Refus exonération ou réduction

Cour de cassation

chambre civile 2

Audience publique du 7 novembre 2013

N° de pourvoi : 12-26307

ECLI:FR:CCASS:2013:C201681

Non publié au bulletin

Rejet

Mme Flise (président), président

SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu, selon l’arrêt confirmatif attaqué (Basse-Terre, 2 juillet 2012) et les productions, qu’à la suite d’un contrôle au titre des années 2002 à 2006, la caisse générale de sécurité sociale de la Guadeloupe a notifié à M. X... un redressement que ce dernier a contesté devant une juridiction de sécurité sociale ;

Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :

Attendu que M. X... fait grief à l’arrêt de rejeter son recours et d’écarter toute mesure de réduction ou d’exonération de cotisations de sécurité sociale ou de minoration de l’assiette de ces cotisations, alors, selon le moyen, que l’article L. 242-1-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable à la cause, subordonne la privation du bénéfice d’une réduction ou exonération de cotisations à la commission par l’employeur de certaines infractions particulières de travail dissimulé, à savoir le défaut de remise de bulletins de paie aux salariés, la mention d’un nombre d’heures de travail inexact sur les bulletins de paie ou le défaut de déclaration préalable à l’embauche ; qu’en se bornant à relever l’absence de compte employeur depuis l’année 2000 de M. X... pour juger le texte susvisé applicable, sans caractériser la réalisation au cas d’espèce de l’une des trois conditions nécessaires à sa mise en oeuvre, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de celui-ci ;

Mais attendu que l’arrêt retient, par motifs propres et adoptés, d’une part, que le contrôle opéré par un inspecteur assermenté avait mis à jour l’absence de compte employeur de M. X... depuis 2000, alors même que deux de ses salariés exerçaient depuis cette date et étaient toujours dans l’entreprise, d’autre part, que M. X... ne justifiait pas avoir accompli ses obligations déclaratives avant 2006 ;

Que de ces constatations et énonciations, faisant ressortir que l’intéressé n’établissait pas avoir effectué pendant la période litigieuse les déclarations nominatives préalables à l’embauche prévues à l’article L. 320, devenu l’article L. 1221-10 du code du travail, la cour d’appel a exactement déduit que les rémunérations versées à ses salariés ne pouvaient faire l’objet d’aucune mesure de réduction ou d’exonération de cotisations de sécurité sociale ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

Et, sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :

Attendu que M. X... fait le même grief à l’arrêt, alors, selon le moyen, qu’il faisait valoir dans ses écritures d’appel que l’article L. 752-3-1-V du code de la sécurité sociale était applicable au cas d’espèce et subordonnait la privation du bénéfice des exonérations de cotisations au titre de la loi pour le développement de l’outre-mer à une condamnation pénale de l’employeur pour fraude fiscale ou travail dissimulé, ce qui excluait que la simple constatation d’une telle infraction par un agent assermenté puisse entraîner une telle conséquence ; qu’en s’abstenant de répondre à ces conclusions péremptoires, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu’il résulte de l’article L. 242-1-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige, que les rémunérations, versées ou dues à des salariés, qui sont réintégrées dans l’assiette des cotisations à la suite du constat de l’infraction définie aux quatrième et cinquième alinéas de l’article L. 324-10 du code du travail ne peuvent faire l’objet d’aucune mesure de réduction ou d’exonération de cotisations de sécurité sociale ou de minoration de l’assiette de ces cotisations ;

Et attendu que la généralité des termes de ce texte exclut qu’en cas de constatation d’une dissimulation d’emploi salarié, les exonérations de cotisations prévues par la loi de programme pour l’Outre-mer puissent recevoir application, peu important que l’infraction ait fait l’objet d’une condamnation pénale, de sorte que la cour d’appel n’était pas tenue de répondre à un moyen inopérant ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

Et attendu que le moyen, pris en sa première branche, n’est pas de nature à permettre l’admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept novembre deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard, avocat aux Conseils, pour M. X...

Il est fait grief à l’arrêt confirmatif attaqué D’AVOIR confirmé la décision de la commission de recours amiable et validé le redressement de monsieur X... ;

AUX MOTIFS PROPRES QU’en l’absence d’élément nouveau soumis à son appréciation, la Cour estime que le premier juge, par des motifs pertinents qu’elle approuve, a fait une exacte appréciation des faits de la cause et du droit des parties, spécialement en indiquant : les dispositions de l’article R. 243-59 du code de la sécurité sociale sur les modalités des contrôles permettent de garantir le respect du contradictoire par la notification d’un rapport de contrôle détaillé à l’issue du contrôle avec délai pour présenter des observations et non en ce qui concerne l’avis préalable lequel est purement informatif ; qu’il n’est pas contesté que l’ensemble des périodes visées aient été reprises au rapport de contrôle ; que dès lors, le principe du contradictoire a été respecté dans le cadre du contrôle litigieux, étant observé que monsieur X... a usé de ce droit suivant observations du 21 mai 2007 ; qu’il résulte des dispositions de l’article L. 244-3 de ce même code que : « L’avertissement ou la mise en demeure ne peut concerner que les cotisations exigibles au cours des trois années civiles qui précèdent l’année de leur envoi ainsi que les cotisations exigibles au cours de l’année de leur envoi. En cas de constatation d’une infraction de travail illégal par procès-verbal établi par un agent verbalisateur, l’avertissement ou la mise en demeure peut concerner les cotisations exigibles au cours des cinq années civiles qui précèdent l’année de leur envoi ainsi que les cotisations exigibles au cours de l’année de leur envoi » ; qu’il en résulte qu’il n’est pas exigé de suite pénale au constat de l’infraction ; le contrôle diligenté par un inspecteur assermenté ayant mis au jour l’absence de compte employeur de monsieur X... depuis 2000 alors même que deux salariés exerçaient depuis et étaient toujours dans l’entreprise, le rapport équivaut à procès-verbal constatant l’existence de l’infraction de travail dissimulé ce qui légitimait l’extension de la période de redressement de 2002 à 2006 ; que malgré ses réclamations, monsieur X... ne justifie pas avoir accompli ses obligations déclaratives avant 2006 ; que selon l’article L. 242-1-1 dans sa rédaction en vigueur à la date du contrôle : « Les rémunérations, versées ou dues à des salariés, qui sont réintégrées dans l’assiette des cotisations à la suite du constat de l’infraction définie aux quatrième et cinquième alinéas de l’article L. 324-10 du code du travail ne peuvent faire l’objet d’aucune mesure de réduction ou d’exonération de cotisations de sécurité sociale ou de minoration de l’assiette de ces cotisations » ; qu’en l’espèce c’est bien le contrôle qui a permis de constater l’existence de l’infraction ainsi qu’il a été rappelé ci-dessus, ce qui prive monsieur X... du bénéfice de l’exonération invoquée ; que par ailleurs il n’est pas contesté que monsieur X... ne s’est pas acquitté de l’intégralité des sommes visées au redressement ce qui justifie l’inscription de privilège à la diligence de la Caisse, mais suite aux versements effectués par le demandeur, la dette doit être ramenée à la somme de 61.623,00 euros et monsieur X... condamné au paiement de cette somme (arrêt, p. 4, § 12 à 14, p. 5, § 1 à 5) ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE les dispositions de l’article R. 243-59 du code de la sécurité sociale sur les modalités des contrôles permettent de garantir le respect du contradictoire par la notification d’un rapport de contrôle détaillé à l’issue du contrôle avec délai pour présenter des observations et non en ce qui concerne l’avis préalable lequel est purement informatif ; qu’il n’est pas contesté que l’ensemble des périodes visées aient été reprises au rapport de contrôle ; que dès lors, le principe du contradictoire a été respecté dans le cadre du contrôle litigieux, étant observé que monsieur X... a usé de ce droit suivant observations du 21 mai 2007 ; qu’il résulte des dispositions de l’article L. 244-3 de ce même code que : « L’avertissement ou la mise en demeure ne peut concerner que les cotisations exigibles au cours des trois années civiles qui précèdent l’année de leur envoi ainsi que les cotisations exigibles au cours de l’année de leur envoi. En cas de constatation d’une infraction de travail illégal par procès-verbal établi par un agent verbalisateur, l’avertissement ou la mise en demeure peut concerner les cotisations exigibles au cours des cinq années civiles qui précèdent l’année de leur envoi ainsi quel es cotisations exigibles au cours de l’année de leur envoi » ; qu’il en résulte qu’il n’est pas exigé de suite pénale au constat de l’infraction ; que le contrôle diligenté par un inspecteur assermenté ayant mis au jour l’absence de compte employeur de monsieur X... depuis 2000 alors même que deux salariés exerçaient depuis et étaient toujours dans l’entreprise, le rapport équivaut à procès verbal constatant l’existence de l’infraction de travail dissimulé ce qui légitimait l’extension de la période de redressement de 2002 à 2006 ; que malgré ses réclamations, monsieur X... ne justifie pas avoir accompli ses obligations déclaratives avant 2006 ; que selon l’article L .242-1-1 dans sa rédaction en vigueur à la date du contrôle : « Les rémunérations, versées ou dues à des salariés, qui sont réintégrées dans l’assiette des cotisations à la suite du constat de l’infraction définie aux quatrième et cinquième alinéas de l’article L. 324-10 du code du travail ne peuvent faire l’objet d’aucune mesure de réduction ou d’exonération de cotisations de sécurité sociale ou de minoration de l’assiette de ces cotisations » ; qu’en l’espèce c’est bien le contrôle qui a permis de constater l’existence de l’infraction ainsi qu’il a été rappelé ci-dessus, ce qui prive monsieur X... du bénéfice de l’exonération invoquée ; qu’il n’est pas contesté que monsieur X... ne s’est pas acquitté de l’intégralité des sommes visées au redressement, ce qui justifie l’inscription de privilège à la diligence de la Caisse (jugement, p. 2, § 7 à 9 ; p. 3, § 1 à 3) ;

1°) ALORS, D’AUTRE PART, QU’il ne peut être dérogé au délai de prescription triennale de la créance de cotisations sociales qu’en cas de constatation d’une infraction de travail illégal par procès-verbal établi par un agent verbalisateur, document distinct du rapport de contrôle qu’il incombe par ailleurs à l’inspecteur assermenté d’établir à l’issue d’un contrôle fiscal ; qu’en retenant au contraire, pour déroger au principe de la prescription triennale de la créance de cotisations sociales, que le rapport établi par l’inspecteur assermenté à l’issue du contrôle fiscal équivalait à un procès-verbal constatant l’existence d’une infraction de travail dissimulé, la cour d’appel a violé l’article L. 244-3 du code de la sécurité sociale ;

2°) ALORS, D’AUTRE PART, QUE l’article L. 242-1-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable à la cause, subordonne la privation du bénéfice d’une réduction ou exonération de cotisations à la commission par l’employeur de certaines infractions particulières de travail dissimulé, savoir le défaut de remise de bulletins de paie aux salariés, la mention d’un nombre d’heures de travail inexact sur les bulletins de paie ou le défaut de déclaration préalable à l’embauche ; qu’en se bornant à relever l’absence de compte employeur depuis l’année 2000 de monsieur X... pour juger le texte susvisé applicable, sans caractériser la réalisation au cas d’espèce de l’une des trois conditions nécessaires à sa mise en oeuvre, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de celui-ci ;

3°) ALORS, ENFIN, QUE monsieur X... faisait valoir dans ses écritures d’appel (conclusions, p. 12, § 3 à 7 et p. 13, § 3) que l’article L. 752-3-1-V du code de la sécurité sociale était applicable au cas d’espèce et subordonnait la privation du bénéfice des exonérations de cotisations au titre de la loi pour le développement de l’Outre-Mer à une condamnation pénale de l’employeur pour fraude fiscale ou travail dissimulé, ce qui excluait que la simple constatation d’une telle infraction par un agent assermenté puisse entraîner une telle conséquence ; qu’en s’abstenant de répondre à ces conclusions péremptoires, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile.

Décision attaquée : Cour d’appel de Basse-Terre , du 2 juillet 2012