partant, leur rémunération ; que la législation du travail est d’ordre public, qu’au delà d’un hypothétique accord des sexeurs, leur dépendance juridique et économique démontre qu’ils n’étaient en réalité que les salariés des sociétés de sexages dont la gérance revenait à la SARL X... Y... qui au travers du rachat du fonds de commerce et du contrat d’assistance possédait la totale maîtrise des décisions commerciales, financières, de recrutement et de gestion, ce qui constituait au demeurant sa seule activité ; qu’en conséquence, se trouve établi l’élément matériel du délit de travail dissimulé par dissimulation de salarié ; que l’élément moral est lui aussi établi puisque l’absence de déclaration d’embauche et de remise de bulletins de salaire aboutissait à mettre à la charge des seuls sexeurs l’ensemble des prélèvements sociaux ; M. Y... étant mal venu à se prévaloir à ce sujet du fait, non contesté au demeurant, que l’ensemble des charges sociales et fiscales au titre d’un travail indépendant aient été payées par les sexeurs, ce qui démontre précisément l’intérêt et le bénéfice financier du montage réalisé ; qu’il convient de réformer le jugement et d’entrer en voie de condamnation tant à l’égard de la SARL X... Y... qu’à l’égard de ses gérants de droit ; que, si M. Sylvain X... est intervenu plus ponctuellement en qualité de gérant de la SARL X... Y..., il a néanmoins participé à la gestion des sociétés de sexage, notamment pour les négociations sur les prix, compte tenu de compétences techniques que ne possédait pas M. Y... en ce domaine, et a été rémunéré 1 219 euros par mois au moins jusqu’en mars 2003 à ce titre par la SARL X... Y... ; qu’en revanche, une relaxe doit être prononcée concernant la société PO conseil, aucun acte de gestion de fait à l’égard des sociétés de sexage n’étant établie à son encontre en l’état de la procédure, pour la période visée à la prévention ;

” 1) alors que les personnes physiques immatriculées au répertoire des métiers ou auprès des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales ne relèvent du régime général de sécurité sociale des travailleurs salariés que s’il est établi que leur activité les place dans un lien de subordination juridique permanent à l’égard du donneur d’ordre ; que l’existence d’un tel lien de subordination ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu’elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait concrètes dans lesquelles est exercée l’activité des travailleurs ; qu’en limitant son analyse aux seuls documents contractuels qui liaient la SARL X... Y... aux sociétés de sexage de volailles, lesquels faisaient tout au plus apparaître une situation de location gérance d’un fonds de commerce, sans établir que la SARL X... Y... avait, de manière effective et concrète, le pouvoir de donner des ordres et des directives en ce qui concerne l’activité des associés des sociétés de sexage de volailles, d’en contrôler l’exécution et d’en sanctionner les manquements, la cour d’appel n’a pas caractérisé le lien de subordination et n’a pas donné de base légale à sa décision au regard des textes visés au moyen ;

” 2) alors que le dirigeant de fait est la personne qui en toute indépendance et liberté, exerce une activité positive de gestion et de direction de la société sous le couvert et aux lieu et place des dirigeants de droit ; que la simple assistance d’une société dans ses démarches juridiques et administratives ne saurait caractériser une activité positive de direction et de gestion de la société aux lieu et place des dirigeants de droit ; que le demandeur avait fait valoir que la SARL X... Y... s’était cantonnée à une mission d’assistance administrative et juridique des sociétés de sexage laissant aux dirigeants desdites sociétés le soin de les gérer ; que la cour d’appel qui se borne à affirmer que la SARL X... Y... aurait exercé la gérance des sociétés de sexage pour en avoir la maîtrise quant aux questions commerciales, financières, de recrutement et de gestion, tout en s’abstenant de relever des actes positifs et effectifs de gestion et de direction des sociétés de sexage, n’a pas légalement justifié sa décision, violant les articles visés au moyen ;

” 3) alors que le lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son salarié ; que l’existence d’un tel lien de subordination ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu’elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait concrètes dans lesquelles est exercée l’activité des travailleurs ; qu’en l’espèce, dans leurs écritures d’appel, les demandeurs faisaient état de très nombreuses auditions de dirigeants de sociétés d’accouvage qui attestaient avoir toujours eu comme uniques interlocuteurs les associés japonais des sociétés de sexage et n’avoir jamais été en relation avec M. Y... ou la SARL X... Y... ; qu’en s’abstenant d’examiner ces éléments concordants, précis et circonstanciés, qui étaient de nature à établir que, dans les faits, les sociétés de sexage exerçaient librement leur activité commerciale sans être placées sous l’emprise d’une gérance de fait ou d’un lien de subordination, la cour d’appel a privé sa décision de toute base légale au regard des textes susvisés ;

” 4) que, pour les mêmes raisons, en refusant de prendre en compte les déclarations des associés des sociétés de sexage, qui étaient de nature à établir que ceux-ci étaient libres d’organiser leur travail comme ils l’entendaient, fixaient eux-mêmes les prix des prestations de sexage, ne recevaient aucune instruction ni n’étaient soumis à aucun pouvoir disciplinaire, la cour d’appel, qui s’est déterminée par des considérations abstraites déduites de documents contractuels, a privé sa décision de toute base légale au regard des textes visés au moyen ;

” 5) alors que la clientèle est un élément constitutif du fonds de commerce mis en location gérance et reste la propriété du propriétaire du fonds de commerce ; qu’en s’engageant à mettre en relation les sociétés d’accouvage avec les sociétés de sexage, la SARL X... Y... n’a fait que se conformer à ses obligations légales et contractuelles envers les SNC X... & Nipponjie et SARL X... Sexage ; qu’en déduisant l’existence d’une relation de travail du seul fait que les sociétés de sexage n’auraient pas été propriétaires de la clientèle des société d’accouvage, cependant que cette situation découlait de l’application pure et simple des règles d’ordre public de la location-gérance, la cour d’appel a violé les textes visés au moyen ;

” 6) alors que l’existence d’un contrat de travail suppose une rémunération versée en contrepartie de la prestation de travail accomplie ; qu’en l’espèce, il ressort des propres constatations de l’arrêt attaqué que ce n’est pas la SARL X... Y... qui rémunérait les associés des sociétés de sexage, mais que c’étaient au contraire ces dernières qui payaient les prestations comptables, fiscales et juridiques, dont la matérialité n’a jamais été remise en cause, fournies par la SARL X... Y... ; qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales qui s’évinçaient de ses constatations et a privé sa décision de base légale au regard des textes visés au moyen ;

” 7) alors que prive sa décision de toute base légale la cour d’appel qui appréhende les flux financiers entre la SARL X... Y... et les sociétés de sexage, sans prendre en compte les commissions très importantes (3 % du chiffre d’affaires HT et cinq centimes par poussin) qui avaient vocation à être reversées aux organismes étatiques nippons auxquels étaient rattachés les sexeurs japonais et sud-coréens, ce qui était de nature à faire apparaître que la commission réellement encaissée par la SARL X... Y... était invariablement fixée à 10 % du chiffre d’affaire, conformément aux accords contractuels liant les parties ;

” 8) alors que prive sa décision de toute base légale, la cour d’appel qui affirme qu’aucun dividende n’aurait été versé en 2000 pour les associés de la société X... Sexage, cependant qu’il ressortait des documents comptables produits aux débats et du procès-verbal d’assemblée générale que les associés gérants de cette société avaient décidé de se distribuer une prime de 2 606 321 francs lors de l’assemblée générale annuelle approuvant les comptes de l’exercice clos le 31 décembre 2000 “ ;

Attendu que, pour dire M. Y... et la société “ X...- Y... “ coupables du délit de travail dissimulé par dissimulation de salariés, l’arrêt énonce qu’en 1999, le fonds de commerce de M. André X..., qui comportait l’activité de “ management “ des sexeurs de volailles et la clientèle de couvoirs, a été acquis par la société “ X...- Y... “ et que, bien qu’inscrits au registre des métiers en qualité de travailleurs indépendants, les associés des sociétés de sexage travaillaient en réalité pour le compte de cette société, propriétaire de la clientèle ; que l’arrêt relève que les conventions “ d’assistance “ conclues entre les sociétés de sexage et la société “ X...- Y... “ comportaient des clauses selon lesquelles cette personne morale s’engageait à mettre en relation les sociétés de sexage avec les entreprises d’accouvage, se réservait l’exclusivité de la recherche et du placement des sexeurs provenant d’une société émanant du ministère de l’agriculture japonais assurant leur recrutement et leur formation et assistait les sociétés de sexage exclusivement composées de personnes d’origine japonaise ou coréenne peu familiarisées avec les obligations administratives, juridiques et comptables inhérentes au fonctionnement de toute entreprise située sur le territoire national ; que les juges observent aussi que si quelques fonctions techniques et d’encadrement étaient assurées par des sexeurs, ceux-ci ne connaissaient pas les rapports juridiques liant les sociétés de sexage et les prévenus, et n’avaient pas la maîtrise du coût des prestations effectuées, ne percevant mensuellement, aux dires mêmes de M. Y..., qu’une rémunération fixe ; que la cour d’appel déduit de ces faits et circonstances que la dépendance juridique et économique des sexeurs démontre que ceux-ci étaient de simples salariés, et que la gérance effective des sociétés de sexage était assurée par la société “ X...- Y... “ qui avait la maîtrise des décisions commerciales, financières et de gestion de ces sociétés ;

Attendu qu’en l’état de ces motifs déduits de leur appréciation souveraine des faits et circonstances de la cause, et qui caractérisent l’absence d’indépendance des sociétés de sexage et de leurs associés, et le contrôle exercé sur elles par la société “ X...- Y... “, qui était en réalité le véritable employeur des travailleurs concernés, la cour d’appel a justifié sa décision ;

Qu’il s’ensuit que le moyen doit être écarté ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 324-9, L. 324-10 et L. 324-11 du code du travail, L. 123-1 et suivants du code de commerce, 1351 du code civil, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

” en ce que l’arrêt infirmatif attaqué a déclaré M. Y... et la société X... Y... coupables de travail dissimulé par dissimulation d’activité et les a condamnés, pour M. Y... à une peine de 60 000 euros d’amende dont 30 000 euros avec sursis et à une interdiction d’exercer l’activité de gérant d’une société commerciale pendant une durée de cinq ans, et pour la société X... Y... à une amende de 20 000 euros ;

” aux motifs que sur la période du 11 juillet 2003 au 7 juin 2004, la SARL X... Y... avait été radiée du RCS de Guingamp et s’était inscrite au RCS de Laval après avoir transféré son siège social dans cette ville : que d’après l’accord passé avec la société ABC developpement à Laval, qui hébergeait le siège social de SARL X... Y..., le courrier adressé aux gérants était réexpédié chez M. Y..., ...à Saint-Brieuc ; qu’aux termes du décret relatif au RCS : “ est un établissement secondaire au sens du présent décret tout établissement permanent, distinct du siège social ou de l’établissement principal et dirigé par l’assujetti, un préposé ou une personne ayant le pouvoir de lier des rapports juridiques avec les tiers » ; qu’une enquête diligentée par l’URSSAF de la Mayenne a établi que la SARL ne disposait à Laval que d’une domiciliation postale ; qu’une attestation remise à la société ABC developpement qui avait consenti le contrat de domiciliation postale et signée de M. Y... certifiait que la comptabilité et les factures de la société étaient tenues et conservées à Kermoal-Graces à Guingamp que de même des attestation des gérants-du 10 juillet 2003- certifiaient que la comptabilité restait tenue à “ Kermoal “ 22200 Graces où les factures demeuraient conservées ;

” 1) alors que la cassation à intervenir sur le premier moyen développé par les demandeurs entraînera, par voie de conséquence, la cassation du chef de l’arrêt qui a dit que l’infraction de dissimulation d’activité était constituée ; qu’en effet, dès l’instant où il est acquis que la SARL X... Y... n’était pas l’employeur des associés des sociétés de sexage et qu’elle n’était pas davantage gérant de fait de ces dernières, elle n’avait plus d’activité sur le site de Kermoal du fait du transfert de son siège social à compter du mois de juillet 2003 et n’avait donc pas à procéder aux formalités d’inscription ;

” 2) alors que la chose jugée au civil s’impose au juge répressif lorsqu’elle procède d’une décision devenue définitive ; que les demandeurs avaient fait valoir que par jugement définitif en date du 17 juin 2008 le tribunal des affaires de sécurité social avait constaté l’absence de toute activité de la SARL X... Y... au lieu-dit Kermoal ; que la cour d’appel qui méconnaît les termes de ce jugement n’a pas légalement justifié sa décision, violant les articles visés au moyen “ ;

Attendu qu’il est reproché à M. Y... et à la société “ X...- Y... “ d’avoir, entre le 11 juillet 2003 et le 7 juin 2004, commis le délit de travail dissimulé par dissimulation d’activité en poursuivant l’activité de cette société à Graces et Guingamp, après sa radiation au registre du commerce des Côtes d’Armor ;

Attendu que, pour dire les prévenus coupables de cette infraction, l’arrêt relève que, durant la période visée à la prévention, la société X...- Y..., qui avait procédé à sa radiation du registre du commerce de Guingamp, s’est inscrite au registre du commerce de Laval, après avoir transféré son siège social dans cette ville ; que les juges ajoutent que, selon une enquête de l’Urssaf de la Mayenne, la société ne disposait en ce dernier lieu que d’une domiciliation, et que, selon une attestation signée et remise par M. Y... à l’organisme qui hébergeait à Laval le siège social de la société X...- Y..., la comptabilité et les factures de la société étaient tenues et conservées au lieu-dit Kermoal-Graces à Guingamp ;

Attendu qu’en l’état de ces motifs, exempts d’insuffisance comme de contradiction et fondés sur son appréciation souveraine des faits et circonstances de la cause, la cour d’appel, qui n’a nullement méconnu l’autorité de la chose jugée par une juridiction civile dans une procédure distincte, a justifié sa décision ;

D’où il suit que le moyen ne saurait être admis ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 724-7, L. 724-9, L. 724-11 et L. 722-12 du code rural, L. 243-11, L. 243-7 et L. 243-9 du code de la sécurité sociale, L. 631-1 du code du travail, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

” en ce que l’arrêt infirmatif attaqué a déclaré M. Y... coupable d’obstacle à l’exercice des fonctions de M. Z..., agent de contrôle assermenté de la caisse de mutualité sociale agricole et l’a condamné à une peine de 60 000 euros dont 30 000 euros avec sursis ;

” aux motifs que par courrier du 20 mai 2003, expédié en recommandé avec accusé de réception, retiré le 22 mai 2003 la SARL X... Y... était informée d’un contrôle commun MSA-URSSAF en son siège, le jeudi 12 juin 2003 ; que, par courrier du 2 juin 2003, reçu le 5 juin, M. Y... faisait savoir à la MSA qu’il ne serait pas disponible le jeudi 12 juin ayant “ programmé de nombreux voyages et déplacements professionnels au mois de juin “ et ne pouvant les annuler, et invitait la MSA à le rencontrer à partir du 12 juillet 2003 ; que, cependant, M. Z... apprenait par la consultation des données INSEE que la SARL avait fait transférer son siège le 10 juillet 2003 à Laval ; qu’ainsi, en se rendant indisponible le temps nécessaire au transfert du siège social, M. Y... s’est bien rendu coupable du délit d’obstacle qui lui est reproché ;

” 1) alors que la cassation à intervenir sur le premier moyen développé par les demandeurs entraînera, par voie de conséquence, la cassation du chef de l’arrêt qui a dit que l’infraction de dissimulation d’activité était constituée ; qu’en effet, dès l’instant où il est acquis que la SARL X... Y... n’était pas l’employeur des associés des sociétés de sexage et qu’elle n’était pas davantage gérant de fait de ces dernières, elle n’avait plus d’activité sur le site de Kermoal du fait du transfert de son siège social à compter du mois de juillet 2003 et n’avait donc pas à procéder aux formalités d’inscription ;

” 2) alors que le délit d’obstacle à l’accomplissement des missions des inspecteurs et contrôleurs du travail suppose que la personne ait fait obstruction à l’exercice de leur mission ; qu’en se bornant à relever que M. Y... s’était rendu indisponible le temps nécessaire au transfert du siège social de la SARL X... Y..., la cour d’appel qui s’abstient de caractériser une obstruction qui aurait interdit à l’inspecteur de la MSA d’exercer son contrôle, a violé les textes visés au moyen ;

” 3) alors que, pour être constitué le délit d’obstacle à l’accomplissement des missions d’inspecteurs ou de contrôleurs du travail implique que lesdits inspecteurs sont en droit de demander des renseignements ; que le demandeur avait fait valoir que la SARL X... Y... était affiliée à l’Organic et non pas à la MSA ; qu’en reprochant à M. Y... d’avoir fait obstacle à la mission de M. Z..., agent de contrôle assermenté de la caisse de mutualité sociale agricole, sans établir que agent de contrôle pouvait valablement réaliser une inspection dans les locaux de la SARL X... Y..., déjà affiliée auprès d’une caisse d’assurance maladie et de retraite, la cour d’appel a privé sa décision de base légale “ ;

Attendu qu’il ressort de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. Y... est poursuivi pour avoir, entre le 12 juin 2003 et le 14 octobre 2003, fait obstacle à l’exercice des fonctions d’un agent de contrôle assermenté de la caisse de mutualité sociale agricole des Côtes-d’Armor ;

Attendu que, pour déclarer M. Y... coupable de cette infraction, l’arrêt énonce que le prévenu, avisé à deux reprises depuis le mois de mai 2003 que la société “ X...- Y... “ ferait l’objet d’un contrôle commun de la MSA et de l’URSSAF des Côtes-d’Armor, s’est rendu indisponible, au prétexte de déplacements professionnels, le temps nécessaire au transfert du siège social de la société dans le département de la Mayenne ;

Attendu qu’en l’état de ces motifs, qui caractérisent le délit retenu en tous ses éléments constitutifs, tant matériels qu’intentionnel, la cour d’appel a justifié sa décision ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

Mais sur le moyen relevé d’office à l’égard de M. Y..., et pris de la violation de l’article 111-3 du code pénal ;

Vu ledit article ;

Attendu que, selon ce texte, nul ne peut être puni d’une peine qui n’est pas prévue par la loi ;

Attendu qu’après avoir déclaré M. Y... coupable de travail dissimulé et d’obstacle aux fonctions d’agent de contrôle de la sécurité sociale et de la caisse de mutualité sociale agricole, l’arrêt le condamne, notamment, à la peine de 60 000 euros dont 30 000 euros avec sursis ;

Mais attendu qu’en prononçant ainsi une peine d’amende excédant le maximum prévu par les articles L. 362-3 et L. 724-13 du code rural, dans leur rédaction applicable aux faits poursuivis, la cour d’appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;

D’où il suit que la cassation est encourue de ce chef ; qu’elle sera limitée aux peines prononcées contre M. Y..., dès lors que la déclaration de culpabilité n’encourt pas la censure ;

Par ces motifs :

I-Sur les pourvois de M. X... et de la société X...- Y... :

Les REJETTE ;

II-Sur le pourvoi de M. Y... :

CASSE et ANNULE, en ses seules dispositions relatives aux peines prononcées à l’encontre du prévenu, l’arrêt de la cour d’appel de Rennes en date du 18 juin 2009, toutes autres dispositions étant expressément maintenues,

Et pour qu’il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée ;

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d’appel de Rennes, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l’impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d’appel de Rennes et sa mention en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l’article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, Mme Guirimand conseiller rapporteur, M. Blondet conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Krawiec ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;

Décision attaquée : Cour d’appel de Rennes du 18 juin 2009